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                                                                                                  Date : 20010524

                                                                                       Dossier : IMM-4677-00

                                                                       Référence neutre : 2001 CFPI 523

ENTRE :

                                          ISIDRO MENDEZ-LEYVA

                                                                                                           demandeur

                                                            et

           LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉET DE L'IMMIGRATION

                                                                                                             défendeur

                      MOTIFS DE L'ORDONNANCE ET ORDONNANCE

LE JUGE TREMBLAY-LAMER

[1]         Il s'agit d'une demande de contrôle judiciaire de la décision par laquelle la section du statut de réfugié de la Commission de l'immigration et du statut du réfugié (la Commission) a conclu, le 4 août 2000, que le demandeur n'était pas un réfugié au sens de la Convention.


[2]         Le demandeur est un citoyen mexicain âgé de 29 ans qui a revendiqué le statut de réfugié au sens de la Convention du fait de ses opinions politiques.

[3]         Le demandeur collaborait avec un groupe de guérilla mexicain connu sous le nom d'EPR. Il a notamment fourni à cette organisation des renseignements au sujet de la corruption au sein du gouvernement et il a conduit des membres de l'organisation à leurs « missions » (à six reprises).

[4]         Le demandeur a allégué avoir été enlevé et torturé par la police judiciaire (la PJ) le 17 octobre 1997, après qu'il eut été découvert qu'il avait fourni à l'EPR des documents secrets de la Secretaria de Educacion Publica (la SEP).

[5]         Le demandeur a réussi à s'évader; il est finalement arrivé au Canada le 28 décembre 1997 et a revendiqué le statut de réfugié au sens de la Convention le 16 juillet 1998. La Commission a rejeté la revendication le 4 août 2000 en se fondant sur deux motifs.

1.        Exclusion

[6]         La Commission a statué que le demandeur était exclu de la protection fournie par la Convention en se fondant sur l'alinéa Fa) de l'article premier de la Convention.


[7]         La Commission a conclu que le demandeur avait volontairement joint l'EPR, même s'il savait que l'EPR avait tué des gens, avant et après son adhésion au groupe.

[8]         La Commission a statué qu'en agissant comme chauffeur, le demandeur avait personnellement pris part aux activités d'un groupe qui se livrait à des actes de terrorisme, en sachant fort bien que des gens seraient tués par suite des actions du groupe.

[9]         La Commission a conclu que le demandeur faisait partie d'une organisation qui commettait des actes de terrorisme, sur une base continue, en tant que raison d'être. Elle a fait remarquer que l'EPR avait choisi une stratégie de « raids éclairs » en se livrant à des attaques armées contre des postes de police, des installations militaires et des immeubles gouvernementaux; qu'elle s'était livrée à de petites attaques dans plusieurs États, principalement contre des avant-postes militaires et policiers mexicains, des immeubles publics et des centrales électriques, et que l'organisation avait tué au moins 17 personnes, y compris plusieurs civils.

[10]       Compte tenu des faits susmentionnés, la Commission a statué que le demandeur avait des aspirations communes avec l'EPR. Elle a en outre statué que le demandeur avait à tout le moins aidé activement l'EPR à commettre des crimes contre l'humanité et, par conséquent, qu'il pouvait être tenu responsable de ces crimes à titre de complice. La Commission a en outre conclu qu'à titre de complice, le demandeur était aussi coupable que l'EPR.


2.        Inclusion

[11]       La Commission a conclu qu'en raison de l'insuffisance d'éléments de preuve crédibles ou dignes de foi, il n'y avait pas de chance raisonnable ou de possibilité sérieuse que le demandeur soit persécuté, s'il devait retourner au Mexique, du fait de l'un des motifs énoncés dans la définition de l'expression « réfugié au sens de la Convention » .

[12]       La Commission a conclu que toute l'histoire se rapportant à l'évasion « spectaculaire » du demandeur, lorsqu'il avait été détenu par des agents de la PJ, était trop forcée pour être vraie. Selon elle, il était invraisemblable que, malgré leur piètre condition physique, le demandeur et son ami eussent réussi à maîtriser les agents fortement armés qui les conduisaient, à pousser deux agents en dehors du véhicule hautement surveillé dans lequel ils avaient pris place, à échapper aux quatre autres agents armés qui les pourchassaient, à parcourir trois kilomètres à pied et à prendre l'autobus public vers la ville la plus proche sans être repérés. La Commission a également conclu qu'il était encore plus invraisemblable que le demandeur et son ami aient eu des menottes.


[13]       La Commission a noté une incohérence entre la description que le demandeur avait donnée au sujet de sa détention et le rapport médical fourni par le docteur Claudio Borgono, qui avait examiné le demandeur et qui avait conclu que celui-ci était atteint d'un syndrome de stress post-traumatique. Le demandeur a affirmé avoir été détenu pendant 24 heures alors que, selon le rapport, il avait été [TRADUCTION] « assujetti à des actes de torture pendant environ deux ou trois jours, au mois d'octobre 1997 » .

[14]       La Commission a également noté qu'il s'était écoulé près de huit mois entre le moment où le demandeur était arrivé au Canada et celui où il avait revendiqué le statut de réfugié au sens de la Convention. Elle a rejeté l'explication que le demandeur avait donnée, à savoir qu'il ne connaissait pas les lois canadiennes régissant le statut des réfugiés, étant donné qu'il est avocat et qu'il a censément quitté le Mexique pour chercher la protection internationale à l'extérieur de son pays.

[15]       La Commission a conclu qu'il s'agissait encore une fois d'un point sur lequel le demandeur avait délibérément induit la formation en erreur, compte tenu du fait que, moins d'un mois après être arrivé au Canada, le demandeur avait inscrit sa propre entreprise en Ontario (cabinet d'avocat Mendez) et qu'il avait obtenu deux cartes de crédit, de deux institutions financières distinctes, au Canada.

[16]       De l'avis de la Commission, cela contredisait la déclaration que le demandeur avait faite à l'agent principal avec qui il avait eu une entrevue au point d'entrée, à savoir qu'il venait au Canada dans le seul but de prendre des vacances. Cela contredit en outre la déclaration que le demandeur a faite dans son témoignage oral, selon laquelle il était expressément venu au Canada pour fuir la persécution au Mexique.


[17]       La Commission a conclu qu'il n'y avait pas suffisamment d'éléments de preuve crédibles, fiables et dignes de foi permettant de reconnaître au demandeur le statut de réfugié.

ARGUMENTS DU DEMANDEUR

1.        Exclusion

[18]       Le demandeur soutient que la Commission a commis une erreur en statuant qu'il avait commis des crimes contre l'humanité à titre de complice. Il n'existait pas le moindre élément de preuve montrant que les membres de l'EPR que le demandeur conduisait ou aidait de quelque autre façon commettaient des crimes. La Commission ne pouvait donc pas tirer pareille conclusion en se fondant sur la preuve.

[19]       Rien ne montrait que les armes transportées par les membres de l'EPR que le demandeur conduisait eussent servi à la perpétration de crimes contre l'humanité. Même si les armes étaient utilisées dans des combats contre les soldats de l'État (ce sur quoi il n'existait pas d'éléments de preuve non plus), cela ne constituerait pas un crime contre l'humanité.

[20]       Le demandeur fait remarquer que le seul élément de preuve concernant les activités criminelles de l'EPR dont la Commission a fait mention se rapportait au fait que l'EPR [TRADUCTION] « a[vait] tué au moins 17 personnes, y compris plusieurs civils » (Intelligence Resource Program, 8 août 1998, dossier du demandeur, pages 61 et 62).


[21]       Il n'existait aucun lien entre les décès de ces civils et les actes commis par le demandeur ou ses contacts au sein de l'EPR. La Commission n'a pas conclu que l'un des membres de l'EPR que le demandeur conduisait avait participé à ces massacres ou à d'autres crimes, et compte tenu de la preuve, pareille conclusion ne pouvait pas être tirée.

[22]       En outre, rien ne montrait que le demandeur eût commis des crimes contre la population civile de façon généralisée et systématique au sens de la définition de « crime contre l'humanité » , que ce soit à titre d'auteur principal ou de complice. De plus, rien ne montrait que l'EPR eût tué des civils de la façon ou dans la mesure requise pour que cela constitue un « crime contre l'humanité » .

[23]       Le demandeur affirme que la Commission n'a pu découvrir aucun crime précis auquel il aurait participé. La Commission a conclu à tort que le demandeur avait pris part, à titre de complice, aux présumés « crimes contre l'humanité » en général commis par l'EPR.

2.        Inclusion


[24]       Le demandeur affirme que la Commission a fait des excès de zèle en concluant qu'il n'était pas crédible, comme le montre le fait qu'elle a employé à maintes reprises et gratuitement le mot « spectaculaire » ainsi que le mot « invraisemblable » pour décrire l'évasion. La Commission a mal interprété certains éléments de preuve ou n'a pas tenu compte de certains éléments de preuve, ou encore elle a tiré une conclusion abusive. L'évasion n'avait rien d'invraisemblable.

[25]       Le demandeur soutient que la conclusion que la Commission a tirée au sujet de l'incohérence existant entre la description qu'il avait donnée au sujet de sa détention et le rapport médical fourni par le docteur Claudio Borgono montrait également qu'elle avait examiné « à la loupe » , d'une façon trop vigilante, la preuve qu'il avait soumise.

[26]       Le demandeur déclare que la Commission a commis une erreur en se fondant sur une incohérence existant dans les faits tels qu'ils étaient relatés dans le rapport médical. Le rapport n'a pas été produit en vue d'étayer les faits, mais afin d'établir le diagnostic médical lui-même. La présumée incohérence figurant dans le rapport n'influe pas sur le bien-fondé du diagnostic de syndrome de stress post-traumatique.

[27]       Le demandeur soutient que la conclusion que la Commission a tirée au sujet de l' « inclusion » ne peut pas être confirmée du seul fait qu'il a tardé à présenter sa revendication. Il est en outre soutenu qu'il était déraisonnable pour la Commission de tenir compte des fausses déclarations que le demandeur avait faites au point d'entrée, à savoir qu'il voulait uniquement être admis au Canada à titre de visiteur. Le demandeur a témoigné qu'il ne savait pas qu'il était possible de revendiquer le statut de réfugié au point d'entrée.


[28]       En outre, il était déraisonnable de conclure à l'absence de crédibilité du demandeur, en ce qui concerne les événements qui s'étaient produits au Mexique, en se fondant sur une « tendance à tromper les autorités canadiennes au sujet de sa raison de venir au Canada » .

[29]       Même si, au Mexique, le demandeur est avocat, il est soutenu que cela ne constituait pas un fondement raisonnable pour rejeter l'explication qu'il avait donnée, à savoir qu'il avait tardé à revendiquer le statut de réfugié parce qu'il ne connaissait pas les lois canadiennes régissant le statut des réfugiés.

ARGUMENTS DU DÉFENDEUR

1.        Exclusion

[30]       Étant donné que la Commission a conclu que l'EPR avait commis des actes de terrorisme sur une base continue, en tant que raison d'être, le défendeur soutient que le fait que le demandeur était complice de « crimes contre l'humanité » est présumé, puisqu'il était membre d'une organisation qui vise principalement des fins limitées et brutales.


[31]       De plus, le défendeur allègue que l'EPR commettait des crimes contre l'humanité en tuant d'une façon continue des civils dans le cadre des attaques systématiques auxquelles l'organisation se livrait à l'endroit du gouvernement mexicain. Le défendeur fait également remarquer que le demandeur était au courant des activités violentes de l'EPR, qu'il avait fourni des documents secrets à l'EPR, qu'il avait agi comme chauffeur pour cette organisation et qu'il croyait fermement que les membres de l'EPR qu'il conduisait avaient au moins une fois transporté des armes.

[32]       Le défendeur soutient que, par conséquent, la complicité du demandeur, en ce qui concerne les « crimes contre l'humanité » , est présumée du fait que celui-ci avait connaissance des activités violentes de l'organisation. qu'il avait néanmoins participé aux activités de celle-ci et qu'il partageait les fins poursuivies par l'organisation.

2.        Inclusion

[33]       Il est soutenu que la Commission n'avait aucune obligation légale de se demander ou de déterminer si le demandeur pouvait être inclus dans la définition de « réfugié au sens de la Convention » , si ce n'était du fait qu'il existe des motifs sérieux de croire que les paramètres de la clause d'exclusion figurant à l'alinéa Fa) de l'article premier de la Convention s'appliquaient au demandeur.

[34]       Le défendeur affirme que la décision de la Commission est fondée sur les conclusions de fait qu'elle a tirées et, en particulier, sur la crédibilité du demandeur; que ces conclusions n'ont pas été tirées d'une façon manifestement déraisonnable et que la présente cour ne devrait donc pas intervenir.


[35]       Le défendeur affirme qu'il est approprié et raisonnable pour la Commission de rendre une décision défavorable au sujet de la crédibilité du demandeur, compte tenu des contradictions et des incohérences existant dans son histoire, ou du fait que l'histoire est tout simplement invraisemblable.

LES POINTS LITIGIEUX

La Commission a-t-elle commis une erreur en excluant le demandeur en vertu de l'alinéa Fa) de l'article premier de la Convention?

La Commission a-t-elle fondé sa décision sur une conclusion de fait erronée tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments dont elle disposait?

ANALYSE

[36]       La question de savoir si un acte est visé par la définition de « crime contre l'humanité » est une question de droit; la norme de contrôle est donc celle de la décision correcte (Gonzalez c. MCI (1994), 24 Imm.L.R. (2d) 229 (C.A.F.); Pushpanathan c. MCI, [1998] 1 R.C.S. 982).

[37]       La définition de « réfugié au sens de la Convention » exclut « les personnes soustraites à l'application de la Convention par les sections E ou F de l'article premier de celle-ci [...] » (paragraphe 2(1) de la Loi sur l'immigration, L.R.C. (1985), ch. I-2).


[38]       L'alinéa Fa) de l'article premier de la Convention est ainsi libellé :

Les dispositions de cette Convention ne seront pas applicables aux personnes dont on aura des raisons sérieuses de penser :

a) qu'elles ont commis un crime contre la paix, un crime de guerre ou un crime contre l'humanité, au sens des instruments internationaux élaborés pour prévoir des dispositions relatives à ces crimes; [...]

[39]       L'un des instruments qui porte sur la question des crimes contre l'humanité est le Statut du Tribunal militaire international (Entente pour la poursuite et le châtiment des grands criminels de guerre des puissances de l'Axe européen) [82 R.T.N.U. 279]. L'expression « crimes contre l'humanité » est définie comme suit à l'article 6 du Statut :

Les crimes contre l'humanité, c'est-à -dire l'assassinat, l'extermination, la réduction en esclavage, la déportation, et tout autre acte inhumain commis contre toutes populations civiles, avant ou pendant la guerre, ou bien les persécutions pour des motifs politiques, raciaux ou religieux lorsque ces actes ou persécutions, qu'ils aient constitué ou non une violation du droit interne du pays où ils ont été perpétrés, ont été commis à la suite de tout crime rentrant dans la compétence du Tribunal, ou en liaison avec ce crime.

[40]       L'article 6 du Statut énonce également une définition des personnes incluses dans la perpétration de crimes de guerre et de crimes contre l'humanité :

Les dirigeants, organisateurs, provocateurs ou complices qui ont pris part à l'élaboration ou à l'exécution d'un plan concerté ou d'un complot pour commettre l'un quelconque des crimes ci-dessus définis sont responsables de tous les actes accomplis par toutes personnes, en exécution de ce plan.

[41]       La Cour d'appel fédérale a déjà examiné la question de l'étendue de la participation nécessaire pour qu'une personne soit incluse à titre de « complice » d'un crime contre l'humanité.


[42]       La Cour a statué que la complicité peut être établie du simple fait de l'appartenance à une organisation qui vise principalement des fins limitées et brutales (Ramirez c. MEI, [1992] 2 C.F. 306 (C.A.F.)).

[43]       Lorsque la question de l'appartenance à une organisation est examinée, la première étape consiste à déterminer quel type d'organisation est en cause. Si les principales fins de l'organisation sont atteintes au moyen de la perpétration de crimes contre l'humanité ou de crimes de guerre, l'appartenance est habituellement suffisante pour établir la complicité (Nejad c. MCI (1994), 85 F.T.R. 312 (C.F. 1re inst.); Saridag c. MCI (1994), 85 F.T.R. 307 (C.F. 1re inst.).

[44]       En l'espèce, le seul élément de preuve dont la Commission a fait mention à l'appui de la conclusion selon laquelle l'ERP est « une organisation dont la raison d'être consistait en partie à commettre des actes terroristes sur une base continue » se lit comme suit :

[TRADUCTION]

Le Partido Democratico Popular Revolucionario (le PDPR) et son aile militaire, l'Ejercito Popular Revolucionario (l'EPR - l'Armée révolutionnaire populaire) sont actifs au Mexique. L'Armée révolutionnaire populaire (l'EPR) s'est affirmée dans l'État de Guerrero, situé dans le sud-ouest, le 28 juin 1996 au cours d'une cérémonie marquant l'anniversaire du massacre de paysans locaux par la police étatique. L'EPR a mené de petites attaques dans plusieurs États, la plupart contre des avant-postes militaires et de police mexicains, des édifices publics et des centrales électriques. Le groupe a tué au moins 17 personnes, y compris plusieurs civils. Le gouvernement Zedillo a qualifié l'EPR de groupe terroriste.

Intelligence Resource Program, 8 août 1998, dossier du demandeur, page 61.


[45]       À mon avis, cet élément de preuve ne peut pas étayer la conclusion selon laquelle l'ERP est une organisation visant des fins limitées et brutales. Il est établi que l'EPR se livre à des actes de violence (mais pas nécessairement à des crimes contre l'humanité), de temps en temps, en vue d'atteindre ses fins politiques. La simple appartenance à une organisation qui commet sporadiquement des abus ne suffit pas pour qu'une personne soit considérée comme complice d'un crime contre l'humanité, comme l'a dit la Cour d'appel fédérale dans l'arrêt Ramirez, précité (à la page 317) :

Quel est, alors, le degré de complicité requis? La première conclusion à laquelle je parviens est que la simple appartenance à une organisation qui commet sporadiquement des infractions internationales [crimes de guerre ou crimes contre l'humanité] ne suffit pas, en temps normal, pour exclure quelqu'un de l'application des dispositions relatives au statut de réfugié.

[...]

Toutefois, lorsqu'une organisation vise principalement des fins limitées et brutales, comme celles d'une police secrète, il paraît évident que la simple appartenance à une telle organisation puisse impliquer nécessairement la participation personnelle et consciente à des actes de persécution. [Non souligné dans l'original.]

[46]       La Cour a également statué que le fait d'avoir connaissance des activités violentes de l'organisation et d'être néanmoins membre de l'organisation et le fait de partager les fins poursuivies par l'organisation établissent le degré de participation nécessaire pour être inclus à titre de « complice » d'un crime contre l'humanité (Sumaida c. MCI, [2000] 3 C.F. 66 (C.A.F.).


[47]       Toutefois, en l'espèce, je ne suis pas convaincue que la Commission se soit demandé si les activités criminelles de l'EPR constituaient des crimes contre l'humanité; la Commission a simplement dit qu'il s'agissait d' « une organisation dont la raison d'être consistait en partie à commettre des actes terroristes sur une base continue » sans mentionner d'autres éléments de preuve.

[48]       Dans l'arrêt Sivakumar c. MCI, [1994] 1 C.F. 433 (C.A.F.), la Cour d'appel fédérale a statué qu'une autre qualification juridique doit être satisfaite pour que des crimes soient considérés comme des « crimes contre l'humanité » (aux pages 442 et 443) :

Certaines autres qualifications juridiques sont communément reconnues comme faisant partie de la définition de crimes contre l'humanité dans la sphère internationale. Il faut qu'ils soient commis de façon généralisée et systématique [...]. Comme l'a fait remarquer un commentateur canadien, Joseph Rikhof, op. cit., à la page 30 :

[TRADUCTION] Cette condition ne signifie pas qu'un crime contre l'humanité ne puisse pas être commis contre une personne, mais afin de faire qualifier un crime interne, tel le meurtre, de crime international, il faut que cet élément supplémentaire soit présent. Cet élément réside dans ce que la victime appartient à un groupe qui a été, de façon systématique et généralisée, la cible d'un des crimes susmentionnés.

[49]       Dans ce cas-ci, la Commission ne s'est pas demandé si les victimes de l'EPR appartenaient à un groupe qui avait été, de façon systématique et généralisée, la cible de cette organisation plutôt que d'être des victimes isolées.

[50]       Je conclus donc que la Commission a commis une erreur de droit en excluant le demandeur de la protection de la Convention en se fondant sur l'alinéa Fa) de l'article premier de la Convention.


[51]       J'examinerai maintenant la conclusion que la Commission a tirée au sujet du bien-fondé de la crainte qu'éprouve le demandeur d'être persécuté au Mexique.

[52]       Le demandeur conteste les conclusions de fait de la Commission, en particulier la conclusion défavorable de crédibilité, en soutenant qu'elle a été tirée de façon abusive et arbitraire. Je ne suis pas d'accord. La Commission a examiné et soupesé tous les éléments de preuve et elle a prononcé des motifs détaillés au sujet des contradictions et des invraisemblances existant dans l'histoire du demandeur. Il n'existe donc en l'espèce aucun motif justifiant l'intervention de la présente cour.

[53]       Pour ces motifs, la demande de contrôle judiciaire est rejetée.

                       « Danièle Tremblay-Lamer »                

                                                                                                                                                    Juge                                    

Toronto (Ontario)

le 24 mai 2001

Traduction certifiée conforme

Suzanne M. Gauthier, LL.L., Trad .a.


                                             COUR FÉDÉ RALE DU CANADA

                                  AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

No DU DOSSIER :                                  IMM-4677-00

INTITULÉ DE LA CAUSE :    ISIDRO MENDEZ-LEYVA

                                                                                                                                         demandeur

et

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ

ET DE L'IMMIGRATION

                                                                                                                                          défendeur

LIEU DE L'AUDIENCE :                      TORONTO (ONTARIO)

DATE DE L'AUDIENCE :                    LE MERCREDI, 23 MAI 2001

MOTIFS DE L'ORDONNANCE

ET ORDONNANCE PAR :                    MADAME LE JUGE TREMBLAY-LAMER

DATE DES MOTIFS :              LE JEUDI, 24 MAI 2001

ONT COMPARU

M. Lehrer                                                 pour le demandeur

Mme Hashemi                                            pour le défendeur

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

VanderVennen Lehrer              pour le demandeur

Avocats

45, rue Nicholas

Toronto (Ontario)

M4Y 1W6

Morris Rosenberg                                   pour le défendeur

Sous-procureur général du Canada


                   COUR FÉDÉ RALE DU CANADA

                                                                         Date : 20010524

                                                             Dossier : IMM-4677-00

Entre :

ISIDRO MENDEZ-LEYVA

                                                                                     demandeur

et

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ

ET DE L'IMMIGRATION

                                                                                      défendeur

                 MOTIFS DE L'ORDONNANCE

                         ET ORDONNANCE

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