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Date : 20000417


Dossiers : T-34-99

ENTRE:

     GABRIEL AZOUZ

     Demandeur

     - et -



     LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA

     Défendeur






     MOTIFS DE L"ORDONNANCE ET ORDONNANCE


LE JUGE BLAIS


[1]      Le défendeur présente cette requête, suite à l"ordonnance du juge Lemieux rendue le 22 décembre 1999, afin d"obtenir la permission de la Cour pour déposer quatre affidavits supplémentaires. Le défendeur demande que l"ordonnance dans ce dossier soit incluse également dans le dossier T-35-99.



LES FAITS

[2]      Le 2 décembre 1999, M. Joe Khoury, consultant, représentant le demandeur M. Gabriel Azouz, a rencontré un représentant du défendeur, M. Jean-Paul Dufour, afin de discuter la résolution du dossier.

[3]      Cette rencontre a eu lieu sans la présence des avocats des deux parties.

LES PRÉTENTIONS DU DÉFENDEUR

[4]      Le défendeur fait valoir que de nouveaux renseignements ont fait surface lors de la réunion du 2 décembre 1999, et qu"il est pertinent de déposer des affidavits supplémentaires. Ces renseignements sont pertinents à la détermination au mérite de la demande de contrôle judiciaire, parce que le renvoi du dossier de la Division de vérifications à la Section d"enquête du demandeur a été fait, suivant le soupçon que la version du demandeur donnée à l"auditeur responsable, n"était pas vraie.

[5]      De plus, le défendeur soumet que ces renseignements touchent la crédibilité de la preuve présentée par le demandeur.

[6]      Le défendeur argumente que la Cour devrait appliquer les mêmes raisons que celles acceptées pour déposer l"affidavit de M. Sweibel pour l"affidavit de M. Dufour, vu que l"information n"a été obtenue que le 2 décembre 1999.

[7]      Le défendeur demande à la Cour d"accepter les affidavits de M. Maheu et M. Choquette, puisqu"ils corroborent l"affidavit de M. Dufour.

[8]      Enfin, puisque les dossiers T-34-99 et T-35-99 doivent être entendus l"un après l"autre, le défendeur demande à la Cour, si l"autorisation est accordée, de déposer les affidavits dans le dossier T-35-99 également.

LES PRÉTENTIONS DU DEMANDEUR

[9]      Le demandeur argumente que les quatre affidavits ne sont pas admissibles, puisque M. Khoury a divulgué des informations dans un contexte confidentiel.

[10]      Le demandeur soumet que cette Cour doit examiner l"admissibilité des documents lors de la requête, puisque le défendeur essaie de déposer des affidavits hors délais. Le demandeur fait valoir qu"il serait difficile de statuer sur l"admissibilité, sans le bénéfice du contre-interrogatoire.

QUESTION EN LITIGE

[11]      La Cour devrait-elle autoriser le dépôt des quatre affidavits supplémentaires du défendeur?

ANALYSE

[12]      Dans l"arrêt Home Juice Co. v. Orange Maison Ltée, [1968] 1 Ex. C.R. 163, la Cour a indiqué:

     Where the affidavits are filed in time, questions of relevancy or admissiblity, like questions of cogency, should ordinarily be left to be dealt with on the hearing of the application. On this view, I dismiss the present application.
     I am not to be taken as saying that there might not be such an abusive filing of irrelevant affidavits or other filing of material before the hearing as would call for an application in advance of the hearing to have the Court excercise a proper judicial discretion to put the matter in proper shape for the hearing.
     As a practical matter, the most efficient and economical way of deciding such questions is by having them so raised and decided at the hearing and as a practical exercise of judicial discretion the parties should not be permitted to raise them before the hearing. The two exceptions of that general rule that I contemplate at the moment are:
     (a) where a party has to obtain leave to admit evidence and it is obvious in the view of the court that it is inadmissible; and
     (b) where the court can be convinced that as a practical matter the admissibility of the affidavits filed by one of the parties should be considered some time before the hearing so that the hearing can proceed in an orderly manner.
    

[13]      Dans l"arrêt Andres Wines Ltd. v. Canadian Marketing International Ltd. (1986), 2 F.T.R. 292, la Cour fédérale a déclaré:

     Furthermore, whenever leave is sought to file evidence in an untimely manner, a court is invited not only to deal with its admissibility but to scrutinize it in its entirety. This seems to be the position taken by Jackett J. in Home Juice Co. v. Orange Maison Ltée (op. cit.) And it appears to me to make eminent sense. A court"s discretion should not be exercised in a void as it were. The scrutiny, in my view, would involve the materiality of the evidence, its probative or persuasive weight and indeed, its inherent pertinence and relevancy of a nature to indicate at this stage of the proceedings that the Court might very well require the evidence at the hearing of the appeal in order to arrive at the best and wisest disposition of it.

[14]      La Cour a examiné les motifs supportant la décision rendue par l"honorable juge Teitelbaum, relativement au dépôt de l"affidavit de M. Sweibel.

[15]      Il m"apparaît difficile d"appliquer les mêmes arguments aux documents, que tente d"introduire le défendeur, dans le présent dossier.

[16]      D"abord, au soutien de sa requête ré-amendée, le procureur du défendeur écrit:

     In addition, on December 2, 1999, a tax consultant representing Mr. Gabriel Azouz, called a meeting with a representative of the Respondent in the Investigations Section of the Agency, to discuss the possibility that the Agency withdraws its Request for Information to the Internal Revenue Service of the United States in exchange of a possible guilty plea from the Applicant for not having declared income received from the sale of auto parts to Jubail Motors;

[17]      Il m"apparaît clair à la lecture de ce document que la rencontre entre MM. Khoury et Dufour était faite de bonne foi de part et d"autre et, à cet effet, j"ai tout lieu de croire que M. Khoury pouvait être sous l"impression que cette rencontre était confidentielle, ayant lui-même travaillé pendant plus de trente ans au service du défendeur, ce qui pouvait lui permettre de comprendre et de connaître, de façon précise, la façon de procéder, en pareilles circonstances.

[18]      Manifestement, il existe une différence de perception relativement à cette rencontre, si l"on s"en tient aux différents affidavits. Cependant, me référant à The Law of Evidence in Canada, Sopinka, John, (1992), pp. 719-34, le juge Sopinka se réfère aux informations échangées dans un processus de règlement et, à cet effet, il écrit à la page 19:

     Policy and General Rule.
     It has long been recognized as a policy interest worth fostering that parties be encouraged to resolve their private disputes without recourse to litigation, or if an action has been commenced, encouraged to effect a compromise without a resort to trial. In furthering these objectives, the courts have protected from disclosure communications, whether written or oral, made with a view to reconciliation or settlement. In the absence of such protection, few parties would initiate settlement negotiations for fear that any concession that they would be prepared to offer could be used to their detriment if no settlement agreement was forthcoming.

     Conditions for Recognition of the Privilege

     There are number of conditions that must be present for the privilege to be recognized:
     a litigious dispute must be in existence or within contemplation;
     the communication must be made with the express or implied intention that it would not be disclosed to the Court in the event negotiations failed; and
     the purpose of the communication must be to attempt to effect a settlement.


[19]      Je n"ai nulle hésitation à considérer que la rencontre du 2 décembre 1999, bien qu"elle n"était pas encadrée par les avocats des deux parties, était une rencontre de bonne foi et que Monsieur Khoury pouvait raisonnablement croire que les informations transmises et particulièrement l"offre de règlement, soient considérées comme étant confidentielles, eu égard aux circonstances.

[20]      Il appert que le représentant du défendeur a soumis un rapport écrit et que plusieurs autres personnes ont préparé des affidavits relativement à cette rencontre, et que le défendeur compte utiliser certaines affirmations qui pourraient être considérées comme étant des admissions contre le demandeur.

[21]      Le deuxième point qui doit être examiné par la Cour est que cet événement du 2 décembre 1999 est arrivé postérieurement au dépôt de la demande de contrôle judiciaire et, qu"à cet effet, la Cour doit se demander si elle est justifiée dans les circonstances, d"autoriser le dépôt d"affidavits supplémentaires.

[22]      Le procureur du défendeur a fait remarquer à la Cour que l"honorable juge Teitelbaum avait décidé d"autoriser le dépôt d"un document, mais non pas en rapport avec les événements du 2 décembre 1999, mais en rapport avec d"autres événements survenus eux, le 14 septembre 1999. Il m"apparaît utile de faire miens les commentaires exprimés par le protonotaire Morneau dans sa décision déposée le 27 septembre 1999, au paragraphe 12.

     Il est constant en jurisprudence que les faits postérieurs à la décision ou à l"acte attaqué par contrôle judiciaire n"ont aucune pertinence et ne doivent pas être admis:
     Rien dans la loi ou dans les règles applicables ne prévoit l"introduction d"une nouvelle preuve relativement au bien-fondé d"une affaire dans le cadre d"un contrôle judiciaire. Cela n"est pas surprenant, car il ressort des pouvoirs en matière de contrôle judiciaire énoncés au paragraphe 18.1(4) de la Loi sur la Cour fédérale, que ce contrôle a pour but d"examiner les erreurs faites au cours des délibérations de la Commission. Extrait de la cause: Franz c. MEI, 80 FTR 79, à la p. 80
         Par cette requête, la Cour est priée d"ajouter des éléments au dossier dont l"arbitre n"avait pas eu connaissance quand il a rendu sa décision et dont il n"aurait pas pu être saisi car ils n"existaient pas. Cette Cour a refusé de rendre pareille ordonnance dans des cas semblables. (Comparer Garland Wilson c. ommission de l"emploi et de l"immigration du Canada, no. du greffe: A-445-88, le 6 août 1990, le juge Hugessen de la cour d"appel. Voir aussi M.N.R. c. Optical Recording Corp. 79 N.R. 23, p. 26 et 27 (C.A.F.)" Extrait de la cause Pacific Press c. Canada, (1990) 127 NR 323 (CAF) à la p. 324.

[23]      Dans les circonstances, je suis d"avis qu"il n"y a pas lieu de s"écarter du principe établi par la jurisprudence. Pour les raisons exprimées, la requête du défendeur est rejetée.

[24]      La présente ordonnance sera également valable pour les deux dossiers T-34-99 et T-35-99.

                         Pierre Blais

                         Juge

VANCOUVER, COLOMBIE BRITANNIQUE

Le 17 avril 2000

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