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Date : 20020730

Dossier : IMM-3834-01

Référence neutre : 2002 CFPI 830

Ottawa (Ontario), le mardi 30 juillet 2002

EN PRÉSENCE DE MADAME LE JUGE DAWSON

ENTRE :

                       NOOR MOHAMMAD KHORRAMI

                                                                                                  demandeur

                                                    - et -

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION

                                                                                                    défendeur

        MOTIFS DE L'ORDONNANCE ET ORDONNANCE

LE JUGE DAWSON


[1]    La demande de contrôle judiciaire déposée par M. Khorrami est de la nature d'un mandamus parce qu'elle est devenue théorique avant la date d'audition prévue lorsque le ministre a fait connaître la décision qui est en cause dans la présente instance. La seule question dont est saisie la Cour est de savoir si les circonstances de l'espèce justifient que les frais soient adjugés à l'encontre du ministre.

LES FAITS

[2]    Dans une lettre datée du 4 juin 2000, l'avocat de M. Khorrami a soumis des observations et fourni des éléments de preuve afin d'obtenir un redressement ministériel ayant trait à l'alinéa 19(1)l) de la Loi sur l'immigration, L.R.C. (1985), ch. I-2 (la Loi). Quand il est devenu clair que, malgré les demandes présentées par l'avocat et par le représentant canadien du Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés, aucune décision n'était prise, la présente demande de contrôle judiciaire a été déposée le 9 août 2001. L'autorisation a été accordée par voie d'ordonnance datée du 25 avril 2002 et la date de l'audition a été fixée au 24 juillet 2002.

[3]    Par la suite, le ministre a rendu sa décision le 21 juin 2002 et cette décision a été communiquée à l'avocat de M. Khorrami le 17 juillet 2002, accompagnée d'une lettre en date du 16 juillet 2002.


[4]                 L'avocat de M. Khorrami prétend maintenant que le retard à prendre la décision et à la communiquer de même que les erreurs contenues dans le dossier déposé par le défendeur en réponse à la demande d'autorisation constituent des raisons spéciales au sens de la règle 22 des Règles de la Cour fédérale en matière d'immigration, 1993, DORS/93-72. Cette règle est rédigée dans les termes suivants :


22. Sauf ordonnance contraire rendue par un juge pour des raisons spéciales, la demande ou l'appel introduit en application des présentes règles ne donne pas lieu à des dépens.

22. No costs shall be awarded to or payable by any party in respect of an application or an appeal under these Rules unless the Court, for special reasons, so orders.


ANALYSE

[5]                 On ne m'a pas convaincue que la preuve dont était saisie la Cour était suffisante pour lui permettre de conclure qu'en soi le retard qui s'est produit dans la demande déposée pour obtenir un redressement ministériel constitue une raison spéciale pour adjuger les dépens.


[6]                 Aucun argument n'a été présenté pour démontrer que la demande de redressement ministériel a été traitée autrement que dans le cours normal des activités. Le dossier du tribunal indique que le temps qu'il a fallu pour prendre la décision est dû au fait qu'après qu'une recommandation favorable eut été transmise par le bureau de Toronto de la Section des crimes de guerre à la direction générale du règlement des cas de l'Unité des crimes de guerre contemporains à Ottawa le 3 janvier 2001, l'Unité des crimes de guerre a obtenu de nouveaux renseignements qui contredisaient l'avis donné par M. Khorrami. Il a donc fallu tenir une nouvelle entrevue le 3 octobre 2001. Aucune observation n'a été soumise pour démontrer que cette entrevue était inutile ou qu'il n'y avait pas lieu de prendre du temps pour analyser l'information fournie au cours de la deuxième entrevue. Il n'y a pas de preuve pour établir que le délai qu'il a fallu pour rendre la décision était injustifié ou excessif.

[7]                 Quant au deuxième motif suggéré comme raison spéciale, soit le retard de 26 jours à communiquer la décision, on fait valoir au nom du ministre qu'il s'agit là du délai habituel qu'il faut pour qu'une décision ministérielle suive la filière avant d'être enfin communiquée à l'avocat. Toutefois, cette prétention ne tient pas compte du fait que cette décision a été prise alors que des procédures judiciaires ayant pour but de forcer le ministre à prendre la décision étaient imminentes. En plus de fixer la date de l'audition, l'ordonnance accordant l'autorisation donnait à M. Khorrami le droit de déposer un autre mémoire le ou avant le 28 juin 2002, et ce mémoire a été préparé, signifié et déposé le 28 juin 2002.

[8]                 Le mémoire a été préparé avec la conviction qu'aucune décision n'avait été prise, et il traitait en partie de l'effet sur la présente demande de la Loi sur l'immigration et la protection des immigrants, L.C. 2001, ch. 27, et du Règlement. Les frais associés à la préparation et à la signification de ce mémoire ont été engagés inutilement au vu du fait que la décision avait été prise, mais non communiquée.


[9]                 Bien qu'il puisse être vrai que trois semaines et demie constituent le temps nécessaire pour communiquer une décision d'un ministre à l'avocat d'une personne, à mon avis, pour ce qui concerne les parties à la présente instance, c'est le ministre qui doit assumer les coûts occasionnés par ce retard. J'estime donc que le retard à communiquer la décision constitue une raison spéciale pour adjuger les dépens relatifs à la préparation et à la signification de l'autre mémoire inutile.

[10]            Quant au troisième motif invoqué, savoir des erreurs dans le dossier de réponse du ministre, le dossier incluait l'affidavit d'une analyste principale de l'Unité des crimes de guerre contemporains à Ottawa. Dans cet affidavit, l'analyste établit sous serment ce qui suit :

[TRADUCTION]

Le demandeur a été interrogé par l'Unité des crimes de guerre contemporains de la région de l'Ontario à Toronto en présence de son avocat le 18 juin 2000. L'avocat du demandeur a manifesté le désir de demander un redressement ministériel et a déposé des observations à l'Unité des crimes de guerre contemporains de la région de l'Ontario le 16 octobre 2000. Les observations ont été transmises à l'Unité des crimes de guerre contemporains de l'Administration centrale le 17 octobre 2000. L'évaluation des observations a été envoyée par M. Rob Bafaro, agent chargé d'audition, de l'Unité des crimes de guerre contemporains à l'Unité des crimes de guerre contemporains de l'Administration centrale en janvier 2001.

  

[11]            Les parties conviennent que, sans que cela soit la faute des avocats, les renseignements contenus dans ce paragraphe ne sont pas exacts. M. Khorrami a été interrogé le 18 juin 1999 et non pas le 18 juin 2000. Bien que l'avocat de M. Khorrami ait effectivement écrit le 16 octobre 2000, les premières observations principales formulées au nom de M. Khorrami ont été faites le 4 juin 2000. En fait, la lettre du 16 octobre 2000 est un document d'une page et demie qui demande un rapport d'étape, qui indique que l'alinéa 19(1)l) de la Loi a été jugé constitutionnel par la Section d'appel de l'Immigration, et qui réclame l'accès à toutes les observations soumises au décideur ainsi qu'une entrevue verbale si la crédibilité est en cause.


[12]            La preuve incorrecte a été répétée dans les arguments du ministre fournis en réponse à la demande d'autorisation.

[13]            Cette erreur a eu pour effet de minimiser le retard apparent. Dans une demande de mandamus, la durée de tout retard est une question pertinente parce que la Cour examine, entre autres choses, si le délai fourni pour se conformer à la demande d'exécution de l'obligation a été raisonnable. Voir : Apotex Inc. c. Canada (Procureur général), [1994] 1 C.F. 742 (C.A.). L'importance de fournir des renseignements exacts dans le dossier du demandeur comme dans celui du défendeur est évidente si l'on tient compte du fait que la décision d'accorder l'autorisation se fonde uniquement sur ces documents.

[14]            En l'espèce, la minimisation du délai a eu pour effet pratique de rendre impératif le dépôt d'un mémoire de réponse, afin d'attirer l'attention de la Cour sur l'erreur quand elle a examiné la demande d'autorisation. Dans cette circonstance, j'estime qu'il y a des raisons spéciales d'adjuger à M. Khorrami les dépens concernant la préparation et la signification de cette réponse.

[15]            Je fixe le total des dépens ayant trait au mémoire de réponse et au deuxième mémoire du demandeur au montant de 1 000 $, incluant les débours.


[16]            Les avocats n'ont soumis aucune question aux fins de la certification, et aucune question ne sera donc certifiée.

ORDONNANCE

[17]            LA PRÉSENTE COUR ORDONNE CE QUI SUIT :

1.          Le défendeur versera au demandeur des frais fixés à 1 000 $.

2.          Aucune question n'est certifiée.

« Eleanor R. Dawson »

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                                                                                                             Juge                          

  

Traduction certifiée conforme

Suzanne M. Gauthier, trad. a., LL.L.

  

COUR FÉDÉRALE DU CANADA

SECTION DE PREMIÈRE INSTANCE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

NUMÉRO DU GREFFE :                  IMM-3834-01

INTITULÉ DE LA CAUSE :             Noor Mohammad Khorrami c. MCI

   

LIEU DE L'AUDIENCE :                   Toronto (Ontario)

DATE DE L'AUDIENCE :                 le 24 juillet 2002

MOTIFS DE L'ORDONNANCE

ET ORDONNANCE :                         Madame le juge Dawson

DATE :                                                   le 30 juillet 2002

   

COMPARUTIONS :

  

Micheal Crane                                                     POUR LE DEMANDEUR

Marcel Larouche                                                  POUR LE DÉFENDEUR

   

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

  

Micheal Crane                                                     POUR LE DEMANDEUR

Toronto (Ontario)

  

Morris Rosenberg                                                 POUR LE DÉFENDEUR

Sous-procureur général du Canada

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