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Date : 19990914

Dossier : IMM-5444-98



ENTRE :


     JORGE ALBERTO PORTILLO


     demandeur


     - et -



     LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L"IMMIGRATION


     défendeur


     MOTIFS DE L"ORDONNANCE

LE JUGE REED


[1]      La présente demande soulève une question inédite concernant l"effet des dispositions transitoires qui s"appliquent au paragraphe 70(5) de la Loi sur l"immigration. Les faits pertinents sont les suivants. Une mesure de renvoi conditionnel a été prise contre le demandeur le 23 août 1993. Il a interjeté appel devant la Section d"appel de l"immigration (la SAI). Son appel a été rejeté le 29 juillet 1994. Toutefois, il n"a pas été renvoyé du Canada. Le 28 janvier 1998, il a présenté une requête en réouverture de l"appel de 1993-1994. Le 3 avril 1998, la SAI a accueilli la requête en réouverture et une audience a été fixée au 8 juillet 1998. Cependant, avant que l"audience puisse avoir lieu, le ministre a émis un avis selon lequel le demandeur constituait un danger pour le public, en application du paragraphe 70(5) de la Loi sur l"immigration.

[2]      La SAI a sollicité les observations du demandeur et du ministre quant à savoir si elle avait compétence pour entendre l"appel rouvert.

[3]      Le 30 septembre 1998, la SAI a décidé qu"elle n"avait pas cette compétence et elle a rejeté l"appel du demandeur. C"est cette décision qui fait l"objet de la présente demande.

[4]      La décision de la SAI de rejeter l"appel du demandeur était fondée sur une interprétation des dispositions législatives pertinentes et sur une analyse quant à savoir si un appel rouvert est plus près d"une poursuite de l"appel antérieur ou de l"introduction d"un deuxième appel. La SAI a conclu que cette deuxième façon de voir était plus appropriée.

[5]      Les dispositions transitoires se trouvent au paragraphe 13(4) du chapitre 15 des L.C. 1995 :

Subsection 70(5) of the Act, as enacted by subsection (3), applies to an appeal that has been made on or before the coming into force of that subsection and in respect of which the hearing has not been commenced, but a person who has made such an appeal may, within fifteen days after the person has been notified that, in the opinion of the Minister, the person constitutes a danger to the public in Canada, make an application for judicial review under section 82.1 of the Act with respect to the deportation order or conditional deportation

Le paragraphe 70(5) de la même loi, édicté par le paragraphe (3), s'applique aux appels interjetés dans le cadre de l'article 70 dont l'audition n'est pas commencée à la date de son entrée en vigueur; cependant, toute personne visée peut, dans les quinze jours suivant la date à laquelle elle est avisée que, selon le ministre, elle constitue un danger pour le public au Canada, présenter une demande de contrôle judiciaire, dans le cadre de l'article 82.1, à l'égard de la mesure de renvoi ou de renvoi conditionnel. [Non souligné dans

order referred to in subsection 70(5). [Emphasis added.]

l'original.]



[6]      L"avocat du demandeur soutient ceci : suivant leur sens ordinaire, les dispositions transitoires préservent la compétence de la SAI; il y a seulement un appel et celui-ci a été introduit le 23 août 1993; conformément à la loi, il ne peut y avoir de nouvel appel - la disposition sur la prescription contenue dans la loi ne le permet pas. Il prétend que, bien que le résultat d"une interprétation littérale puisse être inattendu, il n"est pas absurde, et qu"en conséquence, pour interpréter les dispositions en cause, la Cour n"a pas besoin d"aller au-delà de leur sens ordinaire.

[7]      L"avocate du défendeur soulève les arguments suivants : la décision de la SAI, en assimilant la réouverture de l"appel à un nouvel appel, est correcte; l"audience relative à la réouverture d"appel constitue une nouvelle audience devant un tribunal différent, sur la base de nouveaux éléments de preuve; l"audience relative à la réouverture d"appel n"est pas une poursuite de la première audience. Elle prétend que, compte tenu de l"objet manifeste du paragraphe 70(5), il est insensé que la SAI continue d"avoir compétence dans les circonstances de l"espèce.

[8]      Je suis convaincu que la décision de la SAI est correcte et que la SAI n"a pas compétence dans l"affaire du demandeur. Ma décision est fondée, toutefois, sur un motif légèrement différent de celui sur lequel s"est appuyée la SAI. J"accepte l"argument de l"avocat du demandeur, selon lequel l"appel du demandeur a été introduit en 1993 et qu"il y a seulement un appel. Le paragraphe 13(4), cependant, établit deux exigences : l"appel doit avoir été interjeté avant le 10 juillet 1995, soit la date de l"entrée en vigueur du paragraphe 70(5), et une audience doit également avoir commencé avant cette date. La réouverture de l"appel n"entraîne pas la poursuite de l"audience de 1994. La réouverture d"appel envisage la tenue d"une nouvelle audience. Cette dernière aura lieu devant un tribunal différent, auquel on soumettra une preuve qui vient s"ajouter à celle qui a déjà été entendue. Elle peut être décrite comme une audience de novo. Je suis convaincu que l"avis émis en application du paragraphe 70(5) a pour effet de priver la SAI de sa compétence. L"audience qui a été fixée n"était pas commencée quand le paragraphe 70(5) est entré en vigueur.

[9]      Les avocats ont demandé que je ne rende pas d"ordonnance jusqu"à ce qu"ils aient eu la possibilité de décider s"ils présenteront une demande de certification. Le demandeur a jusqu"au 21 septembre 1999 pour présenter des observations à cet égard. Le défendeur a jusqu"au 27 septembre 1999 pour en faire autant.

                                         B. Reed     
                                         Juge

OTTAWA (ONTARIO)

Le 14 septembre 1999


Traduction certifiée conforme


Julie Boulanger, LL.M.

COUR FÉDÉRALE DU CANADA

SECTION DE PREMIÈRE INSTANCE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


NO DU GREFFE :                      IMM-5444-98
INTITULÉ DE LA CAUSE :              JORGE ALBERTO PORTILLO c. MCI
LIEU DE L"AUDIENCE :                  VANCOUVER (C.-B.)
DATE DE L"AUDIENCE :                  LE 26 AOÛT 1999

MOTIFS DE L"ORDONNANCE DU JUGE REED

DATE DES MOTIFS :                  LE 14 SEPTEMBRE 1999

ONT COMPARU :

M. SHANE MOLYNEAUX                          POUR LE DEMANDEUR
Mme KIM SHANE                              POUR LE DÉFENDEUR

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

M. SHANE MOLYNEAUX                          POUR LE DEMANDEUR
Mme KIM SHANE                              POUR LE DÉFENDEUR

M. Morris Rosenberg

Sous-procureur général du Canada

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