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Date : 20000926

Dossier : IMM-4016-99

ENTRE :

                                                              YAO ZHAO NING

                                                                                                                                          demandeur

                                                                          - et -

                                            LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ

                                                       ET DE L'IMMIGRATION

                                                                                                                                           défendeur

                                                  MOTIFS DE L'ORDONNANCE

LE JUGE DUBÉ:

[1]         Il s'agit d'une demande de contrôle judiciaire de la décision par laquelle l'agente des visas Susanna Ching (l'agente des visas) a, en date du 9 juillet 1999, rejeté la demande de résidence permanente du demandeur au motif qu'il n'avait pas satisfait aux exigences prévues par le paragraphe 9(3) de la Loi sur l'immigration[1], (la Loi) :

9. (3) Obligations - Toute personne doit répondre franchement aux questions de l'agent des visas et produire toutes les pièces qu'exige celui-ci pour établir que son admission ne contreviendrait pas à la présente loi ni à ses règlements.


1. Les faits

[2]         Le demandeur a présenté sa demande de résidence permanente au Canada le 8 mai 1997. Il est au service du Nanjing Research Institute of Electronic Technology, une entreprise qui travaille pour l'armée chinoise.

[3]         Il a passé une entrevue le 24 mai 1998. Une entrée dans les notes du STIDI, en date du 24 avril 1998, indique qu'une vérification des antécédents doit être envoyée par l'entremise d'un poste du bureau de contrôle de l'immigration. L'entrée datée du 28 avril 1998 montre qu'une note de service avec une pièce jointe a été envoyée au SCRS de Tokyo par l'entremise d'un poste du bureau de contrôle de l'immigration. Rien dans le dossier n'indique la nature exacte des renseignements envoyés. Une autre entrée datée du 13 août 1998 indique que la sécurité et les examens médicaux sont en règle et que l'affaire est [TRADUCTION] « prête pour le visa » (PPV). Une entrevue a eu lieu le 8 juillet 1999, et elle a été faite par un agent de sécurité du SCRS. L'entrée du 9 juillet 1999 indique que le demandeur [TRADUCTION] « était très peu coopératif et extrêmement évasif et n'a pas répondu à des questions posées par l'ALS » . L'ALS est un agent de sécurité, comme il ressort de la lettre de l'agente des visas en date du 9 juillet 1999.


[4]         L'agente des visas a rejeté la demande au motif que le demandeur n'avait pas fourni les renseignements demandés à l'entrevue et, elle a donc conclu qu'il n'avait pas satisfait aux exigences du paragraphe 9(3) selon lequel « [t]oute personne doit répondre franchement aux questions de l'agent des visas » .

[5]         Dans son affidavit, pour lequel il n'a pas été contre-interrogé, le demandeur affirme que l'ALS en question n'était pas un agent des visas mais un certain Kim Taylor, un agent de sécurité du SCRS qui ne lui a pas posé de questions relativement aux fonctions du poste qu'il occupait. Les questions visaient à obtenir des renseignements de nature délicate portant sur son employeur, de la façon suivante :

[TRADUCTION]

15.            Il voulait plutôt savoir :

a)              Quelle était la structure organisationnelle de mon employeur au Nanjing Research Institute; et

b)              Détails concernant le nombre de noms de ses employés; et

c)              Il voulait connaître les stratégies de recherche et l'orientation prise par l'entreprise

d)              Il voulait savoir quels organismes utilisaient les produits de notre entreprise et les antécédents de ces organismes

e)              Il voulait savoir si l'entreprise utilisait des techniques et des technologies secrètes et intelligentes de pays étrangers

f)              Il voulait savoir comment nous les utilisions.


[6]         En résumé, l'agent de sécurité du SCRS menait une enquête sur les antécédents de l'employeur du demandeur plutôt que sur ceux de ce dernier. Par conséquent, le demandeur a avisé M. Taylor qu'il n'était pas disposé à répondre à ces questions. Il lui a dit qu'il devait se conformer aux lois de son pays. S'il devait répondre aux questions, il serait extrêmement inquiet de la sécurité et de la protection de sa femme et de ses enfants qui se trouvaient toujours en Chine. Il ne sait pas [TRADUCTION] « pourquoi le Canada lui a demandé de devenir un espion pour son service de renseignements et l'a placé dans la situation la plus compromettante de sa vie » .

[7]         Il n'a pas refusé de répondre aux questions de l'agente des visas.

[8]         Dans son dossier (déposé le 16 décembre 1999), le défendeur admet que l'agente des visas a commis une erreur en rejetant la demande du demandeur sans évaluer de façon appropriée son admissibilité. En particulier, l'agente des visas a commis une erreur en rendant sa décision sans avoir reçu une recommandation de l'ALS relativement à l'admissibilité du demandeur.

[9]         Compte tenu de cette erreur, le défendeur consent à accorder la demande de contrôle judiciaire de la façon suivante :

[TRADUCTION]

(a)             L'affaire sera renvoyée devant un autre agent des visas pour réexamen;

(b)            L'affaire sera renvoyée au motif que les critères de sélection ont déjà été remplis;

(c)             Les examens médicaux du demandeur devront être refaits, étant donné qu'ils sont venus à expiration en mai 1999;

(d)            Il sera nécessaire de faire passer une nouvelle entrevue au demandeur relativement à son admissibilité. Cette entrevue se limitera aux questions de sécurité.


[10]       Le défendeur allègue également que le demandeur a raison quand il affirme que l'abréviation [TRADUCTION] « PPV » signifie « prêt pour le visa » . Il a admis qu'il s'agissait bien d'une erreur, étant donné qu'aucune décision relative à la sécurité n'avait été inscrite dans les notes du STIDI à cette date.

2. Décision

[11]       Le demandeur ne demande plus une ordonnance de la Cour pour qu'un visa lui soit délivré, il cherche plutôt à obtenir une ordonnance de certiorari annulant la décision. Comme je l'ai déjà mentionné, le défendeur consent à accorder la demande de contrôle judiciaire sous réserve de quatre directives. J'accepte ces conditions, mais j'ajouterai une cinquième directive selon laquelle il sera interdit à l'agent de sécurité ou à l'agent des visas d'interroger le demandeur à propos de questions de sécurité ou de renseignements de sécurité portant sur son employeur ou sur le gouvernement chinois.

[12]       Par conséquent, la demande de contrôle judiciaire est accueillie.

[13]       À la fin de l'audience, l'avocate du défendeur a demandé d'aborder la question des dépens après le prononcé de ma décision, probablement parce que le défendeur a consenti à accorder le contrôle judiciaire et que le demandeur a quand même poursuivi l'audition. Si elle souhaite toujours le faire, elle peut déposer ses arguments par écrit dans les sept jours suivant ma décision. Le demandeur peut déposer ses arguments dans les sept jours suivants. Le défendeur peut déposer sa réponse dans les cinq jours suivants.


[14]       Les deux parties et la Cour conviennent qu'il n'y a pas de question de portée générale à certifier dans la présente affaire.

OTTAWA (Ontario)

le 26 septembre 2000

                                                                                                                                              

                                                                                                     Juge

Traduction certifiée conforme

Martine Brunet, LL.B.


Date : 20000926

Dossier : IMM-4016-99

OTTAWA (ONTARIO), LE 26 SEPTEMBRE 2000

EN PRÉSENCE DE : MONSIEUR LE JUGE J.E. DUBÉ

ENTRE :

                                      YAO ZHAO NING

                                                                                          demandeur

                                                  - et -

                    LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ

                               ET DE L'IMMIGRATION

                                                                                           défendeur

                                        ORDONNANCE

La demande de contrôle judiciaire est accueillie.

                                                                                                                                       

                                                                                                     Juge

Traduction certifiée conforme

Martine Brunet, LL.B.


                         COUR FÉDÉRALE DU CANADA

                    SECTION DE PREMIÈRE INSTANCE

                      AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

NUMÉRO DU GREFFE :                 IMM-4016-99

INTITULÉ DE LA CAUSE :             Yao Zhao Ning c. Le ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration

LIEU DE L'AUDIENCE :                  Toronto (Ontario)

DATE DE L'AUDIENCE :                13 septembre 2000

MOTIFS DE L'ORDONNANCE : MONSIEUR LE JUGE DUBÉ

EN DATE DU :                                   26 septembre 2000

ONT COMPARU :

M. Cecil Rotenberg                                                                   POUR LE DEMANDEUR

Mme Claire LeRiche                                                                  POUR LE DÉFENDEUR

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

M. Cecil Rotenberg                                                                   POUR LE DEMANDEUR

Toronto (Ontario)

Morris Rosenberg                                                                      POUR LE DÉFENDEUR

Sous-procureur général du Canada



     [1]       L.R.C. 1976-77, ch. 52.

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