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Date : 20031222

Dossier : T-2005-01

Référence : 2003 CF 1443

                                                                              

ENTRE :

                                                 AB HASSLE, ASTRAZENECA AB

                                                 et ASTRAZENECA CANADA INC.

                                                                                                                                    demanderesses

                                                                             et

                        GENPHARM INC., TAKEDA CHEMICAL INDUSTRIES, LTD.

                                                  et LE MINISTRE DE LA SANTÉ

                                                                                                                                           défendeurs

                                                   MOTIFS DE L'ORDONNANCE

                          [Motifs d'ordonnance confidentiels rendus le 11 décembre 2003]

LE JUGE LAYDEN-STEVENSON

[1]                L'oméprazole, qui fait partie de la famille des benzimidazoles, est un puissant inhibiteur de la sécrétion d'acide gastrique, mais il est essentiellement instable, particulièrement en milieu acide. Genpharm Inc. conteste certains brevets relatifs à l'oméprazole (vendu sous la marque LOSEC). Elle allègue que certains brevets sont invalides et que son produit générique ne contrefera pas d'autres brevets.


LA DEMANDE ET LES PARTIES             

[2]                AB Hassle est la propriétaire des brevets canadiens n º 1,292,693 (693) et n º 2,025,668 (668). AstraZeneca AB (qui a succédé à AstraAB) est la propriétaire du brevet canadien n º 2,133,762 (762) et Takeda Chemical Industries, Ltd. (Takeda) est la propriétaire du brevet canadien n º 1,338,377 (377 ou le brevet Takeda). Avec le consentement des propriétaires, AstraZeneca Canada Inc. a inclus ces brevets sur la liste de brevets qu'elle a soumise à l'égard de ses produits oméprazole et magnésium d'oméprazole.


[3]                Le 9 novembre 2001, les demanderesses AB Hassle, AstraZeneca AB et AstraZeneca Canada Inc. (collectivement Astra) ont déposé un avis de demande désignant Genpharm Inc. (Genpharm), Takeda et le ministre de la Santé (le ministre) comme défendeurs. L'avis de demande, présenté en vertu du Règlement sur les médicaments brevetés (avis de conformité), DORS/93-133, modifié par DORS/98-166 et DORS/99-279 (le Règlement), vise à obtenir une réparation sous forme de déclaration concernant l'avis d'allégation de Genpharm daté du 27 septembre 2001, et, à titre subsidiaire, une ordonnance interdisant au ministre de délivrer un avis de conformité à Genpharm à l'égard de neuf brevets canadiens. Takeda, en qualité de propriétaire du brevet Takeda, n'est pas demanderesse dans la présente affaire, mais elle adopte les observations d'Astra et s'appuie sur celles-ci tout en présentant des observations supplémentaires à l'égard de son propre brevet. Le ministre est chargé de l'application du Règlement. Il n'a pas déposé d'observations et n'a pas été représenté à l'audience. Au cours de la procédure, Genpharm a retiré un certain nombre de ses allégations et Astra, à son tour, a retiré la réparation recherchée à l'égard de ces allégations. À l'audience, quatre brevets demeuraient en litige.

LE CONTEXTE

[4]                L'avis d'allégation de Genpharm est daté du 27 septembre 2001 et Genpharm y précise que sa demande se rapporte aux gélules d'oméprazole en concentrations de 10 mg et 20 mg. Elle allègue que les brevets 693 et 377 sont invalides et que les brevets 668 et 762 ne sont pas contrefaits. Les brevets 693 et 377 portent sur des formulations. Le brevet 693 concerne une formulation consistant en un réactif alcalin ajouté à un noyau d'oméprazole, un enrobage gastrorésistant et entérosoluble et, entre les deux, un sous-enrobage inerte qui se dissout ou se désintègre rapidement dans l'eau. L'invention revendiquée par le brevet 377 concerne l'ajout de sels inorganiques basiques à l'oméprazole à titre de stabilisants. Le brevet 688 revendique un nouvel usage de l'oméprazole en tant qu'antibactérien et le brevet 762 concerne l'association d'une substance qui inhibe la sécrétion d'acide gastrique et d'un antibactérien dégradable en milieu acide.


[5]                Trois procédures, qui concernent les mêmes parties et portent sur l'oméprazole, ont précédé la présente procédure. Les trois ont maintenant été retirées. Le 26 mars 1999, Genpharm a signifié son premier avis d'allégation à l'égard de l'oméprazole. Elle alléguait (dans la partie pertinente pour la présente procédure) la non-contrefaçon des brevets 377 et 668, et la non-contrefaçon et l'invalidité au motif de l'antériorité et de l'évidence du brevet 693. Une demande d'interdiction a été introduite le 7 mai 1999 (T-809-99). Genpharm a retiré ses allégations d'invalidité le 11 juillet 2000.

[6]                Le 13 septembre 1999, un deuxième avis d'allégation a été signifié portant que le brevet 377 était invalide pour cause d'antériorité, d'évidence et de double brevet. Un avis de demande visant à obtenir l'interdiction de la délivrance d'un avis de conformité a été déposé le 28 octobre 1999 (T-1884-99). Un troisième avis d'allégation, daté du 11 juillet 2000, portait que le brevet 693 était invalide. Une troisième demande d'interdiction a été introduite le 25 août 2000 (T-1603-00).


[7]                Ces trois procédures, comme on l'a mentionné ci-dessus, ont été abandonnées. Le premier désistement a suivi l'arrêt de la Cour d'appel fédérale AB Hassle c. Canada (Ministre de la Santé nationale et du Bien-être social) (2000) 7 C.P.R. (4th) 272, où la Cour a conclu que la seconde personne ne pouvait s'appuyer sur une preuve supplémentaire ne figurant pas dans son avis d'allégation. Les autres procédures ont été abandonnées lorsque le ministre a informé Genpharm que sa demande d'autorisation de son produit oméprazole était considérée comme retirée. Les procédures qui devaient faire l'objet d'une audience devant la présente Cour le 8 janvier 2001 ont été abandonnées, sous toutes réserves, avec le consentement des parties. Quand l'appel de Genpharm interjeté auprès du ministère de la Santé au sujet de la décision du ministre a été accueilli, Genpharm a signifié un nouvel avis d'allégation. En vertu d'une ordonnance du protonotaire en date du 31 [sic] novembre 2001, un certain nombre d'éléments de preuve, de transcriptions de contre-interrogatoires et de documents de la Cour afférents aux procédures antérieures (T-809-99, T-188-99 et T-1603-00) ont été versés au dossier de la présente procédure. Les parties ont également été autorisées à déposer des éléments de preuve supplémentaires.

LA NATURE DE LA PROCÉDURE

[8]                Comme je l'ai déclaré précédemment, la présente procédure est intentée en vertu du Règlement. L'histoire et l'économie du Règlement ont été exposés dans divers arrêts de la Cour d'appel fédérale et n'ont pas besoin d'être repris ici. (Voir les arrêts Merck Frosst Canada Inc. c. Canada (Ministre de la Santé nationale et du Bien-être social) (1994), 55 C.P.R. (3d) 302 (C.A.F.); AB Hassle c. Canada (Ministre de la Santé nationale et du Bien-être social), précité; Novartis AG et al. c. Abbott Laboratories Ltd. et al. (2000), 7 C.P.R. (4th) 264 (C.A.F.)). Fondamentalement, les affaires de non-contrefaçon et de validité entre le titulaire du brevet (la première personne) et la personne cherchant à obtenir un avis de conformité du ministre (la seconde personne) débutent par un avis d'allégation, signifié à la première personne par la seconde personne, qui expose les allégations de la seconde personne, y compris le droit et les faits sur lesquels elle fonde ses allégations. La première personne peut s'opposer et demander au tribunal de rendre une ordonnance interdisant au ministre de délivrer un avis de conformité à la seconde personne avant l'expiration du brevet.


[9]                Genpharm est un fabricant de médicaments génériques (la seconde personne) et souhaite distribuer au Canada un médicament d'oméprazole en comparant la drogue qu'elle veut commercialiser à celle d'Astra (la première personne), déjà autorisée par le ministre. Aux termes de l'article 5 du Règlement, Genpharm a fourni un avis d'allégation à Astra à l'égard de certains brevets dont Astra a soumis la liste conformément à l'article 4 du Règlement. La demande d'Astra en vertu de l'article 6 du Règlement constitue une réponse à l'avis d'allégation de Genpharm.

[10]            Les procédures relatives à l'article 6 ne sont pas assimilables à des actions visant à statuer sur la validité d'un brevet ou la contrefaçon. Ce sont des procédures de contrôle judiciaire, à mettre en oeuvre de façon expéditive, en vue de décider s'il est loisible au ministre de délivrer l'avis de conformité demandé. Elle ne visent que des fins administratives : Apotex Inc. c. Canada (Ministre de la Santé nationale et du Bien-être social) (1997), 76 C.P.R. (3d) 1 (C.A.F.). La décision porte sur le point de savoir si les allégations de la seconde personne sont suffisamment étayées pour justifier une conclusion à des fins administratives (la délivrance d'un avis de conformité) portant que la commercialisation éventuelle du produit de la seconde personne ne contreferait pas le brevet du demandeur : Pharmacia Inc. c. Canada (Ministre de la Santé nationale et du Bien-être social) (1994), 58 C.P.R. (3d) 209 (C.A.F.).


[11]            En intentant simplement cette procédure, le demandeur obtient l'équivalent d'une injonction interlocutoire sans avoir satisfait à aucun des critères qu'un tribunal exigerait avant d'interdire la délivrance d'un avis de conformité : Merck Frosst Canada Inc. c. Canada (Ministre de la Santé nationale et du Bien-être social), [1998] 2 R.C.S. 193; Bristol-Myers Squibb Canada Inc. c. Canada (Procureur général) (2001), 11 C.P.R. (4th) 539 (C.A.F.). Le Règlement autorise le tribunal à décider sommairement, sur le fondement de la preuve produite, si les allégations sont fondées. La procédure en vertu de l'article 6 n'est pas juridictionnelle et n'a pas l'autorité de la chose jugée. Le breveté n'est aucunement privé de tous les recours qui lui sont normalement ouverts pour lui permettre de faire respecter ses droits. Si des questions de validité ou de contrefaçon rendent nécessaire un procès en règle, il peut être obtenu selon la voie normale par l'introduction d'une action : Pfizer Canada Inc. c. Apotex Inc. (2001), 11 C.P.R. (4th) 245 (C.A.F.); SmithKline Beecham Pharma Inc. c. Apotex Inc. (2001), 14 C.P.R. (4th) 76 (C.F. 1re inst.), confirmée par (2002), 291 N.R. 168 (C.A.F.); Novartis A.G. c. Apotex Inc. (2002) 298 N.R. 348 (C.A.F.).

L'AVIS D'ALLÉGATION

[12]            Une copie intégrale de l'avis d'allégation de Genpharm est jointe aux présents motifs à titre d'annexe A. Les passages importants pour la présente affaire sont reproduits ci-dessous :

[TRADUCTION]

Brevet no 1,292,693

[...] lesdites revendications sont invalides.

Ce brevet vise et revendique une formulation orale à enrobage gastrorésistant et entérosoluble comportant un « noyau » composé d'une substance active recouverte d'une ou plusieurs couches de sous-enrobage, elles-mêmes recouvertes d'une ou plusieurs couches d'enrobage gastrorésistant et entérosoluble. La substance active est l'oméprazole ou un sel d'oméprazole [...]


Vous êtes déjà parfaitement au courant des fondements factuels et juridiques de ces allégations, ayant pris connaissance de l'affidavit de M. Richard K. Pike, souscrit le 13 septembre 1999, de l'affidavit de M. James Steven Rowe, souscrit le 9 septembre 1999 et de l'affidavit de M. James Steven Rowe, souscrit le 22 mars 2000, ainsi que des pièces accompagnant lesdits affidavits et du contre-interrogatoire ayant porté sur les affidavits et pièces déposés et identifiés dans le cadre de l'affaire T-809-00 de la Cour fédérale du Canada, à laquelle vous étiez partie, tout comme Genpharm et quelques autres. Tous ces affidavits, sauf le dernier de M. Rowe, ont été déposés dans le cadre de cette affaire, le dernier de M. Rowe n'a pas été déposé, mais une copie vous a été communiquée. Aux références citées par M. Rowe à l'appui de l'argument concernant le caractère évident du brevet, on ajoute et invoque l'article de Dechesne et al. intitulé « Étude de l'influence des plastifiants sur les caractéristiques des films appliqués d'eudragit L 30d » , Journal de pharmacie de Belgique, 1982, 37, 4, p. 283-286.

Vous trouverez dans les rapports ci-joints plus de détails sur les fondements factuels et juridiques des allégations ci-dessus.

Brevet no 1,338,377

Ce brevet n'est pas valide. Vous êtes déjà au courant des fondements factuels et juridiques de cette allégation, ayant pris connaissance des affidavits de M. James Steven Rowe, avec les pièces d'accompagnement, souscrits le 14 décembre 1999 et le 26 avril 2000, le premier affidavit ayant fait l'objet d'un dépôt et le second ayant fait l'objet d'une tentative de dépôt dans le cadre de l'affaire T-1884-99 de la Section de première instance de la Cour fédérale du Canada, à laquelle vous étiez partie, tout comme Genpharm et quelques autres.

Brevet no 2,025,668

Ce brevet vise et revendique l'usage de l'oméprazole ou d'un sel pharmaceutiquement acceptable d'oméprazole pour le traitement de maladies infectieuses, et plus particulièrement celles causées par Campylobacter pylori. Le produit de Genpharm ne sera indiqué pour aucun des usages énumérés dans ce brevet. Les gélules d'oméprazole de Genpharm seront étiquetées et vendues pour l'inhibition de la sécrétion d'acide gastrique. Elles ne seront pas étiquetées ni vendues pour le traitement de maladies infectieuses, comme celles causées par Campylobacter pylori. Le produit médicamenteux proposé par Genpharm n'a pas contrefait, ne contrefait pas et ne contreferait pas, s'il était commercialisé, l'une ou l'autre des revendications de ce brevet.

Brevet no 2,133,762

Ce brevet vise et revendique une composition pharmaceutique pour le traitement de la gastrite ou de l'ulcère gastroduodénal, combinant un inhibiteur des récepteurs H2 de l'histamine ou un inhibiteur de la pompe à protons, lequel peut être l'oméprazole, et un antibactérien dégradable en milieu acide.

Les gélules d'oméprazole de Genpharm ne contiendront ni inhibiteur des récepteurs H2 de l'histamine ni antibactérien dégradable en milieu acide, et elles ne seront ni étiquetées ni vendues comme étant la composition revendiquée. Elles ne contreferont donc pas ce brevet.

LES QUESTIONS SOULEVÉES

[13]            Les parties conviennent que les questions à trancher sont celles énoncées par la demanderesse au paragraphe 173 de son exposé des faits et du droit (paragraphe 212 de l'exposé des faits et du droit de Genpharm et paragraphe 35 de l'exposé des faits et du droit de Takeda). Il s'agit de déterminer :


a)         si l'avis d'allégation constitue un abus de procédure;

b)        si Genpharm a fourni un énoncé détaillé des fondements juridiques et factuels de ses allégations, conformément aux dispositions du Règlement;

c)         si les allégations de Genpharm sont fondées, et plus précisément :

i) si son allégation concernant l'invalidité du brevet 693 est fondée;

ii) si son allégation concernant l'invalidité du brevet 377 est fondée;

iii) si son allégation concernant la non-contrefaçon du brevet 668 est fondée;

iv) si son allégation concernant la non-contrefaçon du brevet 762 est fondée.

À l'audience, Astra n'a pas plaidé la question b), et Takeda s'est contentée d'y faire allusion et d'indiquer qu'elle n'entendait pas la pousser. Je n'ai pas l'intention d'étudier cette question plus à fond. J'examinerai les autres, le plus souvent dans l'ordre où elles ont été présentées.

LE BREVET 693

[14]            La demande à l'origine du brevet 693 a été déposée le 29 avril 1987 et elle revendique la priorité d'une demande présentée au Royaume-Uni le 30 avril 1986 (date de priorité). Le brevet 693 a été délivré le 3 décembre 1991. Il vise une formulation qui consiste en un réactif alcalin ajouté à un noyau d'oméprazole, un enrobage gastrorésistant et entérosoluble et, entre les deux, un sous-enrobage inerte qui se dissout ou se désintègre rapidement dans l'eau. Le brevet 693 renferme 19 revendications, reproduites dans l'annexe B aux présents motifs. Par souci de commodité, j'ai reproduit la revendication 1 ci-dessous :


[TRADUCTION] 1. Une préparation pharmaceutique pour administration orale, comprenant : a) un noyau renfermant une quantité efficace d'une substance choisie dans le groupe constitué par l'oméprazole et un réactif alcalin, un sel alcalin d'oméprazole et un réactif alcalin, et enfin un sel alcalin d'oméprazole seul; b) un sous-enrobage inerte pouvant se dissoudre ou se désintégrer rapidement dans l'eau, qui est appliqué sur le noyau et renferme une ou plusieurs couches des substances choisies parmi les excipients de comprimés et les polymères filmogènes; et c) une couche externe appliquée sur le sous-enrobage et constituant un enrobage gastrorésistant et entérosoluble.

[15]            Les revendications 2 à 16 sont subordonnées, directement ou indirectement, à la revendication 1. La revendication 17 reformule la revendication 1 sous forme de procédé. La revendication 18 porte sur un emballage commercial contenant une préparation conforme à l'une ou l'autre des revendications 1 à 16 ainsi que des instructions concernant l'usage de celle-ci pour le traitement de maladies gastro-intestinales. La revendication 19 vise l'usage d'une préparation conforme à l'une ou l'autre des revendications 1 à 16 pour le traitement de maladies gastro-intestinales.

[16]            L'allégation de Genpharm porte que l'invention revendiquée dans le brevet 693 était évidente et ne comporte donc pas le caractère inventif. Selon l'allégation, la personne du métier, à la date de priorité (30 avril 1986), aurait été conduite directement et sans difficulté à la réaliser compte tenu des connaissances générales courantes et de l'état de la technique à ce moment-là. Genpharm fait valoir que les revendications 5, 13 et 19 sont incomplètes et ambiguës. Elle affirme également l'invalidité du brevet au motif de l'antériorité pour les revendications 1, 7, 8, 11 et 17, déclarant que chacune est dépourvue de nouveauté.


LA PREUVE

[17]            Astra et Genpharm ont toutes les deux présenté des affidavits d'experts en matière de formulations. Astra s'est aussi appuyée sur un affidavit d'un membre de son personnel. Tous les auteurs d'affidavit ont subi un contre-interrogatoire. Aucune des parties n'a contesté la qualification et l'expertise des témoins experts proposés.

[18]            Astra s'est appuyée sur les témoignages de trois témoins.

1)    M. John Rees, qui a souscrit des affidavits le 26 juillet 1999, le 31 janvier 2000, le 25 septembre 2000 et le 2 avril 2002, est un consultant auprès de l'industrie pharmaceutique. S'agissant des allégations touchant le brevet 693 dans la présente procédure, Astra se fonde sur les affidavits du 31 janvier 2000 (l'affidavit Rees 1) et du 2 avril 2002 (l'affidavit Rees 2). M. Rees a obtenu son Ph.D. de l'École de pharmacie de l'Université de Londres en 1967. Il a travaillé dans l'industrie pharmaceutique pendant dix-huit ans, puis a été professeur à l'École de pharmacie et de pharmacologie et chef de la pratique pharmacologique à l'Université de Bath. Il compte de nombreuses publications sur divers aspects de la formulation pharmaceutique, notamment sur le pelliculage.


2)    M. Gordon L. Amidon, qui a souscrit un affidavit le 1er avril 2002, est professeur de pharmacologie titulaire de la chaire Charles R. Walgreen, Jr. au Collège de pharmacie de l'Université du Michigan depuis 1994. Il a obtenu un Ph.D. en chimie pharmaceutique de l'Université du Michigan en 1971. Il a travaillé dix ans dans l'industrie pharmaceutique, occupé des postes universitaires quand il ne travaillait pas dans l'industrie pharmaceutique et offre maintenant des services de recherche et de consultation à l'industrie pharmaceutique. Il est le titulaire de divers prix de recherche et compte de nombreuses publications dans les domaines de l'industrie pharmaceutique, de la physique pharmaceutique et de la chimie pharmaceutique.

3)    Brigitta Rook, qui a souscrit un affidavit le 27 janvier 2000, est vice-présidente aux Affaires réglementaires internationales, Secteur gastro-intestinal, chez AstraZeneca. Elle a travaillé au sein du groupe de sociétés AstraZeneca depuis l'obtention de son diplôme de pharmacienne en 1968, d'abord en commercialisation, puis dans la section Stabilité du laboratoire pharmaceutique. En 1970, elle a été nommée à un poste de gestion de la recherche aux Affaires réglementaires et est devenue chef du groupe en 1985. Dans le cadre de ses fonctions de chef du groupe, elle a élaboré des demandes réglementaires touchant la conduite d'essais cliniques portant sur l'oméprazole et des demandes d'autorisation gouvernementale reliées à la vente de l'oméprazole.

[19]            Genpharm s'est appuyée elle aussi sur les témoignages de trois témoins.


1)    M. James Steven Rowe a souscrit des affidavits le 9 septembre 1999 (Rowe 1), le 22 mars 2000 (Rowe 2), le 14 décembre 1999 (Rowe 3), le 26 avril 2000 (Rowe 4), le 24 octobre 2000 (Rowe 5) et le 6 février 2002 (Rowe 6). Pour le brevet 693, Genpharm s'appuie sur les affidavits Rowe 1, 2, 5 et 6. M. Rowe est le directeur scientifique d'une société conseil qui offre des services relatifs à tous les aspects du développement des produits, du concept initial jusqu'au lancement du produit. Il a travaillé dans l'industrie pharmaceutique pendant presque dix ans après son baccalauréat en pharmacie obtenu en 1966. De décembre 1976 à avril 1983, il a été chercheur universitaire et maître de conférences à l'École de pharmacie de l'Université de Londres. Il a obtenu son Ph.D. en pharmacie en 1980 pendant son mandat à l'Université de Londres. En 1983, il a repris ses fonctions de consultant auprès de l'industrie pharmaceutique. Il compte des publications à son actif, mais en moins grand nombre que MM. Rees et Amidon.

2)    M. Michael John Story a souscrit un affidavit le 7 mais 2002 et agit comme consultant auprès de l'industrie pharmaceutique. Il est titulaire d'un Ph.D. en génie chimique obtenu à l'Université de Cambridge, en Angleterre, en 1967. Par la suite, il a travaillé pour diverses entreprises pharmaceutiques. Il a été chargé de développer la formulation de gélules contenant des comprimés entérosolubles d'érythromycine. Il possède une vaste expérience de presque tous les aspects du développement des préparations pharmaceutiques.

3)    M. Philip Andrew Marshall, qui a souscrit un affidavit le 8 février 2002, est un consultant indépendant dans le domaine de la chimie pharmaceutique, des affaires réglementaires et des méthodes de production dans l'industrie pharmaceutique. M. Marshall a obtenu son Ph.D. en 1979 de l'Université d'Adelaide en Australie. Il compte plus de vingt ans d'expérience commerciale dans l'industrie dans tous les aspects du développement de produit. Il a publié pendant plus de vingt-cinq ans, notamment des articles dans des revues scientifiques et non scientifiques, des résumés de conférences et des présentations. M. Marshall est l'auteur de six rapports, élaborés à la demande d'avocats australiens en vue de procédures de brevet devant la Cour fédérale d'Australie. Ces rapports forment des pièces afférentes à son affidavit ainsi que la correspondance des avocats relative à ces rapports.


LES POSITIONS DES PARTIES

Astra

[20]            Astra prétend que le brevet 693 revendique une formulation nouvelle de l'oméprazole pour administration orale. Elle reconnaît qu'une formulation à enrobage gastrorésistant et entérosoluble était connue dans l'état de la technique. Elle fait valoir que l'oméprazole est labile (c'est-à-dire qu'il se désintègre) en milieu acide et qu'il faut le protéger des sécrétions acides de sucs gastriques. Résistant à des conditions très acides, l'enrobage protège les composés labiles en milieu acide au cours de leur passage dans l'estomac (gastrorésistance). Astra soutient que rien, dans l'état de la technique, ne laissait entrevoir la nécessité de modifier la formulation d'oméprazole à enrobage gastrorésistant et entérosoluble en ajoutant un composé alcalin ou un sous-enrobage. Il était supposé qu'un enrobage gastrorésistant et entérosoluble serait compatible avec l'oméprazole.

[21]            Astra soutient que les inventeurs associés au brevet 693 ont constaté l'instabilité de l'oméprazole au contact direct ou indirect d'un enrobage gastrorésistant et entérosoluble. Pour accroître la stabilité de la forme posologique à enrobage gastrorésistant et entérosoluble, il faut ajouter dans le noyau d'oméprazole un réactif alcalin. Un noyau alcalin dissout cet enrobage lorsqu'il est imprégné de l'eau des sucs gastriques et il l'affaiblit. Il faut un sous-enrobage soluble dans l'eau pour assurer à la fois la stabilité en cours d'entreposage et la gastrorésistance.

[22]            Selon ce que l'on prétend, il n'était pas prévu, compte tenu de l'état de la technique, que l'oméprazole ou un noyau alcalin interagirait avec un enrobage gastrorésistant et entérosoluble et qu'un sous-enrobage soluble dans l'eau réussirait à empêcher la perte de gastrorésistance causée par l'imprégnation de l'eau des sucs gastriques.

[23]            Un témoin d'Astra, M. Rees, songeant aux difficultés qu'une personne du métier aurait eues à surmonter dans la formulation de l'oméprazole, reconnaît que cette personne aurait envisagé la possibilité d'un enrobage gastrorésistant et entérosoluble. Cependant, compte tenu du profil de stabilité de l'oméprazole, cette personne aurait fait face à un problème de décoloration en préparant le noyau. La résolution de ce problème nécessiterait un important programme de recherche. La personne du métier pourrait tôt ou tard songer à ajouter un composé alcalin au noyau, mais elle observerait alors un nouveau problème de décoloration. Elle pourrait songer à accroître l'alcalinité, mais elle s'exposerait alors à une perte de gastrorésistance. Cette personne se serait attendue à ce qu'un enrobage gastrorésistant et entérosoluble correctement appliqué donne les résultats escomptés et elle chercherait vraisemblablement à régler le problème de gastrorésistance. Elle n'aurait pas été menée à l'invention revendiquée.


[24]            La personne du métier se trouverait plutôt devant un dilemme difficile à résoudre : soit empirer le problème de décoloration en abaissant l'alcalinité de manière à accroître la gastrorésistance ou exacerber le problème de gastrorésistance en haussant l'alcalinité de manière à régler le problème de décoloration. Il n'y aurait pas eu de solution apparente à ce dilemme, étant donné qu'elle ne se serait pas attendue à une interaction à l'état solide entre l'enrobage et le noyau. Même en supposant qu'elle serait apte à identifier la cause de l'absence de gastrorésistance, la personne du métier n'aboutirait tout de même pas à l'invention revendiquée, puisqu'il est divulgué dans le brevet que l'échec de la gastrorésistance est attribuable à l'imprégnation de l'eau contenue dans les sucs gastriques. Une substance de sous-enrobage qui se dissout ou se désintègre rapidement dans l'eau est bien la dernière chose à laquelle une personne du métier aurait songé pour régler le problème de la gastrorésistance.

[25]            Selon M. Amidon, une personne du métier aurait eu à mener bien des expériences pour tenter de déterminer les causes du conflit entre la stabilité en cours d'entreposage et la gastrorésistance. Même si elle avait pu en arriver à la préparation revendiquée, elle n'aurait pu y parvenir directement et sans difficulté.

[26]            Mme Rook prétend qu'Astra a décidé de modifier la formulation pour les essais cliniques de phase III en raison du fait que la formulation employée pour les essais cliniques de phase II (qui ne comprenait pas de sous-enrobage) n'assurait pas une stabilité adéquate. La formulation utilisée pour les essais de phase III comprenait un réactif alcalin et un sous-enrobage. La modification de la formulation, qui a retardé le processus réglementaire de présentation de la drogue, confirme que l'invention revendiquée n'était pas évidente.

Genpharm


[27]            Genpharm allègue que le brevet 693 traite de la façon dont l'oméprazole est formulé en gélules ou autres préparations pour administration orale. On reconnaît dans le brevet qu'il était su que l'oméprazole pouvait être formulé en granules recouverts d'un enrobage gastrorésistant et entérosoluble et insérés dans une gélule, en vue d'être administré par voie orale. On y reconnaît également qu'il était su que l'oméprazole était instable en milieu acide, mais que, du moins pour les besoins des essais cliniques, il était suffisamment stable lorsque recouvert d'un enrobage acide gastrorésistant et entérosoluble. On précise dans le brevet que le problème observé était lié au fait qu'au cours d'une longue période d'entreposage, le médicament recouvert d'un enrobage gastrorésistant et entérosoluble s'avérait instable et que, pour résoudre ce problème, on avait « inventé » de placer entre l'oméprazole et l'enrobage gastrorésistant et entérosoluble un sous-enrobage capable de se dissoudre ou de se désintégrer rapidement. Genpharm allègue que, avant le dépôt de la demande de brevet, l'oméprazole était un médicament connu, utilisé pour inhiber les sécrétions gastriques, que sa sensibilité à l'acide était connue et qu'il avait notamment été préparé sous une forme posologique solide consistant en des granules recouverts d'un enrobage gastrorésistant et entérosoluble et insérés dans une gélule.


[28]            Un témoin de Genpharm, M. Rowe, a expliqué les étapes qu'il aurait suivies en 1986 pour formuler l'oméprazole à titre de formulateur versé dans l'art. Il aurait examiné la littérature existante, mené des études de préformulation, enrobé l'oméprazole en utilisant des techniques commerciales et mené des études de stabilité. Ce faisant, il en serait arrivé au même point de départ que celui décrit aux lignes 30 à 35 de la page 2 du brevet 693, à savoir que, même si la durée de conservation du produit à enrobage gastrorésistant et entérosoluble était acceptable pour des essais cliniques, elle était insuffisante pour l'entreposage de longue durée. Il soutient qu'une personne du métier aurait songé à ajouter un composé alcalin en vue de stabiliser un noyau renfermant un médicament instable en milieu acide. Une personne du métier aurait été au courant de l'utilisation d'une substance soit acide soit basique pour accroître la stabilité d'un médicament, selon le profil de stabilité du pH observé. La détermination du milieu optimal pour assurer la stabilité d'un médicament se résumait à [traduction] « un simple test courant qu'un technicien aurait pu effectuer » . Il n'aurait pas initialement soupçonné que l'interaction entre l'oméprazole contenu dans le noyau et les groupes acides de l'enrobage gastrorésistant et entérosoluble était une cause probable du problème, mais il aurait certainement été conscient de cette possibilité, étant donné qu'il était généralement admis que ce type de réaction pouvait effectivement survenir. Il déclare qu'il aurait été évident à ses yeux et aux yeux d'autres formulateurs, [traduction] « dans le cours normal de la pratique de la formulation » , qu'un sous-enrobage devait être appliqué dans le cadre habituel de la mise au point de ce produit. L'utilisation d'un sous-enrobage comme solution permettant de séparer le noyau alcalin de l'enrobage gastrorésistant était évidente et non pas nouvelle.

[29]            Se fondant sur l'état de la technique et sur un examen du brevet 693, M. Story affirme qu'il est connu que l'oméprazole peut être stabilisé à l'aide de substances alcalines, ce qui peut mener la personne du métier à formuler de l'oméprazole en présence d'alcalis. Il considère que le recours à un sous-enrobage est évident.


[30]            Monsieur Marshall décrit la tâche qu'il a accomplie et se réfère à ses rapports. On lui a demandé de faire un exercice hypothétique à partir d'instructions et d'informations fournies par étapes. Il n'a effectué aucun test ni aucune expérience. Au terme de son sixième rapport, son résultat final a été un sous-enrobage [traduction] « perméable » contenant un mélange d'hydroxypropyl cellulose ou d'hydroxypropyl méthylcellulose (HPMC) entre le noyau d'oméprazole et l'enrobage gastrorésistant et entérosoluble. Il n'avait pas le brevet à sa disposition lorsqu'il effectué cet exercice.

LES ANTÉRIORITÉS

[31]            La liste complète des antériorités invoquées par M. Rowe est jointe aux présents motifs à titre d'annexe C. Les références primaires dont traitent MM. Rowe et Story sont résumées ci-dessous.

[32]            Le brevet EP 0 124 495 (le brevet 495) intitulé « Omeprazole Salts » , publié le 7 novembre 1984, décrit des sels d'oméprazole et divulgue leurs procédés de préparation, les compositions pharmaceutiques qui les contiennent et leur usage médicamenteux. Le brevet mentionne des comprimés à enrobage gastrorésistant et entérosoluble, des gélules molles à enrobage gastrorésistant et entérosoluble et des gélules dures renfermant des granules de l'ingrédient actif recouvertes d'un enrobage gastrorésistant et entérosoluble. Il divulgue l'instabilité de l'oméprazole en suspension et précise que, s'il est entreposé sans que des mesures de précaution spéciales soient prises, il [traduction] « se dégrade plus rapidement qu'on ne le souhaiterait » .


[33]            Pilbrant et Cederberg (Pilbrant), article publié en 1985 par A. Pilbrant et C. Cederberg et intitulé « Development of an oral formulation of omeprazole » . Cet article fournit un compte rendu d'études effectuées sur une forme posologique solide de l'oméprazole consistant en granules à enrobage gastrorésistant et entérosoluble. Les auteurs affirment, entre autres, que cette forme est très légèrement soluble dans l'eau, très soluble dans une solution alcaline et se désintègre très rapidement dans des solutions aqueuses à faible pH. Des études de préformulation ont révélé que l'humidité, les solvants et les substances acides ont un effet néfaste sur la stabilité de l'oméprazole et qu'ils devraient être évités dans les formulations pharmaceutiques. Les auteurs ajoutent qu'il existe deux principaux choix pour la formulation d'une forme posologique solide pour administration orale, soit [traduction] « une forme posologique orale classique dans laquelle l'oméprazole est libéré et absorbé assez rapidement pour qu'il n'y ait pas désintégration dans l'estomac » et une forme posologique à enrobage gastrorésistant et entérosoluble. Le premier choix a été exclu en raison des résultats de l'étude concernant la biodisponibilité, qui ont révélé que, sous cette forme, plus de la moitié de l'oméprazole se désintégrait dans l'estomac. Les auteurs sont d'avis que la forme posologique à enrobage gastrorésistant et entérosoluble [traduction] « offre les meilleures possibilités » , mais doit [traduction] « être parfaitement enrobée et gastrorésistante puisque, si l'ingrédient actif réussit à s'écouler dans l'estomac, il se dégrade presque immédiatement. C'est la même situation qui se produit lorsqu'un milieu acide s'infiltre dans la forme posologique par des trous minuscules ou des fissures dans l'enrobage gastrorésistant et entérosoluble » .


[34]            Shin-Etsu H-17 - feuillet d'information technique de la Shin-Etsu Chemical Company, daté de mars 1975 et intitulé « Enteric Coating on Tablets Containing Alkaline Matter » . On y expose un problème et propose une solution quant à la perte de stabilité associée aux comprimés à enrobage gastrorésistant et entérosoluble contenant une substance alcaline telle que le chlorure d'ammonium, le carbonate de lithium ou le salicylate de sodium dans un contexte d'entreposage à haute température. On a constaté qu'il était possible d'améliorer la situation en [traduction] « introduisant de l'acide stéarique dans la pellicule intermédiaire, qui est considéré amortir en quelque sorte une réaction d'échange ionique concevable entre la substance alcaline et la substance gastrorésistante et entérosoluble » . Un compte rendu de l'essai de deux formulations pour vérifier la vitesse d'absorption dans les sucs gastriques et le temps de désintégration dans les sucs intestinaux est fourni. L'essai portait sur des comprimés à enrobage gastrorésistant et entérosoluble comportant à la fois une couche intermédiaire et un sous-enrobage de Pharmacoat 606 (nom commercial d'une hydroxypropyl méthylcellulose (HPMC) de Shin-Etsu, produit soluble dans l'eau qui devient en grande partie insoluble dans l'eau lorsqu'un acide stéarique y est ajouté).

[35]            Shin-Etsu P-30 - un autre feuillet d'information technique, daté d'avril 1980 et intitulé « Stability of Methyl-dopa Tablet Coated with Pharmacoat 606 » . On y traite d'un problème causé par une réaction entre un médicament instable dans des conditions alcalines et le Pharmacoat 606. La solution proposée est d'ajouter une substance acide au noyau ou à l'enrobage.


[36]            Brevet britannique no 760,403 (Abbott) - Brevet de 1953 concernant des améliorations d'enrobages gastrorésistants et entérosolubles, et plus particulièrement l'usage de certains solides minéraux dans ces enrobages. Dans la description, on envisage l'usage de parties de l'enrobage gastrorésistant et entérosoluble avec d'autres enrobages de même nature déjà connus. L'un des exemples fournis dans le brevet est une formulation d'érythromycine, un composé labile en milieu acide. On précise dans le brevet qu'un médicament ayant un pH hautement alcalin peut toujours attaquer et affaiblir ou détruire la substance filmogène, mais que l'enrobage demeure viable pour de tels médicaments incompatibles si, par exemple, on ajoute un sous-enrobage contenant une substance compatible et que l'on applique ensuite une couche externe consistant en l'enrobage gastrorésistant et entérosoluble souhaité.

[37]            Rohm Pharma GMBH, Lehman et coll., janvier 1983, « Practical Course in Lacquer Coating » - Publication produite pour un cours donné par Rhom Pharma, fabricant de la préparation polymérique filmogène eudragit. Elle porte sur l'enrobage gastrorésistant et entérosoluble des comprimés et montre au lecteur comment produire de tels comprimés. Le document décrit les caractéristiques de l'eudragit L, confirme qu'il conviendrait à titre d'enrobage gastrorésistant et entérosoluble et qu'il pourrait être appliqué sur des noyaux contenant un médicament très sensible à l'humidité, afin de ralentir la pénétration de l'humidité dans les noyaux.


[38]            En résumé, la position d'Astra en ce qui concerne l'état de la technique est qu'il n'y a aucun motif de modifier la formulation antérieure d'oméprazole (seulement deux documents cités concernent l'oméprazole); aucun document cité ne fait état de l'ajout d'un composé alcalin pour stabiliser un noyau labile en milieu acide; les documents concernant le sous-enrobage s'éloignent du sous-enrobage revendiqué pour traiter d'échec de la gastrorésistance; les traités cités n'abordent pas le problème de l'interaction entre l'enrobage gastrorésistant et le noyau, et certains d'entre eux sont postérieurs à la date de priorité du brevet 693.

ANALYSE

[39]            Le fardeau de la preuve dans la procédure intentée en vertu de l'article 6 a été formulé par le juge Gibson dans la décision SmithKline Beecham, précitée, aux paragraphes 14 et 15 :

Dans cette perspective, je conclus ceci : le « fardeau de présentation de la preuve » qui incombe à Apotex étant d'établir que chacune des questions que soulève son avis d'allégation est mise en jeu, si elle s'acquitte de cette charge, le « fardeau de persuasion » repose ensuite sur SmithKline. Dans l'hypothèse où Apotex parvient à établir que la validité du brevet 637 est mise en jeu, SmithKline a droit de s'appuyer sur la présomption de validité du brevet prévue au paragraphe 43(2) de la Loi.

Toutefois, le caractère de la procédure intentée devant la Cour a des répercussions sur le « fardeau de persuasion » incombant à SmithKline dans les circonstances évoquées au paragraphe précédent. Dans l'arrêt Merck Frosst Canada Inc. c. Canada (Ministre de la Santé nationale et du Bien-être social), le juge Hugessen, s'exprimant au nom de la Cour, a écrit aux pages 319 et 320 :

Si je saisis bien l'économie du règlement, c'est la partie qui se pourvoit en justice en application de l'article 6, en l'espèce Merck, qui doit poursuivre la procédure et assumer la charge de la preuve initiale. Cette charge me paraît difficile puisqu'il s'agit de réfuter certaines ou l'ensemble des allégations de l'avis d'allégation, allégations qui, si elles n'étaient pas contestées, permettraient au ministre de délivrer l'avis de conformité.             [...]                                                                                                      À ce sujet, il y a lieu de noter que si l'alinéa 7(2)b) [du Règlement] semble prévoir que la Cour rend un jugement déclarant que le brevet n'est pas valide ou qu'il n'est pas contrefait, il ne fait aucun doute que ce jugement déclaratoire ne peut être rendu dans le cadre de la procédure fondée sur l'article 6 elle-même. Cette procédure est après tout engagée par le breveté pour demander une interdiction contre le ministre; puisqu'elle revêt la forme d'un recours sommaire en contrôle judiciaire, il est impossible de concevoir qu'elle puisse donner lieu à une demande reconventionnelle de la part de l'intimé en vue de pareil jugement déclaratoire. L'invalidité de brevet, tout comme la contrefaçon de brevet, n'est pas une question relevant d'une procédure de ce genre.

Par conséquent, la charge qui incombe à SmithKline consiste seulement à réfuter les allégations contenues dans l'avis d'allégation, et non pas à justifier des déclarations de validité et de contrefaçon, ou réciproquement à réfuter les prétentions formulées à l'égard des allégations d'invalidité et d'absence de contrefaçon.


Voir également : Pfizer Canada Inc. c. Apotex Inc. (2002), 22 C.P.R. (4th) 466 (C.F.) aux paragraphes 82 et 83 et GlaxoSmithKline Inc. c. Genpharm Inc. 2003 CF 1248, [2003] A.C.F. n º 1582 au paragraphe 34.

[40]            La première étape de l'analyse est l'interprétation des revendications du brevet. Comme je l'ai déclaré ci-dessus, toutes les revendications du brevet 693 renvoient à la revendication 1. Dans la décision Canamould Extrusions Ltd. et al. c. Driangle Inc. (2003), 25 C.P.R. (4th) 343 (C.F. 1re inst.), aux paragraphes 31 et 32, j'ai discuté certains des principes établis dans les arrêts apparentés Free World Trust c. Électro Santé Inc. (2000), 9 C.P.R. (4th) 168 (C.S.C.) et Whirlpool Corporation c. Camco Inc. (2000), 9 C.P.R. (4th) 129 (C.S.C.). Pour les besoins de l'espèce, je reprends ci-dessous les observations que j'y faisais.

Avant d'examiner les questions de validité et de contrefaçon, il faut interpréter le brevet. Pour ce faire, il convient de se reporter au jour de sa publication. La Loi sur les brevets, L.R.C. 1985, ch. P-4 (la Loi), et une interprétation en fonction de l'objet (ou interprétation téléologique) favorisent le respect de la teneur des revendications, ce qui favorise à son tour tant l'équité que la prévisibilité. En énonçant la portée du monopole, les revendications servent d'avis au public pour qu'il sache jusqu'où il peut aller en toute impunité. La teneur d'une revendication doit être interprétée de façon éclairée et en fonction de l'objet. On ne doit interpréter les revendication ni littéralement ni sur la base de notions imprécises telles que l' « esprit de l'invention » . Plus on recherche l' « esprit » et l' « essentiel » de l'invention, moins les revendications remplissent leur fonction à l'égard du public. Les brevets sont, au sens de la Loi d'interprétation, L.R.C. 1985, ch. I -21, des « règlements » et, à ce titre, ils méritent d'être interprétés de la façon qui est le plus susceptible d'assurer l'atteinte de leurs objectifs. L'interprétation de l'intention de l'inventeur manifestée dans la revendication du brevet doit être celle d'une personne versée dans l'art dont relève l'invention. La personne ordinaire versée dans l'art particulier dont relève le brevet n'est ni un grammairien ni un étymologiste et elle ne se livre pas à une analyse minutieuse et verbale du document.


L'article 27 de la Loi régit le contenu des mémoires descriptifs. En contrepartie du monopole, l'inventeur a l'obligation de divulguer son invention. Il n'est pas obligé de revendiquer un monopole sur tous les éléments nouveaux, ingénieux et utiles divulgués dans le mémoire descriptif. La règle habituelle est que l'inventeur renonce à tout ce qui n'est pas revendiqué. On peut tenir compte du mémoire descriptif pour comprendre la signification d'un mot utilisé dans une revendication, mais pas pour augmenter ou diminuer la portée de la revendication telle qu'elle est libellée et donc comprise. Les revendications et la divulgation doivent être interprétées avec un esprit désireux de comprendre. On doit interpréter les mots choisis par l'inventeur conformément au sens que celui-ci voulait leur donner et de façon à favoriser l'atteinte de son objectif, que le libellé des revendications l'ait exprimé expressément ou tacitement. Cela étant, si l'inventeur s'est mal exprimé ou a autrement créé une limitation non nécessaire causant des difficultés, il ne peut s'en prendre qu'à lui-même. Le public est en droit de se fonder sur les termes utilisés pour autant qu'il les interprète de façon juste et informée.

[41]            L'instruction de la présente demande s'est terminée le 31 octobre 2003, au terme de cinq jours de plaidoirie. Le 3 novembre 2003, la Cour d'appel fédérale a publié ses motifs dans l'affaire Apotex Inc. c. AB Hassle, AstraZeneca AB et AstraZeneca Canada Inc. et Le ministre de la Santé 2003 CAF 409, [2003] A.C.F. n º 1601, affaire portant sur le brevet 693.

[42]            Le juge Rothstein a fait mention de la divulgation du brevet 693 pour apprécier les circonstances de l'invention. Il a déclaré :

Pour agir, l'oméprazole doit être libéré dans l'intestin grêle, non dans l'estomac. Aussi, pour éviter que les sucs gastriques acides de l'estomac ne dégradent le noyau d'oméprazole, il faut que celui-ci soit recouvert d'un enrobage gastrorésistant et entérosoluble. Cet enrobage se dissout dans le milieu neutre ou alcalin de l'intestin grêle, après avoir permis à l'oméprazole de passer dans l'estomac sans subir d'altération.

Toutefois, l'application d'un enrobage gastrorésistant et entérosoluble conventionnel directement sur le noyau d'oméprazole entraîne la décomposition rapide de celui-ci, et la préparation pharmaceutique (ou le terme plus commun que nous emploierons ici : le comprimé) subit une forte décoloration et perd de son ingrédient actif. Le problème de la stabilité du médicament à l'entreposage peut se régler en incluant un réactif alcalin dans le noyau d'oméprazole, mais lors du passage dans l'estomac d'un comprimé constitué d'un noyau alcalin en contact direct avec un enrobage gastrorésistant et entérosoluble, des sucs gastriques se diffusent dans le noyau à travers l'enrobage, avant que le comprimé n'atteigne l'intestin grêle. Les sucs gastriques font se dissoudre une partie du noyau, lequel réagit ensuite avec l'enrobage qui finit par se dissoudre.

L'invention décrite dans le brevet pertinent vise l'élaboration d'un comprimé d'oméprazole doté d'un enrobage résistant à la dissolution dans l'estomac. Il s'agit d'appliquer un sous-enrobage inerte entre le noyau d'oméprazole et l'enrobage gastrorésistant et entérosoluble.


[43]            S'agissant de l'interprétation de la revendication 1, la Cour a conclu que la revendication, en tant que revendication relative à un produit, semble claire et dans ce cas, il n'est pas justifié de se reporter à la divulgation pour interpréter la revendication, en particulier pour modifier la portée ou le champ de la revendication : Dableh c. Ontario Hydro, [1996] 3 C.F. 751 (C.A.). L'interprétation de la revendication 1, faite par la Cour d'appel, est la suivante :

La revendication no 1 décrit une [traduction] « préparation pharmaceutique pour administration orale » ou, dans le langage de tous les jours, un comprimé. Il y est expliqué que ce comprimé se constitue d'un noyau, d'un sous-enrobage inerte et d'une couche externe ou enrobage gastrorésistant et entérosoluble. La revendication n'énonce aucune restriction concernant le sous-enrobage inerte; elle n'expose pas qu'il doit être créé suivant un processus particulier.

On peut y lire que le sous-enrobage inerte [traduction] « recouvre le noyau » . ... Puisque la revendication no 1 constitue clairement une revendication se rapportant à un produit et non à un processus, l'expression [traduction] « recouvre le noyau » décrit, selon mon interprétation, la structure de la préparation pharmaceutique finie. Dans le contexte d'une revendication relative à un produit, ces mots décrivent la position du sous-enrobage et non son processus de formation. [...]

[L]a revendication no 1 du brevet décrit une préparation pharmaceutique qui, dans sa forme finale, présente un sous-enrobage ou une couche séparatrice entre le noyau et l'enrobage gastrorésistant et entérosoluble, sans égard à la façon dont cette couche séparatrice est formée.

[44]            Compte tenu du moment où a été publié l'arrêt de la Cour d'appel, j'ai offert aux avocats d'Astra et de Genpharm la possibilité de présenter d'autres observations, s'ils le souhaitaient, au sujet de cet arrêt. Les avocats ont présenté des observations, que j'ai prises en considération. Je me considère liée par l'interprétation de la revendication qu'a donnée la Cour d'appel. Je n'accepte pas l'observation d'Astra portant que l'arrêt [traduction] « n'est pas pertinent à l'égard de la question d'interprétation soulevée en l'espèce » . Comme Astra l'a signalé dans son exposé des faits et du droit au paragraphe 184 :


[traduction] L'interprétation précède l'examen des question de contrefaçon et d'invalidité du brevet et les revendications d'un brevet doivent être interprétées sans référence à ces questions.

[45]            L'arrêt qui fait autorité en matière de critères touchant l'antériorité et l'évidence est l'arrêt Beloit Canada Ltd. et al. c. Valmet Oy (1986), 8 C.P.R. (3d) 289 (C.A.F.). Dans cet arrêt, le juge Hugessen a déclaré qu'il est préférable de traiter d'abord la question de l'évidence. Le juge Gibson, dans la décision récente Bayer AG c. Apotex Inc. 2003 CF 1199, [2003] A.C.F. n º 1531, a adopté l'abrégé du droit exposé par Madame la juge Dawson dans la décision Pfizer (2002), précitée, concernant le critère de l'invalidité au motif de l'évidence. Je partage l'avis du juge Gibson et je me range moi aussi à l'analyse du juge Dawson présentée ci-dessous.

La formulation du critère de l'évidence la plus souvent citée est celle du juge Hugessen dans l'arrêt Beloit, qui s'exprime ainsi :

[traduction] Pour établir si une invention est évidente, il ne s'agit pas de se demander ce que des inventeurs compétents ont ou auraient fait pour solutionner le problème. Un inventeur est par définition inventif. La pierre de touche classique de l'évidence de l'invention est le technicien versé dans son art mais qui ne possède aucune étincelle d'esprit inventif ou d'imagination; un parangon de déduction et de dextérité complètement dépourvu d'intuition; un triomphe de l'hémisphère gauche sur le droit. Il s'agit de se demander si, compte tenu de l'état de la technique et des connaissances générales courantes qui existaient au moment où l'invention aurait été faite, cette créature mythique (monsieur tout-le-monde du domaine des brevets) serait directement et facilement arrivée à la solution que préconise le brevet. C'est un critère auquel il est très difficile de satisfaire.

En d'autres termes, il s'agit de déterminer en général si l'invention alléguée exigeait une activité inventive : arrêt Windsurfing International Inc. et al. c. Trilantic (1985), 8 C.P.R. (3d) 241 (C.A.F.), à la page 256.

Comme l'indique l'arrêt Beloit, le critère de l'évidence est difficile à satisfaire étant donné qu'une « étincelle d'esprit inventif » suffit : arrêt Diversified Products Corp. c. Tye-Sil Corp. (1991), 125 N.R. 218 (C.A.F.), page 368. Toute invention est évidente une fois qu'elle a été faite, c'est pourquoi il faut accueillir avec une extrême prudence le témoignage des experts pouvant tirer profit du recul : voir l'arrêt Beloit, précité, à la page 289.


Le juge Wetston a néanmoins fait remarquer, dans l'arrêt Apotex Inc. c. Wellcome Foundation Ltd. (1998) 79 C.P.R. (3d) 193; confirmée (2000) 10 C.P.R. (4th) 65 (C.A.F.), au paragraphe 243 : « il n'y [a] pas d'activité inventive à suivre un cheminement évident et bien défini, en utilisant des techniques et des procédés connus sur des compositions connues, à moins que l'inventeur ne rencontre des difficultés qui n'auraient pas pu raisonnablement être prévues par une personne versée dans l'art ou être surmontées par l'application d'une compétence ordinaire » .

Le juge Wetston s'est dit convaincu, dans l'affaire qui lui avait été soumise, que les réalisations antérieures « n'auraient pas amené un technicien compétent mais dépourvu d'imagination à cette invention sans expérimentations excessives » (au paragraphe 264). La Cour d'appel a conclu que cette formulation du critère n'était pas erronée (au paragraphe 63).

Quelle est alors la portée de l'expérimentation ou de la manipulation que le technicien compétent et dénué d'imagination, le parangon de déduction, a le droit de mener?

Pfizer se fonde sur la jurisprudence, notamment l'arrêt Bayer Aktiengesellschaft c. Apotex Inc. (1995), 60 C.P.R. (3d) 58 (Cour de l'Ontario (Division générale)) appel rejeté, appel incident accueilli sur une question différente (1998), 82 C.P.R. (3d) 526 (C.A. de l'Ontario), autorisation d'en appeler devant la Cour suprême du Canada rejetée [1998] S.C.C.A. no 563, pour soutenir que l'exécution de recherches ou d'expérimentations semble être hors du champ d'activité du technicien compétent et qu'elle ne suffit pas pour prétendre que des indices suffisants faisaient en sorte que l'invention « valait la peine d'être tentée » .

Dans l'arrêt Bayer, le juge Lederman a écrit ce qui suit aux pages 80 et 81 :

[traduction] Il semble y avoir une différence importante entre les capacités du technicien fictif anglais versé dans l'art et celui du Canada. En effet, l'exécution de recherches ou d'expérimentations semble être hors du champ d'activité du technicien fictif compétent canadien. Dans la décision Cabot Corp. c. 318602 Ontario Ltd. (1988), 20 C.P.R. (3d) 132 à la p. 146 (C.F. 1re inst.), le juge Rouleau a cité un extrait de H.G. Fox dans Canadian Law and Practice Relating to Letters Patent for Inventions :

[Traduction] Pour qu'une invention soit considérée comme « évidente » , il faut qu'elle ait été directement découverte par la personne qui recherchait quelque chose de neuf, un nouveau procédé de fabrication ou autre, sans avoir besoin d'expérimentation, de réflexion profonde, de recherche que ce soit en laboratoire ou dans les textes. [Non souligné dans le texte original.]


Aussi, même si on s'imaginerait normalement que le laboratoire de cette personne mythique est plein d'éprouvettes et de boîtes de Pétri mythiques et qu'elle passe sa vie en expérimentations, aucune recherche de cette nature n'est prise en compte aux fins de l'application du critère juridique. Toute logique qu'ait pu paraître à une personne effectivement versée dans l'art à cette époque, en fonction de l'état des connaissances, de mener certaines expérimentations, cela n'est pas permis au technicien mythique versé dans l'art. Ce chercheur mythique ne peut posséder un esprit de recherche ou de réflexion qui le conduirait ultimement à la solution, mais on attend plutôt de lui qu'il s'exclame instantanément et spontanément, sans plus, « Je connais déjà la réponse et elle est évidente » . Pas plus qu'il ne convient de dire qu'il y avait des indications importantes qui guidaient l'expert mythique vers la solution ou des indices suffisants pour que l'invention « vaille la peine d'être tentée » . Dans la décision Farbwerke Hoechst Aktiengesellschaft Vormals Meister Lucius & Bruning c. Halocarbon (Ontario) Ltd. (1974), 15 C.P.R. (2d) 105, à la p. 114, le juge Collier en rejetant le critère de l'expérience qui « vaut d'être tentée » a déclaré :

Il est facile de dire a posteriori, avec l'avantage du recul, qu'une expérience dans des circonstances telles qu'on les suppose ici, lorsque le temps et les dépenses sont illimités, vaut ou valait la peine d'être tentée.

Il n'en demeure pas moins que même si le technicien versé dans son art ne doit pas faire de recherche, il est, comme l'a noté le juge Hugessen dans l'arrêt Beloit, un parangon de déduction et de dextérité. Il est aussi raisonnablement en mesure de se tenir au courant des progrès accomplis dans son domaine : Whirlpool Corp. c. Camco Inc., [2002] 2 R.C.S. 1067 au paragraphe 74.

Si j'essaie d'appliquer ces principes aux faits qui m'ont été présentés, je pose d'abord comme prémisse que le brevet s'adresse au psychiatre versé dans son art ou à une personne qui connaît bien le traitement des troubles anxieux. Les parties conviennent que comme le brevet 065 porte une date de dépôt prioritaire du 2 novembre 1989, c'est à partir de cette date qu'il faut évaluer l'évidence. Un psychiatre versé dans son art devait-il faire preuve d'esprit inventif à cette date pour traiter le trouble panique ou le TOC au moyen de la sertraline? Ou arrivait-il directement et sans difficulté à cette solution?

[46]            En l'espèce, la personne du métier est un expert en formulation d'expérience qui n'a pas d'imagination, mais fait preuve d'une diligence raisonnable pour se tenir au courant des progrès accomplis dans son domaine.

[47]            Dans la décision AB Hassle c. Apotex Inc., 2003 CFPI 771, [2003] A.C.F. n º 994, le juge Campbell a distingué l'évidence de l'antériorité de la manière suivante :


La principale différence entre l'antériorité et l'évidence est que l'antériorité exige qu'une seule source antérieure contienne une description exacte de l'invention (Creations 2000 Inc. c. Canper Industrial Products Ltd. (1990), 34 C.P.R. (3d) 178, juge Hugessen, à la page 182 (C.A.F.)), alors que pour prouver l'évidence on peut se fonder sur tout, allant de la divulgation contenue dans un seul document à une « mosaïque » de l'état de la technique (Beloit c. Valmet, précité, à la page 294). Il s'agit dans les deux cas de questions de fait (Rothmans, Benson & Hedges Inc. c. Imperial Tobacco Ltd. (1993), 47 C.P.R. (3d) 188, juge Desjardins, à la page 198 (C.A.F.)).

Voir aussi la décision Illinois Tool Works Inc. c. Cobra Fixations Cie (2002), 221 F.T.R. 161, confirmée par 2003 CAF 358, [2003] A.C.F. 1477.

L'évidence

[48]            Avant d'entreprendre la présente analyse, je souligne que les éléments de preuve qui m'ont été présentés l'ont été par écrit. J'ai les transcriptions des contre-interrogatoires relatifs aux affidavits, mais cela est très loin de l'avantage d'avoir entendu des témoignages de vive voix. Les témoignages des experts sont utiles, mais les opinions des experts diffèrent entre elles. C'est incontestablement l'un des facteurs qui ont poussé le juge Hugessen, dans l'arrêt Beloit, précité, à dire qu'il faut faire preuve d'une extrême prudence à l'égard des opinions des experts sur la question de l'évidence. En fin de compte, la décision revient au tribunal. Je n'ai aucune raison de mettre en doute la crédibilité d'aucun des témoins. J'ai accordé peu de poids aux conclusions de M. Amidon parce qu'il n'a pas fait la recension des antériorités citées. Dans certains cas, j'ai privilégié le témoignage d'un expert sur celui d'un autre au sujet de questions particulières.


[49]            Astra signale les problèmes auxquels ont dû faire face les inventeurs de sa formulation d'oméprazole visée par le brevet 693. Le premier était lié à la stabilité en cours d'entreposage. Lorsque l'enrobage gastrorésistant et entérosoluble était fait de polymères contenant des groupes acides, l'oméprazole se décomposait au contact direct ou indirect, de telle sorte que la préparation se décolorait grandement et qu'il y avait perte d'oméprazole. Astra a résolu ce problème en ajoutant des réactifs alcalins et a tôt fait de découvrir que la solution créait un autre problème. Son brevet divulgue que, lorsque la formulation atteignait l'estomac, l'eau contenue dans les sucs gastriques pénétrait l'enrobage gastrorésistant et dissolvait des portions du noyau alcalin. À son tour, la solution alcaline résultante dissolvait des portions de l'enrobage gastrorésistant. La formulation contenue dans le brevet 693 est la solution compatible avec les deux problèmes. M. Rees déclare au paragraphe 52 de l'affidavit Rees 1 :

[traduction] La solution des inventeurs à ces multiples problèmes, décrite sous la rubrique « Grandes lignes de l'invention » , est une nouvelle forme posologique de l'oméprazole qui introduit simultanément un réactif alcalin dans le noyau et un sous-enrobage qui se dissout ou se désintègre rapidement dans l'eau, sous l'enrobage gastrorésistant.

[50]            La question, cependant, est de savoir (malgré le fait qu'Astra ait désigné sa formulation comme innovatrice) si, au terme d'un examen des connaissances générales courantes, les solutions constituaient des approches évidentes aux problèmes qui se posaient. Le fait que les formulateurs d'Astra aient rencontré les deux problèmes et trouvé les solutions pour la même composition n'est pas le facteur déterminant.


[51]            Quand on examine la question, il faut faire preuve de prudence à l'égard de l'analyse rétrospective, particulièrement en raison de la tendance des experts de recourir à ce type d'analyse. Avant de prendre en considération l'affirmation de l'expert « j'aurais pu faire cela » , le tribunal doit aussi tenir compte de la question « pourquoi ne l'avez-vous pas fait? » : Beloit, précité. Pour qu'une invention soit évidente, elle doit se présenter directement à la personne du métier sans profonde réflexion, recherche ou expérimentation : Apotex Inc. et al. c. Wellcome Foundation Ltd. (1998), 79 C.P.R. (3d) 193 (C.F. 1re inst.) confirmée par (2000), 10 C.P.R. (4th) 65 (C.A.F.) confirmé par (2002), 21 C.P.R. (4th) 499 (C.S.C.). Pourtant, il existe une distinction entre une « découverte » , qui ne peut faire l'objet d'un brevet, et une « invention » , qui peut être brevetée. La découverte est ce qui était imprévu ou faiblement entrevu, mais se trouvait sur la voie; l'invention est ce qui se trouvait hors de la voie, de sorte qu'on obtient la nouveauté : Farbwerke Hoechst AG Vormals Meister Lucius & Bruning c. Halocarbon (Ontario) Ltd. (1979), 42 C.P.R. (2d) 145 (C.S.C.).

[52]            Astra reconnaît qu'il est généralement et couramment connu qu'un enrobage gastrorésistant et entérosoluble est conçu pour protéger un médicament labile en milieu acide contre le contenu acide du tube digestif et pour retarder sa libération jusqu'à ce qu'il soit parvenu plus loin dans le tube digestif. Au paragraphe 52 de l'affidavit Rees 1, M. Rees déclare :

[traduction] Un enrobage gastrorésistant et entérosoluble est conçu pour : i) protéger l'estomac contre l'irritation causée par un médicament; ii) protéger un médicament labile en milieu acide contre le contenu acide du tube digestif; ou iii) retarder la libération d'un médicament jusqu'à ce qu'il soit parvenu plus loin dans le tube digestif.


[53]            M. Rees a également témoigné qu'une personne du métier envisagerait d'appliquer un enrobage gastrorésistant et entérosoluble sur l'oméprazole. Pilbrant indique qu'une forme posologique à enrobage gastrorésistant et entérosoluble [traduction] « offre les meilleures possibilités » (dossier des demanderesses, vol. XVII, onglet 92, X, p. 4781). Cet aspect de la composition est évident.

[54]            Le brevet 495 enseigne l'usage d'un noyau alcalin pour assurer la stabilité en cours d'entreposage des sels d'oméprazole. La description fait notamment état de ce qui suit :

[traduction] Un des problèmes de l'oméprazole est lié aux caractéristiques de sa stabilité. Lorsqu'il est entreposé sans que des mesures de précaution spéciales soient prises, il se dégrade plus rapidement qu'on ne le souhaiterait... La présente invention offre de nouvelles formes d'oméprazole ayant une meilleure stabilité pendant l'entreposage.

L'invention

Il a été découvert que les nouveaux sels alcalins d'oméprazole de formule... sont plus stables pendant l'entreposage que la forme neutre correspondante de l'oméprazole.

Dans la description (page 4, ligne 25), il est également question de préparer la formulation en unités posologiques pour administration par voie orale, et l'on mentionne des granules ou comprimés. L'exemple 12 traite d'enrobage gastrorésistant et entérosoluble. Il est également question de gélules molles à enrobage gastrorésistant et entérosoluble. Le brevet concerne cependant des sels d'oméprazole, et l'exemple 12 est le seul exemple de forme posologique solide (un comprimé à enrobage gastrorésistant et entérosoluble contenant de l'oméprazole magnésien) et on n'y parle pas de sous-enrobage. Il n'est nulle part mentionné que cette forme posologique solide pourrait présenter un problème ou qu'elle pourrait nécessiter des modifications. La forme définitive est réalisée en ajoutant un liquide à l'oméprazole sodique solide immédiatement avant l'utilisation. Le sel actif sous forme solide est utilisé sans agent stabilisant et il ne consiste pas en un comprimé à enrobage gastrorésistant et entérosoluble.


[55]            M. Rees a très clairement indiqué que les composés se comportent différemment en solution qu'à l'état solide. Il a ajouté que les études en solution ne permettent pas de prédire le comportement à l'état solide, tel que la stabilité, parce qu'elles ne fournissent pas d'information sur les propriétés à l'état solide qui influent sur la réactivité et la stabilité. Un composé peut être extrêmement instable en solution, mais stable à l'état solide (affidavit Rees 2, paragraphes 38 à 40, dossier des demanderesses, vol. III, onglet 26, p. 856 et 857).

[56]            Genpharm allègue que M. Rees a admis qu'une personne du métier pourrait toujours juger bon d'ajouter un composé alcalin au noyau, mais je ne considère pas qu'un tel commentaire soit incompatible avec son témoignage. Le fait qu'il ait reconnu qu'une personne n'omettrait pas de tenir compte de l'information provenant d'études en solution n'est pas non plus, selon moi, incompatible. Selon ce que je comprends, il cherche à dire qu'une personne du métier, à l'époque visée, à la lumière des connaissances que l'on avait à l'époque, aurait été menée dans d'autres directions. À l'état solide, les problèmes de stabilité auraient été jugés attribuables à l'humidité, aux conditions opératoires et aux substances employées pour l'enrobage gastrorésistant et entérosoluble. Le fait que ces pistes auraient été explorées et que les essais et expériences requis auraient été effectués pour chacune d'elles, avant que soit envisagé l'ajout d'une substance alcaline au noyau, ne modifie pas son argument de base selon lequel les études en solution ne mènent pas à prédire le comportement à l'état solide.

[57]            En contre-interrogatoire, M. Story a fourni les renseignements suivants :


[TRADUCTION]

Q              Reconnaissez-vous que, si nous nous limitons à un sel d'oméprazole, il n'y a rien dans le document du brevet 495 qui laisse supposer un problème pour une forme posologique solide contenant un sel d'oméprazole?

R              Non, on ne mentionne aucun problème.

Q              Et il n'y a aucune mention, aucun motif pour modifier la forme posologique solide visée dans l'exemple 12?

R              Non.

[58]            Le bulletin P-30 de Shin-Etsu enseigne la modification du pH dans un noyau sensible. Elle traite d'un médicament sensible à un milieu alcalin, la méthyl-dopa, sous forme de comprimé. Une substance acide est ajoutée au noyau. M. Rowe précise au paragraphe 37 de l'affidavit Rowe 1 :

[TRADUCTION] L'ajout d'une substance soit acide soit basique à des médicaments pour en accroître la stabilité a été décrit. Par exemple, les références données au paragraphe précédent [Lachman à la page 194, Connors au chapitre 3, Ghebre-Sellasie aux pages 220 et 226, et Bentley au chapitre 10, page 153][1] ainsi que dans le bulletin P-30 de Shin-Etsu... Dans l'exemple fourni par le bulletin P-30 de Shin-Etsu, l'ajout d'une substance acide, soit l'acide citrique, au noyau de la formulation d'un comprimé de méthyl-dopa augmentait la stabilité du produit, puisqu'il était instable en milieu alcalin.

et au paragraphe 30 de l'affidavit Rowe 2 :

[TRADUCTION] M. Rees écarte le bulletin P-30 de Shin-Etsu... parce qu'on y utilise une substance acide pour accroître la stabilité d'un noyau sensible à un milieu alcalin. J'admets que c'est l'inverse de ce qui se produit pour l'oméprazole. Toutefois, le bulletin illustre l'ajout de composés acides à des noyaux qui sont instables en milieu alcalin; le principe est donc le même que lorsqu'on ajoute des composés alcalins à un noyau instable en milieu acide.

J'observe que le bulletin de Shin-Etsu ne mentionne pas la perte de contenu. Il y est uniquement question de stabilité de la couleur.


[59]            M. Rowe n'a pu évoquer aucun document dans lequel ce principe aurait été appliqué. Il a dit ceci au cours de son contre-interrogatoire

[TRADUCTION]

Q              Parlons-en, si vous voulez. Mis à part cette réserve dont nous allons maintenant parler, vous êtes incapable de me citer la moindre référence qui confirme une réaction entre un enrobage gastrorésistant et entérosoluble et un composé actif sensible à un milieu acide.

R              Aucune ne me vient à l'esprit pour l'instant, non.

Q              J'aurais pensé que, compte tenu de l'importance de ce sujet, s'il y en avait eu une, vous l'auriez trouvée. C'est ce à quoi je me serais attendu.

R              Oui.

[60]            Il ressort du témoignage de M. Story qu'implicitement, on pourrait parvenir par déduction au noyau alcalin à partir de l'article de Pilbrant. Cependant, en contre-interrogatoire, M. Story a reconnu qu'il n'affirmerait pas que toute personne du métier tirerait une telle déduction.


[61]            M. Rowe a ajouté qu'il aurait été au courant de la possibilité d'une réaction entre les groupes acides de l'enrobage gastrorésistant et entérosoluble et le noyau labile en milieu acide. Il a cité à l'appui le brevet d'Abbott, mais a reconnu qu'il était généralement et couramment connu que les enrobages gastrorésistants et entérosolubles sont compatibles avec les composés actifs, dont les composés labiles en milieu acide, et que l'on peut s'attendre à ce qu'il n'y ait pas d'interaction. Le brevet d'Abbott renferme plusieurs exemples d'érythromycine (médicament labile en milieu acide) recouverte d'un enrobage gastrorésistant et entérosoluble. Il fait également mention d'une substance hautement alcaline qui s'attaque à l'enrobage gastrorésistant et entérosoluble et précise que [traduction] « en prenant des mesures spéciales, il demeurera néanmoins possible d'enrober ce genre de médicament incompatible, par exemple en appliquant un sous-enrobage fait d'une substance compatible, puis en appliquant un enrobage externe fait de la composition gastrorésistante et entérosoluble souhaitée » .

[62]            Le brevet d'Abbott ne traite pas de l'oméprazole. En contre-interrogatoire, M. Rowe ne savait pas de façon certaine si, après une recherche dans la littérature, ce document aurait même été examiné par une personne du métier. (Dossier des demanderesses, vol. VII, onglet 32, p. 1694, 1695 et 1697). Aucun des exemples fournis dans le brevet d'Abbott ne divulgue l'usage d'un réactif alcalin ou d'un sous-enrobage. Ce brevet illustre la compatibilité d'un enrobage gastrorésistant et entérosoluble avec un noyau alcalin et sensible à un milieu acide. Toute mention d'un sous-enrobage concerne un deuxième enrobage gastrorésistant et entérosoluble.

[63]            L'article de Pilbrant traite d'études de biodisponibilité. Il révèle que, pour éviter la dégradation acide d'une suspension d'oméprazole dans l'estomac, il faut administrer en même temps une grande quantité de substances tampons de pH. De plus, il reconnaît qu'une forme posologique à enrobage gastrorésistant et entérosoluble est une façon de formuler une préparation solide d'oméprazole pour administration orale.


[64]            L'article de Pilbrant enseigne que l'oméprazole doit être protégé de l'acide et de l'humidité, mais en indiquant que [traduction] « les gélules d'oméprazole présentent une stabilité acceptable pendant l'entreposage » , si elles sont gardées dans un emballage approprié. Compte tenu de cette information et du fait que Genpharm s'appuie beaucoup sur ce document, je demeure sceptique devant la déclaration de M. Rowe selon laquelle il savait que l'ajout de substances alcalines au noyau pouvait accroître les probabilités de réaction entre le groupe acide et le noyau et aurait donc suivi directement cette voie.

[65]            Me fondant simultanément sur le brevet 495 et l'article de Pilbrant, je ne vois aucune raison d'ajouter un réactif alcalin au noyau d'oméprazole. Il n'est mentionné dans aucun des autres documents que les enrobages gastrorésistants et entérosolubles sont incompatibles avec un médicament sensible à l'acide, tel que l'oméprazole. Les experts ne connaissaient aucun exemple de médicament acido-sensible recouvert d'un enrobage gastrorésistant et entérosoluble qui ait été stabilisé par l'ajout d'un réactif alcalin. Il me semble que, si Genpharm ne réussit pas à me convaincre, en invoquant le brevet 495 et l'article de Pilbrant, que l'ajout d'un réactif alcalin au noyau d'oméprazole était évident, les autres documents cités comme références ne sauraient être d'un plus grand secours. Genpharm a fait reposer sa plaidoirie en majeure partie sur le brevet 495, sur le brevet d'Abbott et sur l'article de Pilbrant.


[66]            Il ne m'apparaît pas du tout évident que l'ajout d'une substance alcaline au noyau ait été, dans les circonstances, la voie que la personne du métier aurait suivie « directement et facilement » à la date de priorité (avril 1986). Même si le témoignage de Mme Rook n'équivaut pas à l'opinion d'une personne du métier, il révèle tout de même que, à l'étape de la mise au point de l'oméprazole par Astra, il a fallu modifier la formulation au cours des essais cliniques. Ce changement a compliqué et ralenti le processus réglementaire de présentation et d'approbation, lequel se déroule plus facilement s'il n'y a pas de changements (affidavit aux paragraphes 4 à 7, dossier des demanderesses, vol. III, onglet 25, p. 840 à 842).

[67]            Les résultats de M. Marshall sont impressionnants, mais il a sûrement été guidé dans une certaine mesure au cours de l'exercice auquel il s'est prêté. En fin de compte, sa solution d'un sous-enrobage [traduction] « perméable » est fort semblable à la revendication du brevet 693. Elle n'est cependant pas identique, et il convient de noter que, lorsqu'il recommandait un mélange d'options spécifiques pour rendre l'éthyl cellulose (insoluble dans l'eau) « perméable » , il avait le sentiment qu'une décoloration rapide pouvait alors survenir (rapport 6, dossier des demanderesses, vol. XIII, onglet 90-11, p. 3719).

[68]            Astra prétend que Genpharm n'accepte pas le brevet parce que ses experts ne reconnaissent pas que l'eau des sucs gastriques imprègne l'enrobage gastrorésistant et entérosoluble et dissout des portions du noyau alcalin. C'est un fait. Les experts de Genpharm sont d'avis que l'eau ne pénètre pas et que c'est de l'eau déjà présente dans le noyau qui précipite la réaction alcaline à l'origine de la dégradation du noyau. Cette impasse illustre bien les divergences d'opinions qui peuvent surgir parmi des experts. Les parties s'entendent sur le fait que l'eau est présente et que sa présence se traduit par une incompatibilité.


[69]            Pour ce qui est des sous-enrobages solubles dans l'eau, selon moi, même si M. Story a témoigné qu'un tel sous-enrobage a été divulgué dans les antériorités, celles-ci ne dévoilent ni ne laissent supposer qu'il devrait être utilisé dans une forme posologique d'oméprazole recouverte d'un enrobage gastrorésistant et entérosoluble.

[70]            M. Rowe reconnaît qu'il ne serait pas facile d'arriver à l'invention revendiquée et que la voie empruntée pour y parvenir mènerait à bien des impasses. Procéder par tâtonnements en suivant une méthode compliquée et détaillée qui comporte bien des essais et expériences n'est pas compatible avec le critère « directement et facilement » associé à la personne du métier. Les essais de mise au point courants sont autre chose. J'accepte que M. Rowe y voie un exercice de solution de problème, mais j'accepte difficilement la notion que MM. Rowe et Story ont pu parvenir à l'invention sans se livrer à de sérieuses réflexions, recherches ou expériences excédant ce que l'on pourrait qualifier de « courantes » .

[71]            Bien qu'une mosaïque d'éléments soit acceptable en ce qui a trait à l'évidence de l'invention, je garde le sentiment que des éléments isolés, spécifiques et, dans certains cas, vagues, tirés des documents de référence rétrospectivement, ont amené MM. Rowe et Story à conclure que l'invention était évidente. Bien qu'ils caractérisent l'invention comme étant le fruit de travaux de mise au point courants, ils ne dévoilent aucune information sur ce que supposent ces travaux. Ils vont directement à la solution. Selon moi, ils ont pu y arriver par une analyse rétrospective. M. Marshall a eu la chance de se faire remettre les documents de référence et les scénarios appropriés. Je ne suis pas convaincue, suivant la prépondérance de la preuve, qu'une personne du métier serait, directement et facilement, parvenue à l'invention.

[72]            Ce n'est pas sans difficulté que j'en suis arrivée à cette conclusion, mais après que tout a été dit, lorsque je pèse la totalité de la preuve et que je l'examine à la lumière des principes de droit évoqués ici, je conclus que, suivant la prépondérance de la preuve, Astra s'est acquittée du fardeau d'établir que l'avis d'allégation de Genpharm invoquant l'invalidité sur la base de l'évidence n'est pas fondé.

Insuffisance et ambiguïté


[73]            On a consacré beaucoup de temps à exposer une argumentation sur l'insuffisance et l'ambiguïté des revendications 5, 13 et 19. Même si j'ai conscience que mon opinion concernant l'évidence (ci-dessus) et l'antériorité (ci-dessous) prive Genpharm de toute chance de succès à l'égard de ce brevet, j'ai néanmoins examiné ces points attentivement. Ce faisant, j'ai été incapable de trouver dans l'avis d'allégation de Genpharm la moindre mention des fondements juridiques et factuels de ces arguments. Genpharm s'est exclusivement fondée sur l'affidavit de M. Story portant sur cette question, et cet affidavit n'est pas mentionné dans l'avis d'allégation relativement au brevet 693. En fait, l'affidavit a été souscrit le 7 mai 2002 et l'avis d'allégation est daté du 27 septembre 2001. J'ai de plus examiné les affidavits Rowe 1 et Rowe 2 ainsi que l'affidavit de M. Pike. Aucun d'eux ne permettait de soutenir une allégation d'insuffisance ou d'ambiguïté. Les conclusions figurant au paragraphe 105 de l'affidavit Rowe 1 font uniquement allusion à l'allégation d'évidence. Astra a plaidé cette question sur le fond et n'a pas invoqué l'argument que je viens de présenter. J'aurais été portée à croire que la décision rendue dans l'affaire AB Hassle c. Canada, précitée, pouvait s'appliquer également à ces circonstances-ci. Mais, au cas où quelque chose m'aurait échappé et malgré le fait que, selon moi, cette question soit sans incidence, j'analyserai tout de même l'argument de Genpharm.

[74]            La revendication 5 du brevet 693 prévoit un micro-environnement ayant un pH de 7 à 12. Se fondant sur l'affidavit de M. Story, Genpharm allègue l'absence d'appui, d'enseignement ou de certitude à l'égard de cette revendication. Elle prétend qu'il n'existait aucune méthode connue de mesurer le pH d'un micro-environnement à la date de priorité. Le brevet ne divulgue pas comment effectuer cette mesure. Un traité (Drug Stability - Principles and Practices) publié en 2000 précise que la question de la détermination du micro-pH [traduction] « n'est pas encore entièrement résolue » . Ainsi, selon la thèse de Genpharm, il n'existait pas, à la date de priorité, de façon connue de confirmer que [traduction] « le pH du micro-environnement de l'oméprazole est de 7 à 12 » , conformément à la revendication 5.

[75]            La contestation au motif de l'insuffisance de la divulgation se fonde sur l'article 34 de la Loi sur les brevets, L.R.C. 1985, ch. P-4. Pour les besoins de l'espèce, les alinéas pertinents sont les alinéas a) et b), qui sont ainsi conçus :



34.(1) Dans le mémoire descriptif, le demandeur:

a) décrit d'une façon exacte et complète l'invention et son application ou exploitation, telles que les a conçues l'inventeur;

b) expose clairement les diverses phases d'un procédé, ou le mode de construction, de confection, de composition ou d'utilisation d'une machine, d'un objet manufacturé ou d'un composé de matières, dans des termes complets, clairs, concis et exacts qui permettent à toute personne versée dans l'art ou la science dont relève l'invention, ou dans l'art ou la science qui s'en rapproche le plus, de confectionner, construire, composer ou utiliser l'objet de l'invention;

34.(1) An applicant shall in the specification of his invention

(a) correctly and fully describe the invention and its operation or use as contemplated by the inventor;

(b) set out clearly the various steps in a process, or the method of constructing, making, compounding or using a machine, manufacture or composition of matter, in such full, clear, concise and exact terms as to enable any person skilled in the art or science to which it appertains, or with which it is most closely connected, to make, construct, compound or use it;


[76]            L'allégation portant sur l'insuffisance de la divulgation est une contestation de nature technique qui ne devrait pas servir à faire échec au brevet pour une invention méritoire. Cette contestation sera accueillie dans les cas où le mémoire descriptif ne divulgue pas l'invention de manière telle qu'une personne du métier ne puisse pas mettre l'invention en pratique : Airseal Controls Inc. c. M & I Heat Transfer Products (1993), 53 C.P.R. (3d) 259 (C.F. 1re inst.), confirmée par (1997), 77 C.P.R. (3d) 126 (C.A.F.).

[77]            La question est de savoir si la revendication peut être interprétée de manière valable et s'il y avait une description suffisante pour permettre à une personne de réaliser et d'utiliser l'invention. La description du brevet 693 (page 5a) renseigne le lecteur sur le fait qu'un micro-pH peut être créé pour chaque particule élémentaire d'oméprazole en mélangeant l'oméprazole à une ou plusieurs substances alcalines. Puis il fournit la liste des composés qui peuvent être choisis pour créer le pH d'un micro-environnement.

[78]            MM. Rees et Amidon ont été en mesure de définir ce terme employé dans le brevet par rapport au contexte dans lequel il figure. Le témoin de Genpharm, M. Marshall, a utilisé le terme dans ses rapports en traitant de l'interaction entre le noyau et l'enrobage. En contre-interrogatoire, M. Marshall a déclaré que [traduction] « Le terme micro-environnement a commencé assez récemment à être employé par différentes personnes » . Il a ensuite défini le terme par rapport au contexte dans lequel il l'employait.

[79]            Le témoin expert de Genpharm, M. Story, ne conteste pas que le terme « micro-environnement » soit compris et il ne conteste pas non plus que cet élément puisse être mesuré. Son allégation porte essentiellement sur le fait qu'il n'existe pas de méthode standard unique pour le mesurer. En contre-interrogatoire, on assiste à l'échange de propos suivant sur cette question :

[traduction]

Q              À ce que je comprends, l'essentiel de votre plainte tient au fait que les formulateurs utilisent ces termes dans des publications sans que les lecteurs sachent quel sens ils leur donnent?

R              Je crois que, dans chaque situation, le lecteur peut avoir une idée de ce que le rédacteur cherche à dire...

Je ne veux pas dire que, dans chaque situation, on ne sait pas où le rédacteur veut en fait en venir...

Ce que je dis, c'est qu'il n'y a pas de norme, pas de méthode standard pour mesurer le micro-pH, de telle sorte que n'importe qui peut parler de micro-environnement de manière générale...

Q              Vous dénoncez en fait le manque de norme?

R              Oui, je crois que c'est ça. Mais je peux aussi comprendre qu'il serait probablement assez difficile d'établir une norme, à cause de ... de bien des situations différentes.


[80]            Il faut tenir compte du terme tel qu'il est employé dans le brevet, de la manière dont il est compris et de la possibilité ou non de mesurer cet élément. C'est tout ce qu'il faut. Le titulaire du brevet a entièrement le droit de limiter la revendication à sa guise. M. Story ne conteste pas que le terme soit compris lorsqu'il est employé dans ce contexte particulier. Il existe des preuves que la description est suffisante pour permettre à une personne du métier de réaliser l'invention. De plus, je conviens avec Astra que Genpharm ne peut contester la revendication 5 en alléguant que la divulgation est insuffisante et, du même coup, omettre de se plaindre de la revendication 1.

[81]            La contestation pour insuffisance et ambiguïté ne peut être justifiée à l'égard de la revendication 5. Comme Genpharm doit avoir gain de cause à l'égard de chacune de ses allégations, cette conclusion suffit pour rejeter son argumentation.

L'antériorité

[82]            Genpharm allègue que le brevet EP 495, publié en novembre 1984, constitue une antériorité par rapport au brevet 693. La date pertinente pour l'allégation d'antériorité est le 29 avril 1984. Cette allégation vise les revendications 1, 7, 8, 11, 12 et 17. Le brevet 495 divulgue une formulation d'oméprazole contenant un noyau alcalin entouré d'une gélule dure ou molle à titre de couche séparatrice. M. Story est d'avis qu'il divulgue les trois éléments de la revendication 1 du brevet 693.

[83]            Compte tenu de mon analyse concernant l'évidence et du fait que les études en solution ne nous permettent pas de prédire le comportement à l'état solide, il me semble que Genpharm a toute une pente à remonter en ce qui concerne l'antériorité. Même en supposant qu'elle ait réussi à franchir cet obstacle, je n'arrive pas à la conclusion qu'il y a effectivement eu antériorité.


[84]            Genpharm allègue que le brevet 693 définit clairement le terme [traduction] « sous-enrobage » comme étant la [traduction] « couche séparatrice » et que, plus loin, il définit la couche séparatrice en cause dans le cas des gélules. Astra rétorque qu'une gélule est une coquille. Il est impossible qu'elle soit [traduction] « appliquée sur » , comme le prévoit la revendication. « Appliquer sur » suppose un contact intime.

[85]            Compte tenu de la manière dont la Cour d'appel fédérale a interprété la revendication 1 du brevet 693, il n'est loisible à aucune des deux parties de se baser sur la divulgation du brevet pour interpréter la revendication. Même si j'avais tort sur ce point, je rejette néanmoins la position d'Astra. Je ne vois rien dans le brevet qui pourrait m'amener à conclure que les mots [traduction] « appliquée sur » supposent un contact intime, comme on le prétend. S'il faut prendre en considération la divulgation, on peut dire que le brevet 693 entrevoit la possibilité que le sous-enrobage ait la forme d'une gélule et qu'il mentionne expressément qu'elle peut servir de couche séparatrice. À la page 7, vers la fin de la description de la couche séparatrice, il est précisé que [traduction] « dans le cas des gélules, la gélule elle-même sert de couche séparatrice » .

[86]            Le deuxième argument d'Astra est plus convaincant. La société prétend que les gélules mentionnées dans le brevet 495 sont des gélules classiques et que les catégories de gélatine couramment employées sont acides et pourraient réagir avec l'oméprazole. De ce fait, elles ne seraient pas [traduction] « inertes » . À mon avis, cela suffit pour exclure l'argument de l'antériorité. Une personne du métier qui lirait le brevet 495 n'apprendrait pas à appliquer un sous-enrobage « inerte » . Le brevet 495 ne mentionne les gélules qu'une fois (à la page 4, à partir de la ligne 38). Il n'est nullement indiqué que les gélules doivent être inertes. Le brevet 693 exige un sous-enrobage inerte ou une couche séparatrice.


[87]            Ainsi, le brevet 495 enseigne une formulation d'un nouveau sel alcalin d'oméprazole destinée à améliorer la stabilité pendant l'entreposage et il précise qu'un enrobage gastrorésistant et entérosoluble est préférable pour protéger le composé actif contre la dégradation causée par l'acide, mais il n'enseigne pas l'application d'une sous-couche inerte ou d'une couche séparatrice pour contrer le risque de dégradation de l'enrobage gastrorésistant et entérosoluble. On ne saurait se fonder sur ce seul document pour produire l'invention revendiquée sans faire preuve de génie inventif. Astra a démontré que l'allégation d'invalidité pour cause d'antériorité avancée par Genpharm n'est pas fondée.

LE BREVET 377 DE TAKEDA

[88]            La demande qui a mené à l'octroi du brevet 377 a été déposée le 14 septembre 1993 et l'on y revendiquait la priorité d'une demande japonaise déposée le 13 février 1986 (date de priorité). Le brevet 377 a été délivré le 11 juin 1996. Il s'agit d'un brevet qui porte sur une formulation consistant en un ingrédient actif, un sel inorganique basique stabilisant et un enrobage gastrorésistant et entérosoluble. Le brevet de Takeda renferme dix revendications. Ces revendications sont jointes aux présents motifs à titre d'Annexe D. Par souci de commodité, la revendication 1 est reproduite ci-dessous :

[TRADUCTION] Une composition pharmaceutique stabilisée pour l'inhibition de la sécrétion d'acide gastrique, comprenant :


une quantité efficace d'un dérivé de 2-[(2-pyridyl)- méthylsulfinyl]-benzimidazole choisi dans le groupe constitué par le 2-[(3-méthyl-4-(2,2,2-trifluoroathoxy)-2-pyridyl)-méthylsulfinyl] benzimidazole eet le 5-mthoxy-2-[[(4-méthoxy-3,5-diméthyl-2-pyridl)-méthyl]sulfinyl] benzimidazole, ou d'un sel pharmaceutiquement acceptable de celui-ci;

un sel inorganique basique stabilisant, choisi dans le groupe constitué par les sels de potassium, de sodium et d'aluminium, en quantité efficace pour stabiliser la composition;

un enrobage gastrorésistant et entérosoluble pour la composition.

Les revendications 2 à 9 sont subordonnées, directement ou indirectement, à la revendication 1. La revendication 10 vise une composition conforme à l'une ou l'autre des revendications 1 à 9.

[89]            Genpharm allègue que l'invention revendiquée par le brevet de Takeda était évidente et qu'il n'a pas été nécessaire de faire preuve de génie inventif. Elle prétend que tous les experts s'entendent pour dire qu'un formulateur compétent, sachant que l'oméprazole est instable en milieu acide, réaliserait tôt ou tard une formulation consistant à mélanger l'oméprazole à un sel. Elle allègue en outre l'invalidité pour cause d'antériorité et pour cause de double brevet, compte tenu de l'existence du brevet canadien no 1,327,010 (010). L'allégation de double brevet a été retirée au début de l'audience et l'allégation d'antériorité n'a pas été plaidée. Le seul litige qui subsiste par rapport au brevet de Takeda concerne donc l'évidence.

[90]            On l'a noté précédemment, Astra est en l'espèce la demanderesse et Takeda adopte les observations d'Astra au sujet du brevet 377 et s'appuie sur celles-ci. Toutefois, Takeda présente des observations supplémentaires relatives à son brevet. Par souci de commodité, je renverrai aux parties dans le cas de ce brevet en parlant de Takeda et Genpharm bien que, au sens strict des termes, ce ne soit pas exact.


LA PREUVE

[91]            Takeda et Genpharm ont toutes les deux présenté des affidavits d'experts en formulation et ces experts ont été contre-interrogés. Comme de coutume, les experts ont soutenu des points de vue différents. Aucune partie ne conteste la qualification et l'expertise des témoins experts proposés.

[92]            Takeda s'est appuyée sur le témoignage de M. Gerald S. Brenner, consultant auprès de l'industrie pharmaceutique. M. Brenner a souscrit des affidavits le 23 mars 2000 (Brenner 1) et le 17 mai 2002 (Brenner 2). Il est titulaire d'un Ph.D. en chimie organique, a travaillé dans l'industrie pharmaceutique pendant 33 ans et a pris sa retraite comme directeur principal de la recherche et du développement pharmaceutiques et chef de la division de la recherche pharmaceutique. Il possède une longue expérience dans la recherche au stade de la préformulation et dans le développement de formulations et a participé à la préformulation et à la formulation de plusieurs centaines de préparations pharmaceutiques. M. Brenner compte plus de cinquante publications et présentations à son actif.

[93]            Genpharm s'est appuyée sur le témoignage de son expert, M. Rowe, dont les affidavits relatifs aux deux brevets 693 et 377 ont déjà été désignés dans les présents motifs comme Rowe 3 (14 décembre 1999) et Rowe 4 (26 avril 2000). Pour éviter toute confusion avec les affidavits souscrits par M. Rowe au sujet du brevet 693, je continuerai de désigner l'affidavit de décembre comme l'affidavit Rowe 3 et l'affidavit d'avril comme l'affidavit Rowe 4. La qualification de M. Rowe a été résumée précédemment dans les présents motifs et n'a pas besoin d'être reprise.


LES POSITIONS DES PARTIES

Takeda

[94]            Takeda soutient que l'approche de Genpharm est trop simpliste. La décrivant comme une approche [traduction] « draconienne » pour résoudre les problèmes de stabilité, Takeda fait valoir que l'approche de Genpharm conduirait à un nombre indéfini d'essais avant d'arriver à une solution, dans la mesure où on il en existe une. Il y a au moins quatre voies disponibles, dont chacune inclut un grand nombre de domaines possibles d'expérimentation, pour tenter de résoudre un problème d'instabilité. L'ajustement du pH serait l'une des dernières options à considérer.

Genpharm

[95]            Genpharm fait valoir que l'ajustement du milieu pH d'un médicament (en l'occurrence par l'ajout d'un sel inorganique de base comme agent stabilisateur) est une solution si élémentaire et si courante à un problème d'instabilité que la personne du métier aurait certainement adopté cette méthode à un moment ou l'autre. La connaissance de la cause du problème n'est pas nécessaire à la découverte d'une solution.

LES ANTÉRIORITÉS


[96]            La liste complète des antériorités sur lesquelles se fonde M. Rowe à l'égard du brevet Takeda forme l'annexe E jointe aux présents motifs. Les principaux documents cités par M. Rowe sont notamment la demande de brevet européen 124,495 (le brevet 495, que Takeda désigne comme Branstrom), Pilbrant and Cederberg (Pilbrant) et Shin-Estu, bulletin technique P-30, qui sont décrits plus haut dans les présents motifs, ainsi que la demande de brevet européen 064 283 (Joel) et le brevet américain 4,666,919 (Ueno). Ce dernier brevet a été délivré le 19 mars 1987 (après la date de priorité) et ne peut servir dans une contestation fondée sur l'évidence.

[97]            Le brevet EP 064 283 (Joel), intitulé « Stabilization of 1-Substituted Imidazole Derivatives in Talc » et publié le 10 novembre 1982, traite de la stabilisation de compositions à base de talc contenant des dérivés d'imidazole. La stabilisation est réalisée en ajoutant une quantité stabilisante du métal de base d'un acide inorganique ou organique.

[98]            Takeda conteste les références de Ghebre-Sellasie, Lachman et Connors (en plus de Ueno), étant donné qu'elles sont postérieures à la date de priorité. Elle allègue en outre que le bulletin P-30 de Shin-Etsu n'aurait pas été accessible à une personne du métier, puisque les services de résumés chimiques et pharmaceutiques n'en auraient pas fait de résumé. En bref, l'argument de Takeda concernant l'état de la technique porte que, après examen, le brevet 377 n'est pas jugé invalide pour cause d'évidence. Astra note que la preuve de Takeda à cet égard demeure irréfutée.

L'ANALYSE


[99]            La divulgation du brevet de Takeda révèle que les composés de benzimidazole (pour les besoins de la cause, l'oméprazole) sont instables. À l'état solide, ils présentent une multisensibilité et, en suspension, leur stabilité diminue avec l'abaissement du pH. Sous forme posologique (comprimés, poudres, granules et gélules), ils ont tendance à interagir avec d'autres composés également présents et ils sont donc moins stables que lorsqu'on les utilise seuls. Une diminution de la teneur (diminution de l'ingrédient actif) et un changement de couleur surviennent au cours du procédé de fabrication et après un certain laps de temps. Il s'agit du phénomène de la dégradation. Dans le cas des comprimés et granules enrobés, les enrobages gastrorésistants et entérosolubles sont peu compatibles avec les composés et provoquent les mêmes problèmes de dégradation. Un ou plusieurs des ingrédients (qui peuvent être néfastes pour la stabilité des composés) sont essentiels à la fabrication des préparations orales, et des difficultés surgissent donc dans la production des formes posologiques.

[100]        L'objet de l'invention est de résoudre deux problèmes de stabilité : la stabilité de l'oméprazole lui-même (sans distinction de la forme posologique) et la stabilité de l'oméprazole lorsqu'il vient en contact avec les ingrédients couramment utilisés dans les formes posologiques solides administrables par voie orale, dont ceux qui sont utilisés dans les enrobages gastrorésistants et entérosolubles.

[101]        La revendication pertinente concernant la formulation dans le brevet de Takeda prévoit ce qui suit :

[TRADUCTION]

1. Une composition pharmaceutique stabilisée pour l'inhibition de la sécrétion d'acide gastrique, comprenant :

[un ingrédient actif]

un sel inorganique basique stabilisant, choisi dans le groupe constitué par les sels de potassium, de sodium et d'aluminium, en quantité efficace pour stabiliser la composition;

un enrobage gastrorésistant et entérosoluble pour la composition.


[102]        La revendication 1 décrit une composition pharmaceutique qui, dans le produit fini, contient un ingrédient actif (un ou deux substances chimiques ou sels pharmaceutiquement acceptables de celles-ci, parmi un choix de deux), un sel inorganique basique stabilisant (un ou plusieurs sels parmi un choix de trois) et un enrobage gastrorésistant et entérosoluble. Elle consiste essentiellement à ajouter un sel inorganique basique stabilisant pour stabiliser l'oméprazole.

[103]        J'ai discuté précédemment dans les présents motifs du critère juridique applicable à l'égard d'une allégation d'invalidité fondée sur l'évidence. Je n'ai pas l'intention de reprendre ici ce point.


[104]        Comme je l'ai fait pour le brevet 693, je n'ai pas pris en compte les documents cités postérieurs à la date de priorité du 13 février 1986. Genpham n'a pas répondu à l'argumentation de Takeda à cet égard et ne s'est pas appuyée sur ces documents dans les débats. S'agissant de Shin-Estu et de l'observation de Takeda que le bulletin n'avait pas été résumé, le critère qui s'applique est de savoir si les renseignements auraient pu être obtenus par une recherche diligente : Procter & Gamble Co. et al. c. Kimberly-Clark of Canada Ltd. (1991), 40 C.P.R. (3d) 1 (C.F. 1re inst.); Cochlear Corp. c. Cosem Neurostim Ltée (1995), 64 C.P.R. (3d) 10 (C.F. 1re inst.); Mahurkar c. Vas-Cath of Canada Ltd. (1988), 18 C.P.R. (3d) 417 (C.F. 1re inst.), confirmée par (1990), 32 C.P.R. (3d) 409 (C.A.F.). M. Rowe a concédé_que le bulletin Shin-Estu n'avait pas été résumé, mais est resté campé sur sa position que le bulletin serait disponible parce que Shin-Estu [traduction] « distribuait et publicisait à large échelle » les bulletins de ses fabricants. Contre-interrogé, l'expert d'Astra, M. Amidon, s'est rappelé de renseignements provenant du bulletin de Shin-Estu. Je suis convaincue qu'une recherche diligente aurait fait ressortir le bulletin P-30 de Shin-Estu.

[105]        Au paragraphe 29 de l'affidavit Rowe 3, M. Rowe en arrive à la conclusion suivante après avoir examiné dix antériorités citées (dont certaines ont depuis été exclues) :

[TRADUCTION] La conclusion logique de tout chimiste formulateur compétent aurait été d'envisager l'ajout d'un composé stabilisant alcalin à toutes formes posologiques de l'oméprazole, dont les formes solides telles que les comprimés et les gélules, en présence de signes d'instabilité pendant l'entreposage.

[106]        Aux paragraphes 62 et 63 de son exposé des faits et du droit, Takeda résume l'opinion de son expert, M. Brenner. Ces paragraphes s'énoncent ainsi :

[TRADUCTION] De l'avis de notre expert, M. Brenner, l'invention divulguée dans le brevet 377 n'est ni antériorisée ni évidente, à la lumière de l'une ou l'autre des publications citées par Genpharm. L'invention du brevet 377 n'est décrite dans aucune des publications imprimées auxquelles font référence les deux affidavits de M. Rowe. À la date de l'invention, un technicien versé dans l'art mais dépourvu d'imagination n'aurait pas, partant de ses connaissances générales ainsi que de la littérature et de l'information sur la question auxquelles il avait accès à cette date, été amené directement et facilement à la solution enseignée par le brevet 377. Plus précisément, l'usage d'un composé alcalin pour stabiliser l'oméprazole à l'état solide n'a pas préalablement été divulgué. De plus, aucune des antériorités citées n'enseigne qu'une forme posologique solide à enrobage gastrorésistant et entérosoluble était instable ni que le pH était une cause de l'instabilité.

De plus, les bulletins techniques invoqués par Genpharm n'auraient pas été accessibles à une personne ayant des compétences moyennes, étant donné que les services de résumés chimiques et pharmaceutiques ne produisent pas de résumés des bulletins de fabricants et qu'il existe des centaines sinon des milliers de ces bulletins.

[107]        En ce qui a trait à l'évidence, M. Brenner examine chaque antériorité citée sur laquelle s'appuie M. Rowe et critique chacune pour diverses raisons. Il souligne la distinction cruciale entre la stabilisation des solutions et la stabilisation des solides. Le brevet 495, Pilbrant et Rackur concernent tous la stabilisation des solutions. M. Brenner considère que certain document cités (ceux qui sont exclus du fait qu'ils sont postérieurs à la date de priorité) sont trop généraux ou que les principes actifs en cause sont différents. Certaines des antériorités, dit-il, n'enseignent même pas nécessairement un ajustement du pH. L'exposé des faits et du droit de Takeda, aux paragraphes 65 à 95, résume l'analyse des antériorités de M. Brenner. Je n'entends pas en faire une revue détaillée pour des motifs qui seront manifestes.

[108]        Genpharm, si je la comprends bien, ne s'oppose pas au témoignage de M. Brenner à ce sujet. Elle ne fait ressortir aucun élément de preuve contradictoire et ne renvoie à aucun contre-interrogatoire de M. Brenner qui affaiblirait le témoignage de celui-ci. Genpharm ne conteste pas que certaines des antériorité citées sont générales, que certaines se rapportent à des solutions plutôt qu'à des solides ou encore que certaines concernent des principes actifs différents.


[109]        Genpharm invoque plutôt les antériorités en disant que la conversion de composés de benzimidazole sous forme saline était connue d'avance et que l' « invention » consiste simplement à mélanger de l'oméprazole à un sel inorganique basique stabilisant choisi parmi les groupes constitués des sels de potassium, de sodium et d'aluminium. L'adaptation du pH est une technique tellement courante pour régler des problèmes qui surgissent en laboratoire (comme le démontrent les antériorités) que le formulateur mythique aurait évidemment su s'en servir. Genpharm accorde beaucoup de poids au fait que M. Brenner ait reconnu en contre-interrogatoire qu'à un moment ou un autre, la personne du métier « pourrait » essayer de modifier le pH. Se basant sur cette reconnaissance, Genpharm allègue que les experts de Takeda auraient ajouté une substance alcaline au médicament sensible à un milieu acide, non pas au début mais plus tard. M. Rowe l'aurait fait promptement. Selon Genpharm, ils s'entendaient sur le fait qu'à un moment ou un autre, le travailleur compétent l'aurait fait.

[110]        Takeda rétorque que M. Brenner a explicitement dit dans son témoignage qu'en présence d'un problème de stabilité, il y a généralement quatre voies à suivre pour tenter de le résoudre. Chacune de ces voies comporte bien des sphères d'expérimentation possibles, et les résultats escomptés diffèrent grandement selon les différents médicaments. Une personne du métier tenterait de trouver la cause première du problème. Elle ne chercherait pas au départ à ajuster le pH, comme l'a laissé entendre M. Rowe. En contre-interrogatoire, M. Brenner a déclaré ce qui suit :

[TRADUCTION]

Q              Est-ce qu'il n'essaierait jamais le pH ou...

R              Je dirais que, s'il adoptait une approche empirique pour résoudre ce problème, il exclurait probablement l'humidité d'une façon choisie parmi trois ou quatre, par exemple en utilisant un procédé sec ou des excipients secs, et en contrôlant l'environnement ou en utilisant un emballage protecteur. Si cette méthode s'avérait infructueuse, il vérifierait si l'instabilité est attribuable à une quelconque incompatibilité. S'il soupçonnait un problème d'oxydation, il ajouterait un antioxydant.

Ce sont là des choses qu'il essaierait bien avant de modifier le pH de la formulation.

[111]        Il convient de rappeler la preuve irréfutée selon laquelle les antériorités ne révélaient pas qu'il existait un problème d'instabilité dans les formes posologiques solides à enrobage gastrorésistant et entérosoluble, et encore moins que le pH était une cause de l'instabilité. L'usage d'un composé alcalin pour stabiliser l'oméprazole à l'état solide n'avait pas non plus été divulgué. C'est dans ce contexte que Genpharm présente cet argument.

[112]        Il me semble que la position de Genpharm au sujet de l'évidence ressemble au critère anglais du « valait la peine d'être tentée » . Les observations du juge Lederman (reprises en partie par Madame la juge Dawson dans la décision Pfizer (2002), précitée, dont un extrait a été reproduit auparavant) dans l'arrêt Bayer Aktiengesellschaft et al. c. Apotex Inc. (1995), 60 C.P.R. (3d) 58 (Div. gén. (Ontario)), appel rejeté, appel incident accueilli sur une question différente (1998), 82 C.P.R. (3d) 526 (C.A. Ont.), autorisation de pourvoi rejetée, [1999] 1 R.C.S. méritent d'être rappelées :

[traduction] Il semble y avoir une différence importante entre les capacités du technicien fictif anglais versé dans l'art et celui du Canada. En effet, l'exécution de recherches ou d'expérimentations semble être hors du champ d'activité du technicien fictif compétent canadien. Dans la décision Cabot Corp. c. 318602 Ontario Ltd. [...], le juge Rouleau [de la présente Cour] a cité un extrait de H.G. Fox dans Canadian Law and Practice Relating to Letters Patent for Inventions :

[traduction] « Pour qu'une invention soit considérée comme « évidente » , il faut qu'elle ait été directement découverte par la personne qui recherchait quelque chose de neuf, un nouveau procédé de fabrication ou autre, sans avoir besoin d'expérimentation, de réflexion profonde, de recherche que ce soit en laboratoire ou dans les textes. »


Aussi, même si on s'imaginerait normalement que le laboratoire de cette personne mythique est plein d'éprouvettes et de boîtes de Pétri mythiques et qu'elle passe sa vie en expérimentations, aucune recherche de cette nature n'est prise en compte aux fins de l'application du critère juridique. Toute logique qu'ait pu paraître à une personne effectivement versée dans l'art à cette époque, en fonction de l'état des connaissances, de mener certaines expérimentations, cela n'est pas permis au technicien mythique versé dans l'art. Ce chercheur mythique ne peut posséder un esprit de recherche ou de réflexion qui le conduirait ultimement à la solution, mais on attend plutôt de lui qu'il s'exclame instantanément et spontanément, sans plus, « Je connais déjà la réponse et elle est évidente » . Pas plus qu'il ne convient de dire qu'il y avait des indications importantes qui guidaient l'expert mythique vers la solution ou des indices suffisants pour que l'invention « vaille la peine d'être tentée » . Dans la décision Farbwerke Hoechst Aktiengesellschaft Vormals Meister Lucius & Bruning c. Halocarbon (Ontario) Ltd [...] le juge Collier [de la présente Cour] en rejetant le critère de l'expérience qui « vaut d'être tentée » a déclaré :

Il est facile de dire a posteriori, avec l'avantage du recul, qu'une expérience dans des circonstances telles qu'on les suppose ici, lorsque le temps et les dépenses sont illimités [...] vaut ou valait la peine d'être tentée.

En appel, la Cour suprême du Canada a confirmé cette position [...] déclarant à la p. 155 :

Très peu d'inventions sont des découvertes imprévues. En pratique, tous les travaux de recherches suivent l'orientation donnée par l'état de la technique. Dans ces conditions et avec l'avantage du recul, il y aurait presque toujours moyen de dire qu'il n'y a aucun esprit inventif dans les nouveaux perfectionnements parce que chacun peut alors voir comment les réalisations antérieures montraient la voie.

On peut penser que c'est la raison pour laquelle le juge Hugessen a déclaré que la question qu'il posait dans l'arrêt Beloit [...] au sujet de la créature mythique est « un critère auquel il est très difficile de satisfaire » . [Renvois omis.]

[traduction] Par conséquent, les décisions du Royaume-Uni qui recourent au critère de l'expérience qui « valait la peine d'être tentée » doivent être traitées avec une grande prudence. Les observations du lord juge Mustill dans la décision Genentech, précitée, et la conclusion du juge Aldous dans l'arrêt Bayer, précité, portant que le développement du comprimé de nifédipine était évident, reposaient sur le critère de l'expérience qui « valait la peine d'être tentée » (comme on peut le voir des extraits cités précédemment du juge Aldous, que j'ai soulignés). Ces décisions du Royaume-Uni sont donc peu utiles en l'espèce.


[113]        À mon avis, la position de M. Rowe constitue l'adoption de l'approche anglaise. Son témoignage porte essentiellement que, sur le fondement de l'antériorité, l'ajustement du pH valait la peine d'être tenté. Je ne suis pas persuadée que M. Rowe, en l'absence de l'approche « qui valait la peine d'être tentée » , arriverait directement et facilement à la solution. Aussi, son approche aurait des chances de succès en Angleterre, mais elle n'en a pas au Canada. Astra (et Takeda) m'ont persuadée que l'allégation de Genpharm au sujet du brevet 377 de Takeda n'est pas fondée.

LE BREVET 668

[114]        Le brevet 668 a été délivré le 15 septembre 1998 et il s'intitule « Use of Omeprazole As An Antimicrobial Agent » . Il vise un nouvel usage de la substance. Selon la divulgation, ce brevet vise un nouvel usage de l'oméprazole comme antibactérien, plus particulièrement pour le traitement de l'infection causée par Campylobacter pylori, une bactérie spiralée à Gram négatif qui colonise en profondeur la muqueuse gastrique et contre laquelle l'action des antibiotiques usuels est insuffisante.

[115]        Le brevet 668 comporte trois revendications, reproduites dans l'annexe F aux présents motifs. Les parties conviennent que la nomenclature chimique employée dans les revendications devrait s'interpréter comme désignant l'oméprazole. L'agent Campylobacter est désormais connu sous la désignation H. pylori. Les revendications prévoient ce qui suit :

[traduction]

1.        Un usage [de l'oméprazole] (ou d'un de ses sels pharmaceutiquement acceptables) pour la fabrication d'un médicament destiné au traitement des infections à [H. pylori].

2.        Un usage [de l'oméprazole] (ou d'un de ses sels pharmaceutiquement acceptables) pour le traitement des infections à [H. pylori].

3.        Une préparation pharmaceutique destinée à être utilisée pour le traitement des infections à [H. pylori], dans laquelle l'ingrédient actif est [l'oméprazole] (ou un de ses sels pharmaceutiquement acceptables).

[116]        Genpharm allègue que son médicament sera utilisé pour les « anciens » usages. Il ne sera pas utilisé comme antimicrobien et ne contrefera donc pas le brevet 668. Dans son affidavit souscrit le 13 mai 2002, aux paragraphes 26 à 31, M. Richard Pike (premier vice-président, recherche et développement et affaires réglementaires chez Genpharm Inc.) expose les particularités de la monographie de produit de Genpharm et les intentions de cette société en ce qui a trait à la commercialisation de l'oméprazole, si un avis de conformité devait être délivré.

LA PREUVE

[117]        Astra s'est fondée sur l'affidavit de Mme Philippa Murphy (ancienne vice-présidente des affaires réglementaires, Astra), souscrit le 27 juillet 1999, sur celui du Dr Christopher Pinto (médecin), souscrit le 26 juillet 1996, sur celui de Mme Linda Samuel (pharmacienne), souscrit le 28 juillet 1999, et sur celui de M. Adam Pignataro (pharmacien), souscrit le 5 décembre 2001. Ces documents indiquent essentiellement que, même si le produit de Genpharm était homologué, indiqué, étiqueté et vendu uniquement pour l' « ancien » usage, les médecins le prescriraient et les pharmaciens le délivreraient pour le « nouvel » usage.

[118]        Genpharm a invoqué, outre l'affidavit de M. Pike, l'affidavit de Robert Côté (pharmacien), souscrit le 9 mai 2002, et celui du Dr Alan Thomson (médecin et professeur de médecine à l'Université de l'Alberta), souscrit le 9 mai 2002. Ces documents décrivent le régime du « nouvel » usage et leur conclusion est que les pharmaciens sauraient si LOSEC est prescrit pour un nouvel usage.


LES POSITIONS DES PARTIES

Astra

[119]        Astra avance que sa preuve expose en détail le fonctionnement du marché des produits pharmaceutiques de prescription et la manière dont se fera la contrefaçon alléguée. Selon elle, cette preuve démontre que les indications propres au produit de Genpharm ne figurent pas dans le Compendium des produits et spécialités pharmaceutiques (CPS) - ouvrage de référence usuel des pharmaciens et médecins - et que les pharmaciens et médecins ne se préoccupent pas des indications approuvées lorsqu'ils prescrivent ou délivrent l'oméprazole. Les pharmaciens délivrent généralement la marque la moins coûteuse sur le marché, et le produit d'oméprazole de Genpharm, qui devrait être moins coûteux, serait en fait utilisé pour traiter les infections à H. pylori. Selon Astra, les témoins de Genpharm se limitent à dire que les médecins et pharmaciens sauront si l'oméprazole est prescrit pour le traitement d'une infection à H. pylori et ils demeurent muets sur la question de savoir si le produit de Genpharm sera utilisé pour un pareil traitement.

[120]        Selon ce que prétend Astra, c'est un fait admis que les pharmaciens et médecins savent que l'oméprazole est utilisé pour traiter des troubles dus à l'acide généré par H. pylori et il faut donc logiquement en déduire que les médecins et pharmaciens supposeront que le produit d'oméprazole de Genpharm, une fois sur le marché, a été approuvé pour cet usage.


[121]        Se fondant sur le contre-interrogatoire de M. Pike, Astra allègue que les propos de celui-ci [traduction] « révèlent clairement » que Genpharm a l'intention de vendre son produit pour le traitement des infections à H. pylori. Elle allègue plus précisément que, selon le témoignage de M. Pike : a) le produit de Genpharm est un équivalent thérapeutique de LOSEC et sa monographie indique expressément qu'il peut être utilisé avec le même degré d'efficacité que LOSEC; b) la monographie indique également que le produit de Genpharm agit en réduisant la quantité d'acide, ce qui aide à atténuer les problèmes gastriques causés par une bactérie et, dans ce contexte, on saurait que la bactérie en question est H. pylori; c) l'oméprazole de Genpharm est indiqué pour les affections dont le traitement nécessite une réduction de l'acide gastrique, et l'infection à H. pylori pourrait être une de ces affections; et d) la mention dans la monographie du produit de l'usage de l'oméprazole combiné à un antibiotique serait interprétée comme la mention de l'usage de l'oméprazole - éventuellement le produit de Genpharm - combiné à un antibiotique pour traiter les infections à H. pylori.

Genpharm


[122]        Genpharm soutient qu'aucun des témoins d'Astra ne possède ni les connaissances ni l'expérience qui lui permettent de témoigner sur autre chose que son expérience personnelle. Elle fait allusion aux contre-interrogatoires de chaque témoin et déclare que ces éléments de preuve, en réalité, étayent la position de Genpharm. Le Dr Pinto a reconnu qu'il s'exprimait à titre tout à fait personnel et qu'en qualité de médecin, il prescrirait LOSEC en mentionnant sur la prescription [traduction] « aucune substitution » pour chacune des utilisations « nouvelles » . De même, les pharmaciens, Mme Samuel et M. Pignataro, ont déclaré qu'ils exprimaient seulement des opinions personnelles et qu'ils ne substitueraient pas un médicament générique comme celui de Genpharm pour un usage non autorisé. Chacun des pharmaciens a dit que les sociétés comme Astra faisaient la promotion de leurs produits et des usages auxquels ils convenaient.

[123]        Madame Murphy, aux paragraphes 15 à 20 de son affidavit, fait l'hypothèse que le produit de Genpharm, en dépit du fait que son autorisation porte exclusivement sur les utilisations [traduction] « anciennes » , sera prescrit par les médecins et délivrés par les pharmaciens pour les [traduction] « nouvelles » utilisations. Contre-interrogée, Mme Murphy a admis qu'elle n'est ni médecin ni pharmacienne et que les déclarations de son affidavit au sujet de la substitution n'étaient pertinentes que dans la mesure où les Formulaires des provinces visées autorisaient la substitution. Genpharm renvoie aux témoignages de ses experts pour soutenir l'allégation que l'oméprazole de Genpharm serait autorisé et commercialisé pour l'utilisation [traduction] « ancienne » . M. Côté a dit expressément qu'un pharmacien saura toujours si LOSEC est prescrit en vue d'une nouvelle utilisation. Lorsqu'on lui a demandé en contre-interrogatoire de se prononcer si, dans le traitement des infections à H. pylori, l'oméprazole générique serait prescrit dans une prescription accompagné d'un antibactérien dans l'autre, il a répondu que ce fait serait hautement improbable et peut-être même illégal. Le témoignage de M. Thomas va dans le même sens.

[124]        S'agissant de la monographie de produit et du contre-interrogatoire de M. Pike sur lesquels s'appuie Astra, Genpharm fait valoir que les extraits auxquels renvoie Astra étaient soit incomplets, soit sortis du contexte où ils figuraient. L'affidavit de M. Pike ne pouvait être plus spécifique au sujet des intentions de Genpharm touchant la commercialisation de son oméprazole.


[125]        La preuve, dit Genpharm, établit que le produit de Genpharm serait autorisé et commercialisé uniquement pour l' « ancienne » utilisation. Rien n'établit que Genpharm a l'intention de commercialiser son produit pour une « nouvelle » utilisation ni que les médecins prescriraient ou les pharmaciens délivreraient le produit de Genpharm pour une « nouvelle » utilisation.

L'ANALYSE

[126]        La Cour d'appel fédérale a eu l'occasion de faire des observations sur le brevet 668 : AB Hassle c. Canada (Ministre de la Santé nationale et du Bien-être social) (2002), 22 C.P.R. (4th) 1 (C.A.F.). Aux paragraphes 5 et 6, la Cour déclare ce qui suit :

Le brevet 668 de Hassle contient trois revendications, portant chacune sur l'utilisation d'un composé, l'oméprazole, de la manière suivante :

1. Pour la fabrication d'un médicament pour le traitement des infections à Campylobacter.

2. Pour le traitement des infections à Campylobacter.

3. Une préparation pharmaceutique destinée à être utilisée dans le traitement des infections à Campylobacter.

L'oméprazole était un composé connu ou existant. Le brevet dont Hassle est titulaire ne vise que la nouvelle utilisation de l'oméprazole. Par conséquent, le brevet 668 ne confère des droits exclusifs d'utilisation de l'oméprazole qu'à l'égard du traitement des infections à Campylobacter; il ne contient aucune revendication à l'égard du composé chimique même de l'oméprazole.


[127]        La contrefaçon d'un brevet d'utilisation, aux termes du Règlement, n'est pas le seul fait du fabricant de génériques; elle vise aussi la contrefaçon par les patients. Il y a contrefaçon dans le cas où les patients utilisent un médicament vendu par un fabricant de génériques même s'il n'y a pas d'incitation ou d'aide à la contrefaçon de la part du fabricant de génériques : Genpharm Inc. c. Le ministre de la Santé et al. (2002), 20 C.P.R. (4th) 1 (C.A.F.). La simple vente du produit par le fabricant de génériques, sans plus, ne suffit pas à créer la contrefaçon. La contrefaçon intervient quand des éléments de preuve permettent de conclure que les actes et les intentions de la seconde personne conduiraient inévitablement à une nouvelle utilisation du produit de la première personne si la seconde personne obtenait un avis de conformité. Il revient à la première personne d'établir, suivant la prépondérance de la preuve, qu'il se produira d'autres contrefaçons. Pour obtenir une ordonnance d'interdiction, la première personne doit établir que si un avis de conformité était délivré et que la seconde personne devait vendre son médicament générique, les patients ou d'autres tiers contreferaient le brevet d'utilisation de la première personne : AB Hassle c. Canada (Ministre de la Santé nationale et du Bien-être social) (2002), précité.

[128]        En l'espèce, qu'établit la preuve? Je reviens encore une fois aux observations de la Cour dans l'arrêt AB Hassle c. Canada (Ministre de la Santé nationale et du Bien-être social) (2002), précité, aux paragraphes 44 et 45 :

... Selon l'ouvrage The Law of Evidence in Canada, de Sopinka, Lederman et Bryant, 2e édition, à la page 623, l'utilité de l'expert est fonction des limites de ses connaissances. Avant qu'un tribunal reçoive un témoignage, il faut établir que le témoin possède des connaissances et une expérience particulières qui dépassent celles du juge des faits. Le tribunal doit être persuadé que le témoin est suffisamment expérimenté sur le sujet en litige...

La Cour suprême du Canada a statué dans l'arrêt R. c. Abbey, [1982] 2 R.C.S. 24, qu'une partie qui produit une preuve d'expert a « l'obligation d'établir, au moyen d'éléments de preuve régulièrement recevables, les faits sur lesquels se fondent ces opinions. Pour que l'opinion d'un expert puisse avoir une valeur probante, il faut d'abord conclure à l'existence des faits sur lesquels se fonde l'opinion. »

[129]        L'article 81 des Règles de la Cour fédérale (1998) prescrit que les affidavits doivent se limiter aux faits dont le déclarant a une connaissance personnelle. La partie qui cherche à faire accepter un témoignage d'expert doit satisfaire aux critères suivants : la pertinence, la nécessité, l'absence d'autre règle d'exclusion et la qualification suffisante de l'expert : R. c. Mohan, [1994] 2 R.C.S. 9. Les affidavits qui exposent des opinions doivent répondre aux conditions prescrites pour les témoignages d'experts : Vancouver Island Peace Society c. Canada, [1994] 1 C.F. 102 (1re inst.), confirmée par (1995) 179 N.R. 106 (C.A.F.), autorisation de pourvoi rejetée (1995), 192 N.R. 80n (C.S.C.).

[130]        Au paragraphe 1 de son affidavit, Mme Murphy énonce les titres de ses postes actuel et antérieur chez Astra et la durée de service dans chacun. Elle déclare également qu'elle est titulaire d'un B.Sc., d'une M.Sc. et d'un M.B.A. L'affidavit ne décrit nulle part des fonctions associées à ses postes et ne comporte aucune déclaration ni description touchant ses connaissances ou son expertise particulières. Le contre-interrogatoire révèle que ses diplômes de sciences concernent le domaine de la kinésiologie.

[131]        Elle déclare au paragraphe 3 de son affidavit :

[traduction] En raison de mon expérience, de mes fonctions chez Astra et de ma formation, je connais les affaires dont il est ici question.


[132]        Les paragraphes 4 à 11 présentent le détail des renseignements pertinents sur les brevets, sur la réception par Astra de l'avis d'allégation de Genpharm et sur l'absence d'information d'Astra sur la présentation de drogue nouvelle (PDN) de Genpharm. Le paragraphe 12 fournit une courte description de H. pylori. Le paragraphe 14 renvoie à une page précise du CPS (joint en pièce afférente à l'affidavit) qui soutient la déclaration portant que le CPS ne contient pas d'indications détaillées sur les produits de Genpharm. Le paragraphe 18 fait mention des prescriptions en matière d'étiquetage de médicaments tels que l'oméprazole et du fait que les prescriptions relatives à l'étiquetage ne s'appliquent pas aux médicaments d'ordonnance. Il est fait référence aux articles pertinents du Règlement sur les aliments et drogues, C.R.C., ch. 870.

[133]        Les paragraphes 13, 14 (sauf le renvoi au CPS), 15, 16, 17, 19 et 20 de l'affidavit de Mme Murphy font preuve d'une indifférence flagrante à l'égard des principes de la preuve qui ont été discutés antérieurement dans les présents motifs. Mme Murphy cherche à produire des éléments de preuve au sujet des connaissances et de la pratique des médecins lorsqu'ils prescrivent l'oméprazole, des connaissances et de la pratique des pharmaciens lorsqu'ils délivrent l'oméprazole ainsi que de la sensibilité et des préoccupations typiques des médecins, des pharmaciens et des patients au sujet des indications d'autorisation des médicaments génériques. Elle conclut que le produit de Genpharm sera utilisé par les patients pour le traitement des infections à H. pylori.

[134]        Je n'accorde aucune valeur à ces extraits de l'affidavit de Mme Murphy. Je note également l'échange suivant au cours de son contre-interrogatoire :


[traduction]

Q              Dans quelle mesure la substitution est-elle permise et dans quelles circonstances?

R              Un pharmacien peut substituer une autre marque quand deux ou plusieurs produits figurent sur la liste du Formulaire ontarien comme interchangeables.

Q              Dans quelles circonstances seraient-ils portés sur la liste à ce titre, comme interchangeables?

R              Un fabricant doit présenter une demande au Formulaire de l'Ontario en indiquant que son produit est interchangeable avec un autre produit figurant au Formulaire.

Q              Savez-vous si Genpharm l'a fait ou a l'intention de le faire?

R              Je ne le sais pas.

Q              Si elle ne l'a pas fait, je déduis que la substitution ne serait pas autorisée. Ai-je raison?

M. GAIKIS :           Par « substitution » , votre question implique que l'ordonnance vise le produit Losec?

M. HUGHES :         Oui.

LE TÉMOIN :         Si la marque de Genpharm ne figure pas au Formulaire de l'Ontario, l'ordonnance de Losec ne serait pas substituée à la marque de Genpharm, à ce que je sache.

M. HUGHES :

Q              Est-ce que cette condition s'applique aussi aux autres provinces du Canada?

R              Je n'en suis pas certaine à 100 pour cent. Dans la plupart des provinces, on doit avoir son produit au Formulaire pour qu'il soit réputé interchangeable.

Q              Comment l'inscrit-on au Formulaire dans cette intention dans les autres provinces? Est-ce semblable à l'Ontario?

R              Je le crois bien.

Q              Merci.

[135]        Le Dr Pinto témoigne qu'il est un médecin de famille de Toronto, titulaire d'un permis de pratique de la médecine en Ontario depuis 1975. Il ne déclare rien d'autre au sujet des ses connaissances, de son expérience ou de son expertise. Il dit, sur le fondement de ses connaissances, de son expérience et de sa formation, qu'il estime que l'oméprazole générique sera utilisé pour le traitement des infections à H. pylori même s'il n'a pas été formellement autorisé à cet usage.

[136]        Cette « opinion » est suivie d'une affirmation générale portant que [traduction] « les médecins tiennent pour acquis que toutes les marques génériques d'un principe actif sont approuvées pour les mêmes indications que la marque de l'innovateur » . Il affirme la même chose des pharmaciens qui [traduction] « délivrent généralement aux patients des produits génériques à coût moindre, s'il y en a » . Le Dr Pinto conclut en se montrant d'accord avec les déclarations faites aux paragraphes 13, 14, 15, 16, 17, 19 et 20 de l'affidavit de Mme Murphy. Il n'est fourni aucun fondement factuel à aucune des « opinions » exprimées. Je n'accorde aucun poids à cet affidavit. Contre-interrogé, le Dr Pinto a reconnu qu'il exprimait une opinion personnelle. Il a aussi déclaré qu'il prescrirait LOSEC pour les infections à H. pylori.

[traduction]

Q              Vous savez que la marque Losec est maintenant autorisée pour le H. pylori.

R              En effet.

Q              Vous savez que l'autre marque est autorisée pour les usages anciens.

R              En effet.


Q              Comme médecin, qu'allez-vous prescrire à un patient qui a une infection au H. pylori?

R              Je prescrirais Losec.

[137]        Madame Samuel témoigne qu'elle est titulaire d'un permis de pharmacienne en Ontario depuis 1983 et qu'elle pratique dans un établissement de détail. Elle déclare qu'en raison de son expérience, de sa formation et de ses fonctions, elle connaît [traduction] « les choses dont il est ici question » . Elle ne fournit aucun autre renseignement. Elle dit ensuite qu'on lui a demandé de fournir son opinion d'experte sur le fait de savoir si un oméprazole générique, non autorisé pour le traitement des infections à H. pylori, serait utilisé par les patients pour ce traitement.

[138]        Selon son « opinion » , il sera utilisé étant donné que ce traitement constitue une indication autorisée de LOSEC. Elle poursuit en déclarant qu'il y a un nombre important de patients qui souffrent d'infections à H. pylori et qu'ils vont [traduction] « consulter des médecins qui prescriront vraisemblablement un produit d'oméprazole, soit sous forme générique, soit sous un nom de marque » . Le patient portera son ordonnance écrite à la pharmacie, où le pharmacien ne connaît généralement pas les indications spécifiques du médicament prescrit. En l'absence de la mention « Aucune substitution » , [traduction] « le pharmacien délivrera généralement la marque la moins chère, qui est habituellement une marque générique » .


[139]        Madame Samuel poursuit son témoignage en déclarant qu'en général [traduction] « les pharmaciens ne connaissent pas les indications spécifiques pour lesquelles une marque de médicament est autorisée. Par conséquent, dans le cas où il existe un oméprazole générique sur le marché, ce produit sera en fait délivré aux patients qui l'utiliseront pour le traitement des infections à H. pylori » . En conclusion, Mme Samuel est d'accord avec les déclarations faites aux paragraphes 13 à 20 de l'affidavit de Mme Murphy. Mme Samuel, comme le Dr Pinto, a reconnu en contre-interrogatoire qu'elle exprimait une opinion personnelle. Je n'accorde aucun poids à l'affidavit de Mme Samuel.

[140]        Adam Pignataro est propriétaire d'une pharmacie à Mississauga et pratique comme pharmacien en Ontario depuis l'obtention de son permis de pratique en 1977. Il témoigne qu'il possède une expérience tirée de son travail avec d'autres pharmaciens. Il fournit ensuite une opinion d' « expert » selon laquelle les pharmaciens en Ontario seraient d'accord avec les affirmations de l'affidavit de Mme Samuel. Il déclare que les [traduction] « pharmaciens vont considérer qu'un produit générique d'oméprazole a été autorisé pour les mêmes usages que le produit de marque correspondant [du fait que]... il n'y a pas de mécanisme qui signalerait aux pharmaciens qu'une marque générique a été autorisée pour des usages moins nombreux que ceux du produit de marque » .


[141]        Monsieur Pignataro n'a pas exposé la qualification fondant son expertise ni les faits qui appuyaient sa déclaration au sujet des pharmaciens en général, mais il a pratiqué la pharmacie dans divers milieux depuis quelque 25 ans. Bien que ses déclarations sur les pharmaciens en général ne puissent être prises pour argent comptant, elles méritent qu'on leur accorde un poids allant au-delà du niveau de la simple expérience personnelle. Son témoignage n'a pas été gravement affaibli au cours du contre-interrogatoire.

[142]        Robert Côté a obtenu un permis de pratique de la pharmacie en Ontario depuis 1968. Sa qualification, son expérience et son expertise sont exposées aux paragraphes 1 à 4 de son affidavit et son curriculum vitae est présenté à l'annexe A. Je n'ai pas l'intention d'énumérer les éléments de sa qualification et de son expertise. Il me suffira de dire que je suis persuadée qu'il est qualifié pour fournir l'opinion contenue dans son affidavit. Personne n'a soulevé d'objection au sujet de son expertise.

[143]        Monsieur Côté n'est pas d'accord pour dire qu'un pharmacien délivrant de l'oméprazole ignorerait si le produit est délivré pour le traitement d'ulcères associés à H. pylori. Aux paragraphes 7 et 8 de son affidavit, il affirme ce qui suit :

[TRADUCTION]

[...]

a)             Losec est une des étapes d'un régime médicamenteux à trois étapes utilisé pour le traitement des infections à H. pylori; ce produit n'est pas utilisé seul pour cette indication.

b)             La marque d'oméprazole Losec est actuellement inscrite au Formulaire/Index comparatif des médicaments du Programme de médicaments de l'Ontario (le Formulaire) à titre de médicament à usage restreint.

L'usage de Losec pour le traitement des infections à H. pylori est une des étapes d'un régime médicamenteux à trois étapes. Les autres composantes du régime sont deux antibiotiques, soit la clarithromycine, l'amoxicilline et/ou le métronidazole. Losec n'est jamais prescrit seul pour les infections à H. pylori. L'ordonnance contient toujours les deux antibiotiques en plus de Losec. Ainsi, le pharmacien sait en lisant l'ordonnance si Losec, ou l'oméprazole, est prescrit pour le traitement d'ulcères associés à H. pylori.


Monsieur Côté déclare en outre que LOSEC est inscrit dans le Formulaire pour 15 usages restreints, dont l'un pour le traitement des ulcères associés à H. pylori. Au paragraphe 12, il fournit une explication concernant le Formulaire :

[TRADUCTION]

Losec figure actuellement comme produit « à usage restreint » dans le Formulaire, ce qui signifie que le médecin qui le prescrit à des patients admissibles dans le cadre du Programme de médicaments de l'Ontario, notamment ceux qui ont 65 ans ou plus, qui sont bénéficiaires de l'aide sociale ou qui touchent des indemnités d'assurance-invalidité, doit remplir une formule à cet effet, qu'il joint à l'ordonnance. La formule et l'ordonnance doivent être remises ensemble au pharmacien pour qu'il délivre le produit. Le pharmacien doit soumettre la formule relative au médicament à usage restreint au programme responsable du Formulaire pour être remboursé. Vous trouverez ci-joint, à titre de pièce D, une copie conforme d'une formule pour les médicaments à usage restreint.

Les opinions de M. Côté n'ont pas été contestées en contre-interrogatoire. Les questions concernant le Formulaire ont permis de découvrir que la formule relative aux médicaments à usage restreint n'est utilisée que pour les personnes admissibles au Programme de médicaments de l'Ontario. J'accepte le témoignage de M. Côté.

[144]        Le Dr Alan B.R. Thomson a obtenu son diplôme de médecine (M.D.) en 1967 et il est également titulaire d'une M.Sc. en médecine expérimentale et d'un Ph.D. en physiologie. Il a obtenu tous ses diplômes de l'Université Queen's. Dans son affidavit, il expose en détail ses études, son expérience, sa qualification et son expertise, et les pièces appropriées y sont jointes. Je conclus que Dr Thomson a les qualités voulues pour exprimer l'opinion contenue dans son affidavit. Nul n'a contesté sa qualification ni son expertise. Son affidavit fournit les fondements factuels sur lesquels il se base pour formuler l'opinion énoncée au paragraphe 19 :


[TRADUCTION] En bref, lorsqu'un pharmacien reçoit une ordonnance indiquant l'oméprazole et deux antibiotiques, il sait que c'est pour le traitement d'une infection à H. pylori. Son ordonnance entière est consignée sur une même feuille; ou encore il peut prescrire une marque reconnue de combinaison médicamenteuse, telle que Losec 1-2-3A, pour le traitement d'une infection à H. pylori. De plus, la dose et la durée d'administration prescrites pour l'oméprazole seraient différentes de ce qui est recommandé pour tout autre trouble dû à l'acide mais non associé à H. pylori.

J'accepte sans réserve la totalité du témoignage de Dr Thomson.

[145]        M. Richard Pike est premier vice-président chez Genpharm et il est responsable des affaires réglementaires au sein de cette société. Aux paragraphes 27 à 31 de son affidavit, il affirme :

[TRADUCTION] Genpharm ne demande pas au ministre de la Santé d'homologuer l'usage de ses gélules d'oméprazole pour le traitement des infections à Campylobacter. À cet égard, le projet de monographie de produit qui a été fourni dans le cadre de la présentation de drogue nouvelle énonce les usages que Genpharm prévoit pour ses gélules d'oméprazole, une fois le produit approuvé par le ministre. Ce dernier n'exige pas qu'une monographie de produit visant un nouveau médicament énonce tous les usages possibles ou tous les usages pour lesquels d'autres marques de produits ont été approuvées.

La monographie de produit de Genpharm n'inclura pas d'usage pour le traitement des infections à Campylobacter. On n'y fera pas la moindre mention des infections à Campylobacter; on se limitera à mentionner l'usage du médicament pour réduire les sécrétions d'acide gastrique. Vous trouverez ci-joint, à titre de pièce T, une copie conforme de la monographie de produit de Genpharm.

Genpharm ne favorisera pas, ni intentionnellement ni autrement, la contrefaçon du brevet 668 par la promotion, la commercialisation ou toute autre mesure visant à encourager l'usage de ses gélules d'oméprazole pour le traitement des infections à Campylobacter. À cet égard, Genpharm s'abstiendra :

a)             de promouvoir l'usage de ses gélules d'oméprazole pour le traitement des infections à Campylobacter par des visites de ses représentants commerciaux aux cabinets des médecins;

b)              de faire la publicité de l'usage de ses gélules d'oméprazole pour le traitement des infections à Campylobacter dans des revues médicales vendues ou distribuées au Canada;

c)              de promouvoir l'usage de ses gélules d'oméprazole pour le traitement des infections à Campylobacter dans le cadre de conférences médicales au Canada;


d)              de faire, directement auprès des consommateurs, la publicité de l'usage de ses gélules d'oméprazole pour le traitement des infections à Campylobacter au Canada;

e)              de diffuser au Canada tout matériel faisant la promotion de l'usage de ses gélules d'oméprazole pour le traitement des infections à Campylobacter.

Genpharm distribue un catalogue dans lequel figurent de l'information sur les produits et leur disponibilité, ainsi que les prix pour les pharmaciens, les grossistes et les représentants commerciaux. Après avoir reçu un avis de conformité, Genpharm fournit aux pharmaciens un feuillet pour les informer de l'ajout d'un nouveau produit à sa liste de produits disponibles. Genpharm a également un site Web qui fournit de l'information concernant la classe thérapeutique et la disponibilité des produits.

En bref, Genpharm n'est ni autorisée par la loi ni intéressée à conseiller aux médecins ou aux pharmaciens de prescrire ou de délivrer ses gélules d'oméprazole pour le traitement des infections à Campylobacter.

[146]        En contre-interrogatoire, on a échangé les propos suivants. Ces propos sont reproduits intégralement parce qu'ils pourraient être importants plus loin dans le présent énoncé de motifs.

[traduction]

Q              Ai-je raison de dire que Genpharm fait valoir dans l'information fournie aux consommateurs à la page 24 de la monographie de produit que Gen-Omeprazole agit en réduisant la quantité d'acide produite dans l'estomac?

R              Oui, produite dans l'estomac. Je serais d'accord avec cet énoncé, oui.

Q              Ceci pourra aider à traiter les problèmes d'estomac d'origine bactérienne?

R              N'importe quel problème d'estomac d'origine bactérienne?

Q              Dans le contexte de la réduction de l'acide gastrique, je vous dirais que le seul problème d'estomac d'origine bactérienne pertinent serait l'infection à H. pylori. Seriez-vous d'accord?

R              Oui, je le serais.

Q              Lorsqu'il est dit à la page 24 que « Ceci aide à traiter les problèmes d'estomac d'origine bactérienne... » , on fait, n'est-ce pas, allusion à H. pylori, la bactérie qui y est mentionnée?

R              Si vous voulez dire que H. pylori est la seule qui serait en cause ici, oui.


Q              Connaissez-vous d'autres bactéries contre lesquelles Gen-Omeprazole pourrait être utile?

R              Je n'en connais pas.

Q              Il serait donc raisonnable de conclure, ne croyez-vous pas, que la bactérie à laquelle on fait allusion dans cette phrase est H. pylori?

R              Oui.

Q              Par « cette phrase » , j'entends la phrase où il est dit : « Ceci aide à traiter les problèmes d'estomac d'origine bactérienne associés à l'acide. »

R              Oui.

[...]

[En ce qui a trait au paragraphe 3 de la page 15 de la monographie de produit]

Q              La mention dans ce paragraphe de l'usage combiné à un antibiotique serait interprétée comme une mention de l'usage combiné pour traiter une infection à H. pylori, n'est-ce pas?

R              Je le croirais, oui.

Q              Lorsqu'on dit « combiné à un antibiotique » , on fait allusion à l'oméprazole de Genpharm combiné à un antibiotique. Est-ce exact?

R              Je crois que la monographie de produit fait allusion à l'usage de l'oméprazole en général.

Q              Sous la rubrique « Symptômes et traitement d'un surdosage » de la page 14 qui précède?

R              C'est exact.

Q              On le trouve dans la monographie du produit Gen-Omeprazole?

R              C'est exact.

Q              Il serait donc raisonnable de conclure que, lorsqu'on parle d'un produit combiné à un antibiotique, on parle nécessairement de Gen-Omeprazole?

R              Si je me fie à la façon dont cette phrase est formulée, sans désignation expresse de Gen-Omeprazole, je dirais qu'il est question de l'oméprazole en général, dont Gen-Omeprazole.

Q              L'énoncé s'applique au produit Gen-Omeprazole?


R              Et à d'autres aussi, oui.

[147]        Le dernier élément de preuve est la monographie de produit (MP) concernant l'oméprazole de Genpharm. Dans l'arrêt AB Hassle c. Canada (Ministre de la Santé nationale et du Bien-être social), (2002), précité, la Cour a insisté sur l'importance de la monographie de produit. Au paragraphe 55, elle déclare :

[55] En outre, pour être en mesure de conclure au sujet des intentions de Genpharm, la Cour a pu examiner la monographie de produit de Genpharm. Au moment où il obtient l'autorisation du gouvernement, le fabricant de médicaments reçoit un avis de conformité accompagné d'une monographie de produit. La monographie de produit expose notamment les indications du produit pharmaceutique, soit les utilisations pour lesquelles le gouvernement a approuvé le produit. Par conséquent, la monographie de produit limite les indications du produit et elle est disponible dans le Compendium des produits et spécialités pharmaceutiques (CPS). Le CPS est un ouvrage de référence largement consulté par les pharmaciens et médecins, qui dresse la liste des posologies, ingrédients et modes d'emploi applicables à certains médicaments. Il convient de répéter encore une fois que la monographie de produit d'Apotex n'était pas disponible dans la présente procédure.

[148]        Astra cite des extraits spécifiques de la MP de Genpharm à l'appui de son argument selon lequel Genpharm souhaite que son oméprazole soit utilisé pour le nouvel usage. Le premier passage se trouve à la page 3 de la MP : [traduction] « Les données permettent de conclure que les gélules à libération retardée de GEN-OMEPRAZOLE et que les comprimés à libération retardée de LOSEC ont des effets pharmacodynamiques et pharmacocinétiques équivalents et qu'ils peuvent donc être utilisés avec la même efficacité » . Astra omet d'inclure le reste de la phrase, qui se lit ainsi : « pour des traitements qui requièrent l'élimination des sécrétions d'acide gastrique » .

[149]        Le deuxième passage se trouve à la page 15 : [traduction] « combiné à un antibiotique, il convient de consulter l'information posologique/la monographie de produit concernant cet antibiotique » . Ce passage figure sous la rubrique « SYMPTÔMES ET TRAITEMENT D'UN SURDOSAGE » . L'information fournie dans cette section concerne les symptômes et le traitement propres à une situation de surdosage, et il y est question des résultats d'essais effectués sur des rats, des souris et des chiens. Astra se réfère au contre-interrogatoire de M. Pike et à son aveu selon lequel cette mention serait interprétée comme une mention de l'usage combiné pour traiter les infections à H. pylori.

[150]        Le troisième passage se trouve à la page 24 de la MP :

[TRADUCTION] GEN-OMEPRAZOLE peut également être utilisé pour de rares affections, comme le « syndrome de Zollinger-Ellison » , où l'estomac produit de grandes quantités d'acide. GEN-OMEPRAZOLE agit en réduisant la quantité d'acide produite dans l'estomac. Ceci aide à traiter les problèmes d'estomac d'origine bactérienne associés à l'acide.

Astra se réfère de nouveau au contre-interrogatoire de M. Pike au cours duquel celui-ci a reconnu qu'il serait raisonnable de conclure que la bactérie en cause dans la phrase précitée est H. pylori.

[151]        Le dernier passage correspond en fait à plusieurs passages. Astra se réfère aux pages 33 à 35 de la MP, qui fournissent de l'information provenant d'une étude clinique comparant l'oméprazole de Genpharm à LOSEC relativement à l'effet sur le pH intragastrique de 24 heures. Les extraits contestés paraissent aux pages 33 et 35. Voici le texte de ces extraits :


[TRADUCTION] [...] La date fixée pour l'analyse statistique des données pharmacodynamiques était N=58. Le paramètre pharmacodynamique primaire mesuré était la proportion de temps, sur une période continue de 24 heures, où le pH intragastrique était supérieur à 4 chez des patients séronégatifs pour H. pylori (N=40) et séropositifs pour H. pylori (N=18). Le paramètre secondaire était la proportion de temps où le pH intragastrique était inférieur à 4 la nuit et au pH médian de 24 heures. Les données calculées pour ces produits d'oméprazole sont présentées dans les tableaux ci-dessous :

[...]

Les données permettent de conclure que les gélules à libération retardée de GEN-OMEPRAZOLE et que les comprimés à libération retardée de LOSEC ont des effets pharmacodynamiques et pharmacocinétiques équivalents et qu'ils peuvent dont être utilisés avec la même efficacité pour des traitements qui requièrent l'élimination des sécrétions d'acide gastrique.

À la page 34 de la MP, on trouve deux tableaux présentant les résultats des études. Chaque tableau porte un titre. Le tableau 1 a pour titre : [traduction] « Tableau sommaire d'une étude multidose des données comparative sur les gélules et comprimés d'oméprazole (1 x 20 mg) chez des patients séronégatifs pour H. pylori (N=40) [à partir de données mesurées] » . Le titre du deuxième tableau est identique, sauf qu'il fait état des résultats pour les « patients séropositifs pour H. pylori (N=18) » . Astra cite le paragraphe 28 de l'affidavit de M. Pike, où il est dit que la monographie de produit [traduction] « ne fera pas la moindre mention des infections à Campylobacter; on se limitera à mentionner l'usage du médicament pour réduire les sécrétions d'acide gastrique » . Il n'est pas contesté que les infections à Campylobacter sont désormais désignées comme étant des infections à H. pylori, et il est raisonnable de supposer que M. Pike connaissait ce fait lorsque son affidavit a été souscrit le 13 mai 2002.


[152]        Genpharm signale ce que j'ai déjà fait remarquer au sujet du premier passage cité par Astra. En ce qui a trait à la mention de l'antibiotique, Genpharm avance que, en cas de surdosage, si le patient prend un antibiotique, il faut se reporter à la monographie de l'antibiotique. Il n'est pas nécessaire que l'antibiotique soit prescrit pour l'estomac; en effet, le patient pourrait prendre de l'oméprazole pour l'estomac et un antibiotique pour une infection à la gorge, à une oreille ou à un pied. La mention n'est pas une preuve de l'intention de Genpharm d'obtenir que l'oméprazole soit employé pour le nouvel usage.

[153]        Genpharm se réfère à la page 4 de la MP et plus précisément au sous-titre [traduction] « INDICATION ET USAGE CLINIQUE » . Le passage cité se lit ainsi : [traduction] « Les gélules de GEN-OMEPRAZOLE (oméprazole) sont indiquées pour les affections dont le traitement nécessite une réduction de la sécrétion d'acide gastrique, notamment... » . Suit une liste de six affections, correspondant toutes incontestablement à d' « anciens » usages. Selon Genpharm, ceci constitue une preuve claire et convaincante du fait qu'elle ne cherche pas à ce que son oméprazole soit employé pour le nouvel usage.

[154]        En ce qui concerne les résultats de tests, Genpharm prétend que ces tests ont effectivement été menés et qu'il y a une raison pour laquelle les résultats ont été inclus dans la MP. La raison est fournie dans le passage de la page 35 de la MP où il est dit que l'oméprazole de Genpharm et LOSEC ont un effet pharmacodynamique équivalent et peuvent donc être utilisés avec la même efficacité pour des traitements qui requièrent l'élimination des sécrétions d'acide gastrique (mis en italiques par Genpharm).

[155]        Telle est la preuve et je tire de cette preuve les faits suivants :

a)        Lorsqu'un pharmacien reçoit une ordonnance d'oméprazole, il sait si le médicament est destiné au traitement d'une infection à H. pylori.


b)       Le ministre délivre un avis de conformité pour les indications contenues dans la présentation de drogue du demandeur. Il ne valide pas les indications d'un médicament pour lequel un tel avis de conformité est émis.

c)        La plupart des médecins ne seraient pas en mesure de savoir si une préparation générique est homologuée au même titre qu'une préparation non générique (ce fait ressort du contre-interrogatoire de Dr Thomson, dont j'ai accepté le témoignage sans réserve).

d)       Les pharmaciens se fondent couramment sur le CPS. À une exception près, Genpharm ne fournit pas d'indications pour ses produits dans le CPS (ce fait ressort non seulement de l'affidavit de Mme Murray, mais également du contre-interrogatoire de M. Côté).

e)        Quelques pharmaciens, à tout le moins, supposeront qu'un produit générique est approuvé pour les mêmes usages qu'un produit de marque correspondant. (Les témoignages de M. Pinto, Mme Samuel et M. Pignataro en contre-interrogatoire, selon lesquels ils ne substitueraient pas un médicament générique pour un usage non approuvé ont été fournis relativement au Formulaire).

f)        Il n'existe pas de mécanisme (autre que le Formulaire) qui permette d'informer les pharmaciens du fait qu'un médicament générique est approuvé pour un moins grand nombre d'usages que le médicament de marque correspondant (M. Pignataro, affidavit et contre-interrogatoire).

g)         La formule concernant les médicaments à usage restreint du Formulaire ne vaut que pour les personnes admissibles au Programme de médicaments de l'Ontario.


h)        La MP est un document clé. La MP de Genpharm concernant l'oméprazole énumère des usages « anciens » dans la section [traduction] « INDICATION ET USAGE CLINIQUE » .

i)         Il y a quatre passages dans la MP de Genpharm que l'on pourrait interpréter comme des preuves de l'intention de Genpharm d'obtenir que son produit soit employé pour le nouvel usage.

j)        Le premier passage contesté de la MP de Genpharm (analysé en détail au paragraphe 137 ci-dessus) ne constitue pas une telle preuve.

k)       Les deuxième, troisième et quatrième passages constituent des preuves de l'intention de Genpharm d'obtenir que son produit soit employé pour le nouvel usage. Le deuxième passage (la mention de l'usage avec un antibiotique) est limite, mais j'estime qu'en le combinant aux troisième et quatrième passages, on peut raisonnablement conclure que la mention subtile visait à donner au lecteur l'impression que cet oméprazole pouvait être utilisé en association avec un antibiotique.

l)         Le troisième passage (où il est question « d'origine bactérienne » ) fait référence à H. pylori. (L'aveu en ce sens de M. Pike suffit en soi pour tirer cette conclusion. Par ailleurs, le témoin de Genpharm, M. Côté, a déclaré en contre-interrogatoire que H. pylori est la seule bactérie associée aux ulcères qu'il connaisse).

m)       Le quatrième passage concernant les résultats d'études effectuées sur des patients séropositifs et séronégatifs pour H. pylori constitue, selon moi, une tentative flagrante de donner au lecteur l'impression que l'oméprazole de Genpharm peut être utilisé pour traiter les infections à H. pylori.

[156]        Ces constatations m'amènent nécessairement à la conclusion que, si un avis de conformité était délivré et que Genpharm vendait son oméprazole, les patients contreferaient le brevet d'Astra visant le nouvel usage. Le fait que Genpharm ait déclaré dans son avis d'allégation au sujet du brevet 668 que ses gélules d'oméprazole seront étiquetées et vendues pour l'inhibition des sécrétions d'acide gastrique ne suffit pas, à la lumière des faits énumérés ci-dessus, à faire pencher la balance en sa faveur. Il en serait autrement si son étiquette ou sa MP indiquaient expressément que le produit n'est pas approuvé pour le traitement des infections à H. pylori. Astra m'a convaincue, suivant la prépondérance de la preuve, que l'allégation de non-contrefaçon de Genpharm n'est pas fondée.

LE BREVET 762

[157]        Le brevet 762 a été délivré le 1er août 2000 et il s'intitule « Synergistic Combination of a Substance With Gastric Acid Secretion Inhibiting Effect and an Acid Degradable Antibiotic » . Il s'agit d'un brevet visant un nouvel usage. Il porte sur la combinaison d'une substance inhibitrice de la sécrétion d'acide gastrique et d'un antibactérien dégradable en milieu acide.


[158]        Il est indiqué dans la divulgation que certains antibiotiques agissant sur Helicobacter pylori (H. pylori) se dégradent en métabolites non antibactériens en présence d'acide gastrique, ce qui réduit leur efficacité antibactérienne. La combinaison d'une substance inhibitrice de la sécrétion d'acide gastrique et d'un antibactérien dégradable en milieu acide provoque une forte concentration plasmatique de l'antibiotique après administration par voie orale. En combinant les éléments de la présente invention, on obtient une synergie de l'effet antibactérien des antibiotiques qui améliore l'efficacité thérapeutique.

[159]        Le brevet 762 comporte 77 revendications. Ces revendications sont jointes aux présents motifs à titre d'annexe G. Elles visent des compositions pharmaceutiques, des associations médicamenteuses synergiques, l'usage de ces compositions et l'usage destiné à accroître la biodisponibilité des antibiotiques.

[160]        La revendication 1 du brevet 762 s'énonce ainsi :

[TRADUCTION]

1.             Une composition pharmaceutique pour le traitement de la gastrite et de l'ulcère gastroduodénal, contenant une quantité thérapeutiquement efficace [...] d'un inhibiteur de la pompe à protons qui élève le pH intragastrique, et une quantité thérapeutiquement efficace d'un antibactérien dégradable en milieu acide.

[161]        Les revendications concernent pour la plupart des compositions pharmaceutiques ou des associations synergiques de composés comme l'oméprazole.

[162]        Les revendication 2 à 10 sont subordonnées à la revendication 1. La revendication 3 précise que l'inhibiteur de la pompe à protons est l'oméprazole ou un sel pharmaceutiquement acceptable de l'oméprazole. D'autres revendications subordonnées identifient l'antibactérien. La revendication 8 identifie la benzyl-pénicilline; la revendication 9 identifie l'érythromycine et la revendication 10 identifie la clarithromycine.


[163]        La revendication 11 vise une composition pharmaceutique pour administration orale :

[TRADUCTION] Une composition pharmaceutique orale pour le traitement de la gastrite et de l'ulcère gastroduodénal causés par Helicobacter pylori, comprenant comme ingrédients actifs :

a) [...] une quantité thérapeutiquement efficace d'un inhibiteur de la pompe à protons qui élève le pH intragastrique;

b) une quantité thérapeutiquement efficace d'un antibactérien dégradable en milieu acide.

[164]        Les revendications 12 à 20 sont subordonnées à la revendication 11 et précisent l'invention, notamment en identifiant l'antibiotique et l'inhibiteur de la pompe à protons.

[165]        La revendication 41 et ses revendications subordonnées 42 à 46 visent une association médicamenteuse synergique pour le traitement de la gastrite et de l'ulcère gastroduodénal. La revendication 41 se lit ainsi :

[TRADUCTION] Une association médicamenteuse synergique contenant une quantité thérapeutique d'environ 1 à 200 mg d'un inhibiteur de la pompe à protons qui élève le pH intragastrique, et une quantité thérapeutique d'environ 250 mg à 10 g d'un antibactérien dégradable en milieu acide, pour le traitement de la gastrite et de l'ulcère gastroduodénal.

[166]        La revendication 47 vise une association médicamenteuse synergique contenant de l'oméprazole ou un sel pharmaceutiquement acceptable d'oméprazole et un antibiotique de base faible, pour le traitement de la gastrite et de l'ulcère gastroduodénal :

[TRADUCTION] Une association médicamenteuse synergique contenant une quantité thérapeutique d'oméprazole ou d'un sel pharmaceutiquement acceptable d'oméprazole et une quantité thérapeutique d'un antibiotique de base faible, pour le traitement de la gastrite et de l'ulcère gastroduodénal.


[167]        Les revendications 48 à 51, 56 et 57 visent des associations médicamenteuses synergiques contenant un antibiotique spécifique ainsi que de l'oméprazole ou un sel d'oméprazole.

[168]        Les revendications 58 à 76 visent l'usage de l'association médicamenteuse découlant de l'invention pour traiter la gastrite et l'ulcère gastroduodénal ou pour accroître la biodisponibilité d'un antibiotique. Les revendications 64, 66, 67, 69 et 71 à 76 précisent l'usage de l'oméprazole ou de son sel dans cette association.

[169]        La revendication 77 vise l'usage de l'oméprazole pour accroître la biodisponibilité de l'érythromycine.

[170]        Genpharm allègue que le brevet 762 revendique comme « invention » l'usage de l'oméprazole comme inhibiteur de la pompe à protons, mélangé à un antibactérien. Le médicament de Genpharm sera destiné aux usages « anciens » . Il ne sera pas utilisé pour son activité antimicrobienne et il ne sera pas mélangé à un antibactérien. Il ne contrefera donc pas le brevet 762.

LA PREUVE

[171]        Astra et Genpharm s'appuient sur les mêmes éléments de preuve à l'égard du brevet 762 qu'à l'égard du brevet 668.


LES POSITIONS DES PARTIES

Astra

[172]        Selon ce que prétend Astra, le brevet 762 revendique une association de l'oméprazole et d'un antibiotique pour traiter notamment des troubles associés à H. pylori. Il est clairement énoncé dans le brevet que sa portée ne se limite pas à l'association contenue dans une formulation unique. L'allégation de Genpharm se limite à affirmer que son produit ne contiendra pas d'antibiotique. Comme il n'est pas nécessaire de retrouver à la fois un antibiotique et l'oméprazole dans une même forme posologique ou un même produit, l'allégation de non-contrefaçon n'est manifestement pas fondée.

[173]        Astra fait valoir plus précisément que le brevet prévoit expressément ce qui suit aux lignes 5 à 9 de la page 5 :

[TRADUCTION] L'association découlant de la présente invention peut être produite en une seule formulation pharmaceutique contenant les deux ingrédients actifs ou en deux comprimés ou gélules distincts.

[174]        Ainsi, il n'est pas indispensable que les diverses associations décrites dans les revendications soient réunies dans un même produit (un comprimé, une poudre, une gélule). L'oméprazole peut se trouver dans un comprimé et l'antibiotique dans un autre. L'association demeurera l'association brevetée, tant qu'elle sera utilisée conformément aux revendications du brevet.

[175]        Astra soutient que Genpharm a mal interprété le brevet puisqu'elle considère que les revendications visent une composition pharmaceutique pour le traitement de la gastrite et de l'ulcère gastroduodénal, réunissant un inhibiteur des récepteurs H2 de l'histamine ou un inhibiteur de la pompe à protons, lequel peut être l'oméprazole, et un antibactérien dégradable en milieu acide. Genpharm affirme ensuite que ses gélules d'oméprazole ne contiendront ni inhibiteur des récepteurs H2 de l'histamine ni antibactérien dégradable en milieu acide et qu'elles ne seront ni étiquetées ni vendues comme étant la composition revendiquée.

[176]        Astra soutient que l'allégation de Genpharm selon laquelle son produit ne contiendra pas d'antibactérien dégradable en milieu acide ne mène pas à conclure à l'absence de contrefaçon, étant donné que le brevet précise clairement que l'association médicamenteuse peut prendre la forme de deux comprimés ou gélules distincts. Il n'y a rien qui impose de réunir l'antibiotique et l'oméprazole dans une même forme posologique ou un même produit. De ce fait, l'allégation de Genpharm selon laquelle son produit sera dépourvu d'antibactérien dégradable en milieu acide ne permet nullement de conclure que le produit en question ne contrefera pas le brevet. De plus, l'affirmation de Genpharm selon laquelle son produit ne sera ni étiqueté ni vendu comme étant la composition revendiquée revient à dire que son produit ne sera ni étiqueté ni vendu comme contenant un antibactérien dégradable en milieu acide, et elle n'est pas non plus pertinente.


[177]        Astra conteste également les revendications 68 et 69, plus particulièrement la revendication 68 qui, selon elle, ne vise pas l'usage d'une association médicamenteuse comme telle, mais plutôt l'usage d'un inhibiteur des récepteurs H2 de l'histamine ou d'un inhibiteur de la pompe à protons en vue d'accroître la biodisponibilité d'un antibactérien dégradable en milieu acide. La revendication 69, qui est subordonnée à la revendication 68, vise spécifiquement cet usage de l'oméprazole. L'avis d'allégation de Genpharm ne renferme rien concernant le fait que le brevet revendique l'usage de l'oméprazole pour accroître la biodisponibilité du produit.

[178]        Enfin, Astra soutient que la preuve relative au brevet 668 démontre clairement que le produit de Genpharm peut être utilisé en association avec un antibiotique pour le traitement des infections à H. pylori et qu'il est aussi efficace que LOSEC, utilisé dans de telles associations médicamenteuses. Le produit de Genpharm sera employé pour les usages approuvés de LOSEC, notamment en association avec un antibiotique. Selon Astra, l'allégation de Genpharm concernant le brevet 762 n'est pas fondée.

Genpharm

[179]        Les paragraphes 22, 23 et 184 à 188 du mémoire des faits et du droit de Genpharm s'énoncent ainsi :

[TRADUCTION] Le brevet 762 revendique comme « invention » l'usage de l'oméprazole à titre d'inhibiteur de la pompe à protons et son association à un antibactérien.

Le médicament de Genpharm sera utilisé pour les « anciens » usages. Il ne sera pas utilisé pour son activité antimicrobienne et ne sera pas mélangé à un antibactérien. L'allégation de non-contrefaçon de Genpharm est fondée.

Le brevet 762 précise clairement qu'il vise une association médicamenteuse, par exemple l'oméprazole et un antibactérien. À la page 1, il est indiqué au premier paragraphe : « La présente invention consiste en l'association d'une substance à effet inhibiteur sur la sécrétion d'acide gastrique, donc une substance qui élève le pH intragastrique, telle qu'un inhibiteur de la pompe à protons ou un inhibiteur des récepteurs H2 de l'histamine, et d'un ou plusieurs antibactériens dégradables en milieu acide. »


Dans le brevet 762, on reconnaît à la page 2 que l'oméprazole est un composé connu et que son usage pour le traitement des infections à Helicobacter est connu.

Le brevet 762 décrit et revendique une composition contenant deux ingrédients, soit (1) un composé tel que l'oméprazole, plus (2) un antibactérien (tel que la pénicilline ou la clarithromycine).

La justification des allégations de non-contrefaçon de Genpharm concernant les brevets 668 et 762 peut être analysée conjointement.

Comme il a déjà été mentionné sous la rubrique « Le médicament oméprazole de Genpharm » , le produit de Genpharm sera homologué, indiqué, étiqueté et vendu uniquement pour les « anciens » usages. Il ne sera pas homologué, indiqué, étiqueté ni vendu pour le « nouvel » usage et il ne sera pas fourni en association avec quelque antibactérien.[Mis en italiques par Genpharm]

[180]        Dans sa plaidoirie, Genpharm a laissé entendre qu'Astra n'avait pas fait valoir les arguments relatifs à la suffisance de l'avis d'allégation dans ses observations écrites. Dans sa réponse à l'argument touchant la suffisance, Genpharm admet ne pas avoir retracé dans son avis d'allégation chacune des revendications du brevet 77. Astra, dit-elle, fait mention de la partie de la revendication 68 traitant de la biodisponibilité et déclare que la question n'a pas été traitée précisément et que, par conséquent, l'avis d'allégation est déficient. La réponse de Genpharm comporte deux volets. Aucune des allégations de Genpharm ne traite les revendications une à une et Astra ne s'est pas opposée aux autres allégations. De plus, l'argument d'Astra manifeste un aveuglement délibéré parce que l'avis d'allégation concernant le brevet 668 porte explicitement que les gélules d'oméprazole de Genpharm seront étiquetées et marquées comme des inhibiteurs de la sécrétion d'acide gastrique. Tous sauront donc précisément ce qui en est du produit de Genpharm et Astra n'est ni trompée, ni placée dans la confusion d'aucune manière. Il n'est pas nécessaire de traiter toutes les revendications une à une et d'aborder chaque nuance de la revendication.


L'analyse

[181]        Le brevet 762 vise l'association d'une substance ayant un effet inhibiteur sur la sécrétion d'acide gastrique, donc une substance qui élève le pH intragastrique (p. ex. un inhibiteur de la pompe à protons ou un inhibiteur des récepteurs H2 de l'histamine), et d'un ou plusieurs antibactériens dégradables en milieu acide.

[182]        J'ai examiné attentivement le mémoire des faits et du droit d'Astra. Il est question au paragraphe 166 des revendications 68 et 69 du brevet 762. Ce paragraphe fournit une description générale des revendications 58 à 76 et signale en passant les revendications 64, 66, 67, 69 et 71 à 76. La revendication 68 n'est pas mentionnée. La « biodisponibilité » est mentionnée au paragraphe 37, de même qu'aux paragraphes 166 et 167 en ces termes :

[TRADUCTION]

166.         Les revendications 58 à 76 visent l'usage de l'association découlant de l'invention pour traiter la gastrite et l'ulcère gastroduodénal ou pour accroître la biodisponibilité d'un antibiotique [...]

167.         La revendication 77 vise l'usage de l'oméprazole pour accroître la biodisponibilité de l'érythromycine.


[183]        Il n'est pas fait mention ailleurs dans l'exposé des revendications 68 et 69 ou de l'usage en rapport avec l'accroissement de la biodisponibilité. Je n'estime pas que les observations relatives à la biodisponibilité ou celles qui concernent les revendications 68 et 69 puissent à juste titre être vues comme des arguments soulevés dans l'exposé des faits et du droit proprement dit. Il n'est pas loisible à une partie de faire valoir à l'audience un motif non soulevé ou communiqué antérieurement. Par conséquent, je n'ai pas l'intention de traiter plus avant cette partie du plaidoyer d'Astra.

[184]        S'agissant de l'argument portant que Genpharm a mal interprété les revendications du brevet et n'a pas traité le fait que l'association d'Astra pouvait se trouver dans deux ou plusieurs comprimés ou gélules, il est exposé aux paragraphes 37, 157, 254, 255 et 256 de l'exposé d'Astra. Genpharm a été largement informée de cet argument.

[185]        Pour plus de commodité, le passage de l'avis d'allégation de Genpharm concernant le brevet 762 est reproduit ci-dessous :

[TRADUCTION]

Brevet no 2,133,762

Ce brevet vise et revendique une composition pharmaceutique pour le traitement de la gastrite ou de l'ulcère gastroduodénal, combinant un inhibiteur des récepteurs H2 de l'histamine ou un inhibiteur de la pompe à protons, lequel peut être l'oméprazole, et un antibactérien dégradable en milieu acide.

Les gélules d'oméprazole de Genpharm ne contiendront ni inhibiteur des récepteurs H2 de l'histamine ni antibactérien dégradable en milieu acide, et elles ne seront ni étiquetées ni vendues comme étant la composition revendiquée. Elles ne contreferont donc pas ce brevet.

[186]        Au vu de l'avis d'allégation, il m'apparaît que l'argument d'Astra est fondé. L'avis d'allégation ne traite aucune des revendications où l'oméprazole est pris en association avec un antibiotique autrement que dans une seule composition.

[187]        Le paragraphe 5(1) du Règlement prévoit :



5. (1) Lorsqu'une personne dépose ou a déposé une demande d'avis de conformité pour une drogue et la compare, ou fait référence, à une autre drogue pour en démontrer la bioéquivalence d'après les caractéristiques pharmaceutiques et, le cas échéant, les caractéristiques en matière de biodisponibilité, cette autre drogue ayant été commercialisée au Canada aux termes d'un avis de conformité délivré à la première personne et à l'égard de laquelle une liste de brevets a été soumise, elle doit inclure dans la demande, à l'égard de chaque brevet inscrit au registre qui se rapporte à cette autre drogue :

a) soit une déclaration portant qu'elle accepte que l'avis de conformité ne sera pas délivré avant l'expiration du brevet;

b) soit une allégation portant que, selon le cas :

(i) la déclaration faite par la première personne aux termes de l'alinéa 4(2)c) est fausse,

(ii) le brevet est expiré,

(iii) le brevet n'est pas valide,

(iv) aucune revendication pour le médicament en soi ni aucune revendication pour l'utilisation du médicament ne seraient contrefaites advenant l'utilisation, la fabrication, la construction ou la vente par elle de la drogue faisant l'objet de la demande d'avis de conformité.

5. (1) Where a person files or has filed a submission for a notice of compliance in respect of a drug and compares that drug with, or makes reference to, another drug for the purpose of demonstrating bioequivalence on the basis of pharmaceutical and, where applicable, bioavailability characteristics and that other drug has been marketed in Canada pursuant to a notice of compliance issued to a first person and in respect of which a patent list has been submitted, the person shall, in the submission, with respect to each patent on the register in respect of the other drug,

(a) state that the person accepts that the notice of compliance will not issue until the patent expires; or

(b) allege that

(i) the statement made by the first person pursuant to paragraph 4(2)(c) is false,

(ii) the patent has expired,

(iii) the patent is not valid, or

(iv) no claim for the medicine itself and no claim for the use of the medicine would be infringed by the making, constructing, using or selling by that person of the drug for which the submission for the notice of compliance is filed.


[188]        Il est implicite au paragraphe 5(1) qu' « aucune revendication » signifie aucune des revendications du brevet. Le brevet prévoit expressément que l'invention 762 ne se limite pas à l'association contenue dans une seule formulation. Genpharm n'a pas traité de ce point dans son avis d'allégation.

[189]        Dans l'arrêt Genpharm Inc. c. Le ministre de la Santé nationale et du Bien-être social, précité, le juge Rothstein a déclaré aux paragraphes 24 et 25 :


[24] Je ne dis pas qu'il est nécessaire que le fabricant de génériques considère chacune des revendications dépendantes du brevet si la ou les revendications de base qui décrivent l'invention sont considérées dans l'énoncé détaillé. Toutefois, le fabricant de génériques ne peut passer sous silence les revendications qui décrivent l'invention fondamentale. S'il le fait, il ne fournira pas les faits démontrant qu' « aucune revendication pour l'utilisation du médicament ne serait contrefaite » , et son avis d'allégation sera entaché d'un vice et ne sera pas conforme à l'article 5.

[25] Les énoncés détaillés de Genpharm ne démontrent pas qu'aucune revendication pour l'utilisation d'un polyphosphonate, c'est-à-dire l'étidronate disodique, dans un schéma posologique intermittent et cyclique pour le traitement de l'ostéoporose, qui est la nouvelle utilisation de l'étidronate disodique inventée par P & G, ne serait contrefaite advenant la fabrication, la construction, l'utilisation ou la vente par Genpharm de son produit d'étidronate disodique. Les énoncés détaillés considèrent uniquement les revendications pour le kit, soit les revendications 1 à 16. Ils ne considèrent pas les revendications pour l'utilisation, soit les revendications 17 à 37. Ils ne disent pas que le produit de Genpharm ne peut être utilisé dans une thérapie à cycles intermittents pour le traitement de l'ostéoporose. Les énoncés détaillés joints aux avis d'allégation ne tiennent pas compte des revendications pour l'utilisation dans le brevet 376.

[190]        De la même façon en l'espèce, Genpharm n'a pas traité certaines revendications du brevet 762 (les revendications 68 et 69 ne font pas partie de la présente analyse). Elle n'a pas produit dans son énoncé détaillé les faits qui traitent des revendications où l'oméprazole est pris avec un antibiotique, mais non sous une seule forme posologique. Ce faisant, elle n'a pas avancé les faits nécessaires pour soutenir son allégation de non-contrefaçon de ces revendications. Par conséquent, son avis d'allégation ne peut être considéré comme fondé.

[191]        Astra a établi, selon la prépondérance de la preuve, que l'allégation de Genpharm de non-contrefaçon du brevet 762 n'était pas fondée.

[192]        Dans l'hypothèse où je ferais erreur à ce sujet, mes conclusions de fait sur la preuve relative au brevet 668 s'appliqueraient aux revendications du brevet 762 touchant le H. pylori et l'allégation de Genpharm ne serait pas fondée non plus.


L'ABUS DE PROCÉDURE

[193]        Astra a également demandé une déclaration portant que l'avis d'allégation de Genpharm au sujet des brevets 693 et 377 constituait un abus de procédure. Compte tenu de mes conclusions au sujet de ces brevets, il n'est pas nécessaire de trancher la question de l'abus de procédure et je m'abstiens de le faire.

CONCLUSION

[194]        Astra a établi que les diverses allégations de Genpharm touchant l'invalidité et la contrefaçon ne sont pas fondées. Astra a droit d'obtenir une ordonnance interdisant au ministre de délivrer un avis de conformité à Genpharm à l'égard de ses gélules d'oméprazole avant l'expiration des brevets 693, 377, 668 et 762. Astra et Takeda ont droit aux dépens contre Genpharm, taxés selon l'échelle ordinaire. Il n'est pas attribué de dépens en faveur ou à l'encontre du ministre. Une ordonnance suivra en conséquence.

   « Carolyn A. Layden-Stevenson »

              Juge

Ottawa (Ontario)

Le 22 décembre 2003

Traduction certifiée conforme

Martine Guay, LL.L.


                                     COUR FÉDÉRALE

                      AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

DOSSIER :                T-2005-01

INTITULÉ :               AB HASSLE, ASTRAZENECA AB      et ASTRAZENECA CANADA INC.

demanderesses

et

GENPHARM INC., TAKEDA CHEMICAL INDUSTRIES, LTD. ET LE MINISTRE DE LA SANTÉ

défendeurs

LIEU DE L'AUDIENCE :                              Toronto

DATE DE L'AUDIENCE :                            27-31 octobre 2003

MOTIFS DE L'ORDONNANCE :               Madame le juge Layden-Stevenson

[Motifs d'ordonnance confidentiels rendus le 11 décembre 2003]

DATE DES MOTIFS :                                   22 décembre 2003

COMPARUTIONS :                                      Gunars Gaikis

Yoon Kang

                                                                        Pour les demanderesses

Roger Hughes, c.r.

Kamleh Nicola

Jeilah Chan

Pour la défenderesse

Genpharm Inc.

Gary O'Neill

Christopher Van Barr

Pour la défenderesse

Takeda Chemical Industries, Ltd.

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Smart & Biggar

Toronto (Ontario)                                              Pour les demanderesses

Sim, Hughes, Ashton & McKay s.r.l.

Toronto (Ontario)                                              Pour la défenderesse

Genpharm Inc.

Gowling Lafleur Henderson s.r.l.

Ottawa (Ontario)                                               Pour la défenderesse

Takeda Chemical Industries, Ltd.

Sous-procureur général du Canada                                Pour le défendeur

Le ministre de la Santé


ANNEXE A

aux motifs de l'ordonnance rendue le 22 décembre 2003

[motifs confidentiels rendus le 11 décembre 2003]

par Madame la juge Carolyn Layden-Stevenson

dans l'affaire

AB HASSLE, ASTRAZENECA AB

et ASTRAZENECA CANADA INC.

c.

GENPHARM INC., TAKEDA CHEMICAL INDUSTRIES, LTD.

et LE MINISTRE DE LA SANTÉ

T-2005-01

Le 27 septembre 2001

PAR MESSAGER

ASTRAZENECA INC.

1004, chemin Middlegate

Mississauga (Ontario) L4Y 1M4

Aux soins du Président

Monsieur,

Objet : Présentation de drogue nouvelle visant des gélules d'oméprazole - 10 mg et 20 mg

Au nom de notre client, Genpharm Inc., 85, chemin Advance, Etobicoke (Ontario), Canada, M8Z 2S9, nous transmettons la présente lettre, qui constitue l'avis d'allégation de Genpharm et l'énoncé détaillé des fondements juridiques et factuels de ses allégations aux termes des dispositions du Règlement sur les médicaments brevetés (avis de conformité).

VOTRE LISTE DE BREVETS

La demande de Genpharm concerne l'oméprazole en concentrations de 10 mg et 20 mg. À cet égard, nous notons dans le Registre des brevets tenu en application du Règlement, en date du 14 septembre 2001, que vous détenez les brevets canadiens suivants pour l'oméprazole et l'oméprazole magnésien :

1,264,751

Expire le 23 janvier 2007

1,292,693

Expire le 3 décembre 2008

1,302,891

Expire le 9 juin 2009

1,338,377

Expire le 11 juin 2013

2,025,668

Expire le 2 février 2010

2,133,762

Expire le 20 avril 2013

2,166,483

Expire le 8 juillet 2014

2,166,794

Expire le 8 juillet 2014

2,170,647

Expire le 7 juin 2015

DÉCLARATION DE GENPHARM

Conformément au paragraphe 5(1.1) du Règlement, Genpharm déclare, à l'égard des brevets énumérés ci-dessus, qu'aucune revendication valide associée à l'un ou l'autre de ces brevets ne sera contrefaite, à savoir :

Brevet no 1,264,751

Le produit médicamenteux que propose Genpharm ne contrefera aucune des revendications de ce brevet.

Ce brevet vise et revendique des sels alcalins d'oméprazole. Le produit de Genpharm consistera en un méthoxymercaptobenzimidazole (oméprazole base) et non en un sel alcalin d'oméprazole.

Brevet no 1,292,693

Le produit médicamenteux que propose Genpharm ne contrefera aucune des revendications de ce brevet; de plus, lesdites revendications sont invalides.

Ce brevet vise et revendique une formulation orale à enrobage gastrorésistant et entérosoluble comportant un « noyau » composé d'une substance active recouverte d'une ou plusieurs couches de sous-enrobage, elles-mêmes recouvertes d'une ou plusieurs couches d'enrobage gastrorésistant et entérosoluble. La substance active est l'oméprazole ou un sel d'oméprazole. Selon les revendications du brevet, le noyau doit contenir l'ingrédient actif et il doit être recouvert d'un sous-enrobage inerte, lequel doit être recouvert d'un enrobage gastrorésistant et entérosoluble. Les gélules de Genpharm contiennent de multiples granules, chacun formé d'un noyau inerte ne renfermant aucun composé actif. Le composé actif des gélules de Genpharm est pulvérisé sur les noyaux inertes des granules. Une couche protectrice recouvre ensuite les noyaux enrobés. Puis, une couche gastrorésistante et entérosoluble est ajoutée par-dessus la couche protectrice. Les gélules de Genpharm n'ont donc pas le noyau décrit dans les revendications du brevet. Leur noyau est en fait inerte et constitue simplement une base sur laquelle les couches sont appliquées.

Vous êtes déjà parfaitement au courant des fondements factuels et juridiques de ces allégations, ayant pris connaissance de l'affidavit de M. Richard K. Pike, souscrit le 13 septembre 1999, de l'affidavit de M. James Steven Rowe, souscrit le 9 septembre 1999 et de l'affidavit de M. James Steven Rowe, souscrit le 22 mars 2000, ainsi que des pièces accompagnant lesdits affidavits et du contre-interrogatoire ayant porté sur les affidavits et pièces déposés et identifiés dans le cadre de l'affaire T-809-00 de la Cour fédérale du Canada, à laquelle vous étiez partie, tout comme Genpharm et quelques autres. Tous ces affidavits, sauf le dernier de M. Rowe, ont été déposés dans le cadre de cette affaire; le dernier de M. Rowe n'a pas été déposé, mais une copie vous a été communiquée. Aux références citées par M. Rowe à l'appui de l'argument concernant le caractère évident du brevet, on ajoute et invoque l'article de Dechesne et coll. intitulé « Étude de l'influence des plastifiants sur les caractéristiques des films appliqués d'eudragit L 30d » , Journal de pharmacie de Belgique, 1982, 37, 4, p. 283-286.


Vous trouverez dans les rapports ci-joints plus de détails sur les fondements factuels et juridiques des allégations ci-dessus.

Brevet no 1,302,891

Ce brevet ne s'applique pas à l'oméprazole, tel qu'il est indiqué aux lignes 21 à 26 de la page 12; le produit médicamenteux de Genpharm ne le contrefera donc pas.

Quoi qu'il en soit, ce brevet n'est ni contrefait ni valide, pour les mêmes motifs que ceux énoncés à l'égard du brevet 1,292,693 ci-dessus.

Brevet no 1,338,377

Ce brevet n'est pas valide. Vous êtes déjà au courant des fondements factuels et juridiques de cette allégation, ayant pris connaissance des affidavits de M. James Steven Rowe, avec les pièces d'accompagnement, souscrits le 14 décembre 1999 et le 26 avril 2000, le premier affidavit ayant fait l'objet d'un dépôt et le second ayant fait l'objet d'une tentative de dépôt dans le cadre de l'affaire T-1884-99 de la Section de première instance de la Cour fédérale du Canada, à laquelle vous étiez partie, tout comme Genpharm et quelques autres.

Brevet no 2,025,668

Ce brevet vise et revendique l'usage de l'oméprazole ou d'un sel pharmaceutiquement acceptable d'oméprazole pour le traitement de maladies infectieuses, et plus particulièrement celles causées par Campylobacter pylori. Le produit de Genpharm ne sera indiqué pour aucun des usages énumérés dans ce brevet. Les gélules d'oméprazole de Genpharm seront étiquetées et vendues pour l'inhibition de la sécrétion d'acide gastrique. Elles ne seront pas étiquetées ni vendues pour le traitement de maladies infectieuses, comme celles causées par Campylobacter pylori. Le produit médicamenteux proposé par Genpharm n'a pas contrefait, ne contrefait pas et ne contreferait pas, s'il était commercialisé, l'une ou l'autre des revendications de ce brevet.

Brevet no 2,133,762

Ce brevet vise et revendique une composition pharmaceutique pour le traitement de la gastrite ou de l'ulcère gastroduodénal, combinant un inhibiteur des récepteurs H2 de l'histamine ou un inhibiteur de la pompe à protons, lequel peut être l'oméprazole, et un antibactérien dégradable en milieu acide.

Les gélules d'oméprazole de Genpharm ne contiendront ni inhibiteur des récepteurs H2 de l'histamine ni antibactérien dégradable en milieu acide, et elles ne seront ni étiquetées ni vendues comme étant la composition revendiquée. Elles ne contreferont donc pas ce brevet.

Brevet no 2,166,483


Ce brevet vise et revendique une formulation orale à enrobage gastrorésistant et entérosoluble comportant un noyau composé d'une substance active recouverte d'une ou plusieurs couches de sous-enrobage, elles-mêmes recouvertes d'une ou plusieurs couches d'enrobage gastrorésistant et entérosoluble. La substance active contient un sel de magnésium d'oméprazole. Selon les revendications du brevet, le noyau doit contenir l'ingrédient actif et il doit être recouvert d'un sous-enrobage inerte, lequel doit être recouvert d'un enrobage gastrorésistant et entérosoluble. Les gélules de Genpharm renferment de multiples granules, chacun formé d'un noyau inerte ne contenant aucun composé actif.

Le composé actif des gélules de Genpharm est pulvérisé sur les noyaux inertes des granules. Une couche protectrice recouvre ensuite les noyaux enrobés. Puis, une couche gastrorésistante et entérosoluble est ajoutée par-dessus la couche protectrice. Les gélules de Genpharm n'ont donc pas le noyau décrit dans les revendications du brevet. Leur noyau est en fait inerte et constitue simplement une base sur laquelle les couches sont appliquées. De plus, elles ne contiennent pas de sel de magnésium d'oméprazole, mais plutôt de l'oméprazole base. Par conséquent, les revendications du brevet ne seraient pas contrefaites advenant la fabrication, la construction, l'utilisation ou la vente par Genpharm du médicament pour lequel la demande d'avis de conformité est présentée.

Brevet no 2,166,794

Ce brevet vise et revendique l'oméprazole magnésien. Le produit de Genpharm ne contrefera pas ce brevet, étant donné qu'il contiendra de l'oméprazole base et non de l'oméprazole magnésien.

Brevet no 2,170,647

Ce brevet vise et revendique une forme posologique multi-unitaire en comprimé contenant de l'oméprazole ou l'un de ses énantiomères simples ou sels alcalins, ainsi qu'une méthode de fabrication d'une telle formulation et l'usage d'une telle formulation pour le traitement de maladies associées à l'acide gastrique.

Le produit de Genpharm ne contrefera pas ce brevet, étant donné qu'il ne sera pas vendu sous forme de comprimé.


ANNEXE B

aux motifs de l'ordonnance rendue le 22 décembre 2003

[motifs confidentiels rendus le 11 décembre 2003]

par Madame la juge Carolyn Layden-Stevenson

dans l'affaire

AB HASSLE, ASTRAZENECA AB

et ASTRAZENECA CANADA INC.

c.

GENPHARM INC., TAKEDA CHEMICAL INDUSTRIES, LTD.

et LE MINISTRE DE LA SANTÉ

T-2005-01

LES RÉALISATIONS DE L'INVENTION POUR LAQUELLE UN DROIT DE PROPRIÉTÉ OU PRIVILÈGE EXCLUSIF EST REVENDIQUÉ SONT DÉCRITES AINSI :

1.                                                                      Une préparation pharmaceutique pour administration orale comprenant: a) un noyau renfermant une quantité efficace d'une substance choisie dans le groupe constitué par l'oméprazole et un réactif alcalin, un sel alcalin d'oméprazole et un réactif alcalin, et enfin un sel alcalin d'oméprazole seul; b) un sous-enrobage inerte pouvant se dissoudre ou se désintégrer rapidement dans l'eau, qui est appliqué sur le noyau et renferme une ou plusieurs couches des substances choisies parmi les excipients de comprimés et les polymères filmogènes; et c) une couche externe appliquée sur le sous-enrobage et constituant un enrobage gastrorésistant et entérosoluble.

2.                                                                      Une préparation conforme à la revendication 1, dans laquelle le sous-enrobage comprend une ou plusieurs des substances suivantes : l'oxyde de magnésium, l'hydroxyde de magnésium et un composé [Al2O3.6MgO.CO2.12H2O ou MgO.Al2O3.2SiO2.nH2O], où n n'est pas un entier et inférieur à 2.

3.                                                                      Une préparation conforme à la revendication 1, dans laquelle le sous-enrobage comporte deux ou plusieurs sous-couches.

4.                                                                      Une préparation conforme à la revendication 3, dans laquelle le sous-enrobage comprend de l'hydroxypropylméthyl cellulose, de l'hydroxypropyl cellulose ou de la polyvinylpyrrolidone.

5.                                                                      Une préparation conforme à la revendication 1, dans laquelle le noyau alcalin comprend de l'oméprazole et un composé alcalin tampon de pH donnant au micro-environnement de l'oméprazole un pH de 7 à 12.

6.                                                                      Une préparation conforme à la revendication 5, dans laquelle le composé alcalin comprend une ou plusieurs des substances suivantes : l'oxyde, l'hydroxyde ou le carbonate de magnésium, l'hydroxyde d'aluminium, le carbonate, le phosphate ou le citrate d'aluminium, de calcium, de sodium ou de potassium, et le composé d'aluminium et de magnésium Al2O3.6MgO.CO2.12H2O ou MgO.Al2O3.2SiO2.nH2O, où n n'est pas un entier et inférieur à 2.

7.                                                                      Une préparation conforme à la revendication 1, dans laquelle le noyau alcalin comprend un sel alcalin d'oméprazole.

8.                                                                      Une préparation conforme à la revendication 7, dans laquelle le sel alcalin d'oméprazole est le sel de sodium, de potassium, de magnésium, de calcium ou d'ammonium.


9.                                                                      Une préparation conforme à la revendication 7, dans laquelle le noyau alcalin comprend un sel alcalin d'oméprazole mélangé à un composé alcalin inerte.

10.                                                                     Une préparation conforme à la revendication 8, dans laquelle le noyau alcalin comprend un sel alcalin d'oméprazole mélangé à un composé alcalin inerte.

11.                                                                     Une préparation conforme à la revendication 1, dans laquelle l'enrobage gastrorésistant et entérosoluble comprend du phthalate d'hydroxypropyl méthylcellulose, de l'acétate phthalate de cellulose, de l'acide méthacrylique/ester méthylique d'acide méthacrylique copolymérisés ou de l'acétate phthalate de polyvinyle.

12.                                                                     Une préparation conforme à la revendication 11, dans laquelle l'enrobage gastrorésistant et entérosoluble contient également un plastifiant.

13.                                                                     Une préparation conforme à la revendication 1, dans laquelle la teneur en eau de la forme posologique définitive contenant l'oméprazole n'excède pas 1,5 % en poids.

14.                                                                     Une préparation conforme à la revendication 1, dans laquelle le sous-enrobage contient en outre un composé alcalin tampon.

15.                                                                     Une préparation conforme à la revendication 1, dans laquelle le noyau contient de l'oméprazole et de l'hydrogénophosphate de disodium, et le sous-enrobage contient de l'hydroxypropyl méthylcellulose.

16.                                                                     Une préparation conforme à la revendication 1, dans laquelle le noyau alcalin comprend de l'oméprazole et de l'hydroxyde de magnésium, le sous-enrobage comprend une couche contenant de l'hydroxypropyl cellulose et de l'hydrotalcite synthétique, et la couche externe comprend de l'hydroxypropyl cellulose.

17.                                                                     Un procédé de fabrication d'une préparation pharmaceutique orale contenant de l'oméprazole, qui consiste à appliquer sur un noyau comprenant une quantité efficace d'une substance choisie dans le groupe constitué par l'oméprazole et un réactif alcalin, un sel alcalin d'oméprazole et un réactif alcalin, et un sel alcalin d'oméprazole seul, un sous-enrobage inerte qui se dissout ou se désintègre rapidement dans l'eau et comporte une ou plusieurs couches de substances choisies parmi les excipients de comprimés et les polymères filmogènes, et à appliquer sur ledit sous-enrobage d'une couche externe qui constitue un enrobage gastrorésistrant et entérosoluble.

18.                                                                     Un emballage commercial contenant comme ingrédient pharmaceutique actif une préparation conforme à l'une ou l'autre des revendications 1 à 16 ainsi que des instructions concernant l'usage de celle-ci pour le traitement de maladies gastro-intestinales.

19.                                                                     L'usage de la préparation conforme à l'une ou l'autre des revendications 1 à 16 pour le traitement de maladies gastro-intestinales.


ANNEXE C

aux motifs de l'ordonnance rendue le 22 décembre 2003

[motifs confidentiels rendus le 11 décembre 2003]

par Madame la juge Carolyn Layden-Stevenson

dans l'affaire

AB HASSLE, ASTRAZENECA AB

et ASTRAZENECA CANADA INC.

c.

GENPHARM INC., TAKEDA CHEMICAL INDUSTRIES, LTD.

et LE MINISTRE DE LA SANTÉ

T-2005-01

*1.                                                          « Development of an oral formulation of omeprazole » . Pilbrant and Cederberg. Scandinavian Journal of Gastroenterology, Vol 20 supplement 108, pp. 113-120 (1985).

*2.                                                          « Enteric Coating on Tablets containing Alkaline Matter » . Technical Information Sheet No. H17, March 1975, Shin-Etsu Chemical Col. Ltd. Bulletin technique.

*3.                                                          « Stability of Methyl-dopa Tablet Coated with Pharmacoat 606". Technical Information Sheet No P-30, April 1980, Shin-Etsu Chemical Co., Ltd. Bulletin technique.

4.                                                            « Enteric Coating Alkaline Drug » Aquateric Case History 2, 1986, FMC Corporation.

5.                                                            « Practical Course in Lacquer Coating » , Lehman et al., January 1983, Rohm Pharma GMBH.

**6.                                                        « Practical Course in Lacquer Coating » , Lehman et al., April 1986, Rohm Pharma GMBH.

7.                                                            GB760403 intitulé « Improvements in or relating to enteric coatings » .

8.                                                            US 2,540,979 intitulé « Enteric Coating » (Clymer et MacDonnell).

**9.                                                        « Chemical Stability of Pharmaceuticals » , Connors et al., 2nd ed., John Wiley & Sons, New York, 1986, chapitres 3 et 6.

Il convient de signaler que, même s'il date de 1986, ce document constitue une recension de publications antérieures et fait le point sur l'état de la technique en 1986.

*10.                                                        « Pharmaceutics of solids and solid dosage forms » , Cartensen, John Wiley & Sons, New York, 1997, chapitres 6 et 7.

**11.                                                       « Aqueous Polymeric Coatings for Pharmaceutical Dosage Forms » , McGinity (ed), Drugs and the Pharmaceutical Sciences, volume 36, 1989, chapitres 1, 2, 3, 4, 5, 6 et 8.

Bien qu'il ait été publié en 1986, cet ouvrage constitue une recension de publications et d'enseignements dans ce domaine jusqu'à cette date.


**12.                                                       « The Theory and Practice of Industrial Pharmacy » , Lachman, L; Lieberman, H.A; Kanig, J.L; Lea & Febiger, Philadelphia, 1986, chapitres 8, 11, 12, 13 et 26.

*13.                                                        « Modern Pharmaceutics » , Banker G.S., Rhodes C.T., Marcel Dekker Inc., 1979, chapitres 6 et 10.


ANNEXE D

aux motifs de l'ordonnance rendue le 22 décembre 2003

[motifs confidentiels rendus le 11 décembre 2003]

par Madame la juge Carolyn Layden-Stevenson

dans l'affaire

AB HASSLE, ASTRAZENECA AB

et ASTRAZENECA CANADA INC.

c.

GENPHARM INC., TAKEDA CHEMICAL INDUSTRIES, LTD.

et LE MINISTRE DE LA SANTÉ

T-2005-01

BREVET CANADIEN NO 1,388,377 (377)

Les réalisations de l'invention pour laquelle un droit de propriété ou privilège exclusif est revendiqué sont décrites ainsi :

1.                                                                      Une composition pharmaceutique stabilisée pour l'inhibition de la sécrétion d'acide gastrique, comprenant :

une quantité efficace d'un dérivé de 2-[(2-pyridyl)-méthylsulfiny] benzimidazole choisi dans le groupe constitué par le 2-[(3-méthyl-4-(2,2,2-trifluoroéthoxy)-2-pyridyl)-méthylsulfinyl] benzimidazole et le 5-méthoxy-2-[[(4-méthoxy-3,5-diméthyl-2-pyridyl)-méthyl]sulfinyl] benzimidazole, ou d'un sel pharmaceutiquement acceptable de celui-ci;

un sel inorganique basique stabilisant, choisi dans le groupe constitué par les sels de potassium, de sodium et d'aluminium, en quantité efficace pour stabiliser la composition;

un enrobage gastrorésistant et entérosoluble pour la composition.

2.                                                                      Une composition conforme à la revendication 1, dans laquelle le sel inorganique basique stabilisant est un sel inorganique basique de potassium efficace pour stabiliser la composition.

3.                                                                      Une composition conforme à la revendication 2, dans laquelle le sel inorganique basique de potassium est du carbonate de potassium.

4.                                                                      Une composition conforme à la revendication 1, dans laquelle le sel inorganique basique stabilisant est un sel inorganique basique de sodium efficace pour stabiliser la composition.

5.                                                                      Une composition conforme à la revendication 4, dans laquelle le sel inorganique basique de sodium est choisi parmi le groupe constitué par le carbonate de sodium et le bicarbonate de sodium.

6.                                                                      Une composition conforme à l'une ou l'autre des revendications 1 à 5, dans laquelle la quantité de sel inorganique basique stabilisant est de 0,3 à 20 parties en poids par partie du composé 2-[(2-pyridyl)-méthysulfinyl] benzimidazole ou de son sel pharmaceutiquement acceptable.

7.                                                                      Une composition conforme à la revendication 4, qui comprend en outre un excipient pharmaceutiquement acceptable.


8.                                                                      Une composition conforme à la revendication 7, qui comprend, comme excipient, au moins un élément choisi dans le groupe constitué par un véhicule, un agent liant, un agent désintégrant, un surfactant, un antioxydant et un lubrifiant.

9.                                                                      Une composition conforme à l'une ou l'autre des revendications 1 à 5, qui comprend une multitude de granules à enrobage gastrorésistant et entérosoluble, contenant chacun le composé 2-[(2-pyridyl)-méthylsulfinyl] benzimidazole ou son sel pharmaceutiquement acceptable et le sel inorganique basique stabilisant.

10.                                                                     Une composition conforme à l'une ou l'autre des revendications 1 à 5, dont la teneur en eau est de 1 à 40 %, mesurée sous forme d'humidité relative d'équilibre.


ANNEXE E

aux motifs de l'ordonnance rendue le 22 décembre 2003

[motifs confidentiels rendus le 11 décembre 2003]

par Madame la juge Carolyn Layden-Stevenson

dans l'affaire

AB HASSLE, ASTRAZENECA AB

et ASTRAZENECA CANADA INC.

c.

GENPHARM INC., TAKEDA CHEMICAL INDUSTRIES, LTD.

et LE MINISTRE DE LA SANTÉ

T-2005-01

Antériorités citées à l'égard du brevet 377

« The Theory and Practice of Industrial Pharmacy » , Lachman L., Liberman H.A., Kanig J.L., Leas & Febiger, Philadelphia, 1986.

« Chemical Stability of Pharmaceuticals » , Connors et al., 2nd ed., John Wiley & Sons, New York, 1986.

« Pharmaceutical Pelletization Technology » , Ghebre-Sellasie ed., Marcel Dekker Inc., New York & Basel, 1989.

« Bentley's Textbook of Pharmaceutics » , Rawlins E.A. ed. (8th ed.), Balliere Tindall, London, 1977.

Shin-Etsu, bulletin technique P30.

Brevet américain 4,666,919 (Ueno).

Demande de brevet européen 124,495 (Brandstrom) publiée en mars 1983.

Demande de brevet européen 064,283 (Joel) publiée le 10 novembre 1982.

Pilbrant and C. Cederberg, Scandinavian Journal of Gastroenterology, Vol. 20 supplement 108, pp. 113-120, 1985.

Brevet canadien 1,327,010 (appartenant à Takeda).


ANNEXE F

aux motifs de l'ordonnance rendue le 22 décembre 2003

[motifs confidentiels rendus le 11 décembre 2003]

par Madame la juge Carolyn Layden-Stevenson

dans l'affaire

AB HASSLE, ASTRAZENECA AB

et ASTRAZENECA CANADA INC.

c.

GENPHARM INC., TAKEDA CHEMICAL INDUSTRIES, LTD.

et LE MINISTRE DE LA SANTÉ

T-2005-01

BREVET CANADIEN NO 2,025,668 (668)

Les réalisations de l'invention pour laquelle un droit de propriété ou privilège exclusif est revendiqué sont décrites ainsi :

1.                                                                      Un usage du 5-méthoxy-2-[[(4-méthoxy-3,5-diméthyl-2-pyridinyl)méthy]sulfinyl]-1 H-benzimidazole ou d'un de ses sels pharmaceutiquement acceptables pour la fabrication d'un médicament destiné au traitement des infections à Campylobacter.

2.                                                                      Un usage du 5-méthoxy-2-[[(4-méthoxy-3,5-diméthyl-2-pyridinyl)méthyl]sulfinyl]-1 H-benzimidazole ou d'un de ses sels pharmaceutiquement acceptables pour le traitement des infections à Campylobacter.

3.                                                                      Une préparation pharmaceutique destinée à être utilisée pour le traitement des infections à Campylobacter, dans laquelle l'ingrédient actif est le 5-méthoxy-2-[[(4-méthoxy-3,5-diméthyl-2-pyridinyl)méthyl]sulfinyl]-1 H-benzimidazole ou un de ses sels pharmaceutiquement acceptables.


ANNEXE G

aux motifs de l'ordonnance rendue le 22 décembre 2003

[motifs confidentiels rendus le 11 décembre 2003]

par Madame la juge Carolyn Layden-Stevenson

dans l'affaire

AB HASSLE, ASTRAZENECA AB

et ASTRAZENECA CANADA INC.

c.

GENPHARM INC., TAKEDA CHEMICAL INDUSTRIES, LTD.

et LE MINISTRE DE LA SANTÉ

T-2005-01

BREVET CANADIEN NO 2,133,762

REVENDICATIONS

1.                                                                      Une composition pharmaceutique pour le traitement de la gastrite et de l'ulcère gastroduodénal, contenant une quantité thérapeutiquement efficace d'un inhibiteur des récepteurs H2 de l'histamine qui élève le pH intragastrique ou d'un inhibiteur de la pompe à protons qui élève le pH intragastrique, et une quantité thérapeutiquement efficace d'un antibactérien dégradable en milieu acide.

2.                                                                      Une composition conforme à la revendication 1, contenant un inhibiteur de la pompe à protons.

3.                                                                      Une composition conforme à la revendication 2, dans laquelle l'inhibiteur de la pompe à protons est l'oméprazole ou un sel pharmaceutiquement acceptable d'oméprazole.

4.                                                                      Une composition conforme à la revendication 2, dans laquelle l'inhibiteur de la pompe à protons est le lansoprazole ou un sel pharmaceutiquement acceptable de lansoprazole.

5.                                                                      Une composition conforme à l'une ou l'autre des revendications 1 à 4, dans laquelle l'antibactérien dégradable en milieu acide est un antibiotique de base faible.

6.                                                                      Une composition conforme à l'une ou l'autre des revendications 1 à 4, dans laquelle l'antibactérien dégradable en milieu acide est une pénicilline.

7.                                                                      Une composition conforme à l'une ou l'autre des revendications 1 à 4, dans laquelle l'antibactérien dégradable en milieu acide est un macrolide.

8.                                                                      Une composition conforme à la revendication 6, dans laquelle la pénicilline est une benzyl-pénicilline.

9.          Une composition conforme à la revendication 7, dans laquelle le macrolide est une érythromycine.

10.         Une composition conforme à la revendication 7, dans laquelle le macrolide est la clarithromycine.


11.         Une composition pharmaceutique orale pour le traitement de la gastrite et de l'ulcère gastroduodénal causés par Helicobacter pylori, comprenant comme ingrédients actifs :

a)          une quantité thérapeutiquement efficace d'un inhibiteur des récepteurs H2 de l'histamine ayant pour effet d'inhiber la sécrétion d'acide gastrique et donc d'élever le pH intragastrique; ou une quantité thérapeutiquement efficace d'un inhibiteur de la pompe à protons qui élève le pH intragastrique;

b)          une quantité thérapeutiquement efficace d'un antibactérien dégradable en milieu acide.

12.         Une composition conforme à la revendication 11, contenant un inhibiteur de la pompe à protons.

13.         Une composition conforme à la revendication 12, dans laquelle l'inhibiteur de la pompe à protons est l'oméprazole ou un sel pharmaceutiquement acceptable d'oméprazole.

14.         Une composition conforme à la revendication 12, dans laquelle l'inhibiteur de la pompe à protons est le lansoprazole ou un sel pharmaceutiquement acceptable de lansoprazole.

15.         Une composition conforme à l'une ou l'autre des revendications 11 à 14, dans laquelle l'antibactérien dégradable en milieu acide est un antibiotique de base faible.

16.         Une composition conforme à l'une ou l'autre des revendications 11 à 14, dans laquelle l'antibactérien dégradable en milieu acide est une pénicilline.

17.         Une composition conforme à l'une ou l'autre des revendications 11 à 14, dans laquelle l'antibactérien dégradable en milieu acide est un macrolide.

18.         Une composition conforme à la revendication 16, dans laquelle l'antibactérien dégradable en milieu acide est une benzyl-pénicilline.

19.         Une composition conforme à la revendication 17, dans laquelle l'antibactérien dégradable en milieu acide est une érythromycine.

20.         Une composition conforme à la revendication 17, dans laquelle l'antibactérien dégradable en milieu acide est la clarithromycine.

21.         Une association médicamenteuse synergique contenant environ 1 à 200 mg d'un inhibiteur des récepteurs H2 de l'histamine et environ 250 mg à 10 g d'un antibactérien dégradable en milieu acide, pour le traitement de la gastrite et de l'ulcère gastroduodénal.

22.         Une association conforme à la revendication 21, dans laquelle l'antibactérien dégradable en milieu acide est un antibiotique de base faible.

23.         Une association conforme à la revendication 21, dans laquelle l'antibactérien dégradable en milieu acide est un macrolide.

24.         Une association conforme à la revendication 21, dans laquelle l'antibactérien dégradable en milieu acide est une érythromycine.


25.         Une association conforme à la revendication 21, dans laquelle l'antibactérien dégradable en milieu acide est la clarithromycine.

26.         Une association conforme à la revendication 21, dans laquelle l'antibactérien dégradable en milieu acide est une pénicilline.

27.         Une association conforme à la revendication 21, dans laquelle l'antibactérien dégradable en milieu acide est une benzyl-pénicilline.

28.         Une association médicamenteuse synergique contenant une quantité thérapeutiquement acceptable d'un inhibiteur des récepteurs H2 de l'histamine et une quantité thérapeutiquement acceptable d'un antibactérien dégradable en milieu acide, pour le traitement de la gastrite et de l'ulcère gastroduodénal par voie orale.

29.         Une association conforme à la revendication 28, dans laquelle l'antibactérien dégradable en milieu acide est un antibiotique de base faible.

30.         Une association conforme à la revendication 28, dans laquelle l'antibactérien dégradable en milieu acide est un macrolide.

31.         Une association conforme à la revendication 28, dans laquelle l'antibactérien dégradable en milieu acide est une érythromycine.

32.         Une association conforme à la revendication 28, dans laquelle l'antibactérien dégradable en milieu acide est la clarithromycine.

33.         Une association conforme à la revendication 28, dans laquelle l'antibactérien dégradable en milieu acide est une pénicilline.

34.         Une association conforme à la revendication 28, dans laquelle l'antibactérien dégradable en milieu acide est une benzyl-pénicilline.

35.         Un usage d'un inhibiteur des récepteurs H2 de l'histamine, qui inhibe la sécrétion d'acide gastrique, et d'un antibactérien dégradable en milieu acide, pour le traitement de la gastrite et de l'ulcère gastroduodénal causés par Helicobacter pylori.

36.         Un usage conforme à la revendication 35, dans lequel l'antibactérien dégradable en milieu acide est un antibiotique de base faible.

37.         Un usage conforme à la revendication 35, dans lequel l'antibactérien dégradable en milieu acide est un macrolide.

38.         Un usage conforme à la revendication 35, dans lequel l'antibactérien dégradable en milieu acide est une érythromycine.

39.         Un usage conforme à la revendication 35, dans lequel l'antibactérien dégradable en milieu acide est la clarithromycine.


40.         Un usage conforme à la revendication 35, dans lequel l'antibactérien dégradable en milieu acide est une pénicilline.

41.         Une association médicamenteuse synergique contenant une quantité thérapeutique d'environ 1 à 200 mg d'un inhibiteur de la pompe à protons qui élève le pH intragastrique, et une quantité thérapeutique d'environ 250 mg à 10 g d'un antibactérien dégradable en milieu acide, pour le traitement de la gastrite et de l'ulcère gastroduodénal.

42.         Une association médicamenteuse synergique conforme à la revendication 41, dans laquelle l'antibactérien dégradable en milieu acide est un antibiotique de base faible.

43.         Une association médicamenteuse synergique conforme à la revendication 41, dans laquelle l'antibactérien dégradable en milieu acide est une pénicilline.

44.         Une association médicamenteuse synergique conforme à la revendication 41, dans laquelle l'antibactérien dégradable en milieu acide est un macrolide.

45.         Une association médicamenteuse synergique conforme à la revendication 44, dans laquelle le macrolide est l'érythromycine.

46.         Une association médicamenteuse synergique conforme à la revendication 44, dans laquelle le macrolide est la clarithromycine.

47.         Une association médicamenteuse synergique contenant une quantité thérapeutique d'oméprazole ou d'un sel pharmaceutiquement acceptable d'oméprazole et une quantité thérapeutique d'un antibiotique de base faible, pour le traitement de la gastrite et de l'ulcère gastroduodénal.

48.         Une association médicamenteuse synergique contenant une quantité thérapeutique d'oméprazole ou d'un sel pharmaceutiquement acceptable d'oméprazole et une quantité thérapeutique d'érythromycine, pour le traitement de la gastrite et de l'ulcère gastroduodénal.

49.         Une association médicamenteuse synergique contenant une quantité thérapeutique d'oméprazole ou d'un sel pharmaceutiquement acceptable d'oméprazole et une quantité thérapeutique d'une pénicilline dégradable en milieu acide, pour le traitement de la gastrite et de l'ulcère gastroduodénal.

50.         Une association médicamenteuse synergique contenant une quantité thérapeutique d'oméprazole ou d'un sel pharmaceutiquement acceptable d'oméprazole et une quantité thérapeutique de benzyl-pénicilline, pour le traitement de la gastrite et de l'ulcère gastroduodénal.

51.         Une association médicamenteuse synergique contenant une quantité thérapeutique d'oméprazole ou d'un sel pharmaceutiquement acceptable d'oméprazole et une quantité thérapeutique de clarithromycine, pour le traitement de la gastrite et de l'ulcère gastroduodénal.

52.         Une association médicamenteuse synergique contenant une quantité thérapeutique de lansoprazole ou d'un sel pharmaceutiquement acceptable de lansoprazole et une quantité thérapeutique d'un antibiotique de base faible, pour le traitement de la gastrite et de l'ulcère gastroduodénal.


53          Une association médicamenteuse synergique contenant une quantité thérapeutique de lansoprazole ou d'un sel pharmaceutiquement acceptable de lansoprazole et une quantité thérapeutique d'érythromycine, pour le traitement de la gastrite et de l'ulcère gastroduodénal.

54.         Une association médicamenteuse synergique contenant une quantité thérapeutique de lansoprazole ou un d'sel pharmaceutiquement acceptable de lansoprazole et une quantité thérapeutique de clarithromycine, pour le traitement de la gastrite et de l'ulcère gastroduodénal.

55.         Une association médicamenteuse synergique contenant une quantité thérapeutique de lansoprazole ou d'un sel pharmaceutiquement acceptable de lansoprazole et une quantité thérapeutique de pénicilline, pour le traitement de la gastrite et de l'ulcère gastroduodénal.

56.         Une association médicamenteuse synergique contenant environ 1 à 200 mg d'oméprazole ou d'un sel pharmaceutiquement acceptable d'oméprazole et environ 250 mg à 10 g d'un antibiotique de base faible, pour le traitement de la gastrite et de l'ulcère gastroduodénal.

57.         Une association médicamenteuse synergique contenant environ 1 à 200 mg d'oméprazole ou d'un sel pharmaceutiquement acceptable d'oméprazole et environ 250 mg à 10 g de clarithromycine, pour le traitement de la gastrite et de l'ulcère gastroduodénal.

58.         Un usage d'un inhibiteur de la pompe à protons, qui inhibe la sécrétion d'acide gastrique, et d'un antibactérien dégradable en milieu acide, pour le traitement de la gastrite et de l'ulcère gastroduodénal causés par Helicobacter pylori.

59.         Un usage conforme à la revendication 58, dans lequel l'antibactérien dégradable en milieu acide est un antibiotique de base faible.

60.         Un usage conforme à la revendication 58, dans lequel l'antibactérien dégradable en milieu acide est une pénicilline l'antibactérien dégradable en milieu acide est un antibiotique de base faible.

61.         Un usage conforme à la revendication 58, dans lequel l'antibactérien dégradable en milieu acide est un macrolide

62.         Un usage conforme à la revendication 58, dans lequel le macrolide est l'érythromycine.

63.         Un usage conforme à la revendication 58, dans lequel le macrolide est la clarithromycine.

64.         Un usage conforme à l'une ou l'autre des revendications 58 à 63, dans lequel l'inhibiteur de la pompe à protons est l'oméprazole ou un sel pharmaceutiquement acceptable d'oméprazole.

65.         Un usage conforme à l'une ou l'autre des revendications 58 à 63, dans lequel l'inhibiteur de la pompe à protons est le lansoprazole ou un sel pharmaceutiquement acceptable de lansoprazole.

66.         Un usage d'environ 1 à 200 mg d'oméprazole ou d'un sel pharmaceutiquement acceptable d'oméprazole et d'environ 250 mg à 10 g d'un antibiotique de base faible, pour le traitement de la gastrite et de l'ulcère gastroduodénal.


67.         Un usage d'environ 1 à 200 mg d'oméprazole ou d'un sel pharmaceutiquement acceptable d'oméprazole et d'environ 250 mg à 10 g de clarithromycine, pour le traitement de la gastrite et de l'ulcère gastroduodénal.

68.         Un usage d'un inhibiteur des récepteurs H2 de l'histamine ou d'un inhibiteur de la pompe à protons, pour accroître la biodisponibilité d'un antibactérien dégradable en milieu acide.

69.         Un usage conforme à la revendication 68 de l'oméprazole ou d'un sel pharmaceutiquement acceptable d'oméprazole.

70.         Un usage conforme à la revendication 68 du lansoprazole ou d'un sel pharmaceutiquement acceptable de lansoprazole.

71.         Un usage conforme à la revendication 68, 69 ou 70, pour accroître la biodisponibilité d'un antibiotique de base faible.

72.         Un usage conforme à la revendication 68, 69 ou 70, pour accroître la biodisponibilité d'un macrolide.

73.         Un usage conforme à la revendication 68, 69 ou 70, pour accroître la biodisponibilité d'une pénicilline.

74.         Un usage conforme à la revendication 68, 69 ou 70, pour accroître la biodisponibilité de la benzyl-pénicilline.

75.         Un usage conforme à la revendication 68, 69 ou 70, pour accroître la biodisponibilité de l'érythromycine.

76.         Un usage conforme à la revendication 68, 69 ou 70, pour accroître la biodisponibilité de la clarithromycine.

77.         Un usage de l'oméprazole pour accroître la biodisponibilité de l'érythromycine.



[1]            Les documents de Connors et Ghebre-Sellasie sont postérieurs à la date de priorité et je n'en tiens donc pas compte.


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