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Date : 20010626

Dossier : T-975-00

Référence neutre: 2001 CFPI 704

Entre :

                                                         LAURENT RIVARD

                                                                                                                         Demandeur

                                                                      Et:

                                       PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA

                                                                                                                            Défendeur

                                              MOTIFS DE L'ORDONNANCE

LE JUGE NADON

[1]                Il s'agit en l'espèce d'une demande de contrôle judiciaire à l'encontre d'une décision rendue le 12 avril 2000 par le Tribunal des anciens combattants (révision et appel) dans le cadre d'un réexamen de la décision rendue le 28 janvier 1998 par ce même Tribunal qui refusait au demandeur le droit à une pension.


FAITS

[2]                Le demandeur, un ancien combattant, a été enrôlé dans les forces actives de la Seconde Guerre mondiale du 24 juin 1943 au 6 février 1946. En novembre 1945, au cours de son service, le demandeur s'est plaint de nervosité et d'autres symptômes. À la suite d'un diagnostic de réaction psychonévrotique, il a été traité dans une unité psychiatrique. Le 5 février 1946, au moment de l'examen médical pour fins de libération, le diagnostic de psychonévrose mixte chronique a été réitéré. Après sa libération, le demandeur s'est plaint à nouveau, en 1950 et 1964, de symptômes psychiatriques. À partir de 1973, le demandeur a été périodiquement traité pour une anxiété chronique.

[3]                Le 19 septembre 1994, la Commission canadienne des pensions a statué que l'anxiété chronique dont souffrait le demandeur était imputable au service militaire accompli au cours de la Seconde Guerre mondiale, et qu'un droit à pension était donc indiqué en vertu du paragraphe 21(1) de la Loi sur les pensions, L.R.C. 1985, c. P-6. Par conséquent, la Commission a accordé une pension au demandeur rétroactivement au 27 avril 1993, conformément au paragraphe 39(1) de la Loi sur les pensions, supra.


[4]                Le 7 mars 1997, le Comité de révision (examen) du Tribunal des anciens combattants, ayant passé en revue la décision rendue par la Commission canadienne des pensions, a modifié la date d'entrée en vigueur du droit à pension du demandeur et l'a fixée au 19 septembre 1991.

[5]                Le 16 avril 1997, le demandeur a déposé une demande de pension en vertu du paragraphe 21(5) de la Loi sur les pensions, supra à l'égard d'une maladie coronarienne qui, selon lui, était consécutive à son affectation d'anxiété chronique déjà pensionnée. À l'appui de sa demande, il a soumis le rapport du Dr Jacques Voyer, psychiatre, qui concluait que la condition cardiaque du demandeur résultait vraisemblablement du syndrome anxieux chronique.

[6]                Le 2 juin 1997, le ministre des Anciens combattants (le « Ministre » ) a refusé la demande de pension du demandeur puisque, à son avis, la maladie coronarienne ne donnait pas droit à une pension car elle n'était pas consécutive à l'anxiété chronique. Les conclusions du Ministre à ce sujet sont les suivantes :

Maladie coronarienne

Vous alléguez que votre maladie coronarienne est consécutive à l'anxiété chronique qui ouvre déjà droit à une pension.

Le Dr Jacques Voyer donne à entendre dans un rapport psychiatrique en date du 31 mars 1997 que votre maladie coronarienne est fort probablement due à votre anxiété chronique.


Un conseiller médical du Ministère a fait savoir qu'il n'existait pas de lien entre l'anxiété chronique et la maladie coronarienne. Voici des facteurs de risque connus de la maladie cardiaque artérioscléreuse : hypertension, diabète sucré, taux élevé de cholestérol, tabagisme, antécédents de maladies cardiaques dans la famille, sexe masculin, hommes de plus de 45 ans et manque d'exercice. Les troubles psychiatriques ne constituent pas un facteur de risque de la maladie cardiaque.

Le Ministère accepte l'avis du Dr Jacques Voyer au sujet de la cause de votre maladie coronarienne, mais ses observations à ce sujet ne sont pas corroborées par les ouvrages médicaux généraux au sujet des causes et des facteurs de risque connus de la maladie coronarienne.

Le droit à une pension d'invalidité vous est donc refusé en vertu du paragraphe 21(5) de la Loi sur les pensions.

[7]                Le 23 septembre 1997, le Comité de révision (examen) du Tribunal des anciens combattants a maintenu la décision du Ministre, pour les motifs suivants :

Les membres du comité sont prêts à accepter l'avis du Dr Voyer au sujet de la cause de la maladie coronarienne, mais ces observations ne sont pas corroborées par les ouvrages médicaux généraux au sujet des causes et des facteurs de risques connus de la maladie coronarienne. Par conséquent, basé sur les données médicales dans le dossier du vétéran, les membres du comité n'ont pu trouver de preuves médicales pouvant relier l'affectation en cause, même d'une façon minime, à l'affection déjà pensionnée. L'affection n'est pas pensionable [sic] en vertu du paragraphe 21(5) de la Loi sur les pensions.

[8]                Le 28 janvier 1998, le Tribunal des anciens combattants (révision et appel) (le « Tribunal » ) a confirmé la décision du Comité de révision en statuant ce qui suit :

Il a été accepté dans le passé que le stress peut jouer un rôle dans le déclenchement d'une attaque cardiaque qui elle-même peut aggraver d'une manière minimale la maladie coronarienne. Dans ce cas-ci, il n'y a pas de preuve que M. Rivard n'est [sic] jamais souffert d'attaque cardiaque. Le comité en se référant à la Table des invalidités mentionne qu'il n'existe pas de lien entre les affectations psychiatriques et les maladies coronariennes. Donc, dans les circonstances, le comité ne peut accorder de droit à pension.


[9]                Le 21 septembre 1999, le demandeur a présenté au Tribunal une demande de réexamen de la décision du 28 janvier 1998, aux termes du paragraphe 32(1) de la Loi sur le Tribunal des anciens combattants (révision et appel), L.C. 1995, c. 18 (la « LTAC » ). À l'appui de cette demande de réexamen, le demandeur a déposé une nouvelle preuve médicale, soit une expertise préparée par le Dr François Sestier, un cardiologue.

[10]            Le 12 avril 2000, le Tribunal a maintenu sa décision en concluant que la nouvelle preuve présentée par le demandeur ne lui permettait pas de modifier sa décision antérieure. Le 2 juin 2000, le demandeur a déposé la présente demande de contrôle judiciaire à l'encontre de la décision du 12 avril 2000 rendue par le Tribunal.

QUESTION EN LITIGE

[11]            Le demandeur propose deux questions en litige, dont une à plusieurs volets. Toutefois, à mon avis, la véritable question qui se pose en l'espèce est à savoir si le Tribunal a commis une erreur dans sa décision du 12 avril 2000 qui permettrait à cette Cour d'intervenir.

PRÉTENTIONS DU DEMANDEUR


[12]            Le demandeur soutient que le Tribunal, aux termes de l'article 3 de la LTAC, se devait d'interpréter la législation de façon large. Il prétend également que le Tribunal, en vertu de l'article 39 de cette même loi, avait l'obligation de tirer des circonstances et des éléments de preuve les conclusions les plus favorables possibles, d'accepter tout élément de preuve non contredit qui lui semblait vraisemblable en l'occurrence et de trancher en faveur du demandeur toute incertitude quant au bien-fondé de sa demande.


[13]            Le demandeur allègue que le Tribunal a rendu sa décision sur des conclusions de faits tirées de façon abusive et sans tenir compte des divers éléments de preuve dont il disposait. Selon le demandeur, le Tribunal a rejeté abusivement et sans considération sérieuse l'article publié dans la revue Circulation sur lequel s'est appuyé le Dr Sestier dans son rapport. Le demandeur soutient également que le Tribunal a conclut erronément que l'article n'était pas une étude intégrée à la littérature médicale reconnue ni à des ouvrages médicaux de référence sans considérer la valeur scientifique de l'article. De plus, il maintient que le Tribunal a établi sans motif valable que l'opinion non contredite du Dr Sestier ne pouvait être considérée comme étant représentative du consensus médical sur cette question. Selon le demandeur, le Tribunal a également négligé de tenir compte du fait que l'opinion du Dr Sestier était corroborée par l'expertise médicale du Dr Voyer.

[14]            Finalement, le demandeur fait valoir que le Tribunal, dans une décision antérieure, a déjà reconnu un degré de relation entre la maladie cardiovasculaire et le stress émotionnel chez un patient.

PRÉTENTIONS DU DÉFENDEUR

[15]            Le défendeur soumet d'abord que la norme de contrôle applicable en l'espèce devrait être celle de la décision manifestement déraisonnable (MacDonald c. Canada (Procureur général) (1999), 164 F.T.R. 42 (1re inst.) au par. 21). Conséquemment, le défendeur soutient que cette Cour ne devrait intervenir que si le demandeur réussit à démontrer que la décision rendue par le Tribunal comporte une erreur de droit ou est déraisonnable, arbitraire ou absurde au point de ne pas pouvoir s'appuyer sur la preuve au dossier (Hall c. Canada (Procureur général) (1998), 152 F.T.R. 58 (1re inst.); Hunt c. Canada (Procureur général) (1998), 145 F.T.R. 96 (1re inst.) au par. 8).


[16]            Quant à la révision de la décision du Tribunal, le défendeur note d'abord que le Dr Sestier ne peut lui-même affirmer en toute certitude que c'est l'état anxieux du demandeur qui a accéléré l'apparition de son problème coronarien, puisqu'il indique dans son rapport que l'état anxieux chronique du demandeur a probablement (le défendeur souligne) accéléré le processus artérioscléreux chez le demandeur.

[17]            Le défendeur soutient ensuite que les auteurs de l'article dans la revue Circulation reconnaissent que ce qu'ils avancent est nouveau. Le défendeur fait également valoir que les études mentionnées dans l'article ne visent pas spécifiquement la question en l'espèce, soit le lien entre l'état d'anxiété chronique et l'accélération de l'apparition de maladie coronarienne, mais plutôt le lien entre « anxiety disorders » et « cardiac death » .

[18]            Par conséquent, le défendeur soumet qu'il n'était pas déraisonnable pour le Tribunal d'accorder peu de valeur à l'opinion du Dr Sestier. De plus, compte tenu de la preuve au dossier et de tous les facteurs reconnus de risque de maladie coronarienne déjà présents chez le demandeur, le défendeur soutient qu'il n'était pas déraisonnable pour le Tribunal de conclure que l'anxiété chronique du demandeur n'avait joué aucun rôle dans l'accélération de l'apparition de sa maladie coronarienne.


[19]            Finalement, le défendeur soutient, compte tenu de l'ensemble de la preuve au dossier, que la conclusion du Tribunal n'est pas déraisonnable et que le Tribunal n'a commis aucune erreur de droit lorsqu'il a rendu sa décision.

ANALYSE

A.        Le cadre législatif

[20]            Le Tribunal des anciens combattants (révision et appel), créé par la LTAC, est depuis sa création le seul tribunal de révision et d'appel pour les pensions d'anciens combattants. Les articles 3 et 39 de la LTAC prévoient les règles générales d'interprétation et de preuve s'appliquant aux demandes de pension :

3. Les dispositions de la présente loi et de toute autre loi fédérale, ainsi que de leurs règlements, qui établissent la compétence du Tribunal ou lui confèrent des pouvoirs et fonctions doivent s'interpréter de façon large, compte tenu des obligations que le peuple et le gouvernement du Canada reconnaissent avoir à l'égard de ceux qui ont si bien servi leur pays et des personnes à leur charge.

39. Le Tribunal applique, à l'égard du demandeur ou de l'appelant, les règles suivantes en matière de preuve :

a) il tire des circonstances et des éléments de preuve qui lui sont présentés les conclusions les plus favorables possible à celui-ci;

b) il accepte tout élément de preuve non contredit que lui présente celui-ci et qui lui semble vraisemblable en l'occurrence;

c) il tranche en sa faveur toute incertitude quant au bien-fondé de la demande.

Il est également important de mentionner l'article 31 de la LTAC, qui contient une clause privative :


31. La décision de la majorité des membres du comité d'appel vaut décision du Tribunal; elle est définitive et exécutoire.

ainsi que le paragraphe 32(1) de la LTAC, qui permet le réexamen d'une demande :

32. (1) Par dérogation à l'article 31, le comité d'appel peut, de son propre chef, réexaminer une décision rendue en vertu du paragraphe 29(1) ou du présent article et soit la confirmer, soit l'annuler ou la modifier s'il constate que les conclusions sur les faits ou l'interprétation du droit étaient erronées; il peut aussi le faire sur demande si l'auteur de la demande allègue que les conclusions sur les faits ou l'interprétation du droit étaient erronées ou si de nouveaux éléments de preuve lui sont présentés.

De plus, l'article 38 de la LTAC permet au Tribunal de demander l'avis d'un expert médical :

38. (1) Pour toute demande de révision ou tout appel interjeté devant lui, le Tribunal peut requérir l'avis d'un expert médical indépendant et soumettre le demandeur ou l'appelant à des examens médicaux spécifiques.

(2) Avant de recevoir en preuve l'avis ou les rapports d'examens obtenus en vertu du paragraphe (1), il informe le demandeur ou l'appelant, selon le cas, de son intention et lui accorde la possibilité de faire valoir ses arguments.

Enfin, l'alinéa 21(1)(a) et le paragraphe 21(5) de la Loi sur les pensions, supra, sont également pertinents en l'espèce :

21. (1) En ce qui concerne le service militaire accompli pendant la Première Guerre mondiale ou pendant la Seconde Guerre mondiale, et sous réserve du paragraphe (2) :

a) des pensions sont, sur demande, accordées aux membres des forces ou à leur égard, conformément aux taux prévus à l'annexe I pour les pensions de base ou supplémentaires, en cas d'invalidité causée par une blessure ou maladie - ou son aggravation - survenue au cours du service militaire ou attribuable à celui-ci;

[...]


(5) En plus de toute pension accordée au titre des paragraphes (1) ou (2), une pension est accordée conformément aux taux indiqués à l'annexe I pour les pensions de base ou supplémentaires, sur demande, à un membre des forces, relativement au degré d'invalidité supplémentaire qui résulte de son état, dans le cas où :

a) d'une part, il est admissible à une pension au titre des alinéas (1)a) ou (2)a), ou a subi une blessure ou une maladie - ou une aggravation de celle-ci - qui aurait donné droit à une pension à ce titre si elle avait entraîné une invalidité;

b) d'autre part, il est frappé d'une invalidité supplémentaire résultant, en tout ou en partie, de la blessure, maladie ou aggravation qui donne ou aurait donné droit à la pension.

B.         La norme de contrôle

[21]            Le juge Cullen, dans l'affaire MacDonald, supra, a conclu ce qui suit en ce qui concerne la norme de contrôle à appliquer lorsque la Cour doit réviser une décision du Tribunal des anciens combattants, et ce, au paragraphe 21 :

Lorsque la Cour est saisie d'une demande de contrôle judiciaire, elle ne peut pas substituer sa propre décision à la décision de l'office ou du tribunal qui est à l'étude. Comme le cadre législatif confère une compétence exclusive au Tribunal des anciens combattants (révision et appel) et comme la clause privative rend ses décisions définitives et exécutoires, la norme de contrôle applicable est celle de la décision manifestement déraisonnable : Weare c. Canada (Procureur général) (T-347-97, 11 août 1998). Par conséquent, la Cour ne peut intervenir que si la décision contestée est fondée sur une erreur de droit ou sur une conclusion de fait erronée, tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments soumis au Tribunal : Hall c. Canada (Procureur général) (T-2267-97, 22 juin 1998).

La norme de contrôle à appliquer en l'espèce est donc celle de la décision manifestement déraisonnable, comme l'a indiqué le défendeur.

C.        La décision du Tribunal


[22]            Selon l'article 39 de la LTAC, le Tribunal doit accepter tout élément de preuve présenté par le demandeur qui n'est pas contredit et qui lui semble vraisemblable. Il doit également tirer les conclusions les plus favorables au demandeur. Dans l'affaire MacDonald, supra, le juge Cullen a tenu les propos suivants à ce sujet au paragraphe 29 :

Il est mentionné dans la jurisprudence que le Tribunal doit accepter les éléments de preuve médicaux non contredits qui lui semblent vraisemblables dans les circonstances; toutefois, il peut rejeter ces éléments de preuve s'il est saisi d'une preuve contraire ou s'il fournit des motifs touchant la vraisemblance : Re Hornby (1993), 63 F.T.R. 188 (1re inst.); King. c. Canada (Tribunal des anciens combattants (révision et appel)) (1997), 138 F.T.R. 15 (1re inst.); et Moar, précité.

[23]            Donc, si la preuve n'est pas contredite et que le Tribunal ne la juge pas invraisemblable ou non-crédible, il se doit, conformément à l'article 39, de l'accepter. Dans l'affaire Wood c. Canada (Procureur général), [2001] F.C.J. No. 52 (1re inst.), le juge MacKay a indiqué ce qui suit à ce sujet, au paragraphe 28 :

The Board may reject the applicant's evidence when it has before it contradictory medical evidence. However, while there may be an absence of evidence in the form of definitive medical documentation about the injury claimed, where there is no contradictory evidence and the Board does not accept the applicant's evidence without explanation of that, it commits an error that goes to jurisdiction [...]. A decision of the Board that errs in the exercise of its jurisdiction, is unreasonable and warrants intervention by the Court. The standard of patent unreasonableness, in my opinion, is not apt if the error concerns the exercise of the Board's jurisdiction.[je souligne]

[24]            De plus, dans l'affaire Brychka c. Canada (Procureur général) (1998), 141 F.T.R. 258 (1re inst.), le juge MacKay résume ainsi les choix qui s'offrent au Tribunal, aux paragraphes 20 et 25 :


Je conviens avec l'intimé que le Tribunal peut écarter une preuve médicale lorsque le dossier renferme des preuves médicales qui sont contradictoires. [...]

Comme dans l'affaire Moar, j'estime qu'en l'espèce il appartient au Tribunal soit de conclure explicitement à la non-crédibilité de cette preuve médicale produite à l'appui de la demande du requérant, soit de recueillir ses propres preuves médicales concernant la possibilité que cette affection serait due aux effets du stress, soit encore, compte tenu des articles 3 et 39 de la LTAC, d'accueillir favorablement la preuve non contredite présentée par le requérant. [je souligne]

[25]            Il ne fait aucun doute qu'il appartient au Tribunal d'évaluer la preuve qui se trouve devant lui et d'y attribuer le poids qu'il considère approprié. Toutefois, l'évaluation de la preuve doit toujours se faire à la lumière des articles 3 et 39 de la LTAC, ce qui signifie que le Tribunal se doit d'accepter tout élément de preuve présenté, à moins qu'il ne fasse une détermination quant au manque de vraisemblance ou de crédibilité de la preuve ou à moins que cette preuve soit contredite par d'autre preuve au dossier. Il m'apparaît évident à la lecture de la jurisprudence, en particulier des affaires Wood, supra et Brychka, supra, citées ci-haut, que la preuve médicale contradictoire doit être au dossier.

[26]            Il est clair à la lecture des motifs du Tribunal que celui-ci a dûment considéré la preuve soumise par le demandeur, soit le rapport médical du Dr. François Sestier. À la page 4 de ses motifs le Tribunal conclut comme suit:


Le comité note que le Dr. Sestier répond à quelques objections soulevées dans la décision du comité d'appel sur le diagnostic de l'affection à l'étude puisque cette fois-ci il diagnostique de façon claire que l'appelant souffre d'une maladie artérioscléreuse. Cependant le comité ne peut trouver de rapports médicaux indiquant que l'angor pectoris a débuté en 1989. Le premier diagnostic au dossier de l'affection à l'étude de maladie coronarienne a été posé par le docteur Jacques Voyer, psychiatre.

Le comité considère que les études sur lesquelles le docteur Sestier a basé son opinion ne sont pas des études intégrées à la littérature médicale reconnue ni à des ouvrages médicaux de référence. Donc son opinion ne peut être considérée comme étant représentative du consensus médical sur cette question.

De plus le comité a pris note de l'ensemble des facteurs de risque que comporte l'appelant. Le comité a aussi noté l'âge avancé de l'appelant au moment du diagnostic. Le comité est toujours d'avis sans aucun doute que l'affection d'anxiété chronique pour laquelle l'appelant reçoit un droit à pension, n'a joué aucun rôle dans l'accélération de la maladie coronarienne. Le droit à pension n'est pas indiqué.

[27]            Tel qu'il appert des motifs ci-haut, le Tribunal n'a donné aucun poids à l'opinion du Dr. Sestier, vu que celle-ci ne représentait pas, à son avis, le consensus médical sur la question. Par conséquent, vu les facteurs de risque rattachés au demandeur, le Tribunal en arrive à la conclusion que l'affection d'anxiété chronique n'a pas accéléré l'apparition de sa maladie coronarienne.

[28]            Il est à noter qu'au soutien de son opinion, le Dr. Sestier réfère à un article publié dans la revue Circulation par les auteurs Rozanski, Blumenthal et Caplan. Cet article, publié le 27 avril 1999, est joint à son opinion. Les remarques suivantes du Dr. Sestier, qui apparaissent à la page 7 de son opinion, sont pertinentes et je les reproduis:


Après avoir vu en expertise Monsieur Laurent Rivard, il m'est demandé de préciser s'il y a une relation entre son état d'anxiété chronique, qui était reconnu par le Tribunal des Anciens Combattants du Canada, et qui a fait l'objet d'une expertise en psychiatrie qui m'a été communiquée, et la maladie coronarienne de Monsieur Rivard. Classiquement, les facteurs de risque favorisant la maladie coronarienne sont principalement le tabagisme, l'hypercholestérolémie et l'hypertension artérielle. M. Rivard aurait deux de ces facteurs de risque puisqu'il serait hyperlipémique et qu'il aurait fumé par le passé un paquet de cigarettes par jour. Il faut considérer également qu'il est également diabétique et que ceci est un autre facteur de risque pour la maladie coronarienne.

[29]            Je reproduis aussi les remarques du Dr. Sestier qui apparaissent à la page 9 de son opinion:

Il faut en conclure qu'il y a actuellement une évidence dans la littérature d'un lien beaucoup plus scientifique et réel entre un état anxieux et la maladie coronarienne.

Il est clair que Monsieur Rivard avait des facteurs de risque, mais il est également significatif que son état anxieux chronique qui a nécessité une hospitalisation en psychiatrie après la guerre, a probablement accéléré le processus artérioscléreux chez lui.

[30]            Le Dr. Sestier conclut alors que le demandeur a une maladie coronarienne associée à son anxiété chronique, qui ouvrirait le droit à une indemnisation de 50%.

[31]            Au soutien, inter alia, de sa conclusion que l'article dans la revue Circulation ne constitue pas une étude intégrée à la littérature médicale reconnue ou à des ouvrages médicaux de référence, le Tribunal avait en preuve une opinion médicale en date du 22 mai 1997. Vu l'importance de cette opinion, je la reproduis intégralement:

                                                            PROTECTED


                                          PENSION MEDICAL ADVISORY

NAME:                    Rivard, Laurent H.

File #:                       4988382

SERVICE #:             r259445

CLAIMED CONDITION(S) AND SECTION OF PENSION ACT:

1.             Maladie Coronarienne 21(5)

2.             Reflux Gastro-Oesophagien 21(5)

CONSULTATION REQUEST:

Entitlement/assessment                           yes

REASONS FOR CONSULTATION REQUEST:

This man claims that his coronary disease and reflux gastro-esophagitis are consequential to his pensioned condition of Chronic Anxiety.

A Psychiatrist report dated 31 March, 1997, suggests that his coronary condition is very likely the result of his chronic anxiety.

A Physician's Statement dated 09 September, 1996, reveals that the reflux problem could be caused by the cardizem and that the chronic anxiety could have contributed to the reflux problems.

Does the Department recognize a consequential relationship between coronary disease, reflux gastro-esophagitis and the pensioned condition of Chronic Anxiety?

   Renilda MacRae - 20 May, 1997   

   Adjudicator's Signature & Date

MEDICAL OPINION:

There is no relationship between any of these conditions. Psychiatric disorders are not a risk factor for ASHD. The recognized risk factors are well known. GE Reflux is caused by laxity of the GE sphincter; it is not caused by, or in any way related to, any psychotic condition, and is not caused the calcium ion blocker Cardizem.(used in Rx of ASHD).

                                           -- 22-5-97                 Medical Advisor's Signature & Date

[32]            Je n'ai évidemment pas l'intention de décider quelle opinion est bien fondée en l'espèce. Cette décision appartient entièrement au Tribunal. C'est à lui de décider si, eu égard à l'ensemble de la preuve, l'une ou l'autre des opinions est bien fondée. En l'espèce, le Tribunal a rejeté l'opinion du Dr. Sestier pour les motifs que l'on retrouve dans la décision. La question, telle que je l'ai formulée plus tôt, est celle à savoir si le Tribunal a commis une erreur en concluant comme il l'a fait. À mon avis, le Tribunal a commis une erreur justifiant l'intervention de cette Cour.

[33]            Il n'y a pas de doute, comme je l'ai déjà mentionné, que le Tribunal a dûment considéré l'opinion du Dr. Sestier. Néanmoins, le passage suivant dans la décision du Tribunal me préoccupe :


Le comité considère que les études sur lesquelles le docteur Sestier a basé son opinion ne sont pas des études intégrées à la littérature médicale reconnue ni à des ouvrages médicaux de référence. Donc son opinion ne peut être considérée comme étant représentative du consensus médical sur cette question.

[34]            Le Tribunal, à mon avis, ne conclut nullement que l'opinion du Dr Sestier n'est pas vraisemblable ou crédible. Il conclut simplement qu'elle n'est pas représentative du consensus médical sur cette question. Le Tribunal ne fait aucune affirmation quant au manque de crédibilité ou de vraisemblance de la preuve. Par conséquent, en l'absence d'une telle détermination, le Tribunal, en vertu de l'article 39 de la LTAC, peut seulement rejeter l'opinion du Dr Sestier si d'autre preuve contradictoire se trouve au dossier.

[35]            Pourtant, en l'espèce, la seule preuve médicale discutant du lien entre l'anxiété chronique et la maladie coronarienne qui se trouve au dossier, autre que l'opinion médicale du 22 mai 1997 (voir paragraphe 31 de mes motifs), est la preuve déposée par le demandeur. En consultant le dossier du Tribunal qui, selon la lettre de présentation, est une « copie certifiée conforme de toute la documentation utilisée dans la préparation de la décision du Tribunal des anciens combattants Canada, en date du 12 avril 2000 » , on retrouve les éléments de preuve suivants quant au lien entre l'anxiété chronique et la maladie coronarienne :

–    rapport du Dr Voyer daté du 31 mars 1997, déposé initialement par le demandeur devant le Ministre;


–    numéro spécial des Archives des maladies du coeur et des vaisseaux, portant sur « Anxiété, stress et pathologie cardio-vasculaire » en date du 1er octobre 1986, déposé initialement par le demandeur devant le Tribunal lors de la première audience;

–    photocopie d'un passage d'un livre intitulé The Heart, déposée initialement par le demandeur devant le Tribunal lors de la première audience;

–    rapport du Dr Sestier daté du 5 août 1999, avec à l'appui, article paru dans la revue Circulation le 27 avril 1999, intitulé « Impact of Psychological Factors on the Pathogenesis of Cardiovascular Disease and Implications for Therapy » , déposés par le demandeur devant le Tribunal lors du réexamen.

[36]            Toute la preuve médicale au dossier, autre que l'opinion du 22 mai 1997, vise à démontrer qu'un lien existe entre l'anxiété chronique et la maladie coronarienne, et appuie cette thèse. On ne trouve au dossier aucune trace de littérature médicale ou d'ouvrages médicaux contredisant la preuve du demandeur.


[37]            Le Tribunal indique dans ses motifs qu'il est conscient de son obligation en matière de preuve en vertu de l'article 39 de la LTAC. Toutefois, le motif sur lequel s'appuie le Tribunal pour rejeter l'opinion du Dr Sestier a trait au consensus médical sur cette question, tel qu'on le retrouve dans « la littérature médicale reconnue » et les « ouvrages médicaux de référence » . Le Tribunal n'indique pas quelle est cette littérature qui lui permet de rejeter la conclusion du Dr Sestier, où se trouve cette littérature, quand elle a été publiée, ni comment le Tribunal l'a obtenue. Le Tribunal n'a cité avec précision aucune étude ni aucun ouvrage médical qui pourrait supporter sa conclusion. Il s'est contenté de faire une affirmation générale qui n'est pas expliquée. Ce qui est évident, toutefois, c'est que la littérature considérée par le Tribunal qui lui a permis de rejeter la preuve du demandeur n'est pas au dossier.

[38]            Cela dit, il est nécessaire d'étudier la question à savoir si le Tribunal peut invoquer de son propre chef des connaissances médicales qui ne sont pas en preuve afin de réfuter la preuve déposée, malgré ce que semble indiquer la jurisprudence à l'effet que la preuve contradictoire doit être au dossier.

[39]            Le Tribunal dispose d'un mécanisme pour obtenir de la preuve médicale, autre que celle du demandeur, s'il le désire. Le paragraphe 38(1) de la LTAC lui permet de faire appel à un expert médical quant à toute question dont il est saisi. Le paragraphe 38(2) oblige le Tribunal à aviser le demandeur du fait qu'il obtiendra de la preuve d'un expert, afin de lui permettre de présenter ses arguments en réponse.


[40]            À mon avis, le fait que l'article 38 de la LTAC permette au Tribunal de faire appel à un expert en ce qui concerne toute question médicale est une indication que le Tribunal n'a pas d'expertise particulière dans le domaine de la médecine. Ceci a été reconnu par la jurisprudence, au départ dans l'affaire Moar c. Canada (Procureur général) (1995), 103 F.T.R. 314 (1re inst.). La conclusion du juge Heald dans Moar, supra a été reproduite à plusieurs reprises, entre autres dans l'affaire Weare c. Canada (Procureur général) (1998), 153 F.T.R. 75 (1re inst.). Je reprends les propos du juge MacKay dans cette affaire, aux paragraphes 14 et 15 :

En vertu de l'article 38 de la Loi [la LTAC], le Tribunal peut chercher à obtenir des avis médicaux indépendants quant à toute question dont il est saisi. Le juge Heald, dans l'arrêt Moar c. Canada (Procureur général) [(1995), 103 F.T.R. 314 à la p. 316], qui commentait une disposition semblable, le paragraphe 10(3) de la Loi sur le Tribunal d'appel des anciens combattants, à présent abrogée, et son importance quant à la retenue dont la Cour doit faire preuve à l'égard de la décision du Tribunal, a fait la remarque suivante :

Il est indiscutable que l'affaire en instance met en jeu des questions médicales. Le paragraphe 10(3) de la Loi sur le Tribunal d'appel des anciens combattants habilite celui-ci à requérir l'avis d'un expert médical indépendant dans toute matière soumise à sa juridiction. J'en conclus que le Tribunal ne bénéficie pas de la retenue dont les instances judiciaires font habituellement preuve à l'égard des tribunaux spécialisés en raison de leur expertise dans leur domaine de compétence.

Cette décision doit s'interpréter compte tenu de l'arrêt Tonner c. Canada [(12 juin 1996), no du greffe A-263-95, [1996] A.C.F. no 825 (C.A.F.)], dans lequel la Cour d'appel fédérale a conclu que la clause privative figurant dans l'ancienne Loi sur le Tribunal d'appel des anciens combattants donnait droit à ce Tribunal à la retenue. Une disposition semblable figure à présent à l'article 31 de la Loi actuelle. Je conclus que la Cour doit faire preuve de retenue à l'égard des décisions du TACRA, à l'exception de celles portant sur la compétence du Tribunal, à moins qu'elles ne soient manifestement déraisonnables. [notes omises]


[41]            Le juge Heald dans l'affaire Moar, supra, avait conclu que l'existence même de la disposition analogue à l'article 38 de la LTAC signifiait que le Tribunal n'avait pas de compétence spéciale dans le domaine de la médecine, et par conséquent, ne pouvait pas bénéficier de retenue de la part des instances judiciaires. Il a plus tard été déterminé par la Cour d'appel fédérale que la clause privative contenue dans la LTAC exigeait qu'une cour révisant la décision du Tribunal fasse preuve de retenue, puisque c'est ce que désirait le législateur. Cette décision d'exercer de la retenue découlait uniquement de l'existence de la clause privative, et non d'une réévaluation des motifs du juge Heald dans l'affaire Moar, supra au sujet de l'expertise médicale du Tribunal. À mon avis, la substance de l'analyse du juge Heald au sujet de l'expertise médicale du Tribunal s'applique toujours; l'existence, encore aujourd'hui, de l'article 38 de la LTAC confirme que le Tribunal n'a pas d'expertise particulière dans le domaine médical.


[42]            Par conséquent, à mon avis, l'existence même de l'article 38 indique qu'on ne peut reconnaître au Tribunal une compétence inhérente en ce qui concerne les questions médicales. Celui-ci ne possède pas d'expertise particulière dans le domaine médical lui permettant d'affirmer en l'espèce que l'opinion du Dr Sestier et l'article à l'appui ne faisaient pas partie du consensus médical, en l'absence de preuve à l'appui. Donc, je suis d'avis que le Tribunal ne pouvait invoquer des faits médicaux qui n'étaient pas en preuve afin de réfuter la preuve du demandeur. Si le Tribunal désirait obtenir de la preuve autre que celle du demandeur ou de la preuve représentant le contexte médical, il n'avait qu'à invoquer l'article 38 et à demander l'opinion d'un expert.

[43]            Conséquemment, je suis d'avis que les articles 38 et 39 de la LTAC ainsi que la jurisprudence exigent, lorsque lus conjointement, que la preuve médicale déposée par le demandeur soit rejetée uniquement en présence d'une preuve contradictoire au dossier. À mon avis, le Tribunal ne pouvait rejeter l'opinion du Dr Sestier, puisque celui-ci n'est pas contredit par d'autre preuve déposée devant le Tribunal, sauf s'il était d'avis que la preuve n'était pas crédible, ce qui n'est pas le cas en l'espèce.

[44]            Donc, je suis d'avis qu'en rejetant l'opinion du Dr Sestier comme il l'a fait, le Tribunal a erré dans son application de l'article 39 de la LTAC, et n'a pas respecté les obligations qui y sont prévues. Comme l'indique la jurisprudence citée ci-haut, il s'agit d'une erreur de compétence qui vicie la décision en entier.


[45]            Il est vrai que le Tribunal a invoqué d'autres motifs à l'appui du rejet de la demande de pension du demandeur, tel que l'existence préalable chez le demandeur d'autres facteurs de risque. Toutefois, à mon avis, ces autres motifs n'entreraient en jeu que si la preuve médicale du demandeur avait été acceptée. Lors d'une demande de pension, le fardeau de démontrer qu'il existe un lien causal entre l'affection déjà pensionnée et l'affection pour laquelle une pension est demandée incombe au demandeur. En rejetant l'opinion du Dr Sestier et en indiquant expressément que sa théorie ne faisait pas partie du consensus médical général, le Tribunal a refusé d'accepter qu'il puisse, objectivement, exister un lien entre l'anxiété chronique et la maladie coronarienne. À partir de ce moment, il n'était plus possible que le Tribunal admette qu'il y avait un lien causal dans la situation du demandeur puisque le Tribunal venait de déclarer que ce lien n'existait pas objectivement. Il était donc impossible que le Tribunal octroie la pension au demandeur puisqu'il n'admettait pas de lien causal objectif. C'est pourquoi, à mon avis, le rejet de l'opinion du Dr Sestier est une erreur déterminante, peu importe les autres motifs invoqués à l'appui du rejet de la demande.

[46]            Il est à noter que l'opinion médicale du 22 mai 1997 a été déposée au dossier avant même que l'opinion du Dr. Sestier soit produite par le demandeur. Par conséquent, il va sans dire que l'opinion du mois de mai 1997 ne s'adresse nullement à l'opinion du Dr. Sestier.


CONCLUSION

[47]            La demande de contrôle judiciaire sera accueillie et le dossier sera retourné au Tribunal pour reconsidération par un panel différent. Le demandeur aura droit aux dépens.

              "Marc    Nadon"              

                                                                                                      juge

MONTRÉAL (Québec)

le 26 juin 2001


                                               

                   COUR FÉDÉRALE DU CANADA

              SECTION DE PREMIÈRE INSTANCE

Date : 20010626

Dossier : T-975-00

Entre :

                        LAURENT RIVARD

                                                                             Demandeur

Et:

PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA

                                                                              Défendeur

                                                                                                                      

                    MOTIFS DE L'ORDONNANCE

                                                                                                                      


                                                               COUR FÉDÉRALE DU CANADA

                                                            SECTION DE PREMIÈRE INSTANCE

                                NOMS DES PROCUREURS ET DES AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

DOSSIER :                                                      T-975-00

INTITULÉ :                                                       LAURENT RIVARD

                                                                                                                                                             Demandeur

Et:

PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA

                                                                                                                                                               Défendeur

LIEU DE L'AUDIENCE :                                  Montréal (Québec)

DATE DE L'AUDIENCE :                               Le 13 mars 2001

MOTIFS DE L'ORDONNANCE DE    L'HONORABLE JUGE NADON

EN DATE DU :                                                26 juin 2001

COMPARUTIONS:

Me Jean-Pierre Morin                                                                     Pour le demandeur

Me Dominique Guimond                                                              Pour le défendeur

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER:

Me Jean-Pierre Morin

Montréal (Québec)                                                                       Pour le demandeur

Morris Rosenberg

Sous-procureur général du Canada

Montréal (Québec)                                                                       Pour le défendeur

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