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Date : 20000907

Dossier : T-2351-93

ENTRE :

                                    PEPPER KING LTD.,

                                                                                      demanderesse,

                                                  - et -

                                  SUNFRESH LIMITED,

LOBLAWS INC.,

et LES COMPAGNIES LOBLAW LIMITÉE,

                                                                                      défenderesses.

                               MOTIFS DU JUGEMENT

LE JUGE DAWSON

[1] Pepper King Ltd. (Pepper King) est propriétaire de la marque de commerce VOLCANO. Depuis août 1991 au moins, cette marque de commerce a été utilisée par Pepper King ou par son propriétaire original, William Small, en liaison avec une sauce au piment fort.

[2] Depuis mai 1992, les défenderesses ont fait la promotion et la vente d'une salsa en bocaux portant des étiquettes où figure le mot « volcano » .

[3] Pepper King fait valoir que l'emploi du mot « volcano » par les défenderesses contrefait sa marque de commerce.


[4] Par une ordonnance du juge McKeown, les questions de la présente affaire ont été disjointes, de sorte que la question des dommages-intérêts et/ou du recouvrement des profits sera décidée séparément, après l'instruction de toutes les questions touchant la vraisemblance de la confusion et l'invalidité de l'enregistrement de la marque de commerce.

QUESTIONS PRÉLIMINAIRES

[5] À l'ouverture de la séance, Pepper King a soulevé deux questions préliminaires.

[6] La première concernait la portée de sa demande. Sans en avoir préalablement avisé les défenderesses, Pepper King a fait savoir qu'elle retirait les allégations suivantes, que les défenderesses :

i)           ont diminué la valeur de l'achalandage attaché à la marque de commerce VOLCANO, contrevenant à l'article 22 de la Loi sur les marques de commerce, L.R.C. (1985), ch. T-13, modifiée (la Loi);

ii)          ont appelé l'attention du public sur leur salsa de manière à causer ou à vraisemblablement causer de la confusion entre les deux produits, contrevenant à l'alinéa 7 b) de la Loi;

iii)          ont fait passer leur salsa pour le produit de Pepper King, contrevenant à l'alinéa 7 c) de la Loi.

Ces questions sont donc retirées.


[7]         La seconde question intéressait une requête visant le retrait de trois aveux que Pepper King était réputée avoir faits dans sa réponse à la demande de reconnaissance qui lui avait été signifiée en vertu de la règle 256 des Règles de la Cour fédérale (1998), DORS/98-106, et d'après l'ordonnance du juge McKeown selon laquelle Pepper King était réputée avoir reconnu la véracité des faits exposés aux paragraphes 1 à 79 dans la demande de reconnaissance.

[8]         Pour les motifs exposés verbalement à l'instruction, la requête visant l'autorisation du retrait de trois aveux a été rejetée.

LES FAITS

[9]         Pepper King est une petite société canadienne, constituée à l'origine par William Small. M. Small est décédé en 1996 et depuis, Pepper King est exploitée par la veuve du fondateur, Nellie Small, avec l'aide d'autres membres de la famille.

[10]       Mme Small a témoigné qu'à la fin de 1989 ou au début de 1990, son mari avait élaboré la sauce au piment fort faisant l'objet de la demande. On me dit qu'elle est extrêmement forte.

[11]       Mme Small a déclaré qu'après avoir initialement donné sa sauce, son mari a commencé à la vendre. Au début, le produit était vendu dans des bocaux à conserves portant des étiquettes adhésives manuscrites libellées « VOLCANO HOT » ou « VOLCANO HOT PEPPER SAUCE » .


[12]       Au départ, les ventes étaient faites en grande partie par le neveu de M. Small, Richard Downey, qui vendait la sauce au piment à ses collègues de travail à l'usine de General Motors à Oshawa (Ontario) et par M. et Mme Small qui la vendaient au marché aux puces de Stouffville. Par la suite, M. Downey ainsi que M. et Mme Small l'ont vendue à quelques points de vente pour la revente au détail et à des restaurants, brasseries et autres établissements semblables pour leur propre usage dans des sauces et autres recettes.

[13]       Du 13 août 1991 jusqu'à un moment donné en 1992, Pepper King a vendu sa sauce au piment avec une étiquette imprimée libellée « HOME MADE VOLCANO HOT PEPPER SAUCE » « KEEP REFRIGERATED » . Par la suite, quatre types différents d'étiquettes imprimées ont été utilisés qui désignaient la sauce comme « VOLCANO HOT PEPPER SAUCE » ou « VOLCANO HOT HOT PEPPER SAUCE » . Les trois dernières étiquettes présentaient également la liste des ingrédients. Il est formellement reconnu dans la présente instance que le public percevrait les mots « VOLCANO HOT » comme une marque de commerce unique sur ces étiquettes imprimées.

[14]       Les ventes n'étaient pas importantes. Les recettes totales des ventes jusqu'au milieu de mai 1992, moment où les défenderesses ont commencé à vendre leur salsa, se chiffraient à 21 911 $. De ce total, 17 705 $ provenaient des ventes réalisées au marché aux puces de Stouffville et une somme d'au plus 2 103 $, des ventes aux établissements de vente au détail.

[15]       Le 26 août 1992, M. Small a produit une demande d'enregistrement de la marque de commerce VOLCANO. La marque de commerce a été enregistrée le 20 août 1993 sous le numéro LMC 415 846. Le 2 septembre 1993, M. Small a cédé à Pepper King ses droits sur la marque de commerce VOLCANO et sur son enregistrement.

[16]       À la date du dépôt de la défense dans la présente instance, le 16 février 1994, les recettes totales des ventes de Pepper King ne dépassaient pas 25 780 $. Les ventes aux établissements de détail représentaient au plus 4 037,50 $ de cette somme.


[17]       Mme Small n'était pas certaine du volume des ventes en 1994 et dans les années ultérieures.

[18]       En plus de la sauce au piment fort vendue au marché aux puces de Stouffville, on vendait également la sauce au piment en bocaux de verre transparent de 250 ml.

[19]       M. Small ou Pepper King n'ont jamais fait de publicité pour la sauce forte de la demanderesse. Le fait que M. Small n'ait jamais déclaré les ventes de sa sauce au piment fort dans sa déclaration de revenus et que la société n'ait pas encore produit une déclaration de revenus donne une idée de l'envergure de l'opération.

[20]       Les défenderesses (Loblaws) sont toutes des compagnies connexes. Les Compagnies Loblaw Limitée, la société mère, sont le plus grand distributeur alimentaire au Canada.

[21]       La salsa en cause que Loblaws a initialement importée et vendue au Canada portait l'étiquette « All-Natural Volcano Desperately Hot Salsa Picante » . Elle était aussi étiquetée « Extra Chunky Volcano Salsa Picante Desperately Hot » .

[22]       Loblaws a fait la publicité et la vente de sa salsa dans l'ensemble du Canada. Les faits suivants ont été reconnus.

[23]       Depuis mai 1992, Loblaws vend sa salsa en bocaux de verre de 850 ml portant des étiquettes sur lesquelles on trouve le mot « volcano » . La salsa étiquetée « volcano » fait partie d'une gamme de salsas dont la force ou le caractère épicé varient en intensité. Les variétés de salsas commercialisées par Loblaws sont « extra mild » , « mild » , « hot » et « volcano » .


[24]       La salsa de Loblaws étiquetée « volcano » a toujours été présentée en vue de la vente sur les rayons des magasins de détail. Les bocaux étaient placés immédiatement à côté, au-dessus ou au-dessous des autres salsas comportant divers degrés d'intensité.

[25]       Loblaws est propriétaire des marques de commerce LA ELECCION DEL PRESIDENTE, PRESIDENT'S CHOICE , PRESIDENT'S CHOICE in Design, PC et PC Script.                                                                                

[26]       Les marques de commerce PRESIDENT'S CHOICE et PRESIDENT'S CHOICE in Design, PC et PC Script sont bien reconnues depuis mai 1992 partout au Canada. Il a été admis qu'elles sont reconnues dans le sud et dans le centre de l'Ontario par pratiquement tous les acheteurs au détail comme des marques de commerce exclusives de Loblaws.

[27]       La salsa de Loblaws étiquetée « volcano » a été vendue exclusivement par les canaux de distribution habituels de gros et de détail de Loblaws en vue de la revente au public.

[28]       La salsa de Loblaws désignée « volcano » a toujours été vendue sous la marque de commerce LA ELECCION DEL PRESIDENTE figurant sur les étiquettes dans le même caractère typographique que la marque de commerce PRESIDENT'S CHOICE in Design. Depuis février 1994 ou vers cette période, la salsa de Loblaws étiquetée « volcano » a également été vendue avec une étiquette portant la marque de commerce PC Script.

[29]       Le fait suivant a été reconnu :

[TRADUCTION]


61.            Un acheteur normal, vers le milieu de mai 1992 et en tout temps par la suite, qui fait des courses dans un magasin Loblaws ou affilié à Loblaws, aurait connaissance des marques de commerce PRESIDENT'S CHOICE et PRESIDENT'S CHOICE in Design Script..., et conclurait raisonnablement qu'un produit de type mexicain comme la salsa, portant la marque de commerce LA ELECCION DEL PRESIDENTE dans le même caractère typographique que la marque de commerce PRESIDENT'S CHOICE in Design, serait très vraisemblablement un produit de marque exclusive vendu par l'entité qui vendait précédemment les produits PRESIDENT'S CHOICE.

[30]       M. et Mme Small ont pour la première fois appris l'existence de la salsa de Loblaws portant le mot « volcano » en juin 1992, dans la brochure intitulée Insider's Report de Loblaws. À l'époque, ils s'étaient déjà renseignés auprès d'un agent de marques de commerce sur la disponibilité de la marque de commerce VOLCANO.

[31]       Ayant appris l'utilisation faite par Loblaws, M. et Mme Small ont poursuivi les démarches d'enregistrement de leur marque de commerce.

[32]       Le jour même où la marque de commerce VOLCANO a été enregistrée, soit le 20 août 1993, l'avocat représentant Pepper King et M. et Mme Small a envoyé une lettre de mise en demeure à Loblaws. Cette lettre représente la première tentative faite au nom de Pepper King pour aviser Loblaws de ses prétentions et le premier avis d'opposition à l'emploi du mot « volcano » . Elle constitue aussi le premier avis donné à chacune des défenderesses de l'existence de la marque de commerce VOLCANO et des prétentions de Pepper King.

[33]       Il est reconnu que M. Small s'est intentionnellement abstenu d'aviser Loblaws de toute opposition relative à l'emploi du mot « volcano » sur les conseils de son agent de marques de commerce. Celui-ci a fait valoir à ses clients que si Loblaws était avisée, elle pourrait faire opposition et ainsi retarder ou même empêcher l'enregistrement de la marque VOLCANO par M. Small.

[34]       La déclaration introductive d'instance qui a engagé l'action a été déposée le 1er octobre 1993.


LES POSITIONS RESPECTIVES DES PARTIES

[35]       La demande de Pepper King est simple et elle se fonde sur l'article 19 et sur le paragraphe 20(1) de la Loi, qui disposent :


19. Sous réserve des articles 21, 32 et 67, l'enregistrement d'une marque de commerce à l'égard de marchandises ou services, sauf si son invalidité est démontrée, donne au propriétaire le droit exclusif à l'emploi de celle-ci, dans tout le Canada, en ce qui concerne ces marchandises ou services.

20. (1) Le droit du propriétaire d'une marque de commerce déposée à l'emploi exclusif de cette dernière est réputé être violé par une personne non admise à l'employer selon la présente loi et qui vend, distribue ou annonce des marchandises ou services en liaison avec une marque de commerce ou un nom commercial créant de la confusion. Toutefois, aucun enregistrement d'une marque de commerce ne peut empêcher une personne_:

a) d'utiliser de bonne foi son nom personnel comme nom commercial;

b) d'employer de bonne foi, autrement qu'à titre de marque de commerce_:

(i) soit le nom géographique de son siège d'affaires,

(ii) soit toute description exacte du genre ou de la qualité de ses marchandises ou services,

d'une manière non susceptible d'entraîner la diminution de la valeur de l'achalandage attaché à la marque de commerce.

19. Subject to sections 21, 32 and 67, the registration of a trade-mark in respect of any wares or services, unless shown to be invalid, gives to the owner of the trade-mark the exclusive right to the use throughout Canada of the trade-mark in respect of those wares or services.

20. (1) The right of the owner of a registered trade-mark to its exclusive use shall be deemed to be infringed by a person not entitled to its use under this Act who sells, distributes or advertises wares or services in association with a confusing trade-mark or trade-name, but no registration of a trade-mark prevents a person from making

(a) any bona fide use of his personal name as a trade-name, or

(b) any bona fide use, other than as a trade-mark,

(i) of the geographical name of his place of business, or

(ii) of any accurate description of the character or quality of his wares or services,

in such a manner as is not likely to have the effect of depreciating the value of the goodwill attaching to the trade-mark.


[36]       S'appuyant sur le paragraphe 20(1) de la Loi, Pepper King allègue que les produits respectifs, soit la sauce au piment et la salsa, sont fondamentalement identiques et que c'est la même marque de commerce VOLCANO qui est utilisée. Pepper King prétend que Loblaws vend, distribue et annonce ses marchandises du type salsa en liaison avec une marque de commerce créant de la confusion.

[37]       Dans sa réponse, Loblaws invoque trois moyens de défense.


[38]       Premièrement, elle déclare n'avoir jamais employé le mot « volcano » comme marque de commerce.

[39]       Deuxièmement, Loblaws allègue que même dans l'hypothèse où elle l'aurait employé, l'emploi n'était pas de nature à créer de la confusion.

[40]       Troisièmement, Loblaws fait valoir qu'en tout état de cause, la marque de commerce de Pepper King n'était pas distinctive à la date pertinente et que son enregistrement est donc invalide. Elle avance ce dernier point à la fois en défense et en demande reconventionnelle. Dans sa demande reconventionnelle, Loblaws cherche à obtenir une ordonnance de radiation du registre de l'enregistrement numéro LMC 415 846 de la marque de commerce VOLCANO.

LES QUESTIONS EN LITIGE

[41]       Pepper King est le propriétaire de la marque de commerce déposée VOLCANO. Le mot « volcano » figure sur la salsa de Loblaws.

[42]       Par conséquent, comme Pepper King a limité sa demande à la violation effective de l'article 19 de la Loi et à la violation réputée du paragraphe 20(1) de la Loi, les questions à trancher en l'espèce sont les suivantes :

i)           Loblaws a-t-elle employé le mot « volcano » comme marque de commerce?

ii)          Si Loblaws a employé le mot « volcano » comme marque de commerce, cet emploi était-il susceptible de créer de la confusion?


iii)          La marque de commerce de Pepper King était-elle non distinctive à la date pertinente, et l'enregistrement de cette marque s'en trouve-t-il invalide?

ANALYSE

i) Loblaws a-t-elle employé le mot « volcano » comme marque de commerce?

[43]       La partie de la définition d'une marque de commerce qui intéresse la présente instance figure à l'article 2 de la Loi :


a) marque employée par une personne pour distinguer, ou de façon à distinguer, les marchandises fabriquées, vendues, données à bail ou louées ou les services loués ou exécutés, par elle, des marchandises fabriquées, vendues, données à bail ou louées ou des services loués ou exécutés, par d'autres.

(a) a mark that is used by a person for the purpose of distinguishing or so as to distinguish wares or services manufactured, sold, leased, hired or performed by him from those manufactured, sold, leased, hired or performed by others.           


[44]       Pour qu'il porte atteinte à l'article 19 de la Loi, l'emploi de la marque de commerce doit être un emploi comme marque de commerce. Ainsi, dans la décision Clairol International Corp. c. Thomas Supply & Equipment Co. (1968), 55 C.P.R. 176 (Cour de l'Échiquier du Canada), aux pages 192 à 195, il a été jugé que l'emploi d'une marque de commerce qui ne vise pas à distinguer les marchandises du défendeur ne contrevient pas à l'article 19 de la Loi.

[45]       De la même manière, il a été décidé que le paragraphe 20(1) de la Loi exige que l'emploi d'une marque de commerce serve à distinguer les marchandises du défendeur pour qu'il soit considéré comme une violation. Voir Cie Générale des Établissements Michelin c. TAC - Canada (1996), 71 C.P.R. (3d) 348 (1re inst.). Il devient donc nécessaire de décider si Loblaws a employé le mot « volcano » comme marque de commerce.

[46]       La demanderesse, en faisant valoir que le mot « volcano » était employé par Loblaws comme marque de commerce, a invoqué les quatre arguments suivants :


i)           Au cours de la période de mars à juillet 1992, un salarié de Loblaws a fait faire une recherche sur la marque de commerce « VOLCANO » , en signalant que Loblaws souhaitait employer cette marque pour la salsa. Selon la réponse reçue, le mot semblait disponible pour l'utilisation et l'enregistrement.

ii)          Dans une déclaration d'opposition présentée au registraire des marques de commerce au sujet d'une demande d'enregistrement produite par la demanderesse pour la marque de commerce VOLCANO HOT & DESIGN, Loblaws Inc. a déclaré qu'elle avait [TRADUCTION] « vendu une salsa depuis juin 1992 qu'elle désigne comme VOLCANO DESPERATELY HOT SALSA » .

iii)          Loblaws emploie le mot « volcano » sur une étiquette associée à des piments forts qu'elle vend. Dans ce cas, Loblaws reconnaît que son emploi de VOLCANO est un emploi comme marque de commerce. Pepper King affirme que les deux situations ne peuvent être distinguées.

iv)         Pepper King déclare que la formulation expresse de l'étiquette de Loblaws révèle que le mot « volcano » est employé pour identifier la marchandise de Loblaws.

[47]       Aucun des trois premiers arguments invoqués par Pepper King n'arrive à me convaincre.


[48]       S'agissant du premier argument relatif à la recherche de marque de commerce, aucune preuve n'a établi que Loblaws avait subséquemment demandé l'enregistrement de la marque. De plus, le paragraphe 46 de la demande de reconnaissance, dont Pepper King est réputée avoir reconnu la véracité, énonce que si Loblaws avait eu l'intention d'employer le mot « volcano » comme marque de commerce, ce mot aurait été identifié sur l'étiquette comme marque de commerce. Il ne l'a pas été.

[49]       Et ce qui est plus important, c'est que l'élément déterminant en l'occurrence n'est pas l'intention apparente du personnel de Loblaws, mais bien le message que donne l'étiquette au public. Voir Apotex Inc. c. Ciba-Geigy Canada Ltd., [2000] A.C.F., no 508, T-2483-97 (14 avril 2000) (1re inst.). La question est traitée plus loin.

[50]       De manière analogue, en ce qui concerne le deuxième argument, la position adoptée par Loblaws Inc. dans sa déclaration d'opposition est beaucoup moins importante que le message donné au public par son emploi du mot « volcano » .

[51]       En outre, dans l'arrêt California Fashion Industries Inc. c. Reitmans (Canada) Ltd. (1991), 38 C.P.R. (3d) 439 (1re inst.), le juge Cullen a considéré que des allégations similaires non fondées sur des éléments de preuve étaient peu pertinentes au regard de la question de la confusion. Je n'accorde moi non plus pas beaucoup de valeur à une allégation de conclusion juridique qui n'est pas soutenue par des affidavits ou des éléments de preuve et qui n'a jamais fait l'objet d'une décision. Rien dans les déclarations de Loblaws ne constituait la reconnaissance de l'emploi du mot « volcano » comme marque de commerce.


[52]       La demanderesse cherche à faire une distinction avec l'affaire California Fashion Industries et s'appuie plutôt sur la décision de la Cour suprême du Canada dans Johnson c. Marketing Int., [1980] 1 R.C.S. 99. Je considère l'affaire Johnson peu éclairante parce qu'elle repose sur une situation de fait particulière soumise à la Cour, où il a été jugé que deux marques de commerce ne présentant pas de différence appréciable ne pouvaient à la fois causer de la confusion et ne pas en causer. Cela n'aide pas à trancher si un mot est employé comme marque de commerce.

[53]       S'agissant du troisième argument intéressant l'emploi par Loblaws du mot « volcano » comme marque de commerce pour des piments forts, je n'accepte pas la prémisse de l'argument de Pepper King selon laquelle cet emploi ne peut être distingué de l'emploi par Loblaws du mot « volcano » pour sa salsa.

[54]       L'examen des étiquettes respectives présentées en preuve me porte à conclure que le message donné au public par l'emploi du mot « volcano » dans l'expression « Volcano Hot Peppers » apposée sur les piments forts de Loblaws est différent du message donné par l'emploi du mot « volcano » dans l'expression « All-Natural Volcano Desperately Hot Salsa Picante » ou dans l'expression « Extra Chunky Volcano Salsa Picante Desperately Hot » .

[55]       Dans le premier cas, le mot « volcano » dans l'expression « volcano hot peppers » sert à distinguer la source des piments forts. Cependant, lorsque le mot « volcano » est incorporé à d'autres termes descriptifs tels que « all-natural » , « extra chunky » et « desperately hot » , il ne suggère pas de la même manière la source des marchandises.

[56]       J'en arrive maintenant à ce qui, à mes yeux, est l'élément déterminant de la question : quel est le message véhiculé par l'emploi du mot « volcano » par Loblaws en liaison avec sa salsa? En particulier, l'emploi du mot « volcano » identifie-t-il le produit comme provenant d'une source particulière?


[57]       Après un examen attentif de l'ensemble de la preuve produite devant moi, j'ai conclu que l'emploi du mot « volcano » sur les étiquettes de salsa de Loblaws a pour effet de distinguer l'intensité du caractère épicé du produit et non d'identifier la source particulière de la salsa.

[58]       Je fonde ma conclusion sur les raisons suivantes.

[59]       En premier lieu, c'est un fait considéré comme reconnu par Pepper King que :

[TRADUCTION]

45.            À toutes les époques pertinentes, Loblaws a fait la promotion de sa salsa portant le mot « volcano » comme l'une d'une gamme de salsas variant en force. Le terme « volcano » indique et désigne le degré de force de la salsa.

[60]       Il est également reconnu formellement que :

[TRADUCTION]

51.            En tout temps, la salsa de Loblaws portant le terme « volcano » a été mise en vente sur les rayons des supermarchés de détail. Les bocaux de 850 ml de salsa portant le terme « volcano » ont toujours été présentés immédiatement à côté, au-dessus ou au-dessous des autres salsas de Loblaws plus ou moins fortes de manière que l'acheteur potentiel puisse voir toutes les salsas de forces diverses d'un seul coup au même endroit.

[61]       Ce fait est conforme à la publicité du produit faite par Loblaws. Le nouveau produit a été annoncé dans l'édition de juin 1992 du Insider's Report de Loblaws. Dans une annonce placée bien en vue sous le titre [Traduction] « Si vous ne supportez pas la chaleur, sortez du volcan! » , on lit ce qui suit :

[TRADUCTION]

Si vous trouvez la version « Hot » de notre Salsa Picante La Eleccion del Presidente trop douce, la « Volcano » est faite pour vous. La NOUVELLE « VOLCANO » de la gamme Salsa Picante La Eleccion del Presidente est plus forte que la version « Hot » . VOUS ÊTES AVERTIS!! Que les amateurs des salsas populaires « Hot » et « Mild » se rassurent – elles ne changent pas. (Pourquoi changer les deux salsas qui ont fait de La Eleccion del Presidente le premier vendeur de salsas au Canada?!) Nous avons plutôt ajouté DEUX NOUVELLES SALSAS à notre « bataillon de feu » . Et avec la nouvelle salsa « Volcano » , nous lançons la NOUVELLE EXTRA MILD, destinée aux gringos qui n'ont pas encore goûté la salsa parce qu'ils pensent que c'est trop fort pour eux.

...

Les quatre saveurs, Extra Mild (850 ml), Mild (878 ml), Hot (878 ml) et Volcano (850 ml), sont au bas prix de 3,99 $ chacune!


[62]       Je dégage de cette annonce que le message qui doit être véhiculé et reçu est que « volcano » est le mot employé pour indiquer la saveur la plus forte de la gamme « La Eleccion del Presidente Salsa Picante » .

[63]       D'autres annonces produites en preuve vont dans le même sens. Par exemple, dans l'édition du 20 novembre 1993 du Insider's Report, dans un encadré de présentation coiffé du titre « FELICES NAVIDADES! » (Joyeux Noël en espagnol), dans le premier encadré sous le titre figure l'expression « LA ELECCION DEL PRESIDENTE NACHO CHIPS » , suivie de « LA ELECCION DEL PRESIDENTE TORTILLA CHIPS » , suivie, quatre encadrés au-dessous, de « LA ELECCION DEL PRESIDENTE SALSA extra mild, mild, hot, volcano, chunky mild ou chunky hot » .

[64]       Réunis, tous ces éléments de preuve établissent, à mon avis, que le mot « volcano » serait perçu comme dénotant l'intensité du caractère épicé de la salsa, et non sa source.

[65]       Le deuxième fondement de ma conclusion que Loblaws n'a pas employé le mot « volcano » au sens d'une marque de commerce, c'est que je considère que la source du produit de Loblaws était identifiée par l'emploi de la marque de commerce de Loblaws LA ELECCION DEL PRESIDENTE, figurant toujours sur les étiquettes dans le même caractère typographique que la marque de commerce « PRESIDENT'S CHOICE in Design » . À partir de février 1994, la source des produits allait pouvoir être identifiée par le consommateur également par la marque de commerce PC Script sur l'étiquette.

[66]       Les faits suivants, réputés reconnus, sont pertinents à ma conclusion :

[TRADUCTION]

61.            Un acheteur normal, vers le milieu de mai 1992 et en tout temps par la suite, qui fait des courses dans un magasin Loblaws ou affilié à Loblaws, aurait connaissance des marques de commerce PRESIDENT'S CHOICE et PRESIDENT'S CHOICE in Design Script..., et conclurait raisonnablement qu'un produit de type mexicain comme la salsa, portant la marque de commerce LA ELECCION DEL PRESIDENTE dans le même caractère typographique que la marque de commerce PRESIDENT'S CHOICE in Design, serait très vraisemblablement un produit de marque exclusive vendu par l'entité qui vendait précédemment les produits PRESIDENT'S CHOICE.


[67]       Le troisième fondement de ma conclusion est l'emploi par Loblaws, comme je l'ai noté, du mot « volcano » au sein d'un ensemble d'autres mots comme « natural » et « chunky » , qui décrivent le produit et non sa source. Je conclus que le terme « volcano » , de façon similaire, n'évoquerait pas la source du produit.

[68]       Ayant constaté que le mot « volcano » n'était pas employé pour identifier la source des marchandises, je conclus que les défenderesses n'ont contrevenu ni à l'article 19 ni à l'article 20 de la Loi et qu'elles n'ont pas contrefait la marque de commerce de Pepper King.

[69]       Ayant conclu que le mot « volcano » n'a pas été employé comme marque de commerce, il n'est pas nécessaire que je tranche si son emploi est susceptible de causer de la confusion avec la marque de commerce de Pepper King. Néanmoins, comme cet élément a été plaidé exhaustivement, j'en traiterai brièvement.

ii) L'emploi par Loblaws du mot « volcano » était-il susceptible de créer de la confusion?

[70]       L'article 6 de la Loi porte sur la question de la confusion eu égard à une marque de commerce. Il dispose aux paragraphes (1), (2) et (5) :



6. (1) Pour l'application de la présente loi, une marque de commerce ou un nom commercial crée de la confusion avec une autre marque de commerce ou un autre nom commercial si l'emploi de la marque de commerce ou du nom commercial en premier lieu mentionnés cause de la confusion avec la marque de commerce ou le nom commercial en dernier lieu mentionnés, de la manière et dans les circonstances décrites au présent article.

(2) L'emploi d'une marque de commerce crée de la confusion avec une autre marque de commerce lorsque l'emploi des deux marques de commerce dans la même région serait susceptible de faire conclure que les marchandises liées à ces marques de commerce sont fabriquées, vendues, données à bail ou louées, ou que les services liés à ces marques sont loués ou exécutés, par la même personne, que ces marchandises ou ces services soient ou non de la même catégorie générale.

...

(5) En décidant si des marques de commerce ou des noms commerciaux créent de la confusion, le tribunal ou le registraire, selon le cas, tient compte de toutes les circonstances de l'espèce, y compris_:

a) le caractère distinctif inhérent des marques de commerce ou noms commerciaux, et la mesure dans laquelle ils sont devenus connus;

b) la période pendant laquelle les marques de commerce ou noms commerciaux ont été en usage;

c) le genre de marchandises, services ou entreprises;

d) la nature du commerce;

e) le degré de ressemblance entre les marques de commerce ou les noms commerciaux dans la présentation ou le son, ou dans les idées qu'ils suggèrent.

6. (1) For the purposes of this Act, a trade-mark or trade-name is confusing with another trade-mark or trade-name if the use of the first mentioned trade-mark or trade-name would cause confusion with the last mentioned trade-mark or trade-name in the manner and circumstances described in this section.

(2) The use of a trade-mark causes confusion with another trade-mark if the use of both trade-marks in the same area would be likely to lead to the inference that the wares or services associated with those trade-marks are manufactured, sold, leased, hired or performed by the same person, whether or not the wares or services are of the same general class.

...

(5) In determining whether trade-marks or trade-names are confusing, the court or the Registrar, as the case may be, shall have regard to all the surrounding circumstances including

(a) the inherent distinctiveness of the trade-marks or trade-names and the extent to which they have become known;

(b) the length of time the trade-marks or trade-names have been in use;

(c) the nature of the wares, services or business;

(d) the nature of the trade; and

(e) the degree of resemblance between the trade-marks or trade-names in appearance or sound or in the ideas suggested by them.


[71]       Considérant toutes les circonstances de l'espèce, je suis d'avis que l'emploi du mot « volcano » par Loblaws n'a vraisemblablement pas créé de confusion. Pour dégager cette conclusion, je me fonde sur les points suivants :

i)           Aucun élément de preuve n'a été produit établissant qu'il y a eu effectivement confusion. Pepper King n'a pas démontré que quelqu'un aurait acheté le produit de Loblaws en pensant ou en s'attendant qu'il s'agissait du produit de Pepper King.

ii)          Il a été établi en preuve que la marque de commerce de Pepper King n'était pas bien connue. Ni M. Small ni Pepper King n'ont jamais annoncé leur sauce au piment. La sauce au piment de Pepper King a été vendue en quantités relativement petites dans une aire géographique limitée.


iii)          Il a été établi en preuve que Pepper King et les défenderesses avaient des types de commerce différents. Pepper King vendait des quantités très limitées de sauce au détail, en grande partie par des ventes à des particuliers ou à un marché aux puces. Par comparaison, Loblaws vendait sa salsa au détail et à des entreprises franchisées ou sous licence en vue de la vente au détail.

iv)         La présentation des marques de commerce de Loblaws sur la salsa de Loblaws, selon ma conclusion, est reconnue comme indiquant la source de ses marchandises.

[72]       L'argument le plus fort de Pepper King quand il allègue la confusion porte sur le fait que les deux produits sont faits avec des ingrédients très similaires et sont utilisés à des usages similaires.

[73]       La puissance de cet argument, toutefois, se trouve fortement affaiblie parce que Pepper King est réputée avoir reconnu ce qui suit :

[TRADUCTION]

52.            La salsa et la sauce au piment fort ne sont pas fondamentalement des produits similaires. La sauce au piment fort est un ingrédient qui s'ajoute à d'autres aliments apprêtés pour en relever l'assaisonnement et le caractère épicé. La salsa est un produit autonome servi directement sur un aliment porteur comme des croustilles au maïs.

[74]       La demanderesse tente, en faisant preuve de créativité, d'atténuer ce fait qu'elle a reconnu en faisant valoir qu'elle ne va pas jusqu'à dire que la sauce au piment fort de Pepper King et la salsa de Loblaws ne sont pas en substance des produits similaires.


[75]       Je ne trouve pas l'argument convaincant. Je suis d'avis que, dans un sens générique, la salsa et la sauce au piment fort des parties ne seraient pas considérées comme fondamentalement similaires par un consommateur. Je partage l'opinion des défenderesses que la sauce au piment fort, y compris celle de Pepper King, serait considérée comme un ingrédient ou un condiment. La salsa est un produit final autonome qui ressemble plutôt à une trempette. Les produits des parties ne sont pas similaires au point de créer de la confusion chez un consommateur à leur sujet.

[76]       Cela vaut tout particulièrement dans le cas où, ainsi qu'il a été établi, le produit de la demanderesse possède un caractère épicé si prononcé qu'il plairait à quelqu'un qui recherche une épice très forte. Cela ressort du témoignage de M. Downey qui, en goûtant le produit, a identifié immédiatement « des types qui vont aimer ce truc.... » , comme du témoignage de M. Power qui, comme routier, recherche les sauces fortes.

[77]       La question de la confusion doit s'apprécier du point de vue des personnes qui sont susceptibles de consommer les marchandises. Voir l'affaire Cheung Kong (Holdings) Ltd. c. Living Realty Inc., [2000] 2 C.F. 501 (1re inst.).

[78]       J'en conclus que ce genre d'acheteur potentiel serait extrêmement attentif et ne confondrait vraisemblablement pas la sauce au piment fort de la demanderesse avec la salsa la plus forte des défenderesses.

iii) La marque de commerce de Pepper King était-elle non distinctive de sorte que l'enregistrement de cette marque est invalide?

[79]       En présentant cet argument en défense, et aussi en demande reconventionnelle, Loblaws s'est fondée sur l'alinéa 18(1)b) de la Loi qui dispose :



18. (1) L'enregistrement d'une marque de commerce est invalide dans les cas suivants_:

...

b) la marque de commerce n'est pas distinctive à l'époque où sont entamées les procédures contestant la validité de l'enregistrement.

18. (1) The registration of a trade-mark is invalid if

...


[80]          Loblaws a fait valoir que si l'emploi qu'elle faisait du mot « volcano » était jugé un emploi comme marque de commerce, cet emploi suffirait à rendre la marque de commerce VOLCANO de Pepper King non distinctive de la source de la sauce au piment de cette dernière. Loblaws s'est appuyée sur une décision de la Cour dans All Canada Vac Ltd. c. Lindsay Manufacturing Inc. (1990), 28 C.P.R. (3d) 385 (1re inst.).

[81]          Ma conclusion portant que Loblaws n'a pas employé le mot « volcano » comme une marque de commerce pour distinguer ses marchandises est déterminante à l'égard de cet argument. Ce moyen de défense et la demande reconventionnelle de Loblaws fondée sur lui sont rejetés.

CONCLUSION

[82]          Pour les motifs indiqués ci-dessus, je conclus que les défenderesses n'ont pas contrefait la marque de commerce de Pepper King portant le numéro LMC 415 846 et que le bien-fondé de leur demande reconventionnelle n'a pas été établi. Par conséquent, l'action de Pepper King et la demande reconventionnelle de Loblaws sont rejetées.

[83]          Si Loblaws réclame les dépens, Pepper King est tenue de payer aux défenderesses un mémoire de dépens partie-partie en rapport avec la demande de la demanderesse, fixés en conformité avec la colonne III du tableau du tarif B.

           « Eleanor R. Dawson »

                                                                                                                                                                Juge                       

Ottawa (Ontario)

Le 7 septembre 2000

Traduction certifiée conforme

Martine Guay, LL.L.


                                                                                                   Date : 20000907

                                                                                             Dossier : T-2351-93

Ottawa (Ontario), le jeudi 7 septembre 2000

EN PRÉSENCE DE Madame le juge Dawson

ENTRE :

PEPPER KING LTD.

demanderesse,

- et -

SUNFRESH LIMITED,

LOBLAWS INC.,

et LES COMPAGNIES LOBLAW LIMITÉE,

défenderesses.

JUGEMENT

IL EST STATUÉ QUE :

1.                   L'action de la demanderesse est rejetée.

2.                   La demande reconventionnelle des défenderesses est rejetée.


3.                Si les défenderesses réclament les dépens, la demanderesse est tenue de payer aux défenderesses un mémoire de dépens partie-partie en rapport avec sa demande, fixés en conformité avec la colonne III du tableau du tarif B.

                     « Eleanor R. Dawson »

                                                                                                                       Juge                               

Traduction certifiée conforme

Martine Guay, LL.L.


COUR FÉDÉRALE DU CANADA

SECTION DE PREMIÈRE INSTANCE

AVOCATS ET AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

N º DU GREFFE :                                 T-2352-93

INTITULÉ DE LA CAUSE :                PEPPER KING LTD. c. SUNFRESH LIMITED ET AL.

LIEU DE L'AUDIENCE :                     TORONTO (ONTARIO)

DATE DE L'AUDIENCE :                   LES 12, 13 ET 14 JUIN 2000

MOTIFS DU JUGEMENT DE MADAME LE JUGE DAWSON

EN DATE DU :                                     7 SEPTEMBRE 2000

ONT COMPARU :

M. DOUGLAS R. ADAMS                                          POUR LA DEMANDERESSE

M. DAN HITCHCOCK                                               POUR LES DÉFENDERESSES

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

M. DOUGLAS R. ADAMS                                          POUR LA DEMANDERESSE

OTTAWA (ONTARIO)

RICHES, McKENZIE & HERBERT                POUR LES DÉFENDERESSES

TORONTO (ONTARIO)

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