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Date : 19980511


Dossier : T-2234-89

ENTRE

     ALLIEDSIGNAL INC.,

     demanderesse,

     - et -

     DUPONT CANADA INC.

et THE COMPLAX CORPORATION,

     défenderesses.

     TAXATION DES FRAIS - MOTIFS

L"officier taxateur Marc D. Reinhardt

[1]          J"ai été saisi de la taxation du mémoire de frais de la demanderesse le vendredi 21 novembre 1997 à Ottawa. Me Hélène D'Iorio, du cabinet GOWLING, STRATHY & HENDERSON, a comparu pour le compte de la demanderesse. Me Arthur Renaud, du cabinet SIM HUGHES ASHTON & McKAY, a représenté DuPont Canada. Il n"y a pas eu de comparution pour l"autre défenderesse, The Complax Corporation, qui n"a pas été représentée. Les parties avaient jusqu"au 19 décembre 1997 pour produire et échanger des observations écrites.

[2]          Le brevet litigieux se rapporte à une pellicule constituée d"un mélange de polyamide/polyoléfine de faible cristallinité convenant à la préparation d"un mélange à mouler en feuille. La pellicule se compose d"un mélange de polyamide (par ex. le nylon) et de polyoléfine, tous deux d"une cristallinité donnée, ayant une épaisseur, une résistance à la déchirure, une perméabilité au styrène et une pelabilité précises.

[3]          Il s"agissait d"une affaire très complexe, portant sur la diffraction X, la résonance magnétique nucléaire, la spectroscopie à infrarouge, le gradient de densité et la calorimétrie à compensation de puissance. De plus, on a eu recours à des essais d"adhérence et à la microscopie électronique à balayage pour vérifier les propriétés physiques et pour inspecter visuellement la substance en cause. L"affaire portait sur quatre questions principales : 1) la cristallinité de l"élément nylon de la pellicule fabriquée par la défenderesse, 2) si le second composant de la pellicule était une polyoléfine, (3) si le composé à mouler épais (TMC) était l"équivalent du composé à mouler en feuille (SMC) revendiqué dans le brevet et 4) la validité du brevet. Par opposition à l"action ordinaire en contrefaçon de brevet qui ne fait habituellement intervenir qu"une ou deux disciplines techniques, la présente affaire a exigé un effort supplémentaire considérable pour organiser et expliquer les différentes techniques d"analyse et les diverses expériences1. L"instruction a duré 12 jours; 71 pièces ont été mentionnées et les deux parties ont convoqué 14 témoins (dont 10 témoins experts). Une série d"essais inter partes ont également été effectués par la demanderesse ou pour son compte à Morristown (New Jersey) et pour le compte des défenderesses à Kingston (Ontario) et à Wilmington (Delaware). Quelques-uns de ces essais ont été enregistrés sur bande magnétoscopique en vue d"une présentation éventuelle comme pièces au cours de l"instruction.

[4]          Le 3 septembre 1993, Madame le juge Reed, de la Section de première instance, a conclu que le brevet était invalide à cause de son ambiguïté et de son insuffisance, sans tirer de conclusion quant à la contrefaçon. Dans son arrêt rendu le 11 mai 1995, la Cour d"appel a infirmé la décision de la Section de première instance, concluant que le brevet était valide et qu"il y avait eu contrefaçon.

[5]          Sa cause ayant été accueillie en appel, la demanderesse a introduit une requête en augmentation des dépens, laquelle a été accueillie par le juge Joyal, le 23 août 1995. Son ordonnance est ainsi rédigée :

                 [TRADUCTION]                 
                 Il EST ORDONNÉ que l"officier taxateur taxe les dépens de la demanderesse selon les directives suivantes :                 
                 1.      Des honoraires et des débours raisonnables doivent être payés relativement aux frais de déplacement, de logement et de subsistance des témoins et avocats, notamment pour la préparation des déclarations de témoin ou des affidavits de :                 
                          William J. MacKnight                 
                          John Sibilia                 
                          Sean Curran,                 
                 pour la préparation de leur déposition à l"instruction et pour la durée entière de leur présence à l"instruction selon l"alinéa 1(2)a) du tarif B.                 
                 2.      Des honoraires et des débours raisonnables doivent être payés relativement aux frais de déplacement, de logement et de subsistance des avocats et des représentants du client pour leurs réunions pendant la durée de l"instance.                 
                 3.      Des honoraires et des débours raisonnables doivent être payés relativement aux frais de déplacement, de logement et de subsistance des avocats (à l"exclusion des avocats internes d"AlliedSignal Inc.) et des témoins experts pour les essais inter partes effectués par la demanderesse ou pour son compte à Morristown (New Jersey) et par les défenderesses ou pour leur compte à Kingston (Ontario) et à Wilmington (Delaware).                 
                 4.      Des honoraires et des débours raisonnables doivent être payés relativement à la production des bandes magnétoscopiques des expériences effectuées par la demanderesse ou pour son compte à Morristown (New Jersey) même si elles n"ont pas été utilisées comme pièces lors de l"instruction.                 
                 5.      Des honoraires et des débours raisonnables doivent être payés relativement à la production des bandes magnétoscopiques d"une chaîne de fabrication de pellicule de nylon et d"un atelier de SMC, ces bandes ayant été utilisées au cours de l"instruction et cotées comme pièces.                 
                 6.      Les honoraires alloués pour les services suivants devront être portés au-delà des montants indiqués dans le tarif B aux montants suivants :                 
                      a)      préparation et dépôt des actes de procédure : jusqu"à concurrence de 2 000 $. [al. 1(1)a) ];                         
                      b)      services fournis avant l"interrogatoire préalable : jusqu"à concurrence de 2 000 $. [al. 1(1)b) ];                 
                      c)      honoraires et dépenses de deux avocats pour la demanderesse permis pour l"interrogatoire préalable des parties à l"action, y compris une ordonnance d"augmentation des honoraires par demi-journée à 500 $ pour l"avocat principal et à 250 $ pour l"avocat en second. [al. 1(1)c) ];                 
                      d)      honoraires pour la préparation et la présentation par les avocats de toutes les requêtes interlocutoires contestées augmentés par demi-journée à la Cour à 250 $ pour l"avocat principal [al. 1(1)d) ] et à 150 $ pour l"avocat en second;                 
                      e)      services pour la préparation du procès : jusqu"à concurrence de 5 000 $ pour chaque période de deux jours ou moins du procès [al. 1(1)h) ];                 
                      f)      conduite du procès, honoraires d"avocat augmentés jusqu"à concurrence de 1 500 $ par jour et de 750 $ par jour pour l"avocat en second.                 
                 7.      Des frais raisonnables de photocopie devront être accordés pour les copies de documents présentées à la Cour, aux avocats et au sténographe judiciaire, ainsi que pour les copies de documents fournies au client et à l"avocat adverse au cours de l"instance et pour tous les autres travaux de copie et de reprographie nécessaires pour la conduite de la procédure et pour la préparation des pièces en vue de l"instruction.                 

[6]          Le tarif B tel qu"il existait avant le 1er septembre 1995 s"applique à la présente taxation. Le mémoire de frais révisé de la demanderesse est ainsi rédigé [par souci de commodité, les sommes non contestées sont indiquées entre parenthèses; lorsque deux sommes sont indiquées pour un article, la somme la plus élevée est celle que la demanderesse a réclamée et la somme la moins élevée (en italiques) représente la somme qui, selon la défenderesse DuPont, devrait être allouée] :


    

HONORAIRES

DÉBOURS

1.      Pour tous les services jusqu"à la préparation et au dépôt des actes de procédure

(2 000,00 $)

A.      Droit de dépôt à la Cour fédérale

(50,00 $)

B.      Dépenses diverses

(83,78 $)

2.      Pour tous les services fournis avant l"interrogatoire préalable

(2 000,00 $)

A.      Frais de déplacement et de subsistance des avocats

4 068,37 $

2 093,43 $

B.      Dépenses diverses

952,13 $

768,89 $

3.      Pour l"interrogatoire préalable
A.      Yang le 5 décembre 1990 et Bula les 5 et 6 décembre 1990 à Toronto

(3 000,00 $)

     i)      Transcription de l"interrogatoire préalable de Yang

(605,00 $)

     ii)      Transcription de l"interrogatoire préalable de Bula

(645,00 $)

     iii)      Frais de déplacement et de subsistance des avocats

(1 558,25 $)

B.      Degrassi les 12 et 13 décembre 1990 et Combs les 13 et 14 décembre 1990 à Ottawa

(4 500,00 $)

     i)      Transcription de l"interrogatoire préalable de Degrassi à Ottawa

(340,00 $)

     ii)      Transcription de l"interrogatoire préalable de Combs

(423,50 $)

     iii)      Frais de déplacement et de subsistance des avocats

(342,55 $)

     iv)      Frais de déplacement et de subsistance de Degrassi

(1 436,85 $)

     v)      Frais de déplacement de R. Combs

984,11 $

923,08 $

C.      Dépenses diverses pour les articles A et B

82,66 $

49,82 $

4.      Pour la préparation et la présentation des requêtes interlocutoires
A.      Requête par écrit pour obtenir une ordonnance selon la règle 480, le 13 juillet 1990

75,00 $

0,00 $

B.      Requête par écrit pour obtenir une ordonnance conservatoire, le 2 août 1990

75,00 $

0,00 $

     i)      Dépenses diverses

12,71 $

0,00 $

C.      Requête contestée pour contraindre à répondre, le 19 juin 1992

250,00 $

0,00 $

     i)      Frais de déplacement et de subsistance des avocats

383,51 $

0,00 $

     ii)      Divers

76,71 $

0,00 $

D.      Requête contestée pour obtenir la production de données électroniques, le 26 août 1992

250,00 $

0,00 $

     a)      Frais de déplacement et de subsistance des avocats

45,29 $

0,00 $

     b)      Divers

93,60 $

0,00 $

     c)      Requête contestée concernant la lettre du 25 juillet 1996

(250,00 $)

5.      Pour les essais inter partes
A.      Pour les essais inter partes effectués par la demanderesse à Morristown (New Jersey)
     i)      En juin 1992
         a)      Frais de déplacement et de subsistance des avocats

4 411,43 $

2 549,51 $

         b)      Frais de déplacement et de subsistance des témoins experts

5 638,90 $

3 123,19 $

     ii)      En avril 1993
         a)      Frais de déplacement et de subsistance des avocats

2 623,63 $

1 199,20 $

         b)      Frais de déplacement et de subsistance des témoins experts

5 777,06 $

3 261,00 $

     iii)      Frais du Groupe cinéma pour tous les essais préparatoires au procès

125 593,67 $

0,00 $

B.      Pour les essais inter partes effectués par les défenderesses
     i)      À Kingston (Ontario) en janvier 1993
         a)      Frais de déplacement et de subsistance des avocats

551,98 $

428,44 $

         b)      Frais de déplacement et de subsistance des témoins experts

3 852,50 $

2 609,69 $

     ii)      À Wilmington (Delaware) en février 1993
         a)      Frais de déplacement et de subsistance des avocats

2 087,35 $

1 199,66 $

         b)      Frais de déplacement et de subsistance des témoins experts

2 891,00 $

2 049,97 $

     iii)      À Kingston (Ontario) en mai 1993
         a)      Frais de déplacement et de subsistance des avocats

(262,82 $)

         b)      Frais de déplacement et de subsistance des témoins experts

1 476,73 $

1 173,56 $

6.      Pour la préparation des bandes magnétoscopiques des expériences effectuées par la demanderesse, d"une chaîne de fabrication de pellicule de nylon et d"un atelier de SMC

(17 127,11 $)

7.      Pour les frais de déplacement, de logement et de subsistance des avocats et des représentants du client pour des réunions pendant l"instance
A.      Dépenses des avocats

10 840,28 $

9 280,34 $

B.      Dépenses des représentants du client

11 035,01 $

1,289,23 $

8.      Pour la préparation d"un procès de 12 jours en Section de première instance

(30 000,00 $)

A.      Dépenses diverses

18 752,76 $

11 086,38 $

B.      Dépôt d"une demande unilatérale concernant les date, heure et lieu de l"instruction

(75,00 $)

(100,00 $)

C.      Préparation et présence à une conférence préparatoire

(250,00 $)

D.      Dépenses et honoraires - Sacks

5 150,99 $

0,00 $

E.      Dépenses et honoraires - MacKnight

22 116,82 $

15 177,65 $

F.      Dépenses et honoraires - Hoffman

2 368,14 $

0,00 $

9.      Pour le procès

(27 000,00 $)

A.      Frais de déplacement et de subsistance des avocats pendant le procès (y compris le logement des témoins)

27 918,85 $

14 879,43 $

B.      Dépenses et honoraires des témoins

42 097,20 $

22 112,49 $

C.      Dépenses diverses

(16 893,67 $)

10.      Pour les services fournis après le prononcé du jugement

(125,00 $)

A.      Divers

(482,67 $)

         SOMME TOTALE RÉCLAMÉE

412 084,59 $

204 806,16 $

     ____________________________

         I.      QUESTIONS PRÉLIMINAIRES

             -- L"audience de taxation du 26 mars 1997

[1]          Le 26 mars 1997, les parties ont comparu devant moi à Ottawa pour la taxation du mémoire de frais de la demanderesse en réponse à une convocation datée du 13 février 1997. Avant ce jour, la demanderesse avait déposé les affidavits suivants :

     (i)      l"affidavit de Todd Harrold, daté du 24 janvier 1997;

     (ii)      l"affidavit de Kenneth Franck Machacek, daté du 16 janvier 1997;

     (iii)      l"affidavit de Donald Legal, daté du 15 juin 1996.

[2]          Les parties ne s"entendent pas sur la date du 26 mars 1997 comme commencement de l"audience de taxation. Il n"est pas contesté que l"avocate de la demanderesse a demandé un ajournement de la taxation du mémoire de frais du procès et que l"avocat de DuPont s"est opposé à la requête d"ajournement. J"ai accordé l"ajournement à la demanderesse et suis convenu avec l"avocate de la demanderesse que l"affaire du mémoire de frais du procès avait été ajournée avant de commencer (voir plus bas ma directive du 21 avril 1997), en indiquant qu"il était loisible à la demanderesse de lancer à nouveau la procédure de taxation. L"avocate de la requérante avait demandé l"ajournement à la suite de ce qui était survenu plus tôt dans la journée au cours de la taxation du mémoire de frais d"appel. L"avocat de la défenderesse DuPont avait fait valoir que les affidavits au soutien du mémoire de frais d"appel n"étaient pas suffisants pour prouver, comme il incombe de le faire à la partie dont le mémoire est taxé, que les débours étaient nécessaires et qu"ils étaient raisonnables dans les circonstances. Prévoyant que le même argument serait soulevé lors de la taxation du mémoire de frais du procès, l"avocate de la demanderesse a demandé et obtenu l"ajournement susmentionné pour lui permettre de présenter des affidavits plus détaillés auxquels seraient annexées, pouvait-on présumer, des copies des factures réelles et d"autres pièces justificatives. En d"autres termes, ce stratagème de l"avocate d"AlliedSignal visait à contrer l"argument d"absence de preuve soulevé par l"avocat de DuPont qui s"était opposé vivement à l"ajournement et avait demandé que la question de la possibilité pour une partie de présenter de nouveaux affidavits une fois la convocation signifiée soit renvoyée à la Cour. L"avocat de DuPont demandait également que la question de l"ajournement soit incluse dans le renvoi à la Cour. Le 21 avril 1997, j"ai écrit aux parties pour les aviser de ce qui suit :

                 [TRADUCTION] Je vous écris à la suite de ce qui s"est passé au cours de l"audience de taxation du 26 mars 1997 et après cette audience.                 
                 Comme vous vous en souviendrez, nous avions terminé le mémoire de frais d"appel et nous étions sur le point d"entreprendre le mémoire de frais du procès lorsque l"avocate de la demanderesse a demandé un ajournement. Sur la base des observations orales, j"ai accordé l"ajournement et conclu, à la demande de l"avocat de [DuPont] qui s"était opposé à l"ajournement, que la question du supplément de preuve sur les débours soit renvoyée à la Cour.                 
                 Depuis, j"ai reçu des lettres des deux avocats sur l"affaire. J"ai accordé l"ajournement sur le fondement que l"audience de taxation du mémoire de frais du procès n"avait pas encore commencé et que la partie dont le mémoire est taxé a parfaitement le droit de retirer le mémoire avant le commencement de l"audience. L"avocate de la défenderesse semble accepter cette position ainsi qu"il résulte de sa lettre du 4 avril qui déclare : " Nous voulons établir clairement que, à notre avis, la taxation de la section de première instance a été ajournée avant son commencement ". La décision d"ajourner avant le commencement de l"audience a manifestement pour effet de placer le renvoi à la Cour en dehors des paramètres du paragraphe (3) du tarif B [ancien tarif], qui est ainsi rédigé :                 
                         3. Lors de la taxation des dépens, les débours autres que les sommes versées au greffe doivent être justifiés par une preuve satisfaisante et, en cas de contestation, la question peut être renvoyée à la Cour.                         
                 Maintenant qu"elle a obtenu l"ajournement demandé, il incombe à l"avocate de la demanderesse (dont le mémoire est taxé) d"obtenir du greffe une nouvelle convocation. L"avocate a maintenant le choix : elle peut procéder à la nouvelle convocation avec ou sans de nouveaux affidavits (dans le cas où de nouveaux affidavits sont déposés et signifiés, il faut donner à l"avocat des défenderesses la possibilité d"un contre-interrogatoire sur les nouveaux affidavits). De toute façon, une fois la procédure commencée, il ne sera pas accordé d"ajournement en raison du besoin d"un supplément de preuve.                 
                 Si les défenderesses ont subi des frais supplémentaires en raison de l"ajournement, il appartiendra à la Cour, sur la demande de directives quant aux dépens présentée par les défenderesses, de décider la question. Cette question excède ma compétence d"officier taxateur.                 
                 Veuillez agir en conséquence.                 

[3]          L"avocat de DuPont a demandé la révision de ma décision à la Cour. Madame le juge Tremblay-Lamer a statué le 1er octobre 1997 que mes instructions n"étaient pas une " décision définitive " et que la Cour était donc incompétente pour statuer sur la requête1.

[4]          Après l"ajournement du 26 mars 1997, l"avocate de la demanderesse a déposé un autre affidavit de Todd Harrold, daté du 13 juin 1997, et un affidavit de Chantal Lapierre, daté du 31 octobre 1997. Compte tenu de la contestation sur la preuve, l"avocat de DuPont demande que j"identifie expressément les éléments de preuve sur lesquels je fonde mes conclusions. Cette façon de faire permettra, selon l"avocat, de sauvegarder la possibilité pour DuPont de faire valoir les arguments qu"il entendait présenter devant le juge Tremblay-Lamer dans l"hypothèse où l"une ou l"autre des parties souhaiterait demander la révision de ma " décision définitive ".

[5]          Conformément à ma " directive " du 21 avril 1997 et par suite de celle-ci, j"ai l"intention de mentionner et d"utiliser toute la preuve dont je suis saisi, qu"il s"agisse des affidavits à l"appui du mémoire de frais, du dossier et des registres de la Cour, ou des explications données verbalement ou présentées par écrit par les avocats, afin de déterminer la justesse de chaque article. J"aurai donc recours à tous les affidavits déposés dans la présente affaire, y compris les deux affidavits déposés après le 26 mars 1997, date de la convocation pour l"audience de taxation manquée. La taxation est une procédure administrative, qu"il ne faut pas confondre avec une procédure judiciaire ou quasi judiciaire au cours de laquelle il faut adhérer strictement aux règles d"administration de la preuve. Toutefois, en réponse à la demande de l"avocat de DuPont, j"indiquerai, lorsque c"est possible, les éléments de preuve sur lesquels je m"appuie pour prendre ma décision.

             -- La lettre " sous toutes réserves " du 25 juillet 1996

[6]          L"affidavit de Chantal Lapierre introduit en preuve une copie d"une lettre portant la mention [TRADUCTION] " sous toutes réserves " et datée du 25 juillet 1996, sur laquelle certains renseignements ont été supprimés. Cette lettre, selon l"avocat des défenderesses, a été écrite par l"avocat de DuPont pour régler certains des articles d"une version antérieure du mémoire de frais de la demanderesse, que celle-ci lui avait transmis le 13 mai 1996.

[7]          L"avocat de DuPont fait valoir que la lettre du 25 juillet 1996, dans la mesure où elle constituait une offre de règlement, n"a jamais été acceptée par la demanderesse et qu"elle a été retirée par la suite. Donc, selon son argumentation, la preuve contenue dans l"affidavit de Chantal Lapierre n"est pas pertinente par rapport aux questions à traiter en vue de la taxation.

[8]          Cette lettre est également non pertinente, selon l"avocat de DuPont, pour la simple raison que les sommes indiquées dans la lettre de DuPont étaient fondées sur une version antérieure du mémoire de frais (maintenant remplacée par un mémoire de frais révisé) et que ces sommes avaient été établies par la défenderesse après avoir passé en revue divers documents qui avaient été mis à la disposition de l"avocat de DuPont en mai 1996 lors d"une visite chez l"avocate de la demanderesse. Au moment où l"avocat de DuPont a passé en revue ces documents, aucun des trois affidavits originaux déposés à l"appui de la taxation n"avait été signifié [bien qu"on lui eût indiqué que les affidavits seraient identiques à ceux qu"il avait vus sous forme de projets]. Une bonne partie de la preuve contenue dans le second affidavit de Todd Harrold (déposé après l"ajournement du 26 mars 1997) n"apparaissait pas dans les documents que l"avocat de DuPont avait passés en revue en mai 1996. La conclusion qui s"impose, selon l"avocat, c"est que DuPont ne peut être tenue à des sommes établies en vue de régler, de bonne foi, certains articles taxables, alors qu"elles ont été établies sur le fondement d"éléments qui ont été remplacés par une preuve qui a été communiquée par la suite, laquelle a une incidence importante sur les sommes à allouer et, de rappeler l"avocat, n"a de toute façon jamais été acceptée par la demanderesse.

[9]          De son côté, l"avocate de la demanderesse est d"avis que l"officier taxateur ne devrait pas ignorer l"affidavit de Chantal Lapierre, auquel est annexée la lettre " sous toutes réserves " du 25 juillet 1996, pour la seule raison que la lettre faisait partie d"une offre de règlement qui a été retirée par la suite.

[10]          L"avocate de la demanderesse affirme que la seule partie de la lettre du 25 juillet 1996 qui constitue une offre de règlement est la première page, dont d"ailleurs toutes les sommes ont été supprimées. Elle soutient qu"aux pages 2 à 4 de cette lettre, l"avocat de la défenderesse reconnaît la caractère raisonnable des honoraires et débours exposés dans le mémoire de frais. Elle plaide en outre que cette reconnaissance du caractère raisonnable des honoraires et débours n"était pas subordonnée à l"offre de règlement faite par la défenderesse.

[11]          Il me semble que la lettre en question fait partie du domaine public, comme l"a jugé antérieurement le juge Tremblay-Lamer, et qu"il faut donc la regarder et l"apprécier comme tout autre élément de preuve. Il faut se rappeler que l"avocat de la défenderesse avait déjà inspecté, en mai 1996 au moment de sa visite au bureau de l"avocate de la demanderesse, la plus grande partie des documents à l"appui du premier mémoire de frais. La source de la contestation " amicale " dans la présente taxation, c"est que l"avocate de la demanderesse n"a pas annexé au mémoire de frais révisé ces pièces prétendument justificatives au moment où elle a demandé une convocation en vue de la taxation. J"ai déjà indiqué que l"omission n"est pas fatale pour la cause de la demanderesse. Cela étant dit, il reste à voir quel poids il faut accorder à l"argument, contesté par l"avocat de la défenderesse, que, par la lettre sous toutes réserves, il aurait reconnu, avec les quelques exceptions formulées évidemment, le caractère raisonnable des honoraires et débours demandés dans le mémoire initial.

[12]          En tant qu"officier indépendant chargé de la taxation de ces dépens, je dois surtout tirer mes propres conclusions au sujet du caractère raisonnable et de la nécessité. Je puis évidemment prendre en compte la lettre sous toutes réserves qui, comme nous l"avons vu, n"est plus protégée par le secret professionnel. En formant mes propres conclusions sur le caractère raisonnable de chaque article, je suis donc enclin à accorder un certain poids ou une certaine considération à l"affirmation contenue dans la lettre. Je dis un certain poids ou une certaine considération parce qu"on peut penser, sans trop de conjectures, que la lettre était vraisemblablement fondée sur l"information et les documents justificatifs qui avaient été fournis à l"avocat de la défenderesse en mai 1996. Il est donc tout à fait concevable que l"avocat, une fois en possession de plus de renseignements, ait porté un jugement différent sur les dépens demandés. Il faut donc, en toute logique, limiter la portée de cette lettre et de la reconnaissance qu"elle contient du caractère raisonnable des honoraires et débours aux sommes qui figuraient dans le mémoire initial. J"ai donc décidé de n"utiliser cette lettre que comme corroboration d"autres éléments de preuve sur les dépenses réclamées, et non comme preuve à elle seule du caractère raisonnable ou de la nécessité d"un article donné.

[13]          J"ajouterai que l"avocate de la demanderesse m"invite à conserver à l"esprit que la lettre sous toutes réserves avait été envoyée par la défenderesse à propos du mémoire de frais initial " annexé à l"affidavit de Donald Legal du 5 février 1997 " et que ce mémoire était différent du mémoire ultérieur " annexé à l"affidavit de Todd Harrold " en ce que les sommes du premier mémoire étaient plus élevées du fait du non-rajustement des frais de reprographie et des frais du Groupe cinéma, ces rajustements ayant entraîné une réduction de la somme totale de l"ordre de 200 000 $. L"avocate de la demanderesse estimait que la défenderesse ne subissait aucun préjudice du fait des rajustements, puisque ceux-ci n"ont pas affecté ou coloré, de manière significative, la déclaration générale sur le caractère raisonnable contenue dans la lettre. Je ne puis accepter cet argument, qui repose sur de pures conjectures. Rien n"aurait empêché, par exemple, l"avocat de la défenderesse, fort de ces nouveaux chiffres à la baisse qui avaient une incidence significative sur la somme globale demandée, de retourner voir son client et de lui recommander d"accepter un règlement à ces conditions. D"où ma décision de ne retenir la lettre sous toutes réserves que comme élément de preuve secondaire.

[14]          Même si mon analyse était erronée, le poids à accorder à la lettre en cause doit, de toute façon, être proportionné au contexte dans lequel et pour lequel elle a été envoyée, soit très tôt dans la procédure, après la réception d"un mémoire préliminaire et à la suite d"une visite de l"avocat de la défenderesse au cours de laquelle il a passé en revue les affidavits sous forme de projets, ainsi que les factures et reçus justificatifs qui avaient été obtenus à l"époque. Je ne suis aucunement disposé à interpréter la lettre sous toutes réserves comme un consentement. On pourrait sans doute soutenir que je suis lié par un consentement, à moins d"une preuve claire de fraude ou de collusion, mais je ne suis sûrement pas lié par une affirmation générale sur le caractère raisonnable des honoraires et des débours faite par l"un des avocats, quel que soit le contexte dans lequel elle a été faite. C"est à l"officier taxateur qu"il revient de juger le caractère raisonnable en matière de taxation des dépens. C"est dans cette perspective qu"il faut l"apprécier, non à partir des objurgations des parties.

             -- L"ordonnance du juge Wetston en date du 3 novembre 1997

[15]          L"ajournement de l"audience de taxation de la Section de première instance et les conséquences en découlant ont donné lieu à deux requêtes de l"avocat de DuPont. La première, datée du 1er octobre 1997, a déjà été discutée. La seconde visait à obtenir une ordonnance donnant à l"officier taxateur la directive de considérer l"allocation de dépens à DuPont (c"est-à-dire l"intimée dans l"audience de taxation) pour l"audience manquée du 26 mars et pour toute autre audience ultérieure concernant le procès (l"audience a eu lieu le 21 novembre).

[16]          Il est de droit constant que l"officier taxateur n"a pas la compétence d"attribuer ces dépens sans une ordonnance ou une directive de la Cour à cet effet [il a été porté à mon attention, toutefois, que ce pouvoir sera accordé aux officiers taxateurs dans le projet de Règles de la Cour fédérale (1998) , DORS/98-106, (1998) 132 Gazette du Canada, Partie II (n 4, 5/2/1998) (voir la Règle 408(3) concernant les taxations après le 25 avril 1998)].

[17]          Le 3 novembre 1997, le juge Wetston a prononcé l"ordonnance suivante :

                 [TRADUCTION] Que [l"officier taxateur] peut adjuger les dépens pour la préparation, les frais de déplacement et la présence à l"audience de taxation portant sur l"instruction de l"action, à Allied Signal Inc. et à DuPont à l"égard de la présence des avocats à Ottawa à cette fin, si [l"officier taxateur] décide, à sa discrétion, que ces dépens doivent être adjugés.                 

[18]          Les parties sont convenues que la meilleure façon de traiter cette question des dépens pour la préparation, le déplacement et la présence aux audiences de taxation consiste à présenter des mémoires de frais distincts après la taxation des présents dépens. Je passe donc aux articles contestés du mémoire de frais :

         II.      LES ARTICLES CONTESTÉS DU MÉMOIRE DE FRAIS

     2.      Pour tous les services fournis

         avant l"interrogatoire préalable             

         A.      Frais de déplacement et de subsistance      4 068,37 $

             des avocats (Annexe 2.1)      2 093,43 $

[19]          Le paragraphe 2 de l"ordonnance du juge Joyal accordant une augmentation des dépens est ainsi conçu :

                 Des honoraires et des débours raisonnables doivent être payés relativement aux frais de déplacement, de logement et de subsistance des avocats et des représentants du client pour leurs réunions pendant la durée de l"instance.                 

[20]          Les débours couverts à l"annexe 2.1 se rapportent, selon l"avocate de la demanderesse, à des réunions avec le client entre décembre 1989 et décembre 1990. Il s"agit de six réunions, dont trois à l"extérieur de la ville. Au cours de cette période, fait valoir l"avocate, les démarches suivantes ont été faites dans la procédure : l"examen de la défense, la préparation et le dépôt d"une réponse et défense reconventionnelle, la préparation d"un affidavit de documents ainsi que la préparation d"un représentant du client et de l"un des inventeurs, M. Degrassi, en vue de l"interrogatoire préalable.

[21]          L"avocate de la demanderesse soutient que, dans les circonstances, la demanderesse a le droit d"être remboursée des dépenses des deux avocats à l"occasion de toutes ces réunions, puisqu"il a été établi que l"ordonnance du juge Joyal ne contient pas de restrictions quant au nombre d"avocats, que les dépenses ont été faites dans le cours de l"instance et qu"elles sont raisonnables. À l"appui de sa position, elle cite l"affaire Kristan Seafoods International Inc. v. Tom Siddon, Minister of Fisheries and Oceans1 où l"officier taxateur a alloué les débours de deux voyages entre Halifax et Ottawa pour des réunions avec le ministre des Pêches et des fonctionnaires du ministère de la Justice en vue de préparer la défense dans une action qui n"a pas été instruite, pour le motif que les débours avaient été faits de manière raisonnable. De même, dans l"affaire Anheuser-Busch Incorporated c. Carling O"Keefe Breweries of Canada Limited,1 l"officier taxateur a alloué les frais d"un voyage à New York de l"avocat de l"appelante pour rencontrer l"avocat interne en vue de discuter de l"opportunité d"un appel au motif que c"était (page 4) " une démarche raisonnable de la part de la partie pour lui permettre de décider si elle allait ou non interjeter l"appel ".

[22]          L"avocat de la défenderesse formule deux critiques contre les débours établis à l"annexe 2.1, d"abord que la demanderesse ne devrait pas avoir droit au remboursement des frais de déplacement de plus d"un avocat, ensuite que les repas de Roger Criss, l"avocat interne de la demanderesse en matière de brevets, ne peuvent être recouvrés sur le fondement de l"affaire Beloit Canada Ltée v. Valmet-Dominion Inc.1.

[23]          Par sa première critique, l"avocat de la défenderesse conteste la nécessité de la présence de deux avocats aux six réunions mentionnées. Il fait valoir qu"on ne m"a présenté aucune preuve de la nécessité de la présence des deux avocats à ces réunions et me renvoie à l"affaire Carling O"Keefe Breweries of Canada Ltd. c. Anheuser-Busch Inc., et al.1, citée par J.F.D. Cousineau, officier taxateur, dans Nekoosa Packaging Corporation et al. v. AMCA International Ltd. et al.1, où l"officier taxateur Clegg a jugé (pages 10 et 11 de la décision Nekoosa) :

                 Il est raisonnable qu"un avocat et un client se rencontrent pendant le déroulement d"une action devant la Cour. Cependant, la partie qui succombe ne doit pas à mon avis assumer les frais de la présence de l"avocat chargé du dossier et d"un avocat associé à une telle réunion sans que l"affidavit prouve que la présence des deux avocats était réellement nécessaire.                 
                      (Soulignements ajoutés par la défenderesse)                 

[24]          L"avocat de la défenderesse conclut son premier moyen de contestation en plaidant que l"ordonnance du juge Joyal accordant une augmentation des dépens ne permet pas le recouvrement des frais de deux avocats pour ces services. L"ordonnance en question (paragraphe 2) permet le recouvrement pour les frais de déplacement, de logement et de subsistance pour permettre aux avocats ("counsel") d"avoir des réunions avec les " représentants " du client pendant la durée de la procédure. Selon la bonne interprétation de cette ordonnance, il prétend que les frais raisonnables d"un seul avocat peuvent être recouvrés. Si le juge avait voulu que les frais de deux avocats soient taxés, il l"aurait indiqué clairement comme il l"a fait aux alinéas 6 c) , d) et f) qui permettent expressément le recouvrement des honoraires et débours de deux avocats ou d"un avocat principal et d"un avocat en second pour certains services.

[25]          La seconde critique concerne expressément les dépenses d"un repas de Roger Criss, avocat interne de la défenderesse en matière de brevets. La défenderesse soutient que les frais du repas du 5 mars 1990 avec Roger Criss ne devraient pas être recouvrés sur le fondement de l"affaire Beloit (supra, note 5) où la Cour d"appel a jugé, à propos des frais de l"avocat interne en matière de brevets, dont la présence était présentée comme essentielle pour " donner des directives aux avocats et les aider à préparer et à conduire les appels " (à la page 92) :

                 ... il ne fait qu"une seule et même personne avec son employeur. Je ne connais aucun précédent qui appuie la proposition qu"une adjudication de dépens entre parties englobe les frais de déplacement et de subsistance qu"a engagés la partie qui a obtenu gain de cause pour donner des directives à l"avocat et pour comparaître à l"audience, aussi nécessaires qu"ils aient pu être.                 

[26]          En outre, plaide l"avocat de la défenderesse, on ne peut solliciter l"ordonnance du juge Joyal au point d"englober l"avocat interne en matière de brevets dans les termes " avocats " ou " représentants du client ". Si ces frais devaient être recouvrés, l"ordonnance l"aurait indiqué clairement, étant donné la décision rendue dans l"affaire Beloit (supra, note 5) environ quatre ans avant l"ordonnance du juge Joyal. Il est fait mention des " avocats internes " au paragraphe 3 de l"ordonnance. Il en résulte clairement que l"avocat interne ne fait pas partie des " représentants du client ". Le sens obvie du terme " avocats " au paragraphe 3 de l"ordonnance du juge Joyal entraîne que ce paragraphe vise à couvrir les frais d"un avocat, qui ne peut être l"avocat interne de la demanderesse.

[27]          Après avoir lu l"ordonnance du juge Joyal accordant une augmentation des dépens, ma réaction initiale a été que le terme " avocats " comprend les deux avocats de la demanderesse. Le juge Cattanach dans l"affaire Spur Oil Ltd. c. R.1 à la page 250 nous rappelle que le terme " counsel " est un nom à la fois pluriel et singulier. En outre, le contexte dans lequel le terme est employé nous aidera, pouvons-nous espérer, à déterminer s"il est pluriel ou singulier dans les circonstances de l"affaire.

[28]          L"ordonnance du juge Joyal emploie de nombreuses fois le terme " counsel ", parfois seul, parfois précédé ou suivi d"un déterminant. Comme exemples des contextes où le terme est employé seul, on peut citer les honoraires et débours raisonnables relativement aux frais de déplacement, de logement et de subsistance des avocats pour la préparation des dépositions ou des affidavits des témoins et pour leur présence au procès (au paragraphe 1 de l"ordonnance), les sommes à payer aux avocats relativement aux frais de déplacement, de logement et de subsistance pour les réunions avec le client pendant la durée de la procédure (paragraphe 2) et les sommes à payer aux avocats pour les essais inter partes effectués par les deux parties (paragraphe 3). Le terme " counsel " est également employé au pluriel dans la même ordonnance pour les honoraires et dépenses de deux avocats pour l"interrogatoire préalable (alinéa 6c) ), pour les honoraires augmentés de l"avocat principal et de l"avocat en second sur toutes les requêtes interlocutoires contestées (alinéa 6d)), et pour les honoraires d"avocat et de l"avocat en second augmentés pour le procès (alinéa 6f)).

[29]          Donc, dans la présente affaire tout au moins, le contexte global n"impose pas de réponse évidente. L"avocat de la défenderesse soutient que le juge Joyal a utilisé le singulier, et à d"autres moments le pluriel, avec une intention précise et qu"il aurait pu facilement indiquer le nombre d"avocats (en utilisant le pluriel) si cela avait été son intention dans certains paragraphes de l"ordonnance. Si séduisant soit l"argument, je ne le crois pas concluant en l"espèce. Dans le cas des emplois de ce qui paraît être le terme " counsel " au singulier (et cela n"est qu"une supposition), il faut se rappeler que le même terme a également la forme plurielle dans les mêmes paragraphes et les mêmes contextes. Il n"y a pas d"autres termes, déterminants ou indices qui en feraient inexorablement un singulier ou un pluriel. Cela devient donc une matière laissée à mon appréciation.

[30]          J"estime qu"il faut élargir le contexte et le considérer par rapport à l"ensemble de l"instance. Il s"agit vraiment d"une affaire complexe où les questions de fait et de droit et le volume de travail (ainsi que le démontre l"affidavit de Scott MacKendrick déposé par la défenderesse elle-même) ont eu une importance telle que j"estime raisonnable que deux avocats participent aux réunions avec le client. Je trouve également quelque appui pour ma conclusion dans le fait que la demande d"augmentation de dépens de la défenderesse, qui a donné lieu à la décision de Madame le juge Reed, ne semble pas compatible avec les opinions exprimées par son avocat sur la taxation. La défenderesse avait trois avocats pour défendre sa cause. On peut donc soutenir que l"augmentation des honoraires et débours obtenue par la défenderesse après le procès aurait, selon toute vraisemblance, inclus plus d"un avocat. En tous les cas, la formulation de cette ordonnance est identique à celle de l"ordonnance examinée et ne permet pas d"exclure une telle conclusion.

[31]          Enfin sur cette question, je suis porté à accueillir favorablement l"argument de la demanderesse que le tarif (à tout le moins l"ancien tarif), qui a toujours prévu les services d"un avocat, exige une directive de la Cour pour que les dépens couvrent les services de deux (ou plusieurs) avocats. Le paragraphe 2 de l"ordonnance du juge Joyal portait sur un article qui n"est pas compris dans le tarif et doit donc s"appliquer à plus d"un avocat. J"accepte donc la demande pour les services de deux avocats et, pour arriver à cette conclusion, j"ai passé en revue les pièces justificatives annexées au second affidavit de Todd Harrold, déposé le 17 juin 1997.

[32]          En ce qui concerne la seconde critique formulée par la défenderesse, j"accorde à l"avocate de la demanderesse que l"ordonnance du juge Joyal prévoit expressément au paragraphe 2 que la demanderesse a droit aux honoraires et débours raisonnables des représentants du client. Je relève également qu"il n"est aucunement précisé dans l"ordonnance que le représentant du client ne peut être l"avocat interne d"AlliedSignal, quoique le juge l"ait spécifiquement exclu au paragraphe 3 lorsqu"il alloue les honoraires et les dépenses pour les services d"avocat et pour les témoins experts pendant la durée des essais inter partes . Les sommes demandées sont allouées telles qu"elles sont exposées de façon détaillée dans l"affidavit de Donald Legal du 5 février 1997 et dans le premier affidavit de Todd Harrold également du 5 février 1997.

     2.      Pour tous les services fournis

         avant l"interrogatoire préalable             

         B.      Dépenses diverses (Annexe 2.2)      952,13 $

     768,89 $

[33]          On trouve sous cette rubrique six (6) articles de dépenses pour tous les services fournis avant l"interrogatoire préalable : frais de messagerie, frais de Cour (photocopies), interurbains, copies de brevets, frais de photocopie et frais de télécopieur. Selon l"avocate de la demanderesse, le seul point contesté sous cette rubrique est la proposition faite par la défenderesse de réduire de moitié les frais de photocopie.

[34]          Ainsi qu"il est indiqué dans les deux affidavits de Harrold déposés à l"appui de la taxation, les frais de photocopie sont de 0,08 $ par page, indique l"avocate. En outre, les frais de photocopie sont directement inscrits au dossier chaque fois qu"on fait une photocopie. Les frais indiqués à l"annexe 2.2 correspondent à la période allant de novembre 1989 à décembre 1990. Dans une affaire de cette ampleur et de cette complexité, soutient l"avocate, il est impossible de reconstituer exactement huit (8) années plus tard toutes les photocopies qui se sont faites. Toutefois, puisque les débours sont directement inscrits au dossier, elle soutient que les photocopies étaient nécessaires et essentielles au procès et que ces frais étaient occasionnés par le procès.

[35]          Les frais de photocopie couvrent, selon l"avocate de la demanderesse environ 4 000_ photocopies. Au cours de la période en question, les documents photocopiés devaient comprendre l"état de la technique antérieure cité dans la défense, c"est-à-dire douze (12) brevets et les documents annexés dans les affidavits de documents de la demanderesse et de la défenderesse. L"avocate ajoute que, contrairement à ce qui avait été affirmé par l"avocat de la défenderesse, chaque partie a fait des photocopies pour l"avocat adverse, sans les facturer. L"affidavit de documents de la demanderesse contenait soixante-dix (70) documents de plusieurs pages, tandis que celui de la défenderesse en contenait quarante et un (41). On peut vérifier ces chiffres dans les affidavits de documents et dans la défense qui font partie du dossier de la Cour. Elle arrive à la conclusion que les frais de photocopie énumérés à l"annexe 2.2 devraient être alloués intégralement.

[36]          L"avocat de la défenderesse s"y oppose en faisant valoir qu"on n"a fait aucun effort dans les affidavits déposés à l"appui pour expliquer le caractère raisonnable ou la nécessité des frais de photocopie. Dans ces affidavits et dans ses observations écrites, la demanderesse se contente de dire que ces frais ont été inscrits directement au dossier. Selon l"avocat de la défenderesse, la règle établie par la jurisprudence à l"égard des photocopies est la suivante :

                 Il est donc nécessaire pour la partie qui réclame les frais de photocopie de présenter à l"officier taxateur des éléments de preuve satisfaisants démontrant que les frais de                 
                 photocopie réclamés étaient essentiels à la conduite de l"action1.                 
                      (Souligné dans l"original.)                 

[37]          L"avocat de la défenderesse soutient qu"il n"y a aucune preuve (alors qu"il devrait y en avoir, comme le montre l"affaire Windsurfing1) sur les documents qui ont été photocopiés et sur la nécessité de la photocopie de ceux-ci. Étant donné l"absence de preuve, il est raisonnable, selon lui, de réduire de moitié les frais de photocopie, ce qui donnerait une somme de 768,89 $ pour cet article.

[38]          Je comprends que la différence que cherche à obtenir la demanderesse en sus de ce que la défenderesse accepte de payer est de l"ordre de 200 $. Dans un mémoire de frais

qui pourrait en théorie atteindre le demi-million de dollars, il s"agit d"une somme relativement modeste; néanmoins, il s"agit d"une question importante qui justifie, je crois, qu"on s"y arrête plus longuement.

[39]          La preuve fournie par la demanderesse consiste dans une déclaration qu"on retrouve dans deux affidavits de Todd Harrold, d"abord celui qui a été signé le 5 février 1997, auquel est joint une liste d"annexes indiquant les dépenses faites pour chaque article, ensuite son second affidavit, signé le 17 juin, où il est déclaré au paragraphe 8 : [TRADUCTION] " En ce qui concerne l"annexe 2.2, ainsi qu"il a été expliqué plus haut, les frais ont été directement inscrits au dossier ". Naturellement, cette preuve est complétée par les explications de l"avocate de la demanderesse, rapportées plus haut.

[40]          La preuve est ténue, certes, mais pas au point, me semble-t-il, de porter un coup fatal à la cause de la demanderesse. Un calcul rapide montre qu"il a fallu en gros 4 656 photocopies [(366,48 $ + 6 $) / 0,08 $] pour tous les services fournis avant l"interrogatoire préalable. Dans son mémoire, l"avocate de la demanderesse ne réclame de remboursement que pour 4 000 photocopies. Pour les motifs exposés plus loin, je n"ai pas d"hésitation à accepter, en l"espèce, ce chiffre de 4 000 photocopies comme raisonnable et nécessaire dans les circonstances. La somme finale devrait donc être de 320 $, soit 4 000 photocopies à 0,08 $. La somme finale pour l"annexe 2.2 devrait donc être ramenée à 905,65 $. Avant de passer à un autre point, je tiens à traiter de ce qui constitue une preuve suffisante pour un article comme les photocopies.

[41]          Les déclarations des deux affidavits mentionnées plus haut sont minces, d"un genre proche de celui des affirmations catégoriquement rejetées par mon collègue G.M. Smith, officier taxateur, dans l"affaire F-C Research Institute et al. v. The Queen et al.1 Cette décision a été rendue après l"affaire Diversified (supra, note 9), souvent citée, dans laquelle le juge Teitelbaum n"avait rien alloué pour les frais de photocopie par suite de ce qu"il appelle l"absence de toute preuve pour démontrer que les photocopies étaient " essentielles à la conduite de l"action ". Peu de temps après cette décision, l"officier taxateur C.E. Stinson a abordé la même question dans l"affaire United Terminals Limited v. The Minister of National Revenue et al.1 Dans une affaire récente de taxation, j"ai eu l"occasion de traiter plus en détail de ces trois décisions1. Voici l"analyse que j"ai faite, qui explique, je l"espère, les motifs qui me conduisent à taxer les frais de photocopie dont il s"agit comme je l"ai fait :

                      Lorsque j"ai examiné pour la première fois la question des photocopies faites à l"interne dans l"affaire Diversified , j"estimais que j"avais le pouvoir discrétionnaire pour me fonder, dans les cas semblables à ceux dont j"étais saisi à l"époque, sur mon expérience et mes connaissances afin de rendre une décision, compte tenu de la preuve très mince présentée au sujet de la quantité de photocopies et du caractère raisonnable des frais de photocopie réclamés. Je me suis donc fondé sur mon expérience en qualité d"officier taxateur et sur mes connaissances au sujet des réalités se rattachant à la pratique du droit pour accepter, dans l"affaire Diversified , un nombre " arbitrairement " réduit de photocopies, en raison de l"absence de preuve concernant toutes les photocopies qui avaient été faites. En l"absence de preuve factuelle, j"ai également accepté, en me fondant une fois de plus sur mon expérience et sur mes connaissances, un taux de 0,25 $ la page, qui m"apparaissait raisonnable dans les circonstances. Ce taux est encore fréquemment accordé par d"autres officiers taxateurs saisis d"une preuve comparable ou d"une preuve aussi ténue.                 
                      La décision que j"avais rendue dans l"affaire Diversified a été portée en appel devant la Section de première instance, où le juge Teitelbaum a conclu que j"avais commis une erreur de droit en acceptant un nombre " arbitrairement " réduit de photocopies sans preuve ou justification. Le juge Teitelbaum a également formulé des commentaires sur le taux de 0,25 $ la page qui était réclamé. Voici un extrait de sa décision :                 
                         Il est donc nécessaire pour la partie qui réclame des frais de photocopie de présenter à l"officier taxateur des éléments de preuve satisfaisants démontrant que les frais de photocopie réclamés étaient essentiels à la conduite de l"action.                         
                         En l"espèce, je n"ai pas à me prononcer sur le sens de l"expression " ayant été essentiels à la conduite de l"action " car aucune preuve n"a été présentée à l"officier taxateur pour démontrer que les photocopies étaient " essentielles à la conduite de l"action ". La seule preuve soumise par les demanderesses au sujet des photocopies se trouve au paragraphe 23 de l"affidavit signé par Christopher Pibus le 11 juin 1990.                         
                         -- En ce qui concerne les frais de photocopie, on m"informe et je crois sincèrement que le système informatisé utilisé par notre cabinet facture un tarif de 25 cents par feuille photocopiée.--                         
                         L"officier taxateur a donc commis une erreur de droit en accordant la somme de 4 635,43 $.                         
                         Je formulerai également des commentaires au sujet des frais de 25 cents qui sont facturés par feuille photocopiée.                         
                         En toute déférence, je ne peux souscrire au raisonnement de l"officier taxateur. Les photocopies ne constituent un débours                         
                         admissible que si elles sont essentielles à la conduite de l"action. Elles visent à défrayer le plaideur du coût réel de la photocopie. Les frais de 25 cents la feuille réclamés par le cabinet de l"avocat des demanderesses constituent des frais arbitraires et ils ne correspondent pas au coût réel de la photocopie. Les activités d"un cabinet d"avocats ne consistent pas à réaliser un bénéfice sur ses photocopieurs. Le cabinet d"avocats doit faire payer le coût réel et il incombe à celui qui réclame ces débours de convaincre l"officier taxateur du coût réel des photocopies essentielles.                         
                      En juin 1991, mon collègue C. Stinson, officier taxateur, a eu pour la première fois l"occasion d"examiner cette question par suite de la décision que le juge Teitelbaum avait rendue dans l"affaire Diversified . Dans l"arrêt United Terminals Ltd., l"officier taxateur Stinson a fait une distinction entre l"arrêt Diversified et l"affaire dont il était saisi en soulignant la dualité apparente du raisonnement que le juge avait adopté. Selon l"officier taxateur Stinson, le juge Teitelbaum a statué, d"une part, que j"avais commis une erreur de droit en accordant un nombre arbitraire de photocopies en l"absence d"éléments de preuve clairs justifiant la nécessité et le caractère raisonnable des photocopies qui ont été faites et, d"autre part, il a conclu que j"avais eu raison d"accorder, sans justification et sur une base purement discrétionnaire, un montant à l"égard des frais de déplacement réclamés. Invoquant cette contradiction apparente dans le traitement qui a été accordé à des débours comparables, l"officier taxateur Stinson a cru qu"il était autorisé à continuer à exercer son pouvoir discrétionnaire au sujet des débours qui n"ont pas été établis ou dont la preuve est incomplète.                 
                      En ce qui a trait aux commentaires que le juge Teitelbaum a formulés au sujet du taux de 0,25 $ la page que j"ai accordé pour les photocopies, l"officier taxateur a jugé que ces commentaires étaient des remarques incidentes et a accordé le même taux de 0,25 $ la page, en se fondant sur ce qu"il a appelé les " réalités commerciales se rattachant à la pratique du droit ". Un examen plus approfondi de l"affaire United Terminals indique que mon collègue était manifestement saisi d"une preuve irréfutable indiquant que les photocopies faites à l"interne étaient essentielles et qu"il a estimé que, s"il devait appliquer à la lettre le raisonnement du juge Teitelbaum et n"accorder aucun montant en raison de l"absence d"éléments de preuve concrets au sujet du taux demandé, il refuserait par le fait même à une partie gagnante le droit légitime d"être indemnisée (bien que partiellement) de ses frais, y compris les débours raisonnables, et irait à l"encontre des réalités commerciales se rattachant à la pratique moderne du droit.                 
                      Plus récemment, mon collègue G. Smith, officier taxateur, a examiné et comparé les deux arrêts Diversified et United Terminals dans l"affaire F-C Research Institute Ltd. , précitée, et a conclu comme suit en se fondant sur les faits à l"origine du litige et sur la preuve qui lui avait été présentée, que :                 
                         À mon avis, dans un mémoire, la simple énumération des débours, accompagnée d"une description générale et appuyée seulement d"une déclaration laconique relative au caractère raisonnable et nécessaire des débours , ne fournit pas suffisamment d"éléments d"information à partir desquels l"officier taxateur peut s"acquitter de ses fonctions et arriver à la conclusion que les débours réclamés étaient essentiels à la conduite des procédures, qu"ils ont été engagés avec prudence ou que la quantité ou le taux retenu, selon le cas, était raisonnable dans les circonstances. Cette conclusion se fonde également sur les principes dégagés par la Cour dans [...] Diversified Products Corporation v. Tye-Sil Corporation Limited [...]. À partir de ces décisions, je conclus que [...] les débours doivent être appuyés d"une preuve qui établit, de façon satisfaisante, que les frais réclamés satisfont aux critères du caractère raisonnable et de la nécessité.                         
                      À première vue, l"officier taxateur Smith semble adopter un raisonnement plus strict pour l"évaluation des débours, mais va-t-il aussi loin que d"exiger dans chaque cas une preuve absolue et détaillée du genre que propose le juge Teitelbaum dans l"arrêt Diversified ? Sans chercher à interpréter le raisonnement de l"officier taxateur Smith, je ne le crois pas. En fait, d"un point de vue plus général, un même fil conducteur caractérise les deux arrêts F-C Research Institute et United Terminals. Il s"agit de l"obligation de présenter une preuve suffisante ou raisonnable pour convaincre l"officier taxateur que les frais ont été engagés. Tout devient ensuite une question de degré de la preuve. Une déclaration générale semblable à celle que le juge Teitelbaum a critiquée dans l"affaire Diversified et qui a également été commentée dans l"arrêt F-C Research Institute ne suffirait pas à convaincre un officier taxateur. De la même façon, une preuve absolue et détaillée ne constitue pas une condition indispensable à respecter pour qu"un montant puisse être accordé. Comme l"officier taxateur Stinson l"a dit à maintes reprises, plus la preuve est détaillée, moins le résultat sera lié au pouvoir discrétionnaire de l"officier taxateur, mais cela ne signifie pas que celui-ci ne peut invoquer son pouvoir discrétionnaire pour rendre une décision en l"absence d"une preuve convaincante.                 

[42]          Comme l"explique l"avocate de la demanderesse dans son mémoire, le gros des photocopies se composait principalement des documents énumérés dans les affidavits de documents déposés par les deux parties et portait sur la période allant de novembre 1989 à décembre 1990. Au total, 111 documents de plusieurs pages ont été photocopiés et, selon ce qu"on prétend, il a été nécessaire dans certaines circonstances de faire plus d"une photocopie de certains documents. En fait, certains documents ont été reproduits en quatre et parfois cinq copies, à l"intention des avocats des deux parties et de leur client respectif ou de son représentant. Quoi qu"il en soit, je dois admettre que la preuve sur ce point n"est pas suffisamment détaillée et complète pour qu"on puisse s"y reporter facilement et qu"il suffise de la parcourir pour s"y fier. Les journaux d"exploitation et les tableaux informatiques qu"on joint de plus en plus souvent aux affidavits à l"appui pourraient sûrement être rendus plus détaillés et complets, de manière à comprendre, par exemple, des renseignements utiles comme le titre de documents photocopiés, le nombre de pages photocopiées, le nombre de copies produites et leur destination. Cette information non seulement rendrait le processus de taxation plus facile pour l"officier taxateur, mais permettrait aussi à ce dernier d"établir la taxation avec une plus grande précision et une plus grande certitude d"indemniser la partie qui a gain de cause à raison de ses débours pour le reste parfaitement légitimes1.

[43]          Dans une décision du 4 novembre 1997, Faulding (Canada) Inc. v. Pharmacia S.P.A.1, la Cour (le juge McKeown) a adopté, semble-t-il, le critère de l"affaire Diversified à l"égard des frais internes admissibles, comme les photocopies. Cependant, rien dans l"affaire Faulding (Canada) Inc. (supra, note 15), ni d"ailleurs dans l"affaire Diversified , ne suggère que, pour satisfaire à ce critère, il faille une preuve absolue et au-delà de tout doute sur la nécessité et le caractère raisonnable des frais. Il incombe plutôt à la partie dont le mémoire est taxé de me convaincre, en fonction de la prépondérance de la preuve, de la nécessité et du caractère raisonnable des dépenses, ce qui a été fait en l"espèce.

[44]          Une dernière remarque sur la question. Je relève que l"avocat de la défenderesse propose qu"on effectue une réduction arbitraire de 50 % de cet article. On peut opposer simplement comme réponse que c"est là le genre de réduction arbitraire qui a été expressément rejeté par le juge Teitelbaum dans l"affaire Diversified . En outre, pourquoi une réduction de 50 %, plutôt que de 25 % ou de 75 %? Si la charge de la preuve incombe à la demanderesse sur ce point comme pour tous les autres débours, il reste que l"avocat de la défenderesse ne m"a pas indiqué de photocopies superflues qui auraient été faites au cours de cette période. Bien que la preuve eût pu être plus détaillée, comme je l"ai indiqué plus haut, j"avais néanmoins, après avoir parcouru le dossier et les explications de l"avocate de la défenderesse, la preuve incontestable qu"au moins 4 000 photocopies étaient nécessaires et sont raisonnables dans les circonstances.

     3.      Pour l"interrogatoire préalable             

         B.(v)      Frais de déplacement de Richard Combs      984,11 $

             (annexe 3.4)      923,08 $

[45]          Selon la formulation de l"avocate de la demanderesse, le seul désaccord entre les parties touchant les débours de cette annexe se rapporte aux frais de repas classés comme " personnels " par M. Combs et à la portion repas des frais de Roger Criss qui, soutient l"avocat de la défenderesse, ne devrait pas être allouée sur le fondement de l"affaire Beloit (supra, note 5).

[46]          M. Combs a été interrogé à Ottawa en décembre 1990 au sujet de l"historique de la société demanderesse. Sa note de frais pour les deux jours passés à Ottawa en vue de l"interrogatoire comporte diverses sommes pour des repas " personnels " à côté d"une somme pour les repas " d"affaires ". Sa note semble distinguer clairement entre les deux types de repas. La position de l"avocat de la défenderesse est qu"il faudrait refuser la portion repas " personnels ". De son côté, l"avocate de la demanderesse explique que cette distinction apparente est dépourvue de conséquences, puisque le classement des repas comme personnels ou d"affaires est lié à une politique interne de la société demanderesse et ne devrait pas influer sur l"admissibilité des frais en vue de la taxation.

[47]          J"en suis venu à la conclusion, non sans quelques hésitations cependant, de refuser les repas " personnels " (25 $), simplement parce qu"on ne m"a pas proposé d"explication valable de la distinction faite dans la note de frais. Je remarque que la même distinction a été faite par M. Degrassi dans sa note de frais (pièce C-2), mais que la question n"a pas été discutée du fait que les deux parties se sont entendues sur une somme pour les dépenses de M. Degrassi avant la taxation.

[48]          En ce qui touche le second point sur cet article, c"est-à-dire les repas de Roger Criss (avocat interne de la demanderesse), je suis d"accord avec la demanderesse que rien n"empêche le recouvrement des repas de l"avocat interne d"AlliedSignal à titre de représentant de cette société selon le paragraphe 2 de l"ordonnance du juge Joyal. Pour arriver à mes conclusions en ce qui concerne les frais de M. Combs et de M. Criss, je me fonde sur la preuve contenue dans le second affidavit de Todd Harrold, daté de juin 1997. La somme totale allouée pour cet article s"établit à 959,41 $.

     3.      Pour l"interrogatoire préalable             

         C.      Dépenses diverses pour les articles A et B      82,66 $

             (annexe 3.5)      49,82 $

[49]          Le seul désaccord entre les parties concerne encore les frais de photocopie. Dans l"annexe 3.5, les frais portent sur 821 photocopies. L"avocate de la demanderesse prend la position que ces frais ont été faits pendant l"interrogatoire préalable au cours duquel des photocopies de documents ont été faites parce qu"elles étaient nécessaires. Elle fait valoir que ces frais ont manifestement été faits pendant l"instance et qu"ils sont raisonnables, de sorte qu"ils devraient être alloués.

[50]          L"avocat de la défenderesse oppose que la seule preuve concernant le caractère raisonnable et la nécessité se trouve dans le second affidavit de Todd Harrold, où celui-ci déclare que ces frais ont été directement inscrits au dossier. C"est là une preuve manifestement insuffisante, soutient l"avocat, avant de proposer une réduction de 50 % des frais de photocopie réclamés.

[51]          Ce qui distingue ces frais de photocopie de ceux dont nous avons traité auparavant à propos de l"article 2B, c"est l"absence d"explications raisonnables sur les documents photocopiés et les personnes auxquelles ces photocopies étaient destinées. La preuve présentée ici est loin de valoir la preuve présentée à propos de l"article 2B et, en l"absence d"autres explications, je ne puis allouer le débours, selon le critère établi dans l"affaire Diversified1. La preuve administrée ici ne serait pas jugée satisfaisante même selon l"attitude la plus libérale, du genre de celle que j"ai adoptée dans l"affaire Melo"s (supra, note 13), exposée plus en détail à propos de l"article 2B. Pour les raisons ci-dessus, la somme allouée pour l"article 3C est de 16,98 $.

     4.      Pour la préparation et la présentation

         des requêtes interlocutoires

         A.      Requête par écrit pour obtenir une ordonnance      75,00 $

             selon la règle 480, le 13 juillet 1987 (sic)          0,00 $

[52]          L"avocate se fonde d"abord sur l"ordonnance du juge Joyal et ensuite sur l"affaire Teledyne Industries Inc. et al. v. Lido Industrial Products Ltd.1 pour demander une somme à cet article. Le juge Dubé a écrit que les dépens suivent le sort de l"affaire sauf ordonnance contraire et a cité le juge en chef Jackett qui avait auparavant énoncé la règle dans Crabbe c. L"honorable Donald C. Jamieson1.

[53]          L"avocat de la défenderesse s"oppose au motif que les ordonnances interlocutoires sont muettes quant aux dépens des requêtes et qu"on ne peut invoquer l"ordonnance du juge Joyal que pour augmenter le montant des dépens qui avaient déjà été adjugés. Il cite également Orkin1 qui affirme (à la page 1-14) :

                 [TRADUCTION] ... si le jugement donne gain de cause à une partie mais sans qu"une ordonnance soit faite quant aux dépens, aucuns dépens ne peuvent être taxés par l"une ou l"autre des parties de sorte que lorsqu"une question est tranchée sur requête ou après instruction sans mention des dépens, c"est comme si le juge avait dit qu"il jugeait bon de ne pas faire d"ordonnance sur les dépens.                 

[54]          L"avocat de la défenderesse conclut en disant que cette règle a été suivie par les autres officiers taxateurs. Il cite en particulier les affaires Anglo-Marine Inc. v. 2963-5976 Quebec Inc.1, Penthouse International Ltd. v. 163564 Canada Inc.1 et Gucci Guccio S.p.a. v. Meubles Renel Inc. et al.1.

[55]          L"ordonnance du juge Joyal dispose au paragraphe 6 :

                 Les honoraires alloués pour les services suivants devront être portés au-delà des montants indiqués dans le tarif B aux montants suivants :                 
                         d) honoraires pour la préparation et la présentation par les avocats de toutes les requêtes interlocutoires contestées augmentés par demi-journée à la Cour à 250 $ pour l"avocat principal [al. 1(1)d) ] et à 150 $ pour l"avocat en second.                         

[56]          Bien que la référence à l"alinéa 6d) de l"ordonnance du juge Joyal soit utile, elle n"est pas déterminante, puisqu"il s"agit ici d"une requête " sur consentement ", et non d"une requête " contestée ". Les règles applicables à la présente taxation sont celles qui étaient en vigueur lors de l"introduction de l"action, c"est-à-dire en 1989. Comme le soutient l"avocate de la demanderesse et comme le confirme l"affaire Teledyne (supra, note 15), il y avait à l"époque une règle prévoyant que les dépens suivent le sort de l"affaire. Pour cette raison, j"alloue la somme demandée, 75 $.

     4.      Pour la préparation et la présentation

         des requêtes interlocutoires

         B.      Requête par écrit pour obtenir une ordonnance      75,00 $

             conservatoire, le 2 août 1990              0,00 $

[57]          Il s"agit également d"une requête sur consentement. J"alloue la somme demandée (voir l"article 4(A) ci-dessus).

     4.      Pour la préparation et la présentation

         des requêtes interlocutoires

         B.      Requête par écrit pour obtenir une ordonnance         

             conservatoire, le 2 août 1990                     

             i.      Divers (annexe 4.1)              12,71 $

                                     0,00 $

         C.      Requête contestée pour contraindre à      250,00 $

             répondre, le 19 juin 1992              0,00 $

             i.      Frais de déplacement et de subsistance          383,51 $
                 des avocats (annexe 4.2)                  0,00 $
             ii.      Divers (annexe 4.3)                      76,71 $

                                             0,00 $

         D.      Requête contestée pour obtenir la production 250,00 $

             de données électroniques, le 26 août 1992      0,00 $

             a)      Frais de déplacement et de subsistance          45,29 $
                 des avocats (annexe 4.4)                  0,00 $
             b)      Divers (annexe 4.5)                      93,60 $

                                             0,00 $

[58]          La portion honoraires des articles ci-dessus est allouée puisqu"il s"agit d"honoraires couverts par l"ordonnance du juge Joyal accordant une augmentation des dépens [alinéa 6d) reproduit plus haut] et qui sont raisonnables dans les circonstances.

[59]          Quant à la portion débours, ceux-ci sont alloués parce qu"ils sont raisonnables et qu"ils sont nécessaires à la conduite de l"instance.

     5.      Pour les essais inter partes

     A.      Pour les essais inter partes effectués par

         la demanderesse à Morristown (New Jersey)

         i.      En juin 1992

             a)      Frais de déplacement et de subsistance          4 411,43 $

                 des avocats (annexe 5.1)                  2 549,51 $

[60]          Ainsi que l"explique l"avocate de la demanderesse, des essais préparatoires au procès ont été effectués dans le cours de l"instance à la fois par la demanderesse et par la défenderesse. La demanderesse a effectué des essais préparatoires à Morristown (New Jersey) en juin 1992 et en avril 1993. La défenderesse a effectué des essais préparatoires à Kingston (Ontario) en janvier 1993, à Wilmington (Delaware) en février 1993 et à Kingston (Ontario) en mai 1993. L"ordonnance du juge Joyal dispose au paragraphe 3 :

                 3. Des honoraires et des débours raisonnables doivent être payés relativement aux frais de déplacement, de logement et de subsistance des avocats (à l"exclusion des avocats internes d"AlliedSignal Inc.) et des témoins experts pour les essais inter partes effectués par la demanderesse ou pour son compte à Morristown (New Jersey) et par les défenderesses ou pour leur compte à Kingston (Ontario) et à Wilmington (Delaware).                 

[61]          Encore ici, d"après le mémoire de l"avocate de la demanderesse, les essais inter partes ont été nombreux et complexes. Ils étaient essentiels au procès et les avocats ainsi que les témoins experts y ont assisté et ont participé à leur élaboration. Les essais préparatoires au procès ont fait l"objet des affidavits d"experts déposés au procès et les décisions de la Section de première instance et de la Cour d"appel tiennent compte de leurs résultats. À titre d"exemple, l"avocate dans son mémoire rappelle que les essais préparatoires portant sur la question de la cristallinité sont longuement discutés dans la décision du juge Reed à la page 33 de la version non publiée. De même, les essais préparatoires sont discutés à propos de la question de la polyoléfine aux pages 24 et suivantes de cette décision non publiée. La Cour d"appel se fonde également sur les essais préparatoires pour conclure à la contrefaçon et l"avocate me renvoie à l"arrêt de la Cour d"appel annexé à ses observations.

[62]          L"avocate m"a convaincu que les essais préparatoires au procès étaient essentiels à la procédure et qu"ils correspondent étroitement à l"ordonnance du juge Joyal. Il reste donc à décider du caractère raisonnable des sommes demandées.

[63]          L"avocate de la demanderesse soutient que, en ce qui touche l"article a) , il n"y a pas de restriction imposée quant au nombre d"avocats pouvant assister aux essais par l"ordonnance du juge Joyal et que les frais de déplacement et de subsistance pour deux avocats (Me MacKlin et elle-même) devraient être alloués. Elle prend la position que, si le juge Joyal avait souhaité restreindre le nombre d"avocats, il aurait ajouté des mots pour le préciser, c"est-à-dire que l"ordonnance aurait prévu les frais pour un avocat. Tel qu"il est utilisé au paragraphe 3 de l"ordonnance, le terme anglais " counsel " peut embrasser plus d"une personne, ainsi que nous l"avons vu plus haut.

[64]          Naturellement, l"avocat de la défenderesse soutient au contraire que l"ordonnance du juge Joyal n"autorise pas deux avocats, mais un seul.

[65]          Pour les raisons déjà énoncées, j"estime que les frais de déplacement et de subsistance de deux avocats étaient à la fois raisonnables et nécessaires en l"espèce et que la formulation de l"ordonnance n"est pas suffisamment restrictive pour justifier l"interprétation qu"elle n"autorise qu"un seul avocat. Les débours en question sont justifiés par les reçus annexés au second affidavit de Harrold et sont alloués.

     5.      Pour les essais inter partes

     A.      Pour les essais inter partes effectués par la

         demanderesse à Morristown (New Jersey)

         i.      En juin 1992

             b)      Frais de déplacement et de subsistance          5 638,90 $

                 des témoins experts (annexe 5.2)              3 123,19 $

[66]          Les honoraires et les débours de l"annexe 5.2 sont ceux de William MacKnight, l"un des témoins experts de la demanderesse. M. MacKnight a témoigné sur la question de savoir si le deuxième composant de la pellicule de DuPont était une polyoléfine. Le juge Reed a noté : " J"ai trouvé la déposition de M. MacKnight très convaincante " (page 27 de la décision)1.

[67]          Les honoraires de M. MacKnight étaient de 1 200 $ par jour pour les services précédant son témoignage au procès. L"avocat de la demanderesse soutient que les essais préparatoires au procès étaient une composante essentielle du témoignage de M. MacKnight au procès, que la préparation en vue de ces essais et la présence à ces essais étaient indispensables et faisaient partie de la préparation de M. MacKnight en vue du procès. M. MacKnight a pris une part active, selon l"avocate, à la conception des essais préparatoires et a mentionné ces essais dans son affidavit d"expert et dans sa déposition au procès, laquelle, se fait fort de rappeler l"avocate, a été jugé convaincante par le juge de première instance.

[68]          De son côté, l"avocat de la défenderesse attaque le caractère raisonnable des honoraires de 1 200 $ par jour, demandés par M. MacKnight. Il soutient qu"on n"a fait aucun effort dans les affidavits à l"appui pour justifier le caractère raisonnable de ce taux, qui est identique à celui qui est alloué pour la préparation du procès, ce qu"il prétend trop généreux. Étant donné l"absence de toute explication dans les affidavits à l"appui justifiant le taux de 1 200 $ par jour, il m"invite à réduire ce taux de moitié, pour tenir compte du fait que sa présence à l"inspection était plutôt destinée à recueillir des faits qu"à préparer sa déposition au procès.

[69]          L"avocate de la demanderesse conteste la qualification que fait l"avocat de DuPont des essais préparatoires comme une simple " inspection " visant à rassembler des faits.

[70]          L"ordonnance du juge Joyal accordant l"augmentation des dépens dispose au paragraphe 1 :

                 Des honoraires et des débours raisonnables doivent être payés relativement aux frais de déplacement, de logement et de subsistance des témoins et avocats, notamment pour la préparation des déclarations de témoins ou des affidavits de :                 
                      William J. MacKnight                 
                      John P. Sibilia                 
                      Sean Curran,                 
                 pour la préparation de leur déposition à l"instruction et pour la durée entière de leur présence à l"instruction selon l"alinéa 1(2)a) du tarif B.                 

[71]          Certes, une partie a le droit d"engager l"expert ou les experts de son choix pour faire avancer sa cause, mais cela ne signifie pas que le succombant doive immanquablement payer la note de l"expert ou des experts de la partie qui a gain de cause sans contester les honoraires et les débours demandés. La jurisprudence regorge d"affaires où l"on attaque de telles notes, fondamentalement sur deux fronts : sur le premier, on met en cause le caractère raisonnable des honoraires demandés, et sur le second, on attaque des débours qui correspondent à des articles qui figurent d"une manière parfaitement légitime dans un mémoire de frais en disant qu"ils dénotent un train de vie de riche. En d"autres termes, le niveau d"expertise nécessaire dans une affaire donnée peut justifier qu"on engage la " cadillac " des témoins experts, mais cela ne signifie pas que le succombant devra nécessairement payer la " cadillac " si l"on pouvait faire appel à d"autres témoins experts qui demandaient des honoraires moindres. Cette attitude prudente est exprimée par le juge Sirois de la Cour du Banc de la Reine de Saskatchewan dans l"affaire Angelstad v. Frederick Estate1 :

                 [TRADUCTION] Certains témoins experts semblent réclamer tout ce que le client peut payer, tandis que d"autres ont une attitude très raisonnable à l"égard de la rémunération qu"ils reçoivent pour témoigner devant la Cour. Cela a pour effet de placer l"avocat dans une position peu enviable lorsqu"il estime que le témoignage de l"expert est important pour la cause de son client parce qu"il croit nécessaire de citer l"expert à témoigner quel qu"en soit le coût. Si cette décision peut être acceptable et légitime du point de vue de l"avocat, cela ne signifie pas que la Cour approuvera nécessairement les honoraires de l"expert à l"égard d"un poste qui peut être imputé en entier à la partie qui n"a pas eu gain de cause. Il semble que les avocats en soient venus en pratique à payer tout simplement la facture d"honoraires de l"expert quitte à tenter de la faire passer pour un débours. L"avocat qui cherche à obtenir le paiement des frais du témoin expert a le fardeau de justifier la dépense en ce sens que la partie qui n"obtient pas gain de cause ne devrait pas être tenue de payer des coûts qui ne sont pas raisonnables eu égard à l"importance du rôle joué par la déposition du témoin dans l"issue du procès et à la complexité de l"expertise.                 

[72]          La note annexée comme pièce E-2 au second affidavit de Todd Harrold indique que les frais de voyage de M. MacKnight pour les trois jours à Morristown s"élèvent à 446,90 $. La note comprend des frais de déplacement en voiture (350 milles), des frais d"hôtel pour trois nuits (les 22, 23 et 24 juin), un dîner le 22 et des petits-déjeuners les trois jours. Je n"ai aucune difficulté à juger que ces frais de déplacement et de logement sont raisonnables et doivent être alloués intégralement.

[73]          La note d"honoraires de l"expert soulève plus de difficultés. Pour les trois jours d"essais préparatoires, M. MacKnight a présenté à la demanderesse une note de 3 600 $ US. Le juge Joyal a clairement donné la directive d"allouer une somme pour la préparation de ce témoin. Les parties ont potentiellement distingué deux phases dans la préparation, qui varient selon le côté où l"on se place. La première phase possible consiste dans les essais préparatoires au procès. L"avocate de la demanderesse fait valoir que ces essais forment une partie indissociable de la préparation en vue de la déposition, tandis que l"avocat de la défenderesse soutient que ces essais doivent être distingués de la préparation en vue de la déposition et ne visaient qu"à recueillir les faits. La seconde phase, si l"on accepte la théorie de l"avocat de la défenderesse, consiste dans la préparation immédiate en vue de la déposition. Dans l"hypothèse où je conclurais qu"il y a eu effectivement deux phases distinctes dans la préparation en vue de la déposition, je devrais décider s"il faut appliquer à chacune le même taux pour la préparation du procès.

[74]          Après avoir passé en revue les arguments des parties, j"en arrive à la conclusion inéluctable que je ne puis dissocier les essais préparatoires de la préparation immédiate en vue de la déposition, à l"encontre de la position de l"avocat de la défenderesse, et je décide donc que les essais préparatoires ont formé une partie indissociable (" partie intégrante " pour reprendre l"expression consacrée) de la préparation du témoin expert en vue du procès. Je passe maintenant au caractère raisonnable des honoraires payés à M. MacKnight.

[75]          J"ai lu la jurisprudence proposée par les parties et on trouve le même thème qui revient dans la plupart des affaires1. Je note en particulier les lignes directrices suivantes :
     (1)      L"engagement d"un expert doit, dans les circonstances du moment, constituer une représentation prudente et raisonnable du client;         
     (2)      L"engagement de l"expert ne doit pas constituer un chèque en blanc pour la taxation;         
     (3)      Quel poids le juge a-t-il accordé au témoignage de l"expert?         

[76]          En l"espèce, je suis d"opinion qu"il était prudent et raisonnable de la part de l"avocat de la demanderesse, compte tenu de la matière du procès et plus particulièrement de la complexité, de l"importance et du volume de l"affaire, d"engager un expert comme M. MacKnight pour témoigner quant à la polyoléfine contenue dans la pellicule attaquée. M. MacKnight a également témoigné au sujet de la cristallinité. En outre, par voie de conséquence, je suis d"avis que l"engagement de M. MacKnight ne constituait pas un chèque en blanc en vue de la taxation. M. MacKnight était amplement qualifié pour témoigner sur les questions mentionnées plus haut et son témoignage était crucial pour la cause de la demanderesse. Enfin, en ce qui concerne le poids accordé au témoignage de l"expert par le juge, je note que le juge Reed a trouvé sa déposition très convaincante et que Madame le juge Desjardins en fait également mention dans ses motifs pour la Cour d"appel.

[77]          J"en viens maintenant aux honoraires qui ont été effectivement demandés par l"expert. Ils peuvent paraître élevés à première vue, mais sont fonction, je pense, de ses compétences et semblent être conformes à ce que permet le marché pour ce type d"expertise. Ce n"est pas un cas où il s"agissait de choisir entre une " cadillac " et une " volkswagen " en ce qui concerne le témoignage d"un expert. J"estime qu"il était nécessaire pour l"avocate de la demanderesse de retenir les services de M. MacKnight et d"engager ces frais pour faire progresser la cause de son client. J"alloue donc la somme demandée.

     5A.      Pour les essais inter partes effectués par la

         demanderesse à Morristown (New Jersey)

             ii.      En avril 1993

             a)      Frais de déplacement et de subsistance          2 623,63 $
                 des avocats (annexe 5.3)                  1 199,20 $

[78]          Deux questions ont été soulevées sur cet article. La première (et maintenant bien connue) concerne la nécessité de la présence de deux avocats aux essais effectués en avril 1993 pour le compte de la demanderesse. La seconde porte sur les frais de repas de Me Macklin (l"avocat principal de la demanderesse), attaqués comme extravagants.

[79]          Pour les mêmes motifs que sur l"article 5A(i)a) plus haut, j"estime que la présence de deux avocats était justifiée et raisonnable. Quant au caractère extravagant des frais de repas, j"accorde à l"avocat de la défenderesse que la somme demandée (423,67 $ CAN pour 4 personnes) est trop élevée. Je la ramène à 200 $ (ou 50 $ par personne).

     5A.      Pour les essais inter partes effectués par la

         demanderesse à Morristown (New Jersey)

             ii.      En avril 1993

             b)      Frais de déplacement et de subsistance          5 777,06 $

                 des témoins experts (annexe 5.4)              3 261,00 $

[80]          La seule question soulevée porte sur le caractère raisonnable du tarif quotidien des honoraires de M. MacKnight. Pour les motifs déjà exposés sur l"article 5A(i)b) , j"alloue la somme demandée, soit 5 777,06 $.

     5A.      Pour les essais inter partes effectués par la

         demanderesse

             iii.      Frais du Groupe cinéma pour tous les          125 593,67 $

                 essais préparatoires (annexe 5.5)                  0,00 $         

                                        

[81]          Le " Groupe cinéma " en question constitue, selon l"affidavit de Kenneth F. Machacek, une division ou un groupe interne au sein de la société demanderesse. Les frais demandés correspondent aux tarifs horaires des employés internes d"AlliedSignal multipliés par le nombre d"heures qu"ils ont consacrées à la participation aux essais inter partes .

[82]          Les essais préparatoires inter partes ont fait appel à plusieurs techniques d"analyse, la résonance magnétique nucléaire, la spectroscopie infrarouge, la diffraction X et la calorimétrie à compensation de puissance. La mise en oeuvre de ces techniques d"analyse exigeait, selon l"avocate de la demanderesse, à la fois un matériel sophistiqué et un personnel spécialisé. Le fait est reconnu par les deux parties.

[83]          L"avocat de la défenderesse fait valoir que les frais demandés ne constituent pas des frais remboursables de la demanderesse. Il prétend en outre que les charges internes de cette nature ne peuvent être recouvrées selon le tarif et que l"ordonnance du juge Joyal accordant une augmentation des dépens est muette en ce qui concerne les " frais du groupe cinéma ".

[84]          L"avocate de la demanderesse plaide que sa cliente ne devrait pas être pénalisée pour avoir effectué à l"interne les essais préparatoires qui auraient pu être réalisés à l"externe. Elle prétend que, si les essais avaient été effectués à l"externe, les coûts seraient plus élevés encore pour la défenderesse (le chiffre de 343 400,96 $ a été avancé). Enfin, elle fait valoir que, si ces dépenses ne peuvent être recouvrées comme débours admissibles, sa cliente devrait néanmoins avoir droit de les recouvrer dans les circonstances actuelles pour empêcher l"" enrichissement sans cause " de la défenderesse.

[85]          C"est là l"article le plus controversé et le plus coûteux de tout le mémoire de frais. Le jugement du juge Reed abonde en références aux essais préparatoires effectués par les deux parties. J"en déduis que les essais ont formé une partie essentielle du procès pour les deux parties. Faudrait-il cependant que les frais des essais effectués par la défenderesse soient jugés non recouvrables pour la seule raison qu"ils ont été réalisés à l"interne plutôt qu"à l"extérieur de la société?

[86]          C"était peut-être le cas auparavant, mais ce n"est plus aussi évident aujourd"hui. On peut recourir à une analogie pour trouver la solution. Jusqu"à récemment, la jurisprudence sur les frais de " photocopie " par exemple voulait que ces frais ne soient pas alloués à moins que les photocopies aient été faites à l"extérieur du cabinet d"avocats. La jurisprudence récente1 de la Cour, au contraire, indique que les frais de photocopies faites à l"interne peuvent également être recouvrés si la partie qui en recherche le recouvrement peut démontrer à l"officier taxateur que les photocopies faites à l"interne étaient essentielles au procès. La partie en cause doit également établir la preuve d"un rapport avec le coût réel des photocopies pour le cabinet. Cette dernière exigence vise à neutraliser la perception qu"ont les succombants, à tort ou à raison, que beaucoup de cabinets d"avocats gonflent le prix des photocopies demandé à leurs propres clients pour faire un profit sur les débours comme les frais de photocopie.

[87]          Après avoir lu attentivement d"abord l"arrêt de la Cour d"appel et, en second lieu, la décision de la Section de première instance où l"on trouve de nombreuses mentions des essais, j"accepte la position de l"avocate de la demanderesse : les essais préparatoires ont formé une partie essentielle de la conduite du procès. Je suis également d"avis qu"il était loisible à la demanderesse de réaliser ces essais à l"interne dans les circonstances de l"espèce et que les coûts reliés à ces essais devraient être recouvrés de la défenderesse si la demanderesse peut me démontrer les coûts réels des essais préparatoires.

[88]          La preuve des coûts réels se trouve dans l"affidavit de Kenneth F. Machacek, contrôleur chez AlliedSignal. Il a déposé avoir revu les coûts du Groupe cinéma pour les essais préparatoires réalisés en juin 1992 et en avril 1993 et, sur le fondement des relevés mensuels annexés à son affidavit, il établit à 125 593,67 $ CAN le coût total attribué au Groupe cinéma. Ce coût total a été obtenu de la manière suivante, selon la déposition de M. Machacek : [TRADUCTION] "... Un taux horaire normal est établi chaque année, pour les spécialistes et pour les techniciens, en vue de facturer le temps à toutes les unités fonctionnelles d"AlliedSignal. Ce taux est fixé chaque année en fonction des coûts de main-d"oeuvre et des coût indirects."

[89]          Cette preuve est loin d"établir les coûts réels du Groupe cinéma pour la société. Comme le déclare M. Machacek, les tableaux mensuels annexés à son affidavit font ressortir les coûts de la main-d"oeuvre directe et indirecte du projet. C"est précisément le type de coûts qui ne doivent pas être inclus dans la partie débours du mémoire de frais. Par exemple, les éléments à prendre en compte pour établir le coût réel des photocopies sont limités aux seuls coûts d"utilisation de l"appareil (papier, poudre imprimante, autres coûts d"entretien, etc.) et excluent le taux de salaire horaire de l"opérateur (normalement des frais indirects qu"on ne peut recouvrer). Enfin, même si les coûts de main-d"oeuvre pouvaient être inclus dans les coûts " réels ", je ne suis aucunement en mesure de vérifier le caractère raisonnable des divers taux de salaire pour les spécialistes et les techniciens qui apparaissent sur les tableaux annexés à l"affidavit de Machacek.

[90]          Le seul autre élément de preuve à ce sujet se trouve dans l"affidavit de Donald Legal. M. Legal avait initialement déposé que les coûts reliés à la préparation de ces essais préparatoires s"élevaient à 343 400,96 $. Cette somme a été ensuite ramenée à la somme demandée maintenant dans le mémoire de frais révisé. On n"a fourni aucune explication. En tout cas, je n"admets pas qu"il faudrait, comme le plaide l"avocate de la demanderesse, allouer la somme révisée pour la seule raison que les frais seraient beaucoup plus élevés si les essais avaient été effectués à l"extérieur. Ce qui est exigé, c"est une preuve sur les coûts réels des essais pour la société. Or, cette preuve, l"avocate de la demanderesse n"est pas arrivée à la fournir et je dois donc rejeter intégralement les frais du Groupe cinéma sur le fondement du critère établi dans l"affaire Diversified1.

[91]          L"avocate de la demanderesse a plaidé à l"audience que je devrais allouer cette somme pour une autre raison. Elle a soutenu que le fait de refuser le recouvrement des frais du Groupe cinéma allait nécessairement entraîner l"enrichissement sans cause de la défenderesse.

[92]          C"est la première fois que la notion, ou la théorie, de l"" enrichissement sans cause " est plaidée devant moi dans le cadre de la taxation de dépens. À ma connaissance, aucun autre officier taxateur n"a eu à se prononcer sur cette argumentation. Voici comment l"avocate de la demanderesse présente son argument:

                 [TRADUCTION] Il a été jugé qu"il y a enrichissement sans cause lorsque trois éléments sont réunis : a) l"enrichissement d"une personne, b) un appauvrissement corrélatif d"une autre personne, et c) l"absence de justification juridique de l"enrichissement. Dans la situation présente, il y aurait enrichissement de la défenderesse puisque celle-ci n"aurait pas à indemniser la demanderesse pour les coûts des essais préparatoires, la demanderesse subirait un appauvrissement du fait qu"elle a réalisé les essais à l"interne. Nous prétendons qu"il n"y a pas de justification juridique de l"enrichissement puisque, si les essais avaient été effectués à l"extérieur, ils constitueraient un article recouvrable.                 

[93]          Cette argumentation est peut-être séduisante, mais je ne crois pas nécessaire d"avoir recours à la théorie de l"" enrichissement sans cause " pour trouver une solution dans la présente situation. J"espère néanmoins que cet argument sera présenté de nouveau, mais dans un contexte où les actes de procédure et les observations traiteront directement la question.

[94]          Pour arriver à ma conclusion, j"ai considéré les deux scénarios suivants. Ordinairement, les débours faits par un plaideur individuel profane en faveur de tiers désintéressés sont taxables parce que le plaideur profane ne réalise pas de profit. Cela tient à ce que les dépens constituent une indemnité. Par exemple, si le plaideur profane débourse 2 000 $ en faveur du sténographe judiciaire pour les transcriptions, le sténographe judiciaire réalise un profit, mais le plaideur profane est en position de perte. Par la suite, la somme de 2 000 $ taxée et recouvrée par le plaideur profane remplace le débours initial de 2 000 $. Donc, le plaideur profane est remis en état et ne réalise pas de profit du fait des dépens. Cependant, les heures consacrées à son procès par le même plaideur profane ne sont pas taxables parce que celui-ci n"a pas fait de dépenses qui pourraient être indemnisées conformément aux principes en matière de dépens. C"est-à-dire que, au moment de l"introduction de la poursuite, sa position est à zéro. Si les heures consacrées à son procès sont évaluées à 1 000 $ et qu"il recouvre la somme taxée, il n"est pas indemnisé des sommes qu"il a déboursées, il réalise plutôt un profit de 1 000 $. Il importe peu que, n"eût été du procès, il eût pu gagner 1 000 $ en faisant autre chose. La somme perdue de 1 000 $ représente quelque chose qui se rapproche des dommages-intérêts pour manque à gagner, mais ce n"est sûrement pas une indemnité du point de vue des dépens. Il n"a rien payé pour ses heures de travail et il ne reçoit rien pour ses heures de travail.

[95]          Enfin, la société était obligée de payer le salaire de ses employés abstraction faite du procès. Les heures de travail des employés constituent les heures de travail de la société, tout simplement. Le fait que les employés auraient pu consacrer ces heures à d"autres travaux, non reliés aux procès, pour gagner de l"argent pour la société n"est pas pertinent, parce que cela se rapproche des dommages-intérêts pour manque à gagner, mais n"est pas de la nature d"une indemnité. Le fait que la société aurait pu payer quelqu"un de l"extérieur pour faire le même travail et recouvrer la somme ainsi déboursée lors de la taxation n"est pas non plus pertinent, parce que, dans ce dernier scénario, il s"agit manifestement d"une indemnité. En conclusion, donc, toute somme recouvrée par la demanderesse lors de la taxation constituerait un profit, tout comme pour le plaideur profane de notre exemple.

     5B.      Pour les essais inter partes effectués par

         les défenderesses

             i.      À Kingston (Ontario)

                 en janvier 1993

                 a) Frais de déplacement et de subsistance          551,98 $

                 des avocats (annexe 5.6)                  428.44 $

[96]          J"alloue la somme demandée au motif que la présence de Me D"Iorio était essentielle et que les frais étaient raisonnables.

     5B.      Pour les essais inter partes effectués par

         les défenderesses

             i.      À Kingston (Ontario)

                 en janvier 1993

                 b) Frais de déplacement et de subsistance          3 852,50 $

                 des témoins experts (annexe 5.7)              2 609,69 $

[97]          Je note une divergence entre la somme demandée ci-dessus (3 852,50 $) et la somme demandée dans les observations de l"avocate de la demanderesse (3 443,68 $). À défaut de toute explication sur l"origine de cette divergence, j"ai décidé d"allouer la somme moindre, soit 3 443,68 $ pour cet article.

     5B.      Pour les essais inter partes effectués par

         les défenderesses

             ii.      À Wilmington (Delaware)

                 en février 1993

                 a) Frais de déplacement et de subsistance          2 087,35 $

                 des avocats (annexe 5.8)                  1 199,66 $

[98]          Encore ici, j"accepte la présence de deux avocats, mais je vais cependant réduire la somme demandée pour Me D"Iorio. La somme de 45,20 $ US pour la " green Room " est supprimée de la note d"hôtel. Je réduis également la somme recouvrable pour son logement de 175 $ US par nuit à 100 $ US par nuit. J"estime que des frais de 175 $ US par nuit dénotent un train de vie de riche, qui ne devrait pas être supporté par la partie adverse. La somme de 100 $ US peut paraître purement arbitraire mais, compte tenu d"un taux de change de 1,25361, je suis d"avis que la somme allouée est plus que raisonnable. La somme totale allouée pour cet article est donc de 1 936,67 $ CAN.

.

     5B.      Pour les essais inter partes effectués par

         les défenderesses

             ii.      À Wilmington (Delaware)

                 en février 1993

                 b) Frais de déplacement et de subsistance          2 891,00 $

                 des témoins experts (annexe 5.9)              2 049,97 $

[99]          J"alloue cet article mais, par cohérence avec la somme allouée pour l"article précédent, je dois réduire la somme en fonction du taux de change de 1,2536, soit le taux moyen obtenu de la Banque du Canada pour le mois de février 1993. La somme allouée s"établit à 2 600,97 $.

     5B.      Pour les essais inter partes effectués par

         les défenderesses

             iii.      À Kingston (Ontario) en

                 mai 1993

                 b) Frais de déplacement et de subsistance          1 476,73 $
                 des témoins experts (annexe 5.11)              1 173,56 $

[100]          Le différend porte ici sur les dépenses de voiture de location et de taxi de M. MacKnight. L"avocat de la défenderesse m"invite à comparer les dépenses de cet article aux dépenses faites par M. MacKnight lors d"un voyage antérieur (annexe 5.7) dans des circonstances semblables. J"accorde à l"avocat de la défenderesse que les dépenses pour cet essai sont élevées et, en outre, l"explication donnée par l"avocate de la demanderesse sont insuffisantes. J"alloue 1 173,56 $ pour cet article.

     7.      Pour les frais de déplacement, de logement et

         de subsistance des avocats et des représentants

         du client pour des réunions pendant l"instance

         A.      Dépenses des avocats                      10 840,28 $

             (annexe 7.1)                               9 280,34 $

[101]          Après avoir lu les observations et passé en revue l"annexe 7.1 (jointe au second affidavit de Harrold) auquel sont jointes des copies des notes de frais en question, j"alloue les sommes demandées, qui sont raisonnables dans les circonstances.

     7.      Pour les frais de déplacement, de logement et

         de subsistance des avocats et des représentants

         du client pour des réunions durant l"instance

         B.      Dépenses des représentants du client              11 035 01 $

             (annexe 7.2)                              1 289,23 $

[102]          L"ordonnance du juge Joyal accordant une augmentation des dépens dispose au paragraphe 2 :

                 Des honoraires et des débours raisonnables doivent être payés relativement aux frais de déplacement, de logement et de subsistance des avocats et des représentants du client pour leurs réunions pendant la durée de l"instance. [Non souligné dans l"original.]                 

[103]          Un différend est apparu sur le nombre de réunions entre l"avocate de la demanderesse et M. Roger Criss, avocat interne d"AlliedSignal et l"un des représentants de la demanderesse. Dix-neuf réunions ont eu lieu au cours de l"instance. L"avocat de la défenderesse soutient que ce nombre est excessif dans les circonstances. Il s"oppose également à la demande en ce qui concerne M. Criss au motif qu"il n"était pas un représentant de la société couvert par l"ordonnance du juge Joyal.

[104]          Je ne suis pas de l"avis de l"avocat de la défenderesse sur le fait que le nombre de 19 réunions tenues entre 1989 (année de la déclaration) et 1993 (année de l"instruction de l"affaire) serait tout à fait excessif. J"estime au contraire que ce nombre est raisonnable dans les circonstances.

[105]          Quoi qu"il en soit, cependant, j"accorde à l"avocat de la défenderesse que pour être un " représentant du client " au sens de l"ordonnance du juge Joyal, il faudrait que M. Criss ait été cité comme témoin en interrogatoire préalable ou à l"instruction. Au soutien de sa thèse, l"avocat de la défenderesse cite les affaires Beloit Canada Ltée v. Valmet Dominion et al.1, TRW Inc. v. Walbar of Canada Inc.1 et Aerlinte Eireann Teoranta v. Canada1 dont je cite le passage suivant [au paragraphe 79] :     

                 À l"appui de la demande d"inclusion des dépenses de MM. Wilson et Andreassen, les défendeurs m"ont référé à des affaires où la Cour avait accueilli les dépenses du conseiller technique d"une partie. En l"espèce toutefois, il s"agit de dépenses engagées par des membres du personnel des parties. MM. Wilson et Andreassen sont des fonctionnaires du ministère des Transports, défendeur. Ils ont joué un rôle manifestement utile dans l"avancement de la cause, et la déposition de M. Wilson a été retenue au procès et jugée importante par le juge Muldoon en ce qui a trait à la question centrale du présent litige. Mais les frais de déplacement de MM. Wilson et Andreassen sont des dépenses engagées par une partie au cours du litige. Ce ne sont pas des frais de déplacement engagés afin de déposer au procès. Une partie ne peut inclure les dépenses qu"elle a engagées pour la défense de sa cause dans les frais judiciaires qu"elle cherche à se faire rembourser par la partie qui n"a pas eu gain de cause.                 

[106]          Enfin, je suis également d"accord avec l"avocat de la défenderesse pour éliminer la somme de 44,10 $ au titre de dépenses " personnelles " de M. A. Degrassi qui est aussi un représentant de la société demanderesse. Comme je l"ai indiqué plus haut à propos de l"article 3B(v)1, on n"a pas fourni d"explication valable de la différence de traitement entre les repas " personnels " et " d"affaires " dans la note de frais. La somme allouée s"établit donc à 1 289,23 $.

     8.      Pour la préparation d"un procès de 12 jours

         en Section de première instance

         A.      Dépenses diverses                           18 752,76 $
             (annexe 8.1)                              10 396,38 $

[107]          Les dépenses diverses qui apparaissent à l"annexe 8.1 portent sur des éléments comme des frais de photocopie et de reliure, des frais d"heures supplémentaires, des frais de location de voiture et des frais reliés à la préparation et à l"agrandissement de dessins et de schémas. La contestation porte sur le nombre de dessins et d"agrandissements de pièces du procès.

[108]          L"avocat de la défenderesse attaque le nombre de copies, de négatifs et d"épreuves des pièces du procès, qu"il juge excessif.

[109]          L"ordonnance du juge Joyal accordant l"augmentation des dépens prévoit, au paragraphe 7 " des frais raisonnables de photocopie ... pour tous les autres travaux de copie et de reprographie nécessaires pour la conduite de l"instance et pour la préparation des pièces en vue du procès " [Non souligné dans l"original.]

[110]          J"ai passé en revue la facture annexée au second affidavit de Harrold, signé le 17 juin 1997, et les observations écrites des parties et j"en viens à la conclusion que le nombre de copie de dessins et d"agrandissements n"était pas excessif. J"alloue donc pour cet article la somme demandée, soit 18 752,76 $

.

     8.      Pour la préparation d"un procès de 12 jours

         en Section de première instance

         D.      Dépenses et honoraires - Sacks                  5 150,99 $                  (annexe 8.2)                           0,00 $

[111]          La question concerne ici l"interprétation à donner au paragraphe 1 de l"ordonnance du juge Joyal accordant une augmentation des dépens. Par souci de commodité, je reproduis encore ce paragraphe :

                         1.      Des honoraires et des débours raisonnables doivent être payés relativement aux frais de déplacement, de logement et de subsistance des témoins et avocats, notamment pour la préparation des déclarations de témoin ou des affidavits de :                         
                                  William J. MacKnight                         
                                  John Sibilia                         
                                  Sean Curran,                         
                         pour la préparation de leur déposition à l"instruction et pour la durée entière de leur présence à l"instruction selon l"alinéa 1(2)a) du tarif B.                         

[112]          Cette formulation est-elle si restrictive qu"elle ne couvre pas les honoraires et les débours de M. Sacks pour la préparation en vue de son témoignage? M. Sacks a déposé au procès en tant que témoin ordinaire et l"un des inventeurs du brevet en cause. C"est également un ancien employé de la demanderesse.

[113]          Deux interprétations possibles ont été présentées par les parties. Selon l"avocate de la demanderesse, l"ordonnance couvre les frais et débours de tous les témoins au procès, y compris les témoins ordinaires comme M. Sacks. Selon l"avocat de la défenderesse, le remboursement doit être restreint aux honoraires en vue de la préparation des trois experts nommés dans le paragraphe.

[114]          Je ne dois pas céder à la tentation de récrire le paragraphe en question. Mon rôle consiste simplement à appliquer le paragraphe tel que je le comprends. Je suis d"accord avec l"avocate de la demanderesse qui soutient, dans ses observations écrites, que le paragraphe en question couvre les honoraires et les débours de tous les témoins au procès, y compris les témoins ordinaires. Dans des circonstances normales, un témoin ordinaire comme M. Sacks n"aurait droit qu"à 100 $ par jour pour chaque jour où il témoigne (voir le tarif A, paragraphe 4(1)). Toutefois, les honoraires et les débours reliés à sa préparation ne seraient pas recouvrables à moins qu"ils ne soient autorisés par la Cour (voir le tarif A, article 5). On a suggéré que le terme " notamment " dans le paragraphe en question pourrait impliquer une restriction à l"égard des témoins autres que ceux dont les noms sont énumérés dans ce paragraphe. Je suis d"avis que le terme " notamment " n"implique pas de restriction du genre, mais que, comme le plaide l"avocate de la demanderesse, il introduit un exemple.

[115]          Quoi qu"il en soit, je réduis néanmoins les frais de M. Sacks à 3 382 $. J"ai supprimé complètement la note du 24 juin 1990 présentée par M. Sacks1.

     8.      Pour la préparation d"un procès de 12 jours

         en Section de première instance

         E.      Dépenses et honoraires - MacKnight              22 116,82 $              (annexe 8.3)                              15 177,65 $

[116]          Deux questions ont été soulevées sur cet article. La première concerne les dépenses et les honoraires de M. MacKnight (1 353,50 $) pour une réunion en juin 1992, plus d"un an avant le procès. La seconde porte sur les sept jours de préparation demandés par M. MacKnight pour son témoignage en Cour (qui a duré une journée).

[117]          Je suis d"accord avec l"avocate de la demanderesse que la somme de 1 353,50 $ est recouvrable au titre de la préparation en vue du procès. Si je me trompe sur ce point, je suis d"avis que la somme est également recouvrable au titre de la préparation en vue des essais préparatoires (voir l"article 5A(i)b) et l"annexe 5.2).

[118]          Quant à la seconde objection, l"avocat de la défenderesse suggère un ratio plus " raisonnable " entre la préparation et la participation, qui serait de 4 à 1 (c"est-à-dire 4 jours de préparation pour 1 jour de participation). Le ratio réel en l"espèce est de 7 à 1. Il n"y a aucune jurisprudence appuyant un ratio particulier. Toutefois, comme le rappelle l"avocat de la défenderesse, il existe une jurisprudence voulant que l"engagement et la rémunération des témoins experts ne soient pas un " chèque en blanc1 ".

[119]          Après mûre réflexion, j"ai décidé d"allouer la somme demandée pour la préparation et la présence en Cour. Je fonde ma décision sur le fait que je dois taxer ces frais sans l"avantage du recul. M. MacKnight a témoigné sur la question de savoir si le second composant de la pellicule de DuPont était ou non une polyoléfine. Il a également témoigné sur la question de la cristallinité. Enfin, il a témoigné pour réfuter la preuve offerte par les experts de la défenderesse. Les questions sur lesquelles il a témoigné étaient hautement techniques et justifiaient une préparation solide. Il n"y a pas de règles fermes que je puisse appliquer pour déterminer le ratio optimal entre les jours de préparation et les jours de présence en Cour nécessaires en l"espèce. Je ne vois pas de raisons contraignantes de réduire le nombre de jours demandés et j"exerce donc mon pouvoir discrétionnaire en faveur de la demanderesse. Toute autre décision constituerait un exercice capricieux de mon pouvoir discrétionnaire. J"alloue la somme demandée.

     8.      Pour la préparation d"un procès de 12 jours

         en Section de première instance

         F.      Dépenses et honoraires - Hoffman                  2 368,14 $              (annexe 8.4)                               0,00 $

[120]          Selon les explications de l"avocate de la demanderesse, M. Hoffman était un expert au procès et a témoigné sur la question de l"équivalence entre le composé à mouler en feuille (SMC) et le composé à mouler épais (TMC).

[121]          L"avocat de la défenderesse soutient qu"il ne faudrait rien allouer pour la raison que l"ordonnance du juge Joyal accordant une augmentation des dépens est muette au sujet de M. Hoffman. Nous retrouvons ici l"argument déjà présenté au sujet des honoraires et des débours de M. Sacks. Pour les raisons indiquées à propos de l"article 8 D, j"alloue les sommes demandées, parce qu"elles sont raisonnables.

     9.      Pour le procès
     A.      Frais de déplacement et de subsistance des              27 918,85 $

     avocats pendant le procès (y compris le logement              14 879,43 $

     des témoins) annexe 9.1                         

[122]          Cet article se rattache également au paragraphe 1 de l"ordonnance du juge Joyal, autorisant le recouvrement des dépenses raisonnables des témoins et des avocats pour la durée entière de leur présence au procès.

[123]          Le premier point de contestation porte sur les dépenses de déplacement d"une technicienne juridique, Mme Beaudin, pour assister au procès à Toronto. L"avocat de la défenderesse est d"avis que ces frais sont de la nature de frais indirects. En outre, il soutient que, si ces frais sont recouvrables, il aurait fallu faire appel aux services d"un technicien juridique de Toronto, plutôt que de faire venir Mme Beaudin à Toronto. L"avocate de la demanderesse fait valoir qu"il s"agissait d"une affaire complexe, qui était en cours depuis près de quatre ans au moment du procès. De nombreux documents avaient été produits et il fallait les garder en ordre et les repérer pour les avocats. Enfin, il est inexact, selon elle, qu"un

technicien juridique aurait pu être fourni par le bureau du cabinet à Toronto, parce que, dans une affaire de cette complexité, ce technicien n"aurait eu aucune connaissance de l"affaire ou de ses complexités.

[124]          Après quelque hésitation, j"en suis venu à la conclusion que la défenderesse n"a pas à supporter les frais de déplacement et de subsistance d"un technicien juridique employé au bureau d"Ottawa de l"avocate de la demanderesse. On ne m"a pas cité de jurisprudence au sujet de l"utilisation et de l"assistance de techniciens juridiques dans un contexte semblable à celui-ci et je ne puis pas ne pas tenir compte du fait que le paragraphe 1 de l"ordonnance du juge Joyal est muet sur la question. En effet, l"ordonnance ne parle que de " témoins " et d"" avocats ". Faut-il interpréter le paragraphe 1 de manière à englober les techniciens juridiques? Je ne le crois pas. Je pense plutôt que les services de techniciens juridiques sont compris et englobés dans les services fournis par les avocats et font donc partie des coûts indirects du cabinet. Je les compare aux secrétaires, aux bibliothécaires, aux relieurs et aux autres commis de bureau en ce qui concerne la taxation des dépens. Je déduis donc la somme de 4 479,99 $ demandée pour Mme Beaudin.

[125]          Le second point contesté concerne la note d"hôtel de Me Macklin et de Me D"Iorio à Toronto, qui couvre une période commençant le 31 mai 1993, soit une semaine avant le début du procès. Est-ce qu"une préparation d"une semaine est excessive?

[126]          Encore ici, je ne puis m"appuyer sur des règles fermes pour déterminer le nombre optimal de jours de préparation dont un avocat a besoin en vue d"une telle cause. Les seuls éléments que je puis considérer, c"est que le procès a duré 10 jours, qu"il faisait intervenir une preuve très technique, qu"on a produit une multiplicité de documents et qu"un grand nombre de témoins, ordinaires et experts, ont été interrogés, contre-interrogés et réinterrogés. J"en viens à la conclusion qu"une préparation d"une semaine pour les avocats n"était pas excessive dans les circonstances. Sauf en ce qui concerne les dépenses de Mme Beaudin, j"alloue les sommes demandées.

     9.      Pour le procès
         B.      Dépenses et honoraires des témoins              42 097,20 $                  (annexe 9.2)                          22 112,49 $

[127]          Le différend porte sur les dépenses et honoraires de trois témoins, à savoir M. Sacks, M. MacKnight et M. Hoffman.

[128]          Pour M. Sacks, l"avocate de la demanderesse demande 3 424,37 $, ce qui représente la totalité de ses honoraires et débours. L"avocat de la défenderesse fait valoir que, puisque M. Sacks n"était pas un témoin expert, il a droit, en qualité de témoin ordinaire, à 100 $ au plus, à quoi s"ajoutent évidemment ses débours raisonnables, pour un total de 909,78 $.

[129]          Je renvoie les parties aux paragraphes 115 à 119 ci-dessus pour l"analyse du paragraphe 1 de l"ordonnance du juge Joyal. Dans le cas de M. Sacks, j"alloue la somme demandée, soit 3 424,37 $.

[130]          En ce qui concerne M. MacKnight, la contestation porte sur le nombre de jours qui peuvent être alloués pour la préparation et sur le taux des honoraires pour chaque jour de présence en Cour.

[131]          Je ne vois aucune difficulté à allouer les deux jours supplémentaires de préparation qui ont été demandés par M. MacKnight au taux demandé, soit 1 200 $ US par jour. Je ne suis pas disposé, cependant, à faire de même pour les dix jours de présence au procès. J"accorde à l"avocat de la défenderesse que le taux de 2 000 $ US par jour en Cour n"est pas raisonnable. L"avocat m"a cité les affaires Engine and Leasing Co. et al.1 et particulièrement Aerlinte Eireann Teoranta1 où le juge Joyal a fait observer :

                 L"indemnité versée au témoin expert pendant l"instruction au taux horaire qui est accordé à celui-ci pour se préparer peut être considérée comme trop généreuse. En outre, l"idée selon laquelle les avocats peuvent engager des frais de témoin expert pour lesquels ils seront pleinement indemnisés s"ils ont gain de cause n"est pas fondée. [Non souligné dans l"original.]                 

[132]          On ne m"a pas proposé de formule mathématique particulière pour établir un taux raisonnable. Je comprends que la chose est laissée à mon pouvoir discrétionnaire et j"alloue, dans les circonstances, le taux de 1 200 $ US par jour de présence en Cour. Comme le fait valoir l"avocat de la défenderesse, rien ne justifie d"accorder pour la présence au procès un taux d"honoraires qui est 67 % plus élevé que le taux accordé pour la préparation. La jurisprudence serait plutôt que le taux des honoraires pour la présence au procès soit inférieur au taux accordé pour la préparation. Le taux de 1 200 $ US par jour correspond à peu près au taux accordé par le juge Joyal pour les honoraires des avocats pendant le procès (voir l"alinéa 6 f) de son ordonnance).

[133]          Enfin, une question a été soulevée concernant les dépenses de M. Hoffman. Selon l"avocat de la défense, M. Hoffman, qui a témoigné comme expert au procès, n"est pas inclus au paragraphe 1 de l"ordonnance du juge Joyal. À son avis, il faudrait rejeter la demande de M. Hoffman au motif que le juge Reed ne s"est pas appuyée sur son témoignage pour arriver à ses conclusions au procès. Il soutient que ce fait est pertinent lorsqu"il s"agit de déterminer s"il y a lieu d"allouer ou non les frais pour un témoin expert (voir l"affaire Aerlinte , supra, note 27). Pour les raisons exposées à propos des articles 8 F et D, j"alloue les frais de M. Hoffman.

[134]          J"alloue donc la somme de 31 868,40 $1 pour l"article 9 B.

     III.      DÉPENS DE LA PROCÉDURE DE TAXATION AJOURNÉE

         LE 26 MARS 1997

[135]          Selon l"ordonnance rendue par le juge Wetston le 3 novembre 1997, je dois traiter des dépens reliés à l"audience manquée du 26 mars 1997. Je dois également traiter des dépens reliés à l"audience du 21 novembre 1997.

[136]          Les parties sont convenues que je devrais taxer les dépens de ces audiences dans une procédure distincte. J"invite donc les parties à me faire parvenir, aux soins du Greffe de la Cour, leurs mémoires de frais avec les documents justificatifs pour les frais de préparation, de déplacement et de participation aux audiences de taxation, y compris les frais reliés à la présence à l"audience manquée du 26 mars 1997.

     IV.      RÉSUMÉ

[137]          Par souci de commodité, j"ai annexé aux motifs un tableau qui récapitule les sommes demandées et allouées pour ce mémoire de frais.

     III.      DÉPENS TAXÉS

Le mémoire de frais de 412 084,59 $ est taxé et accueilli pour la somme de 258 754,13 $. Un certificat de taxation portant cette somme sera délivré.

     _____________________

                                         Marc D. Reinhardt

Traduction certifiée conforme

________________________

Richard Jacques, LL. L.

     ANNEXE


ARTICLE

DESCRIPTION

HONORAIRES

DÉBOURS

SOMME ALLOUÉE

1.

Pour tous les services jusqu"à la préparation et au dépôt des actes de procédure


2 000,00 $


2 000,00 $

A.

Droit de dépôt à la Cour fédérale

50,00 $

50,00 $

B.

Dépenses diverses

83,78 $

83,78 $

2.

POUR TOUS LES SERVICES FOURNIS AVANT L"INTERROGATOIRE PRÉALABLE


2 000,00 $


2 000,00 $

A.

Frais de déplacement et de subsistance des avocats

4 068,37 $

4 068,37 $

B.

Dépenses diverses

952,13 $

905,65 $

3.

POUR L"INTERROGATOIRE PRÉALABLE

A.

Yang le 5 décembre 90 et Bula les 5 et 6 décembre 90

3 000,00 $

3 000,00 $

i)

Transcription de l"interrogatoire préalable de Yang

605,00 $

605,00    $

ii)

Transcription de l"interrogatoire préalable de Bula

645,00 $

645,00 $

iii)

Frais de déplacement et de subsistance des avocats

1 558,25 $

1 558,25 $

B.

Degrassi les 12 et 13 décembre 1990 et Combs les 13 et 14 décembre 1990 à Ottawa


4 500,00 $


4 500,00 $

i)

Transcription de l"interrogatoire préalable de Degrassi

340,00 $

340,00 $

ii)

Transcription de l"interrogatoire préalable de Combs

423,50 $

423,50 $

iii)

Frais de déplacement et de subsistance des avocats

342,55 $

342,55 $

iv)

Frais de déplacement et de subsistance de Degrassi

1 436,85 $

1 436,85 $

v)

Frais de déplacement de R. Comb

984,11 $

959,41 $

C.

Dépenses diverses pour les articles A et B

82,66 $

16,98 $

4.

POUR LA PRÉPARATION ET LA PRÉSENTATION DES REQUÊTES INTERLOCUTOIRES

A.

Requête par écrit pour obtenir une ordonnance selon la règle 480, le 13 juillet 1990


75,00 $


75,00 $

B.

Requête par écrit pour obtenir une ordonnance conservatoire, le 2 août 1990


75,00 $


75,00 $

i)

Dépenses diverses

12,71 $

12,71 $

C.

Requête contestée pour contraindre à répondre,

le 19 juin 1992


250,00 $


250,00 $

i)

Frais de déplacement et de subsistance des avocats

383,51 $

383,51 $

ii)

Divers

76,71 $

76,71 $

D.

Requête contestée pour obtenir la production de données électroniques, le 26 août 1992


250,00 $


250,00 $

a)

Frais de déplacement et de subsistance des avocats

45,29 $

45,29 $

b)

Divers

93,60 $

93,60 $

c)

Requête contestée concernant la lettre du 25 juillet 1996

250,00 $

250,00 $

5.

POUR LES ESSAIS INTER PARTES

A.

Pour les essais inter partes effectués par la demanderesse à Morristown (New Jersey)

i)

En juin 1992

a)

Frais de déplacement et de subsistance des avocats

4 411,43 $

4 411,43 $

b)

Frais de déplacement et de subsistance des témoins experts

5 638,90 $

5 638,90 $

ii)

En avril 1993

a)

Frais de déplacement et de subsistance des avocats

2 623,63 $

2 399,96 $

b)

Frais de déplacement et de subsistance des témoins experts

5 777,06 $

5 777,06 $

iii)

Frais du Groupe cinéma pour tous les essais préparatoires au procès


125 593,67 $


néant

B.

Pour les essais inter partes effectués par les défenderesses

i)

À Kingston (Ontario) en janvier 1993

a)

Frais de déplacement et de subsistance des avocats

551,98 $

551,98 $

b)

Frais de déplacement et de subsistance des témoins experts

3 852,50 $

3 443,68 $

ii)

À Wilmington (Delaware) en février 1993

a)

Frais de déplacement et de subsistance des avocats

2 087,35 $

1 936,67 $

b)

Frais de déplacement et de subsistance des témoins experts

2 891,00 $

2 600,97 $

iii)

À Kingston (Ontario) en mai 1993

a)

Frais de déplacement et de subsistance des avocats

262,82 $

262,82 $

b)

Frais de déplacement et de subsistance des témoins experts

1 476,73 $

1 173,56 $

6.

POUR LA PRÉPARATION DES BANDES MAGNÉTOSCOPIQUES DES EXPÉRIENCES EFFECTUÉES PAR LA DEMANDERESSE, D"UNE CHAÎNE DE FABRICATION DE PELLICULE DE NYLON ET D"UN ATELIER DE SMC


17 127,11 $


17 127,11 $

7.

POUR LES FRAIS DE DÉPLACEMENT, DE LOGEMENT ET DE SUBSISTANCE DES AVOCATS ET DES REPRÉSENTANTS DU CLIENT POUR DES RÉUNIONS PENDANT L"INSTANCE

A.

Dépenses des avocats

10 840,28 $

10 840,28 $

B.

Dépenses des représentants du client

11 035,01 $

1 289,23 $

8.

POUR LA PRÉPARATION D"UN PROCÈS DE 12 JOURS EN SECTION DE PREMIÈRE INSTANCE


30 000,00 $


30 000,00 $

A.

Dépenses diverses

18 752,76 $

18 752,76 $

B.

Dépôt d"une demande unilatérale concernant les date, heure et lieu de l"instruction


75,00 $


100,00 $


175,00 $

C.

Préparation et présence à une conférence préparatoire

250,00 $

250,00 $

D.

Dépenses et honoraires - Sacks

5 150,99 $

3 382,00 $

E.

Dépenses et honoraires - MacKnight

22 116,82 $

22 116,82 $

F.

Dépenses et honoraires - Hoffman

2 368,14 $

2 368,14 $

9.

POUR LE PROCÈS

27 000,00 $

27 000,00 $

A.

Frais de déplacement et de subsistance des avocats (y compris le logement des témoins)

27 918,85 $

23 438,86 $

B.

Dépenses et honoraires des témoins

42 097,20 $

31 868,40 $

C.

Dépenses diverses

16 893,67 $

16 893,67 $

10.

POUR LES SERVICES FOURNIS APRÈS LE PRONONCÉ DU JUGEMENT

125,00 $

125,00 $

A.

Divers

482,67 $

482,67 $

TOTAL

258 754,13 $

     AVOCATS ET PROCUREURS INSCRITS AU DOSSIER

INTITULÉ DE LA CAUSE:              ALLIEDSIGNAL INC.,

                                         Demanderesse,

                                 - et -

                             DUPONT CANADA INC.                              et THE COMPLAX CORPORATION,

                                         Défenderesses

N DU GREFFE :                      T-2234-89

LIEU DE LA TAXATION :              Ottawa (Ontario)

DATE DE LA TAXATION :              Le 21 novembre 1997

MOTIFS DE L"OFFICIER TAXATEUR      MARC D. REINHARDT

                            

EN DATE DU :                      11 mai 1998

ONT COMPARU :

     Hélène D"Iorio                  pour la demanderesse

     Arthur Renaud                  pour les défenderesses

PROCUREURS INSCRITS AU DOSSIER :

     Gowling, Strathy & Henderson

     Ottawa (Ontario)                  pour la demanderesse

     Sim Hughes Ashton & McKay          pour les défenderesses

     Toronto (Ontario)

__________________

     Comme l"explique de façon détaillée M. Scott MacKendrick dans l"affidavit déposé pour le compte des défenderesses.

     Les dépens de cette requête ont été adjugés à la demanderesse et les parties s"accordent pour qu"une somme de 250 $ soit ajoutée au chiffre final, pour cette requête.

Dossier T-32-86, décision non publiée de F. Pilon, officier taxateur, 19 janvier 1988.

Dossiers A-14-83, A-80-83 et A-81-83, décision non publiée de J.E. Clegg, officier taxateur, 23 avril 1990.

(1991), 39 C.P.R. (3d) 90.

Dossier T-298-90, T-2149-80 et T-4900-80, décision non publiée de J.E. Clegg, officier taxateur, 23 avril 1990.

T-1848-82, décision non publiée, 13 novembre 1991.

[1993] 1 C.F. 244.

Re Diversified Products Corp. et al. v. Tye-Sil Corporation Limited (1990), 34 C.P.R. (3d) 267 (C. F. 1re inst.); (1990), 41 F.T.R. 227 à la page 233.

Windsurfing International Inc. et al. v. Bic Sports Inc. et al. 6 C.P.R. (3d) 526 à la page 533.

(1995) DTC 5583.

Dossier T-705-89, décision non publiée de taxation, 3 juillet 1991.

Melo"s Food Centre Ltd. c. Borges Food Ltd., dossier A-673-95, décision non publiée, 8 août 1996.

Voir de façon générale les motifs que j"ai rédigés pour la taxation de l"appel, dossier A-660-93, décision non publiée, 16 juillet 1997.

Dossier T-421-97, décision non publiée.

Supra, note 9.

56 C.P.R. (2d) 93 (C.F. 1re inst.).

[1973] C.F. 1091, à la page 1092.

The Law of Costs, Second Edition, Canada Law Book Inc., 1996.

[1996] F.C.J. No. 952, Lamy, O.T.

[1995] F.C.J. No. 441, Lamy, O.T.

Dossier T-780-90, décision non publiée de Smith, O.T., 26 octobre 1994.

     Voir l"onglet 6 du Cahier de documents de la défenderesse.

[1989] S.J. No. 645.

Engine and Leasing Co. et al. v. Atlantic Towing Ltd. 93 F.T.R. 181 (juge Joyal); Sanmammas Compania Maritima S.A. et al. v. The Ship "Netuno" 102 F.T.R. 172 (juge Tremblay-Lamer); Aerlinte Eireann Teoranta v. Canada [1993] F.C.J. 1462 (officier taxateur Wendt) et Dableh v. Ontario Hydro [1994] No. 1810 (officier taxateur Stinson).

Voir Diversified Product Corp. et al. v. Tye-Sil Corp. Ltd, supra, note 9 et la kyrielle d"affaires qui ont suivi.

Supra, note 9.

Taux pour le 25 février 1993 fourni par la Banque du Canada.

Supra note 5.

(1992), 43 C.P.R. (3d) 43 (C.A.F.).

[1993] F.C.J. No. 1462, W.F. Wendt, officier taxateur.

Voir le paragraphe 53 plus haut.

Le taux de change était de 1,1819 le 24 juin 1990.

Engine and Leasing Co. et al. v. Atlantic Towing Ltd. (1995), 93 F.T.R. 181 (C.F. 1re inst.).

Supra, note 27.

Supra, note 27.

Mes calculs sont les suivants : 2 000 $/jour - 1 200 $/jour = 800 $; 800 $/jour x 10 jours x 1,2786 = 10 228,80 $ à déduire. Le taux de change de 1,2786 est le taux moyen pour le mois de juin 1993, fourni par la Banque du Canada.

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