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     Date : 19991004

     Dossier : IMM-5482-98

Ottawa (Ontario), le 4 octobre 1999

EN PRÉSENCE DE Mme LE JUGE SHARLOW


Entre :


     JAINANAN ARJUN,

     demandeur,

     - et -


     LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION,

     défendeur.



     ORDONNANCE



     La requête est rejetée avec dépens, et ceux-ci sont fixés à 1 000 $.



                         Karen R. Sharlow

                                     Juge


Traduction certifiée conforme


Laurier Parenteau, LL.L.




     Date : 19991004

     Dossier : IMM-5482-98


Entre :


     JAINANAN ARJUN,

     demandeur,

     - et -


     LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION,

     défendeur.



     MOTIFS DE L'ORDONNANCE


LE JUGE SHARLOW

[1]      Il s'agit d'une requête déposée par la Couronne en vertu de la Règle 397 en vue d'examiner de nouveau une ordonnance en date du 8 septembre 1999, par laquelle j'ai accueilli la demande de contrôle judiciaire. L'ordonnance a été rendue à l'audience après l'audition de la cause.

[2]      L'avocat de la Couronne s'appuie sur la Règle 397(1)b) et prétend que l'ordonnance devrait être modifiée parce qu'une question qui aurait dû être traitée a été oubliée ou omise involontairement. L'avocat de M. Arjun prétend que les conditions relatives à l'application de cette règle ne sont pas réunies.

Motif pour lequel la demande a été accueillie

[3]      À l'audience, l'avocat de M. Arjun a fait valoir que l'agent des visas n'avait pas accordé à M. Arjun une entrevue même si celui-ci avait obtenu plus de 60 points dans l'appréciation initiale de sa demande. L'argumentation écrite de la Couronne affirmait que M. Arjun n'avait pas obtenu les 60 points requis. Toutefois, l'avocat de la Couronne a concédé à l'audience que M. Arjun avait obtenu plus de 60 points, et qu'il avait donc droit à une entrevue.

[4]      L'avocat de la Couronne a également reconnu que l'omission d'accorder à M. Arjun une entrevue était une erreur qui donnait à M. Arjun le droit de faire annuler la décision de l'agent des visas et de faire examiner de nouveau sa demande par un autre agent des visas.

[5]      C'est sur la base de cette deuxième concession que l'ordonnance accueillant la demande de contrôle judiciaire a été rendue.

Fondement de la demande de réexamen

[6]      L'avocat de la Couronne s'est tardivement rendu compte qu'il n'aurait pas dû reconnaître qu'on avait à tort refusé une entrevue à M. Arjun. Au contraire, il aurait dû porter à mon attention l'article 11.1 du Règlement. Cet article prévoit en effet que, parce que M. Arjun n'avait pas obtenu de points dans la catégorie du " facteur professionnel ", il n'aurait pas eu droit à une entrevue même s'il avait obtenu plus de 60 points. L'avocat de la Couronne prétend maintenant que son omission de faire mention de ce point juridique à l'audience a mené à une ordonnance qui pourrait être fondée sur une erreur de droit.

[7]      L'argument de la Couronne se fonde sur l'hypothèse selon laquelle, si l'article 11.1 du Règlement avait été porté à mon attention à l'audience, les autres arguments soulevés au cours de l'audience auraient été tranchés en faveur de la Couronne. Ce n'est pas nécessairement le cas. Tout réexamen m'obligerait nécessairement à examiner les autres motifs de contrôle qui ont été pleinement débattus devant moi mais qui n'ont pas été tranchés.

Opportunité de réexaminer l'ordonnance

[8]      La requête de la Couronne soulève une question préliminaire importante, c'est-à-dire la question de savoir si l'omission par un avocat de soulever un argument juridique au cours d'une audience est un fondement approprié pour demander le réexamen d'une ordonnance en vertu de la Règle 397(1)b).

[9]      L'avocat de M. Arjun prétend que la doctrine de la chose jugée devrait empêcher qu'un tel oubli constitue un motif de réexamen. En réponse à cet argument, l'avocat de la Couronne cite la décision Jhajj c. Canada, [1995] 2 C.F. 369 (C.F. 1re inst.) et prétend que la Règle 397 a priorité sur la doctrine de la chose jugée.

[10]      La Couronne fait erreur en s'appuyant sur cette décision. Celle-ci traite de la règle qui a précédé la Règle 399, c'est-à-dire la Règle 1733. La Règle 399 traite du pouvoir de la Cour d'annuler ou de modifier une ordonnance en s'appuyant sur une nouvelle preuve, une ordonnance rendue sur requête ex parte, une ordonnance rendue en l'absence d'une partie qui n'a pas comparu par suite d'un événement fortuit ou d'une erreur ou à cause d'un avis insuffisant de l'instance, ou une ordonnance obtenue par fraude. La Règle 399 ne s'applique pas en l'espèce.

[11]      Je doute fort qu'il soit approprié en l'espèce d'appliquer la Règle 397. Les arguments de la Couronne sont de la nature d'un appel, et n'allèguent aucune omission de ma part de traiter d'un point qui a été débattu.

[12]      Toutefois, il semble plus approprié dans les circonstances particulières de l'espèce de se laisser guider par la Règle 3, qui souligne que l'objectif général de la Cour est d'apporter une solution au litige qui soit juste et la plus expéditive et économique possible.

[13]      Je supposerai donc, sans pour autant me prononcer à cet égard, que la Couronne a à bon droit invoqué la Règle 397. Je réexaminerai tous les arguments qui ont été présentés d'après le bien-fondé de cette affaire.



Réexamen -- Les autres arguments de M. Arjun

[14]      La demande de contrôle judiciaire de M. Arjun contestait la décision d'un agent des visas de refuser sa demande de résidence permanente. La contestation était fondée sur plusieurs moyens, notamment l'omission de lui accorder l'entrevue dont il a été question ci-dessus.

[15]      L'avocat de M. Arjun a également fait valoir que la demande de résidence permanente de son client était fondée sur des renseignements erronés fournis par la Couronne.

[16]      M. Arjun a préparé lui-même sa demande, sans se faire aider par un avocat ou un autre conseiller professionnel. Il déclare dans son affidavit qu'au début de 1998 il a demandé à la Couronne une trousse du demandeur pour l'aider à préparer sa demande, mais que la trousse qu'il a reçue portait sur les dispositions réglementaires qui avaient été abrogées l'année d'avant. Il a formulé sa demande en s'appuyant sur des renseignements périmés, et c'est la raison pour laquelle il a indiqué que le métier qu'il avait l'intention d'exercer au Canada était celui d'inspecteur d'installations électriques. M. Arjun prétend de plus qu'il était aussi qualifié comme machiniste, mais que ce n'est pas le métier qu'il a mentionné dans sa demande.

[17]      M. Arjun soutient que, s'il avait obtenu les renseignements à jour, il aurait su qu'en vertu des dispositions réglementaires en vigueur il aurait pu obtenir une meilleure évaluation dans la catégorie de machiniste. C'est manifestement le cas. Donc, si l'on croit le récit de M. Arjun, il faut nécessairement en inférer que les renseignements erronés qu'il a obtenus de la Couronne ont compromis dès le départ sa demande de résidence permanente.

[18]      M. Arjun a été contre-interrogé au sujet de son affidavit. Ce contre-interrogatoire ne jette aucun doute sur sa crédibilité.

[19]      La Couronne n'a pas prétendu que l'argument de M. Arjun est mal fondé sur le plan des principes. Elle a plutôt simplement nié que des renseignements périmés lui ont été envoyés. La Couronne s'appuie sur un affidavit d'une fonctionnaire qui dit avoir été la personne responsable de s'assurer que des renseignements exacts et en vigueur étaient inclus dans toutes les trousses du demandeur, et qu'au meilleur de sa connaissance aucune trousse renfermant des renseignements périmés n'avait été envoyée après que les nouvelles dispositions réglementaires furent entrées en vigueur.

[20]      Toutefois, la fonctionnaire a admis en contre-interrogatoire qu'on ne conservait aucun dossier sur les renseignements qui étaient réellement envoyés à des particuliers, et qu'elle ne pouvait pas affirmer avec certitude que M. Arjun avait reçu la bonne trousse.

[21]      Je conclus que la Couronne a effectivement envoyé à M. Arjun une trousse périmée sur laquelle il s'est appuyé pour présenter sa demande. La preuve par affidavit de M. Arjun est crédible et je l'accepte. L'affidavit sur lequel s'appuie la Couronne est véridique, mais il ne réfute pas l'affirmation de M. Arjun selon laquelle la Couronne lui a envoyé des renseignements périmés.

[22]      Il ressort manifestement de la demande de M. Arjun que celui-ci s'est appuyé sur des renseignements périmés. Il aurait dû être évident pour l'agent des visas que M. Arjun avait été mal informé sur certaines questions très fondamentales. Dans les circonstances, l'agent des visas aurait dû noter l'erreur flagrante et prendre des mesures qui auraient permis à M. Arjun de corriger sa demande. Je n'ai aucun doute que, si M. Arjun avait obtenu des renseignements exacts, sa demande aurait été considérablement modifiée et qu'il aurait peut-être pu obtenir un résultat positif.

[23]      Pour ces motifs, mon ordonnance du 9 septembre 1999 est maintenue. La Couronne paiera les dépens de la présente requête, qui sont fixés à 1 000 $.

                         Karen R. Sharlow

                                     Juge

Ottawa (Ontario)

le 4 octobre 1999



Traduction certifiée conforme


Laurier Parenteau, LL.L.

     COUR FÉDÉRALE DU CANADA

     SECTION DE PREMIÈRE INSTANCE

     AVOCATS ET PROCUREURS INSCRITS AU DOSSIER



NE DU GREFFE :              IMM-5482-98

INTITULÉ DE LA CAUSE :      JAINANAN ARJUN c. LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION

REQUÊTE TRAITÉE PAR ÉCRIT SANS COMPARUTION DES PARTIES

MOTIFS DE L'ORDONNANCE DE Mme LE JUGE SHARLOW

DATE :                  le 4 octobre 1999



OBSERVATIONS ÉCRITES PRÉSENTÉES PAR :

Bill Wong                              POUR LE DEMANDEUR

David Tyndale                          POUR LE DÉFENDEUR



PROCUREURS INSCRITS AU DOSSIER :

Bill Wong                              POUR LE DEMANDEUR

Toronto (Ontario)

Morris Rosenberg                          POUR LE DÉFENDEUR

Sous-procureur général du Canada

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