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Date : 19990909


Dossier : T-2827-96



ENTRE :

     LYLE NASH,

     demandeur,

     - et -

     SANJEL CEMENTERS LTD.,

     défenderesse.



     MOTIFS DE L"ORDONNANCE

LE PROTONOTAIRE JOHN A. HARGRAVE :

    

LES REQUÊTES

[1] Les requêtes du demandeur et de la défenderesse sont, en un sens, des images inverses. Le demandeur veut que les interrogatoires préalables se tiennent l"un à la suite de l"autre le même jour, ou des jours consécutifs, mais de toute façon, sans délai appréciable entre le premier interrogatoire, c"est-à-dire l"interrogatoire du défendeur M. Thompson suivi de son contre-interrogatoire par le demandeur, et le second, c"est-à-dire celui du demandeur, M. Nash, suivi de son contre-interrogatoire par la défenderesse. Pour sa part, la défenderesse, dans sa requête, cherche à obtenir soit que l"agente de brevets informée du dossier soit présente aux interrogatoires, soit, à titre subsidiaire, qu"il y ait une suspension après l"interrogatoire du défendeur afin que l"avocat puisse obtenir une transcription et demande l"avis professionnel de l"agente des brevets avant que la défenderesse n"interroge le demandeur.

[2] Une question de procédure préliminaire a été soulevée. Le dossier de requête initial du demandeur et son recueil de jurisprudence et de doctrine ne traitent pas de la question principale, à savoir la participation de l"agente de brevets. Le deuxième dossier de requête du demandeur, qui contient la réponse à la requête de la défenderesse ainsi que le deuxième recueil de jurisprudence et de doctrine du demandeur, fait état de renseignements pertinents qui auraient peut-être dû être soulevés dès le départ. Toutefois, il ne s"agit là que d"une des difficultés que soulèvent les requêtes abordant le même problème de différents points de vue. En l"espèce, personne n"en a subi de préjudice.

ÉTABLISSEMENT DU CALENDRIER DES INTERROGATOIRES PRÉALABLES

[3] L"établissement du calendrier des interrogatoires préalables et la discussion quant à savoir qui peut raisonnablement assister à ces interrogatoires sont des domaines sur lesquels le juge en chef de la Colombie-Britannique, l"honorable Allan McEachern, a été appelé à se pencher, en partie, dans l"affaire Boxer c. Reesor (1983), 43 B.C.L.R. 352. Commentant l"établissement du calendrier des interrogatoires préalables, le juge en chef a fait observer qu"un [TRADUCTION] " [...] tribunal ne devrait avoir à s"immiscer dans ces questions qu"exceptionnellement, car elles relèvent plus justement de la responsabilité des avocats ". Ce commentaire s"applique peut-être également, dans la limite du raisonnable, à la question de savoir qui peut assister à un interrogatoire préalable. Dans certaines circonstances, il y a lieu qu"un expert assiste à un interrogatoire préalable pour donner des conseils, mais d"autres catégories de personnes peuvent souvent, par entente ou par ordonnance, être présentes afin de favoriser un déroulement harmonieux et efficace de l"interrogatoire préalable. Si on tente de tracer une ligne pour séparer les personnes qui peuvent à juste titre être présentes à l"interrogatoire de celles qui ne le peuvent pas, de quel côté de cette ligne se trouveront les stagiaires, les assistants juridiques, les divers professionnels utiles et les agents de brevets? Toutes ces personnes peuvent en savoir davantage sur le dossier que l"avocat, qui, autrement, devrait consacrer inutilement de nombreuses heures coûteuses pour essayer de se familiariser suffisamment avec le dossier.

[4] Quoi qu"il en soit, ce n"est pas un domaine facile à aborder. Tout ce qu"il est possible de faire, c"est exercer le pouvoir discrétionnaire applicable au processus de la Cour, examiner la question de savoir qui peut être présent et ensuite ordonner ce qui semble le plus juste et le plus équitable. Ce n"est guère une tâche facile que de s"immiscer ainsi dans les affaires des avocats : cela embarrasse tous les intéressés. Et cette tâche est rendue encore plus pénible par le différend d"ordre procédural relatif à la question de savoir si une partie peut déposer un argument de dernière minute ou, peut-être, une nouvelle plaidoirie ou de nouveaux éléments sous prétexte de présenter une réplique. En outre, quand, contrairement à la règle 363, aucune des requêtes ne s"appuie sur le moindre affidavit (et sur peu d"éléments de droit) décider de l"établissement des calendriers et des listes de présence de l"interrogatoire préalable est une tâche diablement difficile et ingrate. Toutefois, l"avocat du demandeur mentionne la règle 54. Suivant la nouvelle règle 54, les parties à un litige peuvent demander des directives sur la procédure à suivre. Ces directives, cependant, ne portent pas sur une question en litige, mais plutôt sur la conduite d"une instance ou celle d"une étape d"une instance : voir le commentaire fait par Roger Hughes, c.r., sur la règle 54 dans l"ouvrage intitulé 1998-99 Annotated Federal Court Act and Rules , Butterworths, 1948. En l"espèce les questions qui se posent sont mixtes. D"une part, il y a la question de procédure qui vise la pratique des interrogatoires préalables tenus l"un à la suite de l"autre par opposition à la tenue d"interrogatoires espacés permettant à l"avocat d"obtenir une transcription et de demander conseil à une agente de brevets qui connaît bien le dossier, le tout manifestement couvert par une directive prévue par la règle 54. D"autre part, il y a la question de savoir qui peut être présent à l"interrogatoire préalable : dans une instance à gestion spéciale comme la présente, il doit exister une compétence par implication permettant de résoudre une question litigieuse qui découle des règles de la Cour en matière d"interrogatoires préalables.

QUELQUES FAITS PRÉSUMÉS

[5] J"aborderai tout d"abord les faits que j"ai réussi à établir, non à partir d"affidavits, mais plutôt à partir des actes de procédure et des observations écrites et orales des avocats, qui n'ont pas été faites sous serment.

[6] D"après ce que j"ai compris, il s"agit en l"espèce d"un différend portant sur un manomètre utilisé dans les forages et qui sert à mesurer la pression, non pas en prise directe sur le liquide sous pression, mais par l'intermédiaire d'un piston interposé entre le liquide et son mécanisme de mesure de manière à empêcher que le manomètre ne soit contaminé et ne se bouche. La défenderesse prétend que le manomètre du demandeur fonctionne selon un principe connu et utilisé depuis toujours, plus particulièrement lorsque le fluide excavé est de la boue susceptible de contaminer et de boucher un manomètre conventionnel. Elle ajoute qu"un tel dispositif est évident et ne comporte aucun aspect inventif. Elle évoque le fonctionnement de divers manomètres qui ont déjà été utilisés et qui le sont peut-être encore aujourd"hui pour mesurer les pressions de combustion et les hautes pressions d"injection des robustes moteurs diesels marins, dans lesquels la pression est mesurée à une extrémité d"un piston.

[7] Le présent différend s"inscrit dans le contexte suivant : l"avocat de la défenderesse s"est présenté à la date prévue pour l"interrogatoire préalable avec le témoin de la défenderesse, M. Thompson, la personne qui devait être interrogée. L"avocat avait également amené avec lui Mme Caldwell, qui est depuis longtemps l"agente de brevets de la défenderesse et une employée du cabinet de l"avocat de la défenderesse.

[8] L"avocat du demandeur s"est opposé à la présence de Mme Caldwell parce qu"elle n"est pas avocate. L"avocat de la défenderesse a répondu qu"étant donné que l"affaire soulevait des problèmes et difficultés techniques, il avait besoin de pouvoir consulter Mme Caldwell et il a ajouté que l"avis technique qu"elle pourrait fournir permettrait d"abréger l"interrogatoire parce qu"elle connaît bien l"entreprise de la défenderesse et le dossier de celle-ci.

[9] L"avocat du demandeur fait valoir, toujours sans affidavit, que, bien qu"il soit permis à des experts d"assister à l"interrogatoire préalable, Mme Caldwell n"a pas été reconnue à ce titre et elle n"est pas un expert [TRADUCTION] " des aspects techniques des capteurs et des régulateurs de pression des dispositifs de pompage destinés aux opérations de cimentation et de fracturation ". (En utilisant ces expressions, l"avocat va au delà du brevet, étant donné que le dispositif breveté du demandeur n"a rien à voir avec la régulation des pressions, mais a tout à voir avec la mesure de pressions.) L"avocat du demandeur a donc refusé d"interroger le témoin de la défenderesse, M. Thompson.

[10] L"avocat de la défenderesse a proposé, à titre de compromis, qu"il y ait un ajournement entre l"interrogatoire de M. Thompson et l"interrogatoire du demandeur, M. Nash, afin que l"avocat de la défenderesse puisse obtenir une transcription de l"interrogatoire préalable et, en temps utile, l"avis de Mme Caldwell à titre d"agente de brevets et d"employée, à partir de cette transcription. Cette proposition a été rejetée, d"où la présente impasse.

ANALYSE

Requête en vue d"obtenir la tenue des interrogatoires préalables l"un à la suite de l"autre

[11] D"abord, en ce qui concerne la requête présentée par le demandeur en vue d"obtenir, conformément à la règle 54, une directive prévoyant la tenue d"interrogatoires consécutifs ou l"un à la suite de l"autre, sans suspension entre les deux, l"avocat du demandeur prétend, sans pouvoir s"appuyer sur un précédent, qu"il existe une certaine norme selon laquelle [TRADUCTION] " la procédure normale est qu"une fois qu"une partie a été interrogée, on passe immédiatement à l"interrogatoire de l"autre ". S"il s"agit d"une norme dans certains domaines de la pratique, c"est peut-être plutôt la dérogation à cette règle que son observation qui est la coutume dans bon nombre de domaines de pratique contentieuse.

[12] L"avocat du demandeur a avancé des précédents qui, au mieux, soutiennent que les règles régissant l"interrogatoire préalable sont destinées à garantir un processus juste, rapide, peu coûteux et expéditif; il cite les décisions B.C. Ferry Corporation c. The Royal Vancouver (1995), 94 F.T.R. 265 à la page 268, où est mentionnée la décision Hanke v. Francis (1982), 37 B.C.L.R. 108 à la page 110, et Trusthouse Forte California Inc. v. Gateway Soap & Chemical Co. (1995), 63 C.P.R. (3d) 346. L"avocat passe ensuite au concept selon lequel la défenderesse, en voulant interroger le demandeur à une date ultérieure, demande en réalité un deuxième interrogatoire préalable, une mesure qui n"est accordée que dans des circonstances très inhabituelles. Il s"agit là d"une conclusion dépourvue de logique et vouée à l"échec car il n"y a pas encore eu de premier interrogatoire préalable.

[13] Suivant la règle 236(2), une partie défenderesse peut procéder à un interrogatoire préalable en tout temps après la production de la déclaration en signifiant simplement une assignation à comparaître prévue à la règle 91(1). Les règles ne limitent aucunement ce pouvoir discrétionnaire de fixer un interrogatoire préalable, si ce n"est dans le cas où il y a recours abusif à ce privilège, abus auquel il est possible de remédier, notamment par des dépens. Aucune convention ou règle n"oblige la partie défenderesse à tenir les interrogatoires préalables l"un à la suite de l"autre. Dans la limite du raisonnable et de ce qui convient aux témoins et à l"avocat de la partie adverse, la partie défenderesse peut établir le calendrier des interrogatoires préalables comme elle l"entend.

Présence d'un conseiller spécial à l'interrogatoire préalable

[14] D"après la façon dont la défenderesse interprète la situation et le droit, dans les affaires techniques, ce qui inclut des circonstances où des difficultés techniques se posent, l"avocat peut amener un conseiller spécial à un interrogatoire préalable afin de l"aider. Selon la défenderesse, la présence d"un tel conseiller se justifie par le fait qu"elle permettra d"abréger la durée de l"interrogatoire, garantissant ainsi un processus aussi efficace que possible. L"avocat de la défenderesse invoque ainsi la décision Tridici v. M.E.P.C. Canadian Properties Ltd. (1978), 8 C.P.C. 212, telle qu"elle est exposée dans le sommaire et à la page 213 (C.S. Ont.), l"affaire International Chemalloy Corporation v. Friedman (1983), 33 C.P.C. 264 à la page 269 (protonotaire de l"Ont.), l"affaire Leesona Corporation c. Montreal Throwing Co. Ltd. (1975), 19 C.P.R. (2d) 72 aux pages 73 et 74 (C.F. 1re inst.) et l"affaire Green c. La Reine (1979), 107 D.L.R. (3d) 690 aux pages 691 et 692 (C.F. 1re inst.). C"est peut-être dans la décision Tridici (précitée) à la page 213 que le concept est le mieux formulé :

         [TRADUCTION] Quand on ne peut supposer que le demandeur ou son avocat ont une formation dans le domaine visé par l"interrogatoire, la présence d"un tel expert peut être utile et peut abréger l"interrogatoire préalable. [À la page 213]
     Dans toutes ces affaires, ce conseiller spécial était un expert. En l"espèce, je ne dispose pas de suffisamment d"éléments étayés par affidavit pour établir si Mme Caldwell est un expert dans le sens où elle peut être appelée à témoigner par un tribunal afin de le seconder ou pour donner son opinion dans le sens habituel du mot expert. Il est certain qu"une personne ne possédant pas de compétences professionnelles dans le domaine en question ne serait pas, dans la plupart des secteurs d"activité, considérée par le tribunal comme un expert admis à témoigner au procès : voir par exemple la décision Cooper & Beatty c. Alpha Graphics Ltd. (1980), 49 C.P.R. (2d) 145 (C.F. 1re inst.) :
         [TRADUCTION] La Cour rejette le témoignage de l"agent de brevets en ce qui concerne le point litigieux parce que son expertise ne porte pas sur le domaine qui fait l"objet du brevet en litige. L"agent de brevets est un expert en matière d"interprétation des brevets. (Sommaire, à la page 146)
     Toutefois, dans l"affaire International Chemalloy (précitée) le tribunal a statué que la demanderesse avait droit à ce qu"un comptable soit présent à l"interrogatoire préalable afin d"apporter son aide, non en matière de comptabilité, mais pour aider l"avocat à démêler les documents dont il connaissait bien le contenu. Le protonotaire Sandler résume ce point de la manière suivante à la page 269 :
         [TRADUCTION] Vu la complexité des questions que soulève la présente affaire et compte tenu des connaissances et de l"expertise qu"il a acquises par son expérience des questions soulevées à ce sujet, M. Holmes sera très utile à l"avocat de la demanderesse. Je suis convaincu que sa présence permettra à celle-ci d"obtenir le meilleur interrogatoire préalable auquel elle est en droit de s"attendre et qu'ainsi sa présence servira les fins de la justice.

[15] L"avocat du demandeur précise qu"il n"invoque la décision International Chemalloy que pour le concept suivant lequel il faut un élément technique requérant l"aide d"un expert avant qu'il ne lui soit permis d'assister à l"interrogatoire préalable. L"avocat fait aussi remarquer que l"expert doit être reconnu et, sur ce point, il mentionne la décision Cooper & Beatty (précitée) à la page 146, selon laquelle le témoignage d"un agent de brevets sera rejeté si son expertise ne porte pas sur le domaine qui fait l"objet du brevet. Le problème que me pose cette application de la décision Cooper & Beatty est que, dans cette affaire, le témoignage d"expert que la défenderesse cherchait à obtenir de l"agent de brevets s"inscrivait dans le contexte d"une déposition à l"instruction et non dans le contexte d"un conseil technique donné à un avocat au cours d"un interrogatoire préalable, comme c"est le cas en l"espèce.

[16] La situation actuelle est certainement, sinon similaire, au moins analogue à la celle de l"affaire International Chemalloy , dans laquelle un comptable professionnel a aidé l"avocat à démêler des documents. Il est vrai que la décision International Chemalloy , étant une décision d"un protonotaire de l"Ontario, ne lie pas la présente Cour, mais celle-ci a, elle aussi, déjà permis qu"un expert soit présent pour prêter son concours à un interrogatoire préalable sans apparemment se demander si la personne serait effectivement reconnue comme un expert au procès : voir, par exemple la décision Green c. La Reine (précitée) dans laquelle un des défendeurs, contre qui l"action avait été rejetée, avait obtenu la permission de rester et de donner des conseils en tant qu"assistant, en dépit du fait qu"il pouvait être et, en fait, qu"il serait probablement un témoin à l"instruction. Du contexte de la décision Green c. La Reine , je déduis que l"assistant dont la présence a été permise lors de l"interrogatoire préalable n"était pas une personne dotée des compétences d"un expert indépendant. Il semblerait donc que la Cour fédérale ne met pas sur le même pied l'expert, plus précisément l'expert indépendant dans le contexte d"une instruction, et l'assistant, plus précisément la personne dont la présence peut être requise pour aider dans le contexte de l"interrogatoire préalable. Les tribunaux ontariens ont, dans certains cas, adopté la même attitude. Par exemple, dans l"affaire Merchants Bank of Canada v. Ketchum (1895), 16 P.R. 366 (H.C. Ont.) l"ancien associé d"un défendeur a pu assister à l"interrogatoire du demandeur à titre de conseiller de l"avocat chargé de l"interrogatoire.

[17] Signalons aussi l"affaire Smith v. Walnut Dairy Limited and Brown (1945), O.W.N. 801 dans laquelle la Haute Cour de justice a maintenu la décision d"un protonotaire de cette Cour qui avait confirmé qu"un expert en sinistres, dont l"avocat souhaitait obtenir la présence pour le seconder et lui donner des consignes, pouvait être présent à l"interrogatoire préalable.

[18] Cette jurisprudence semble établir une distinction entre ce que j"ai appelé l'expert indépendant dans le cadre de l"instruction et l"assistant dans le cadre de l"interrogatoire préalable. Je crois qu"il s"agit de deux situations différentes et qu"elles ne vont coïncider que si, fortuitement, l"expert présent à l"interrogatoire entend aussi être reconnu expert à l"instruction. En outre, comme l"indiquent les auteurs de l"ouvrage Sopinka on the Law of Evidence in Canada , Butterworths, 1999, à la page 617, la définition d"expert change sans arrêt parce qu"il y a de nombreux sujets sur lesquels un tribunal admettra tant l"opinion de profane que l"opinion d"expert.

[19] L"avocat du demandeur prétend qu"il incombe à la défenderesse de faire reconnaître la qualité d"expert de Mme Caldwell sous une forme ou sous une autre. Il n"y a pas de preuve par affidavit indiquant quelles démarches ont été faites ou n"ont pas été faites en ce sens. Cette lacune soulève aussi la question de savoir comment Mme Caldwell pourrait être reconnue; la réponse semble être qu"elle était, en fait, reconnue comme étant une mandataire de la défenderesse et son agente de brevets depuis longtemps, non seulement dans les affaires qui concernent ce litige particulier, qui se poursuit depuis 1996, mais dans d"autres affaires de brevet. En tant que telle, elle est considérée comme pouvant apporter une aide considérable à l"avocat de la défenderesse qui, bien qu"étant un avocat chevronné, n"est au courant de ce dossier en particulier que depuis peu.

[20] L"avocat du demandeur prétend qu"il serait injuste et, en fait, préjudiciable pour son client de permettre la participation dans le processus de l"interrogatoire préalable de l"agente de brevets, Mme Caldwell, ou subsidiairement, d"accepter que les interrogatoires aient lieu à des occasions distinctes afin de permettre à Mme Caldwell de lire attentivement la transcription et de donner des conseils à ce sujet, mais, au cours du débat, il n"a ni précisé quel était ce préjudice ni apporté de preuve de celui-ci. Cet avocat propose aussi que Mme Caldwell examine les transcriptions de l"interrogatoire à la fin du processus d"interrogatoire préalable et donne ses conseils à ce moment-là.

[21] À l"opposé, l"avocat de la défenderesse a au moins donné des exemples défendables expliquant comment l"exclusion totale de Mme Caldwell du processus d"interrogatoire en cours pourrait porter préjudice au demandeur. En fait, lorsqu"il est possible à une partie de rendre un interrogatoire plus efficace, plus utile et plus complet en tirant profit, dès lors, des connaissances d"une personne au courant des méandres de l"affaire, cette connaissance devrait être accessible au moment où elle est utile.

[22] La défenderesse a gain de cause pour ce qui est de la présence de Mme Caldwell à l"interrogatoire préalable. De même, comme je l"ai déjà indiqué, l"autre solution proposée par la défenderesse, à savoir qu"il y ait une suspension entre les interrogatoires afin de permettre à Mme Caldwell d"examiner la transcription, et qui a été offerte à titre de compromis au demandeur, est, elle aussi, raisonnable et adéquate.

CONCLUSION

[23] Contrairement à l'instruction, l"interrogatoire préalable est une procédure privée. Il ne faut quand même pas oublier que les règles et la procédure qui s"appliquent à l"interrogatoire préalable visent à fournir une procédure efficiente et efficace. En outre, l"interrogatoire préalable vise, entre autres choses, à éviter toute surprise à l"instruction. Enfin, le processus de l"interrogatoire préalable doit être juste pour les deux côtés.

[24] Pour atteindre ces objectifs, l"avocat peut vouloir amener à l"interrogatoire une personne-ressource, un spécialiste ou un conseiller dans un certain domaine pertinent. La spécialité peut être celle d"un expert indépendant que l"avocat peut appeler à témoigner à l"instruction, mais dans d"autres cas, le spécialiste en question peut être un gestionnaire de documents, un expert technique ou simplement une personne qui connaît le dossier et qui, par l"application de ses connaissances, mais sans s"immiscer dans l"affaire, est essentielle à la fois à l'avocat et au bon déroulement de l"interrogatoire préalable. Un tel assistant, qu"il s"agisse d"un stagiaire, d"un assistant juridique, d"un technicien ou d"une personne précieuse par la compétence ou la connaissance particulière qu"elle détient, ne peut qu"aider et contribuer à la tenue d"un interrogatoire préalable juste, rapide et expéditif, un interrogatoire qui servira les fins de la justice. De plus, le recours à un tel assistant épargnera sans aucun doute de l"argent au client.

[25] La défenderesse peut choisir l"une ou l"autre des solutions qu"elle proposait, soit que Mme Caldwell assiste à des interrogatoires tenus l"un à la suite de l"autre, soit que le demandeur est interrogé au moment convenable choisi par la défenderesse afin d'accorder à l"agente de brevets de la défenderesse la possibilité d"examiner la transcription de l"interrogatoire précédent et de conseiller l"avocat. Ces recours s"excluent l'un l'autre.

[26] La défenderesse a droit aux dépens quelle que soit l"issue du litige.

                         (Signé) " John A. Hargrave "

                                 Protonotaire

Le 9 septembre 1999

Vancouver (Colombie-Britannique)

Traduction certifiée conforme :


Richard Jacques LL. L.

     COUR FÉDÉRALE DU CANADA

     SECTION DE PREMIÈRE INSTANCE

     AVOCATS ET AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER




N" DU DOSSIER :                      T-2827-96
INTITULÉ DE LA CAUSE :              LYLE NASH
                             c.
                             SANJEL CEMENTERS LTD.

LIEU DE L"AUDIENCE :                  VANCOUVER (C.-B.)
DATE DE L"AUDIENCE :                  le 8 septembre 1999

MOTIFS DE L"ORDONNANCE DU PROTONOTAIRE JOHN A. HARGRAVE, EN DATE DU 9 SEPTEMBRE 1999



ONT COMPARU :

R. Donick                                      pour le demandeur
T. R. Kerr                                      pour la défenderesse

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Whitt & Co.

Calgary (Alb.)                                  pour le demandeur

Bennett, Jones

Calgary (Alb.)                                  pour la défenderesse
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