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Date : 2001116

Dossier : T-2022-89

CALGARY (Alberta), le vendredi 16 novembre 2001.

EN PRÉSENCE DE MONSIEUR LE JUGE TEITELBAUM

ENTRE :

LE CHEF VICTOR BUFFALO, agissant en son nom et au nom de tous les autres membres de la nation et de la bande indienne de Samson

et

LA NATION ET BANDE INDIENNE DE SAMSON,

                                                                                                                            DEMANDEURS

ET

SA MAJESTÉ LA REINE DU CHEF DU CANADA, LE MINISTRE DES AFFAIRES INDIENNES ET DU NORD CANADIEN et LE MINISTRE DES FINANCES

                                                                                                                              DÉFENDEURS

ET

LE CHEF JEROME MORIN, agissant en son nom et au nom de tous les MEMBRES DE LA BANDE INDIENNE D'ENOCH ET DES RÉSIDENTS DE LA RÉSERVE DE STONY PLAIN NO 135

                                                                                                                          INTERVENANTS

ET

EMILY STOYKA et SARA SCHUG

                                                                                                                     INTERVENANTES


                                                              ORDONNANCE

Pour les motifs énoncés dans les motifs de l'ordonnance, la demande que les demandeurs Samson ont présentée en vue de déposer en preuve les volumes 1 et 2, parties 1 et 2, du rapport de la Commission royale sur les peuples autochtones est rejetée.

« Max M. Teitelbaum »

Juge

Traduction certifiée conforme

Suzanne M. Gauthier, trad.a., LL.L.


Date : 20011116

Dossier : T-2022-89

Référence neutre : 2001 CFPI 1249

ENTRE :

LE CHEF VICTOR BUFFALO, agissant en son nom et au nom de tous les autres membres de la nation et de la bande indienne de Samson

et

LA NATION ET BANDE INDIENNE DE SAMSON,

                                                                                                                            DEMANDEURS

ET

SA MAJESTÉ LA REINE DU CHEF DU CANADA, LE MINISTRE DES AFFAIRES INDIENNES ET DU NORD CANADIEN et LE MINISTRE DES FINANCES

                                                                                                                              DÉFENDEURS

ET

LE CHEF JEROME MORIN, agissant en son nom et au nom de tous les MEMBRES DE LA BANDE INDIENNE D'ENOCH ET DES RÉSIDENTS DE LA RÉSERVE DE STONY PLAIN NO 135

                                                                                                                          INTERVENANTS

ET

EMILY STOYKA et SARA SCHUG

                                                                                                                     INTERVENANTES


                                               MOTIFS DE L'ORDONNANCE

LE JUGE TEITELBAUM

[1]                 Cette décision se rapporte à une demande présentée oralement par les demandeurs, le chef Victor Buffalo et la bande indienne et nation de Samson (ci-après appelés les Samson); les Samson sollicitent l'autorisation de déposer en preuve les volumes 1 et 2, parties 1 et 2, du Rapport de la Commission royale sur les peuples autochtones, ci-après appelée la CRPA, et de faire inscrire à titre de pièces lesdits volumes dans la présente instance.

[2]                 La « Couronne » défenderesse s'oppose au dépôt desdits volumes.

[3]                 Pour mieux comprendre ma décision, il faut à mon avis faire l'historique de l'affaire.

[4]                 Les Samson ont cité un certain M. James Youngblood Henderson à titre de témoin expert dans la présente instance et ont demandé à la Cour l'autorisation de déposer ce rapport en tant que rapport « d'expert » .

[5]                 La Couronne défenderesse a contesté l'admissibilité du rapport d'expert de M. Henderson qui avait été soumis par les Samson. Dans les motifs de l'ordonnance concernant l'admissibilité du rapport Henderson en date du 18 janvier 2001, j'ai dit ce qui suit au sujet de ce rapport, tel qu'il se rapporte à la CRPA :


[4]    La seconde moitié du rapport Henderson renferme un sommaire, ou un aperçu, du rapport de la Commission royale sur les peuples autochtones [ci-après la CRPA], celle-ci ayant été établie par le gouvernement fédéral et dont le rapport, composé de cinq volumes, a été publié au mois de novembre 1996. Le rapport Henderson renferme des détails au sujet du mandat de la CRPA; l'on y donne un aperçu de certaines constatations et de recommandations.

[5]    La Couronne s'oppose à l'admission en preuve du rapport Henderson pour le motif qu'il n'est ni pertinent ni nécessaire. Dans ses observations orales, la Couronne a fait savoir que son argumentation se rapportait principalement à la question de la nécessité.

[...]

[7]    Les demandeurs Samson soutiennent que le rapport Henderson aidera la Cour en fournissant des renseignements historiques et le contexte de l'évolution du processus d'élaboration des traités en Amérique du Nord en général, et en particulier du traité no 6, ainsi que le contexte des droits issus de traités, des droits ancestraux et des droits inhérents qui servent de fondement aux revendications et aux questions constitutionnelles à trancher dans cette action.

[6]                 En outre, au paragraphe 23 de la décision que j'ai rendue le 18 janvier 2001, j'ai dit ce qui suit :

[23]      Dans le cadre de l'argumentation, l'avocat des demandeurs Samson a mentionné longuement le rapport de la CRPA et en a lu certains extraits. Toutefois, ces extraits servent à souligner tant la nature politique que la nature juridique du rapport de la CRPA. Ainsi, il est fait mention du volume 1 ( « Un passé, un avenir » ), du chapitre 6 ( « Déracinement et assimilation » ), p. 186-197. Parmi les sujets qui sont traités dans ce chapitre il y a les divergences dans les postulats et dans la compréhension des Européens et des autochtones; la non-exécution par la Couronne des traités et des promesses; le retour à l'esprit des traités; les mesures de contrôle et d'assimilation prises par la Couronne au moyen de lois fédérales telles que la Loi sur les Indiens. Le contenu de ces pages, tout en étant en partie de nature historique, constitue en général un argument d'ordre politique. Des arguments de nature davantage politique figurent également dans le volume 2 du rapport de la CRPA ( « Une relation à redéfinir » ), aux chapitres 1 ( « Les traités » ) et 2 ( « La fonction gouvernementale » ). Des exemples d'arguments d'ordre juridique évidents figurent dans le volume 1, chapitre 9 ( « La Loi sur les Indiens » ). Il est difficile et de fait presque impossible de voir comment l'expert éventuel des demandeurs Samson, M. Henderson, pourrait être contre-interrogé au sujet du contenu du rapport de la CRPA puisqu'il n'en est pas l'auteur. Il ne faudrait pas interpréter ces remarques comme voulant dire que le rapport de la CRPA n'a pas sa place dans le présent litige; toutefois, c'est aux avocats qu'il appartient d'en parler dans leurs plaidoiries.


[7]                 Comme le montre la décision du 18 janvier 2001, j'ai statué que le rapport Henderson, qui traitait en partie du rapport de la CRPA, n'était pas admissible.

[8]                 Les Samson ont tenté de porter ma décision en appel. La Cour d'appel fédérale a annulé l'appel pour le motif qu'elle n'avait pas compétence.

[9]                 Les demandeurs ont décidé de citer un témoin ordinaire, M. J. Peter Meekinson. M. Meekison était membre de la CRPA. Il a été nommé à la Commission environ deux ans après que celle-ci eut commencé ses travaux et, si je comprends son témoignage, il n'a pris part qu'à quelques audiences, et en fait à deux audiences au plus.

[10]            Après que M. Meekison eut témoigné, les Samson ont présenté une demande orale en vue d'être autorisés à déposer en preuve les volumes 1 et 2, parties 1 et 2, du rapport de la CRPA dans l'instance.

[11]            À l'appui de la demande, l'avocat des demandeurs Samson soutient que la CRPA a été créée parce que la Couronne, au moyen d'un décret du Conseil privé, avait ordonné à la commission d'enquête d'enquêter, de faire certaines recommandations concrètes et de faire rapport au Parlement.

[12]            L'avocat des demandeurs admet que le rapport renferme des recommandations au sujet de la politique que le Parlement doit suivre, mais il soutient que cela ne devrait pas régler la question de savoir si le rapport est admissible en preuve aux fins de la présente instruction.

[13]            Les Samson déclarent que la Cour a reçu une preuve similaire, à savoir le rapport Penner qui a été inscrit comme pièce et qui traitait de recommandations (au sujet de la politique) concernant l'autonomie indienne.

[14]            L'argument de la Couronne, qui veut empêcher la production en preuve des deux premiers volumes du rapport de la CRPA dans la présente instruction est le suivant : quels que soient les droits et les obligations que les parties ont l'une envers l'autre, ces droits et obligations existaient avant que la CRPA soit créée et indépendamment de la CRPA; or, en ma qualité de juge présidant l'instruction, je dois déterminer quels sont ces droits et obligations et apprécier la conduite de la Couronne par rapport à ces droits et obligations plutôt que par rapport au rapport de la CRPA. L'avocat de la Couronne soutient qu'aucun nouveau droit n'a été créé par suite des recommandations de la CRPA et que les arguments que les demandeurs ont à invoquer en se fondant sur la CRPA devraient être débattus dans une enceinte politique plutôt que dans le cadre de la présente instruction.


[15]            À mon avis, les travaux des commissaires qui ont été nommés en vue de mener l'enquête sur les peuples autochtones ont donné lieu à de longues recherches avant que la Commission tire les conclusions auxquelles elle est arrivée. Comme M. Meekison l'a déclaré dans son témoignage, la Commission avait pour mandat de recommander au gouvernement du Canada la politique future que celui-ci devrait adopter dans ses relations avec les peuples autochtones.

[16]            Je souscris à l'argument de l'avocat de la Couronne selon lequel [TRADUCTION] « la CRPA a peut-être apporté une contribution précieuse au débat d'ordre public relatif aux questions autochtones, mais son rapport n'est pas nécessaire ou utile aux fins de la procédure de la Cour » .

[17]            Au cours de l'instruction, j'ai déclaré à maintes reprises qu'il ne m'incombe pas de mener une enquête. Comme je l'ai dit, ce qui est à mon avis évident, ma fonction consiste à tenir une instruction de façon à déterminer les questions, telles que je les comprends, et à trancher ces questions, en me fondant sur la lecture de la déclaration, de la défense et de la preuve qui m'a été soumise.

[18]            Je tiens encore une fois à dire que le rapport de la Commission royale sur les peuples autochtones est un ouvrage de nature « politique » en ce sens qu'il vise à recommander au gouvernement du Canada la façon dont celui-ci devrait élaborer ses politiques, en ce qui concerne les relations qu'il entretient avec les peuples autochtones du Canada. Je suis convaincu que je n'ai pas besoin du rapport de la CRPA pour m'aider à déterminer légalement les questions dont je suis saisi.

[19]            Dans la décision que j'ai rendue au sujet du rapport de M. Henderson, j'ai dit que les avocats pourront se référer au rapport de la CRPA dans les conclusions finales qu'ils présenteront dans l'instance.

[20]            En ce qui concerne l'argument que l'avocat des Samson a présenté au sujet du dépôt en preuve du rapport Penner, la situation est fort différente. Premièrement, et avant tout, le rapport Penner a été déposé en preuve par les Samson dans la présente instruction. La Couronne défenderesse ne s'est pas opposée à ce dépôt. Deuxièmement, le rapport Penner a été préparé par des députés pour le gouvernement du Canada. Il n'a pas été préparé par des tiers.

[21]            L'objection de la Couronne, en ce qui concerne le dépôt « en preuve » par les « Samson » des volumes 1 et 2, parties 1 et 2, du rapport de la CRPA est retenue.

« Max M. Teitelbaum »

Juge

Calgary (Alberta),

le 16 novembre 2001.

Traduction certifiée conforme

Suzanne M. Gauthier, trad.a., LL.L.


COUR FÉDÉRALE DU CANADA

SECTION DE PREMIÈRE INSTANCE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

DOSSIER :                                                                      T-2022-89

INTITULÉ :                                                                     Chef Victor Buffalo et autres

c.

Sa Majesté la Reine et autres

LIEU DE L'AUDIENCE :                                             Calgary (Alberta)

DATE DE L'AUDIENCE :                                           le 1er novembre 2001

MOTIFS DE L'ORDONNANCE PAR :                   Monsieur le juge Teitelbaum

DATE DES MOTIFS :                                                  le 16 novembre 2001

COMPARUTIONS :

M. James O'Reilly

M. Ed Molstad, c.r.

M. Peter Hutchins

Mme C. Scattolin                                                               POUR LES DEMANDEURS SAMSON

T-2022-89

Mme Claudia McKinnon                                                    POUR LES DEMANDEURS ERMINESKIN

T-1254-92

M. Allan Macleod, c.r.

M. Clarke Hunter

Mme Brenda Armitage                                                        POUR SA MAJESTÉ LA REINE


- 2 -

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

O'Reilly et associés

Montréal (Québec)

Parlee McLaws

Calgary (Alberta)

Hutchins, Soroka et Dionne

Montréal (Québec)                                                            POUR LES DEMANDEURS SAMSON

T-2022-89

Blake, Cassels & Graydon                                                POUR LES DEMANDEURS

Calgary (Alberta)                                                               ERMINESKIN

T-1254-92

M. Morris Rosenberg                                                        POUR SA MAJESTÉ LA REINE

Sous-procureur général du Canada                                 


COUR FÉDÉRALE DU CANADA

SECTION DE PREMIÈRE INSTANCE

                                                         Date : 2001116

                                                Dossier : T-2022-89

ENTRE :

LE CHEF VICTOR BUFFALO, agissant en son nom et au nom de tous les autres membres de la nation et de la bande indienne de Samson

et

LA NATION ET BANDE INDIENNE DE SAMSON,

                                                    DEMANDEURS

ET

SA MAJESTÉ LA REINE DU CHEF DU CANADA, LE MINISTRE DES AFFAIRES INDIENNES ET DU NORD CANADIEN et LE MINISTRE DES FINANCES

                                                       DÉFENDEURS

ET

LE CHEF JEROME MORIN, agissant en son nom et au nom de tous les MEMBRES DE LA BANDE INDIENNE D'ENOCH ET DES RÉSIDENTS DE LA RÉSERVE DE STONY PLAIN NO 135

                                                  INTERVENANTS

ET

EMILY STOYKA et SARA SCHUG

                                               INTERVENANTES

                                                                                  

MOTIFS DE L'ORDONNANCE

                                                                                  

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