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     Date : 19980623

     Dossier : T-1013-98

OTTAWA (ONTARIO), le mardi 23 juin 1998

EN PRÉSENCE DE MADAME LE JUGE McGILLIS

ENTRE :

     NAV CANADA,

     Demanderesse,

     - et -

     ASSOCIATION CANADIENNE DU CONTRÔLE DU TRAFIC AÉRIEN,

     Défenderesse.

     ORDONNANCE

     La demande de sursis de l'ordonnance du Conseil canadien des relations du travail, délivrée le 29 mars 1998 et déposée à la Cour en vertu d'une ordonnance datée du 17 mai 1998, conformément à l'article 23 du Code canadien du travail, est rejetée parce que la Cour n'a pas compétence pour connaître de l'affaire par application du paragraphe 28(3) de la Loi sur la Cour fédérale. Aucune ordonnance d'adjudication des dépens ne sera prononcée.

     D. McGillis

                                         Juge

Traduction certifiée conforme

Laurier Parenteau, LL.L.

     Date : 19980623

     Dossier : T-1013-98

ENTRE :

     NAV CANADA,

     Demanderesse,

     - et -

     ASSOCIATION CANADIENNE DU CONTRÔLE DU TRAFIC AÉRIEN,

     Défenderesse.

     MOTIFS DE L'ORDONNANCE

     [Prononcés à l'audience à Ottawa (Ontario),

     le mardi 23 juin 1998]

LE JUGE McGILLIS

[1]      L'avocat de l'Association canadienne du contrôle du trafic aérien (l'Association) a présenté une demande d'ordonnance interlocutoire prononçant le sursis de l'ordonnance délivrée par le Conseil canadien des relations du travail le 29 mars 1998 et déposée à la Cour, conformément à l'article 23 du Code canadien du travail, L.R.C. (1985), ch. L-2, en vertu d'une autre ordonnance prononcée par le Conseil canadien des relations du travail le 17 mai 1998.

[2]      Une demande de contrôle judiciaire présentement en instance devant la Cour d'appel fédérale a été introduite par l'Association en vue de faire annuler l'ordonnance prononcée par le Conseil canadien des relations du travail le 17 mars 1998 aux fins du dépôt à la Cour de l'ordonnance antérieure délivrée le 29 mars 1998.

[3]      Au début de l'instance, j'ai demandé si la Section de première instance était incompétente pour accorder le sursis demandé, par application du paragraphe 28(3) de la Loi sur la Cour fédérale, L.R.C. (1985), ch. F-7, modifiée.

[4]      L'alinéa 28(1)h) de la Loi sur la Cour fédérale confère à la Cour d'appel la compétence pour entendre et trancher une demande de contrôle judiciaire visant le Conseil canadien des relations du travail. La Section de première instance est incompétente pour connaître de certaines procédures, par application du paragraphe 28(3) de la Cour fédérale qui prévoit :

28(3)      Where the Court of Appeal has jurisdiction to hear and determine any matter, the Trial Division has no jurisdiction to entertain any proceeding in respect of the same matter.
28(3)      La Section de première instance ne peut être saisie des questions qui relèvent de la Cour d'appel.

Avant sa modification, en 1990, le paragraphe 28(3) était ainsi libellé1 :

28(3)      Where the Court of Appeal has jurisdiction under this section to hear and determine an application to review and set aside a decision or order, the Trial Division has no jurisdiction to entertain proceeding in respect of that decision or order.
28(3)      Lorsque, en vertu du présent article, la Cour d'appel a compétence pour entendre et juger une demande d'examen et d'annulation d'une décision ou ordonnance, la Division de première instance est sans compétence pour connaître de toute procédure relative à cette décision ou ordonnance.

[5]      Par application de l'alinéa 28(1)h) de la Loi sur la Cour fédérale, la Cour d'appel a compétence exclusive pour connaître d'une demande de contrôle judiciaire visant l'ordonnance délivrée par le Conseil canadien des relations du travail le 17 mai 1998 en vertu de l'article 23 du Code canadien du travail. En conséquence, la question qui doit être tranchée est celle de savoir si la présente demande de sursis est une procédure relative à la même affaire (" ...proceeding in respect of the same matter " selon la version anglaise de la Loi) que celle qui est en instance devant la Cour d'appel, au sens du par. 28(3) de la Loi sur la Cour fédérale .

[6]      L'avocat de l'Association a fait valoir que la Section de première instance a compétence pour accorder la réparation demandée parce que la demande de sursis touche une décision différente de celle qui est contestée dans la demande de contrôle judiciaire en instance devant la Cour d'appel. Il soutient en outre que le paragraphe 28(3), selon lequel la Section de première instance n'a pas compétence, a une portée plus étroite que la disposition qu'il a remplacée.

[7]      Pour déterminer si l'exclusion prévue par le paragraphe 28(3) de la Loi sur la Cour fédérale concernant la compétence s'applique en l'espèce, il faut examiner les deux demandes en instance devant la Cour.

[8]      La demande de contrôle judiciaire déposée par l'Association devant la Cour d'appel le 5 juin 1998 vise l'annulation de l'ordonnance délivrée le 17 mai 1998 par le Conseil canadien des relations du travail en vertu de l'article 23 du Code canadien du travail et se fonde sur le non-respect des principes de justice naturelle.

[9]      La requête en sursis, déposée par l'Association devant la Section de première instance le 18 juin 1998 vise la réparation suivante :

         [Traduction]         
         LA REQUÊTE VISE à obtenir le sursis de l'ordonnance du Conseil canadien des relations du travail délivrée par Richard I. Hornung, c.r., vice-président, le 29 mars 1998 (dossier du Conseil no 18669-C), déposée à la Cour fédérale le 17 mai 1998 (dossier du greffe no T-1013-98), en vertu de l'article 23 du Code canadien du travail, L.R.C. (1985), ch. L-2, jusqu'à l'audition de la demande de contrôle judiciaire déposée par la défenderesse devant la Cour d'appel fédérale (Dossier du greffe no A-367-98) à l'encontre de l'ordonnance par laquelle le Conseil canadien des relations du travail a ordonné que l'ordonnance du 29 mars soit déposée à la Cour.         

[10]      Les moyens suivants sont invoqués à l'appui de la requête en sursis :

         [Traduction]         
         LES MOTIFS DE LA REQUÊTE SONT LES SUIVANTS :         
         1.      L'article 50 de la Loi sur la cour fédérale, L.R.C. (1985), ch. F-7.         
         2.      Le par. 398(1) des Règles.         
         3.      La défenderesse demande le contrôle judiciaire de l'ordonnance datée du 17 mai 1998 (dossier du Conseil no 18669-C) par laquelle le Conseil canadien des relations de travail a ordonné que l'ordonnance antérieure du Conseil, datée du 29 mars 1998 (Ordonnance du Conseil no 18669-C) soit déposée à la Cour fédérale, le dépôt ayant été effectué le 17 mai 1998.         
         4.      Par application de l'article 23 du Code canadien du travail, l'ordonnance, une fois enregistrée, l'ordonnance a la même valeur qu'un jugement de la Cour fédérale et des procédures ultérieures peuvent être engagées comme s'il s'agissait d'un jugement de la Cour.         
         5.      La défenderesse a des arguments défendables solides à faire valoir à l'appui de l'annulation de l'ordonnance du Conseil ordonnant que l'ordonnance du 29 mars 1998 soit déposée à la Cour Fédérale.         
         4. (sic)      La défenderesse et ses membres subiront un préjudice irréparable si l'ordonnance du Conseil, devenue une ordonnance de la Cour, est exécutée.         
         5. (sic)      L'exécution de l'ordonnance déposée à la Cour fédérale menacerait la sécurité aérienne au Canada.         

[11]      Je suis d'avis qu'un examen du fond de la requête en sursis établit sans équivoque qu'il s'agit d'une procédure relative à la même affaire que celle qui est en instance devant la Cour d'appel. En particulier, les paragraphes 3, 4 et 5 des moyens invoqués à l'appui de la requête révèlent le lien factuel inextricable qui existe entre les deux procédures. En effet, l'avocat de l'Association a admis loyalement et avec justesse pendant la plaidoirie que la requête en sursis était [Traduction] " relative aux questions soumises à la Cour d'appel ". Dans les circonstances, la Section de première instance n'a pas compétence pour trancher la présente requête en sursis par application du paragraphe 28(3) de la Loi sur la Cour fédérale .

[12]      Avant de conclure, je désire préciser que, selon moi, le libellé actuel du paragraphe 28(3) de la Loi sur la Cour fédérale a une portée plus large que les termes dans lesquels était formulée la disposition qu'il a remplacée. De plus, la version française de l'actuel paragraphe 28(3) est rédigée dans des termes très larges.

[13]      Je désire aussi formuler de brefs commentaires sur la décision Banque nationale du Canada c. Granda, [1984] 2 C.F. 249 (C.A.F.), dans laquelle la Cour d'appel fédérale a conclu que la Section de première instance avait le pouvoir de surseoir à l'exécution d'une décision déposée à la Cour en vertu de la disposition qui a précédé l'article 23 du Code canadien du travail. Je note, en particulier, que cette décision a été rendue avant la modification du paragraphe 28(3) de la Loi sur la Cour fédérale, qui a élargi la portée de la limite à la compétence de la Section de première instance. Dans les circonstances, je suis convaincue que le raisonnement qui sous-tend cette décision ne s'applique plus.

[14]      La requête en sursis de l'ordonnance délivrée par le Conseil canadien des relations du travail le 29 mars 1998 et déposée à la Cour en vertu d'une ordonnance datée du 17 mai 1998 est donc rejetée pour défaut de compétence de la Section de première instance pour connaître de l'affaire par application du paragraphe 28(3) de la Loi sur la Cour fédérale. Il n'y aura pas d'adjudication des dépens.

     D. McGillis

                                         Juge

OTTAWA

23 juin 1998

Traduction certifiée conforme

Laurier Parenteau, LL.L.

COUR FÉDÉRALE DU CANADA

SECTION DE PREMIÈRE INSTANCE


AVOCATS ET AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

NUMÉRO DU GREFFE :          T-1013-98

INTITULÉ DE LA CAUSE :      NAV CANADA C. ASSOCIATION CANADIENNE DU CONTRÔLE DU TRAFIC AÉRIEN

LIEU DE L'AUDIENCE :          Ottawa (Ontario)

DATE DE L'AUDIENCE :          23 juin 1998

MOTIFS DE L'ORDONNANCE PRONONCÉS PAR MADAME LE JUGE McGILLIS

DATE DES MOTIFS :          23 juin 1998

ONT COMPARU :

Me John A. Coleman      POUR LA DEMANDERESSE

Me Sean McGee      POUR LA DÉFENDERESSE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Ogilvy Renault      POUR LA DEMANDERESSE

Ottawa (Ontario)

Nelligan Power      POUR LA DÉFENDERESSE

Ottawa (Ontario

__________________

     1      Loi modifiant la Loi sur la Cour fédérale, la Loi sur la responsabilité de l'État, la Loi sur la Cour suprême et d'autres lois en conséquence, L.C. 1990, ch. 8, art. 8.

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