Décisions de la Cour fédérale

Informations sur la décision

Contenu de la décision

                                                                                                                              Date : 20010608

                                                                                                                Dossier : IMM-1139-99

                                                                                           Référence neutre : 2001 CFPI 1112

OTTAWA (Ontario), le 8 juin 2001

EN PRÉSENCE DE Monsieur le juge MacKay

ENTRE :

IVAN ANTONIO BERMUDEZ,

ANA BERMUDEZ, IVAN BERMUDEZ, GRETHELL BERMUDEZ,

et BRYAN BERMUDEZ

                                                                                                                                      demandeurs

et

LE MINISTRE DE LA

CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION

                                                                                                                                         défendeur

MOTIFS DE L'ORDONNANCE SUPPLÉMENTAIRE ET ORDONNANCE

LE JUGE MacKAY

[1]                 Les motifs et l'ordonnance supplémentaire qui suivent viennent s'ajouter aux motifs et à l'ordonnance qui ont été déposés en l'espèce le 13 juin 2000. Par cette ordonnance, il a été fait droit à la demande de contrôle judiciaire des demandeurs, la décision de la section du statut de réfugié rejetant la revendication a été annulée et l'affaire a été renvoyée pour réexamen.


[2]                 Lorsque cette demande de contrôle judiciaire a été entendue, la décision a été reportée; j'ai fait savoir que je prononcerais des motifs à l'appui de ma décision et que je donnerais ensuite aux avocats la possibilité de proposer, pour examen par la Cour, une question ou des questions aux fins de la certification en vertu du paragraphe 83(1) de la Loi sur l'immigration, L.R.C. (1985), ch. I-2, dans sa forme modifiée (la Loi) pour examen par la Cour d'appel.

[3]                 Par la suite, lorsque mes motifs ont été déposés au mois de juin 2000, j'ai omis de donner aux avocats la possibilité de proposer des questions pour examen conformément au paragraphe 83(1). Les motifs de l'ordonnance et l'ordonnance par lesquels la demande a été accueillie ont été déposés le 13 juin 2000. Par la suite, l'avocat du ministre défendeur a écrit à la Cour afin de proposer la certification de deux questions; il s'agit des questions suivantes :

1)              La formation de la section du statut de réfugié est-elle tenue d'informer l'intéressé de l'élément particulier de l'alinéa Fa) de l'article premier en vertu duquel ses activités sont examinées lorsqu'elle l'avise de son exclusion possible?

2)              Quelle est l'étendue des crimes de guerre en vertu de l'alinéa Fa) de l'article premier? Pareils crimes sont-ils limités au contexte d'un conflit armé international ou peuvent-ils être commis dans un contexte interne?


[4]                 Au nom des demandeurs, l'avocat a répondu le 27 juin 2000, en soutenant que la Cour avait conclu, eu égard aux faits de l'affaire, que l'équité procédurale avait été déniée au demandeur par suite de la décision de la formation, ce qui, selon l'avocat, était déterminant, et ce, indépendamment de la question de savoir si la présente cour avait avec raison conclu que les crimes de guerre, tels qu'ils sont envisagés à l'alinéa Fa) de l'article premier, sont limités aux crimes commis dans le cadre d'un conflit armé international. De l'avis des demandeurs, les questions proposées n'étaient pas déterminantes dans un appel en ce qui concerne la première des conclusions de la Cour.

[5]                 Des lettres ont ensuite été échangées entre les avocats, ceux-ci ayant examiné l'évolution du droit criminel international et la compétence des tribunaux d'examiner pareilles questions. Aussi intéressantes soient-elles, ces lettres ne sont pas convaincantes lorsqu'il s'agit de déterminer s'il convient d'envisager la certification des questions proposées.

[6]                 Après un certain retard, pour lequel je tiens à m'excuser, j'ai conclu que les questions proposées ne seront pas examinées plus à fond et ne seront pas certifiées.

[7]                 Deux motifs m'amènent à tirer cette conclusion. En premier lieu, je retiens l'argument invoqué pour le compte des demandeurs, selon lequel ma décision du 13 juin 2000 était fondée sur deux conclusions, la première étant qu'eu égard aux circonstances, la SSR a manqué à son devoir d'équité du fait que, même si elle avait prévenu le demandeur que l'alinéa Fa) de l'article premier était en cause, elle ne l'avait pas prévenu que la formation considérerait la perpétration de crimes de guerre comme distincte des crimes contre l'humanité.


[8]                 Aux paragraphes 8 et 9 des motifs de l'ordonnance du 13 juin 2000, j'ai fait les remarques suivantes :

[...] En l'espèce, le défendeur soutient que puisque le demandeur savait qu'il y avait une possibilité d'exclusion par application de l'alinéa 1Fa), celui-ci et son avocat avaient pleinement le temps de préparer leurs arguments au sujet des agissements qui pourraient justifier l'exclusion. Qui plus est, l'avocat du demandeur a présenté des conclusions au sujet de ces agissements, encore que sous l'angle des crimes contre l'humanité, et non des crimes de guerre. Dans sa décision, la section du statut a expressément refusé d'examiner si les agissements de M. Bermudez constituaient un crime contre l'humanité.

[...] À mon avis, les deux motifs d'exclusion pouvant être invoqués en l'espèce en application de l'alinéa 1Fa) sont suffisamment différents pour impliquer des preuves et des arguments différents, et pour que l'on s'attende à des conclusions différentes en réfutation. Il y a lieu de noter, bien que ceci se rapporte davantage au second point litigieux, que les faits tels qu'ils étaient évoqués à l'audience ne font pas ressortir de prime abord des crimes de guerre, mais des crimes contre l'humanité. Que les crimes contre l'humanité aient pu être un facteur était raisonnablement prévisible, mais il n'en était pas de même des crimes de guerre dans les circonstances de la cause.

Je crois que cet aspect de la décision est fondé sur les faits et que les questions proposées, si elles sont certifiées, ne régleront peut-être pas un appel d'une façon efficace.

[9]                 En second lieu, à mon avis, une fois que l'ordonnance a été déposée le 13 juin 2000, la présente cour était functus officio, même s'il est possible de considérer qu'une possibilité qui avait antérieurement été donnée aux avocats avait été refusée. Je puis uniquement offrir mes excuses à cet égard. Toutefois, le paragraphe 83(1) prévoit ce qui suit :

83. (1) Le jugement de la Section de première instance de la Cour fédérale rendu sur une demande de contrôle judiciaire relative à une décision ou ordonnance rendue, une mesure prise ou toute question soulevée dans le cadre de la présente loi ou de ses textes d'application - règlements ou règles - ne peut être porté en appel devant la Cour d'appel fédérale que si la Section de première instance certifie dans son jugement que l'affaire soulève une question grave de portée générale et énonce celle-ci.


[10]            Dans la décision Brar c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration) (1997), 139 F.T.R. 79, 41 Imm.L.R. (2d) 194 (1re inst.), Monsieur le juge Heald a refusé de certifier une question proposée conformément au paragraphe 83(1). Les circonstances, dans cette affaire-là, étaient différentes en ce sens que les avocats n'avaient pas soulevé la question de la certification lors de l'audition de la demande de contrôle judiciaire. Le juge Heald a conclu qu'après avoir examiné les questions en litige et avoir rendu un jugement officiel, il était functus officio et n'avait pas compétence pour rouvrir l'affaire. Je suis d'accord.

Conclusion

[11]            Pour ces motifs, je refuse de certifier les questions qui ont été proposées aux fins d'un examen conformément au paragraphe 83(1) de la Loi et l'ordonnance qui suit est rendue :


ORDONNANCE

[12]            IL EST ORDONNÉ que les questions proposées par le défendeur aux fins d'un examen conformément au paragraphe 83(1) de la Loi sur l'immigration, à l'égard de l'ordonnance du 13 juin 2000, ne soient pas certifiées aux fins d'un examen par la Cour d'appel.

« W. Andrew MacKay »

Juge

OTTAWA (Ontario),

le 8 juin 2001.

Traduction certifiée conforme

Suzanne M. Gauthier, LL.L., Trad.a.


COUR FÉDÉRALE DU CANADA

SECTION DE PREMIÈRE INSTANCE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

NO DU DOSSIER :                                                         IMM-1139-99

INTITULÉ DE LA CAUSE :                                       Ivan Antonio Bermudez et autres

c.

MCI

LIEU DE L'AUDIENCE :                                             Toronto (Ontario)

DATE DE L'AUDIENCE :                                           le 10 novembre 1999

MOTIFS DE L'ORDONNANCE                             

SUPPLÉMENTAIRE PAR :                                       Monsieur le juge MacKay

DATE DES MOTIFS :                                                  le 8 juin 2001

ONT COMPARU

M. Micheal Crane                                                             POUR LE DEMANDEUR

M. Martin Anderson                                                         POUR LE DÉFENDEUR

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

M. Micheal Crane                                                             POUR LE DEMANDEUR

Toronto (Ontario)

M. Morris Rosenberg                                                        POUR LE DÉFENDEUR

Sous-procureur général du Canada                                 

 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.