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Date : 20021017

Dossier : IMM-4638-01

OTTAWA (Ontario), le 17 octobre 2002

EN PRÉSENCE DE MONSIEUR LE JUGE ROULEAU

ENTRE :

                         KENNETH EDWARD ELIJAH

                                                                demandeur

                                    

ET :

          LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉET DE L'IMMIGRATION

                                                                défendeur

                                ORDONNANCE

[1]                 La demande de contrôle judiciaire est rejetée.

                                                                                                                                              « P. Rouleau »             

   Juge

   

Traduction certifiée conforme

Claude Leclerc, LL.B


Date : 20021017

Dossier : IMM-4638-01

Référence neutre : 2002 CFPI 1082

ENTRE :

                         KENNETH EDWARD ELIJAH

                                                                demandeur

                                    

ET :

          LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉET DE L'IMMIGRATION

                                                                défendeur

                         MOTIFS DE L'ORDONNANCE

LE JUGE ROULEAU

[2]                 Il s'agit d'une demande de contrôle judiciaire présentée en vertu de l'article 18.1 de la Loi sur la Cour fédérale, L.R.C. (1985), ch. F-7, relativement à une décision rendue le 28 août 2001 par Sara Trillo, agente des visas (l'agente des visas) au consulat général du Canada à New York (États-Unis). La demande de statut de résident permanent au Canada (la demande) présentée par le demandeur a été rejetée pour le motif que le demandeur n'avait pas obtenu au moins 70 points d'appréciation, le nombre minimum exigé par l'alinéa 9(1)b) du Règlement sur l'immigration de 1978 (le Règlement) pour répondre aux critères de sélection en vue de l'immigration au Canada.

[3]                 Le demandeur sollicite une ordonnance annulant cette décision et renvoyant l'affaire à un autre agent des visas pour nouvel examen.

[3]                 Le demandeur est un citoyen de l'Inde et il est né le 25 novembre 1970. Il est marié et père d'un enfant. Il parle, lit et écrit l'anglais couramment .

[4]                 Le 16 mai 2000, le demandeur a présenté une demande de résidence permanente au Canada dans la catégorie des demandeurs indépendants par l'entremise de l'ambassade du Canada à Buffalo (New York). Il a indiqué dans sa demande qu'il comptait travailler comme « directeur financier » . La demande a fait l'objet d'une évaluation sur dossier pour le poste de directeur financier (CNP 0111) et elle a été codée dans la catégorie des immigrants indépendants. Le demandeur s'est vu accorder le nombre maximum de points quant à l'expérience, c'est-à-dire six points d'appréciation. En conformité avec l'alinéa 11.1a) du Règlement sur l'immigration de 1978 (le Règlement), on a demandé au demandeur de se présenter à une entrevue afin que l'on vérifie les renseignements mentionnés dans sa demande quant à son expérience et ses compétences et afin que l'on évalue ses qualités personnelles.


[5]                 L'agente des visas a fait passé une entrevue au demandeur le 23 août 2001. Ce dernier est arrivé aux États-Unis en provenance de l'Inde afin de passer son entrevue. Il a déclaré que son épouse et sa fille l'accompagneraient au Canada. Le demandeur a déclaré qu'il immigrait au Canada étant donné que c'est un pays développé doté d'une structure financière équilibrée. Il a informé l'agente des visas qu'il n'avait jamais visité le Canada et qu'il n'y avait aucun proche parent.

[6]                 L'agente des visas a passé en revue, avec le demandeur, les fonctions et les responsabilités, telles qu'elles sont décrites dans la Classification nationale des professions, en rapport avec l'emploi pour lequel il a postulé et pour lequel il veut être apprécié, c'est-à-dire directeur financier (CNP 0111). Elle a informé le demandeur qu'il n'avait pas accompli une partie importante des fonctions essentielles décrites dans la Classification nationale des professions pour cette profession. L'agente des visas était d'avis, et elle l'a dit au demandeur lors de l'entrevue, qu'il n'avait pas d'expérience dans la profession qu'il prévoyait exercer. Elle a informé le demandeur de ses doutes et lui a donné l'occasion de répondre.

[7]                 Le 28 août 2001, l'agente des visas a examiné le dossier du demandeur et elle en est venue à la même conclusion que lors de l'entrevue. Elle a de plus conclu que le demandeur ne réussirait pas à s'établir avec succès au Canada. Il a échoué pour ce qui est des points et l'agente des visas a estimé que les points d'appréciation reflétaient adéquatement ses chances de s'établir avec succès au Canada.


[8]             Dans une lettre datée du 28 août 2001, l'agente des visas a fait part au demandeur des motifs de son refus. En bref, sa demande a été rejetée en vertu de l'alinéa 9(1)b) du Règlement parce qu'il avait obtenu moins de 70 points d'appréciation et qu'il n'avait obtenu aucun point pour le facteur de l'expérience et le facteur demande dans la profession. En effet, les paragraphes 11(1) et (2) du Règlement exigent qu'un demandeur obtienne au moins un point d'appréciation pour ces facteurs afin qu'un visa d'immigrant soit délivré.

[9]                 Le demandeur veut faire annuler cette décision dans la présente demande de contrôle judiciaire.

[10]            La lettre de refus du 28 août 2001 exprimant la décision et les motifs de l'agente des visas est ainsi libellée :

[traduction] J'AI TERMINÉ L'ÉVALUATION DE VOTRE DEMANDE ET J'AI LE REGRET DE VOUS INFORMER QUE J'AI CONCLU QUE VOUS NE RÉPONDEZ PAS AUX CONDITIONS VOULUES POUR IMMIGRER AU CANADA.

CONFORMÉMENT À L'ALINÉA 8(1) DU RÈGLEMENT SUR L'IMMIGRATION DE 1978, LES DEMANDEURS INDÉPENDANTS, LA CATÉGORIE DANS LAQUELLE VOUS AVEZ FAIT UNE DEMANDE, SONT APPRÉCIÉS EN FONCTION DES FACTEURS ÉNUMÉRÉS À L'ANNEXE I DU RÈGLEMENT SUR L'IMMIGRATION. CES FACTEURS SONT : L'ÂGE, LA DEMANDE DANS LA PROFESSION, LES ÉTUDES ET LA FORMATION, L'EXPÉRIENCE, L'EMPLOI RÉSERVÉ OU LA PROFESSION DÉSIGNÉE, LE FACTEUR DÉMOGRAPHIQUE, LES ÉTUDES, LA CONNAISSANCE DU FRANÇAIS ET DE L'ANGLAIS ET LES QUALITÉS PERSONNELLES. VOUS AVEZ ÉTÉ APPRÉCIÉ EN FONCTION DE LA PROFESSION POUR LAQUELLE VOUS DÉSIRIEZ ÊTRE APPRÉCIÉ, C'EST-À-DIRE DIRECTEUR FINANCIER (CNP 0111). VOICI LES POINTS ATTRIBUÉS POUR CHACUN DES CRITÈRES DE SÉLECTION POUR LA PROFESSION QUE VOUS ENVISAGIEZ D'EXERCER :

ÂGE                                 10

FACTEUR PROFESSIONNEL              00

ÉTUDES ET FORMATION         15

EXPÉRIENCE                          00

EMPLOI RÉSERVÉ                      00

FACTEUR DÉMOGRAPHIQUE              08

ÉTUDES                       15

ANGLAIS                              09


FRANÇAIS                            00

QUALITÉS PERSONNELLES              04

TOTAL                                61

[11]            De plus, on trouve jointes au dossier du tribunal les notes du STIDI de l'agente des visas qui contiennent les renseignements additionnels donnés à l'appui du refus de la demande et dans lesquelles on analyse attentivement les lettres d'appui provenant d'anciens employeurs.

[12]            La question principale dans la présente demande est de savoir si, compte tenu de la preuve, l'appréciation de l'agente des visas pour le facteur professionnel et le facteur de l'expérience pour la profession envisagée de directeur financier (CNP 0111) était déraisonnable. La présente demande soulève aussi la question de savoir si l'agente des visas a commis une erreur dans son appréciation des points au chapitre des qualités personnelles du demandeur.

[13]            Le demandeur prétend d'abord que l'agente des visas a mal interprété la définition de « directeur financier » ou mal appliqué la définition aux faits de l'espèce.


[14]            Le demandeur prétend que l'agente des visas aurait dû le reconnaître comme directeur financier. Elle ne lui a accordé aucun point d'appréciation pour cette profession alors qu'elle aurait dû lui en accorder 3. Selon la Liste générale des professions, le facteur études/formation (FEF) pour la profession de directeur financier est de 15. Si le demandeur avait été apprécié comme directeur financier, il aurait dû recevoir 15 points pour ce facteur, ce qui fut le cas. Toutefois, il est impossible que l'agente des visas ait pu avoir fait cela tout en ne lui accordant aucun point pour le facteur professionnel. Les deux éléments devraient être calculés ensemble. Le demandeur soutient que le fait que l'agente des visas lui ait accordé 15 points au titre du FEF signifie que celle-ci l'a en fait reconnu comme directeur financier.

[15]            Le demandeur fait également remarquer qu'après qu'elle eu inscrit dans ses notes du STIDI la liste des fonctions du demandeur chez son employeur actuel, United Phosphorus Ltd., l'agente des visas a déclaré qu'elle avait l'impression que les fonctions principales du demandeur chez cet employeur ne correspondaient pas à celles énumérées dans la CNP pour la profession de directeur financier. Le demandeur prétend qu'il est clair que ses fonctions correspondaient à celles énumérées dans la définition de directeur financier mentionnée dans la CNP, surtout si on fait une lecture large de la définition.

[16]            Le demandeur prétend ensuite que l'agente des visas l'a mal apprécié au titre du facteur de l' « Expérience » . Un maximum de huit points peut être accordé au titre de ce facteur; l'agente des visas a commis une erreur en n'accordant au demandeur aucun point au titre de ce facteur. À l'appui de sa prétention, le demandeur se fonde sur les remarques qui se trouvent au chapitre OP-5 du Guide de l'immigration intitulé « Traitement des demandes des immigrants indépendants » et qui sont ainsi libellées sous la rubrique « Expérience » :

En général, plus le FFRE est élevé, plus on peut octroyer de points pour l'expérience. Si l'on procède de cette façon, c'est que les employés plus expérimentés ont une valeur supérieure au sein des professions spécialisées. Dans les professions moins spécialisées, ce n'est pas le cas. Par conséquent, on attribue plus de points à un menuisier qui a deux années d'expérience qu'à un manoeuvre qui en a quinze.


Pour ce qui est de l'expérience, les points peuvent être accordés conformément à la grille suivante :

Années d'expérience

FFRE

1 année

2 années

3 années

4 années

1-2

2

2

2

2

5-7

2

4

4

4

15

2

4

5

6

17-18

2

4

6

8

[17]            Compte tenu que l'agente des visas a accordé au demandeur 15 points au titre du FFRE, le demandeur aurait dû se voir accorder 6 points d'appréciation pour son expérience comme directeur financier.

[18]            Le demandeur prétend que l'agente des visas a commis une erreur en ne tenant pas compte de la lettre du directeur général de la United Phosphorus, une importante société internationale qui compte 2 500 employés. Selon le directeur général de cette société, le demandeur exerçait un certain nombre de fonctions nécessaires conformément à la CNP. Dans sa lettre, il a décrit les fonctions du demandeur. L'agente des visas a commis une erreur en droit en interprétant et en appliquant aux faits de l'espèce la description de la profession de directeur financier qui se trouve dans la CNP (0111).

[19]            Le demandeur affirme que l'agente des visas a commis une erreur dans son attribution des points d'appréciation au chapitre des qualités personnelles. Elle aurait attribué plus de points pour les qualités personnelles si elle n'avait pas commis d'erreur en appréciant l'expérience de travail du demandeur.


[20]            Après avoir examiné attentivement les mémoires des parties, le dossier certifié du tribunal déposé à la Cour ainsi que l'affidavit de l'agente des visas, je suis d'avis que la décision rendue en l'espèce est raisonnable compte tenu de la preuve qui a été présentée à l'agente des visas.

[21]            Le premier motif de la demande de contrôle judiciaire du demandeur est que l'agente des visas a commis une erreur en ne lui accordant aucun point au chapitre du facteur professionnel alors qu'elle lui a accordé 15 points pour les études et la formation pour la profession de directeur financier. Je suis d'accord. Les commentaires qui figurent au chapitre OP-5 du Guide de l'immigration intitulé « Traitement des demandes des immigrants indépendants » , mentionnent ce qui suit sous la rubrique « Facteur formation relative à l'emploi (FFRE) » :

Ce facteur permet d'accorder un nombre de points équivalent au nombre d'années de formation officielle nécessaires pour atteindre un rendement moyen au sein de la profession au regard de laquelle un demandeur est évalué. Après avoir déterminéqu' un demandeur est compétent dans la profession au regard de laquelle un demandeur est évalué, l'agent vérifie la valeur de cette profession, pour ce qui a trait à l'indicateur de formation professionnelle (IFP), dans le guide d'orientation de la Classification nationale des professions, et convertir ces valeurs en un nombre approprié de points d'appréciation selon le FFRE, jusqu'à concurrence de dix-huit [...] (non souligné dans l'original)

[22]            On peut lire ce qui suit sous la rubrique « Facteur demande dans la profession » :

La Liste géné rale des professionsest une liste de professions auxquelles correspondent des points d'appréciation allant d'un minimum de 1 àun maximum de 10. Il est important de savoir qu'il n'y a aucune corrélation directe entre la valeur des points et la demande de main-d'oeuvre au sein d'une profession donnée. La valeur reflète plutôt les possibilités d'emploi générales, au Canada, d'une personne qui possède ces compétences professionnelles.


[...]

Le maximum de 10 points prévu pour le facteur « Demande dans la profession » est attribué à un demandeur qui a une offre d'emploi validée dans une profession à laquelle la CNP attribue une cote de cinq (5) ou plus au titre de l'IFP. (Il convient de noter que la cote cinq (5) de la CNP équivaut àquinze (15) points d'appréciation pour le facteur études.)

Le nombre maximum de 10 points prévu pour le facteur « Demande dans la profession » est également attribué à un demandeur dont la profession a été désignée par le Ministre.

Si un candidat n'obtient aucun point pour le facteur « Demande dans la profession » , c'est-à-dire si sa profession ne figure pas sur la Liste géné rale des professions, n'a pas étédésign ée par le Ministre ou s'il n'a pas d'offre d'emploi validée, on interrompra le traitement de la demande.

[23]            Il ressort clairement que lorsque la profession qu'envisage d'exercer un candidat est mentionnée dans la « Liste générale des professions » (la Liste) et que le candidat s'est vu accordé un nombre précis de points d'appréciation sous la rubrique « Facteur des études et de la formation » , l'agent des visas doit lui accorder le nombre correspondant de points d'appréciation qui figure dans la colonne « Facteur demande dans la profession » qui se trouve dans la liste.


[24]            En l'espèce, l'agente des visas a commis une erreur en n'accordant aucun point au demandeur pour le facteur demande dans la profession alors qu'elle lui a accordé 15 points d'appréciation FFRE pour la profession de directeur financier. Le demandeur avait clairement droit à trois points d'appréciation pour le « Facteur demande dans la profession » . Le raisonnement qui sous-tend ceci est que si on conclut qu'un demandeur a droit à 15 points d'appréciation FFRE pour la profession envisagée de directeur financier signifie que celui-ci a été jugé qualifié pour cette profession et les 3 points d'appréciation pour le « Facteur demande dans la profession » ne font que refléter les possibilités d'emploi générales au Canada d'une personne qui possède déjà ces compétences professionnelles.

[25]            Le demandeur soutient que l'agente des visas l'a mal apprécié quant au facteur « Expérience » et qu'elle a commis une erreur en ne lui accordant aucun point à l'égard de ce facteur. Je remarque qu'il est ressort de l'attribution des points que l'agente des visas a jugé que le demandeur possédait une expérience pertinente pour la profession envisagée.

[26]            Comme nous l'avons affirmé, l'agente des visas aurait dû accorder 3 points d'appréciation au demandeur pour le facteur « Demande dans la profession » . Je dois en déduire que le demandeur répondait aux critères de la CNP relatifs à la profession de directeur financier, notamment ceux qui concernent les études. Comment l'agente des visas a-t-elle alors pu n'accorder aucun point au demandeur pour l'expérience?

[27]            Le demandeur soutient qu'il est évident que ses fonctions correspondent à la définition de directeur financier qui figure dans la CNP, en particulier si on interprète cette définition d'une manière large. L'agente des visas a commis une erreur susceptible de révision en interprétant la définition de la CNP d'une manière étroite.

[28]            Le demandeur prétend que l'agente des visas était tenue de vérifier s'il avait exercé l'ensemble ou un certain nombre des fonctions précisées dans la description de la CNP. En ignorant ou en ne considérant pas la preuve que constitue la lettre, l'agente des visas a commis une erreur de droit dans son interprétation de la description de directeur financier qui se trouve dans la CNP 0111. Le demandeur a proposé qu'on lui accorde 6 points d'appréciation pour le facteur de l'expérience.


[29]            Dans l'arrêt Lim c. Canada (Ministre de l'Emploi et de l'Immigration) (1991), 121 N.R. 241 (C.A.F.), il a été décidé que la question de savoir si un demandeur est vraiment qualifié pour une profession mentionnée dans la CNP est purement une question de fait qui relève entièrement de l'agent des visas. Le juge Evans (maintenant juge à la Cour d'appel) a écrit dans l'arrêt Madan c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration) (1999), 172 F.T.R. 262, que les agents des visas ont un pouvoir très étendu lorsqu'il s'agit de déterminer si un demandeur répond aux critères pour une profession donnée, y compris dans leur interprétation des dispositions de la CNP. Leur connaissance et leur compréhension de ce document est au moins égale, sinon supérieure, à celle du tribunal chargé du contrôle.

[30]            En l'espèce, l'agente des visas a témoigné dans son affidavit et dans ses notes du STIDI qu'elle a examiné l'expérience de travail du demandeur avec celui-ci. De 1989 à 1994, le demandeur a travaillé à la division des « services » de la Texool Corporation à Bombay. Il a produit une lettre non datée provenant de cette société, laquelle lettre mentionnait qu'il avait travaillé comme aide à l'exportation à partir de mars 1989. La lettre renvoie à une liste de fonctions dont aucune ne correspondait aux fonctions énumérées dans la CNP pour la profession de directeur financier. Le demandeur a déclaré que cette société exportait essentiellement du prêt-à-porter. Le demandeur a produit deux lettres de référence provenant des sociétés Unique et J.B. Chemicals & Pharmaceutical, toutes deux de Bombay. Une des lettres datée du 27 février 1999 et signée par le directeur de l'administration et du personnel, R. Natarajan, mentionnait que le demandeur avait travaillé pour la société entre février 1994 et février 1999 comme cadre à la division internationale et par la suite comme directeur de l'expédition et de la publicité au sein de cette même division. L'autre lettre n'était pas datée et était aussi signée par R. Natarajan. Les deux signatures étaient complètement différentes.


[31]            La dernière lettre que le demandeur a produit provenait de son employeur actuel, United Phosphorus Ltd. de Mumbai (Bombay). Elle était non datée et mentionnait que le demandeur travaillait comme directeur financier au service de l'expédition depuis mars 1999. Cette lettre donnait la liste de ses fonctions alors qu'il travaillait pour le service de l'expédition de cette société. Les fonctions que le demandeur avait exercées, selon la lettre, étaient presque le calque des fonctions décrites dans la CNP pour la profession que le demandeur envisageait d'exercer, c'est-à-dire : « planifier, organiser, diriger et contrôler [...] » . L'agente des visas a fait part de ses inquiétudes au demandeur.

[32]            L'agente des visas a déclaré dans son affidavit, et cela ressort clairement de ses notes, qu'elle a examiné les lettres de référence et a demandé au demandeur de décrire dans ses propres mots les fonctions qu'il avait exercées alors qu'il travaillait pour ces trois sociétés. Celui-ci a déclaré qu'il s'occupait de la planification, de l'élaboration du budget, de la négociation des tarifs de fret et du maintien des bonnes relations avec les agents de quai et les exploitants aériens. Il s'occupait aussi de la planification et de l'élaboration du budget pour les activités qui relevaient de la section de l'expédition. Il devait aussi s'occuper des avances des banques consenties sur des lettres de crédit. L'agente des visas lui a ensuite demandé de donner des détails sur son implication quant au volet financier de l'entreprise. Il a affirmé qu'il essayait de négocier des tarifs de fret plus avantageux et essayait d'augmenter les ventes. Voilà essentiellement en quoi consistait son implication quant au volet financier de la société United Phosphorus Ltd. L'agente des visas a conclu que les fonctions que le demandeur avait prétendu exercer lors de son entrevue ne correspondaient pas aux fonctions de directeur financier telles qu'elles sont définies dans la CNP.


[33]            De plus, l'agente des visas étaient d'avis, et elle l'a mentionné au demandeur lors de son entrevue, qu'il ne possédait pas l'expérience pertinente exigée pour la profession à l'égard de laquelle il souhaitait qu'on l'apprécie. Il ressort des notes du STIDI qu'elle a fait part au demandeur de ses inquiétudes concernant sa demande et lui a donné l'occasion de répondre.

[34]            Je ne suis pas convaincu que l'agente des visas a commis une erreur en ce qui concerne l'attribution des points d'appréciation pour le facteur de l'expérience. Il appert, eu égard aux notes du STIDI et à l'affidavit de l'agente, que la raison pour laquelle la demande a été rejetée était que l'agente n'était pas convaincue, d'après l'ensemble de la preuve, que le demandeur avait exercé une partie importante des fonctions mentionnées dans sa demande. En particulier, le titre de la fonction que le demandeur a exercée de 1989 à 1994 était « aide à l'exportation » et les fonctions qu'il a exercées n'avaient rien à voir avec celle de directeur financier; ni la lettre provenant de la société J.B. Chemicals & Pharmaceuticals, ni la lettre provenant du directeur général de la société United Phosphorus Ltd. concernant son rendement n'ont pas été jugées comme des preuves crédibles qu'il a exercé une partie importante des fonctions mentionnées dans la CNP. De plus, comme il ressort des notes du STIDI, le demandeur a lui-même laissé entendre qu'il ne « faisait pas le travail » mais qu'il ne faisait qu'exercer deux des cinq ou six fonctions précisées dans la CNP. Il a expliqué qu'il était instruit et qu'il pouvait effectuer un nombre important des fonctions de la profession qu'il envisageait d'exercer si on lui en donnait l'occasion.


[35]            L'obligation de convaincre un agent des visas du bien-fondé d'une demande repose sur le demandeur. Décider si un demandeur remplit ou non les conditions prescrites dans la CNP exige manifestement une appréciation de la preuve relative à son expérience et à sa formation, une tâche que seul l'agent des visas doit accomplir. À mon avis, selon la preuve dont l'agente des visas était saisie, la décision qu'elle a prise était parfaitement raisonnable et il était loisible à cette dernière de la prendre.

[36]            Finalement, le demandeur soutient que l'agente des visas a commis une erreur dans son appréciation des points pour le facteur des qualités personnelles.

[37]            Je ne suis pas d'accord. L'annexe I du Règlement exige que des points d'appréciation soient accordés à la suite d'une entrevue afin de refléter les qualités personnelles de la personne et de ses personnes à charge qui leur permettront de s'établir avec succès au Canada d'après la faculté d'adaptation de la personne, sa motivation, son esprit d'initiative, son ingéniosité et autres qualités semblables et non pas seulement d'après son expérience de travail.

[38]            L'agente des visas a noté que le demandeur ne s'était pas préparé pour son déménagement au Canada. Il n'avait rien fait pour accroître ses compétences. Il connaissait très peu le Canada et avait des attentes irréalistes sur ce qui arriverait lors de son arrivée au Canada. Tout ceci a amené l'agente des visas à conclure que le demandeur aurait de la difficulté à s'établir avec succès et, par conséquent, elle ne lui a accordé que quatre points pour les qualités personnelles. Il ressort clairement du dossier que l'agente des visas « a bien saisi les questions en litige » . Je ne vois aucune raison d'intervenir et de reconsidérer les conclusions de l'agente des visas relativement aux qualités personnelles.


[39]            En conclusion, si on accepte que l'agente des visas a commis une erreur dans son appréciation du demandeur pour le facteur professionnel mais que les éléments de preuve qui ont été portés à sa connaissance justifiaient raisonnablement la conclusion à laquelle elle est arrivée quant à l'expérience de travail et quant aux qualités personnelles du demandeur, celui-ci n'aurait quand même pas obtenu le nombre minimum de points requis. Par conséquent, la demande de contrôle judiciaire est rejetée.

   

             « P. Rouleau »                  

Juge                        

Ottawa (Ontario)

le 17 octobre 2002

  

Traduction certifiée conforme

Claude Leclerc, LL.B.


                          COUR FÉDÉ RALE DU CANADA

                        SECTION DE PREMIÈRE INSTANCE

                         AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

DOSSIER :                      IMM-4638-01

INTITULÉ :                     Kenneth Edward Elijah c. Le Ministre de la Citoyenneté et

de l'Immigration

LIEU DE L'AUDIENCE :         Vancouver (Colombie-Britannique)

DATE DE L'AUDIENCE:          Le 1er octobre 2002

MOTIFS DE L'ORDONNANCE : MONSIEUR LE JUGE ROULEAU

DATE DES MOTIFS :            Le 17 octobre 2002

COMPARUTIONS :

Laura Valdez                                       POUR LE DEMANDEUR

Pauline Anthoine                                   POUR LE DÉFENDEUR

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Des Friedland                                      POUR LE DEMANDEUR

Laura Valdez

Avocats

Vancouver (C.-B.).                                  

Morris Rosenberg                                   POUR LE DÉFENDEUR

Sous-procureur général du Canada                       

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