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Date : 20020912

Dossier : T-1842-00

Ottawa (Ontario), jeudi le 12 septembre 2002

EN PRÉSENCE DE MONSIEUR LE JUGE GIBSON

ENTRE :

THERESIA WINKLER, à titre personnel et

en tant qu'exécutrice testamentaire de la

succession du défunt Thomas P. Kelley

                                                                                                                                            Applicant

                                                                             et

                                    SAMUEL ROY, Aztec Investments Limited, Elane

                                   Holdings Limited and Falwyn Developments Limited

                          faisant affaires sous la raison sociale Samuel Roy Enterprises,

                         Saroy Film Productions of Canada Limited et Firefly Books Ltd.

                                                      et Adperbrascan Corporation

                                                                                                                                      Respondents

                                                                ORDONNANCE

VU la demande par laquelle Theresia Winkler, en application de diverses dispositions de la Loi sur le droit d'auteur et de la partie V des Règles de la Cour fédérale (1998), réclame les mesures de réparation suivantes :

1.             une déclaration portant que Theresia Winkler est la titulaire du droit d'auteur sur les livres The Black Donnellys et Vengeance of the Black Donnellys du défunt auteur Thomas P. Kelley, publiés respectivement pour la première fois au Canada en avril 1954 et en novembre 1962 (les livres), et qu ce titre elle a droit aux revenus découlant de leur vente;


2.             une déclaration selon laquelle l'enregistrement du droit d'auteur, effectué le 15 octobre 1974 en faveur de Pagurian Press Limited et portant le numéro 254758, est nul et doit en conséquence être radié;

3.             une déclaration établissant que les défendeurs ont violé le droit d'auteur de la demanderesse sur les livres;

4.             des dommages-intérêts pour violation du droit d'auteur;

5.             les profits résultant de la violation du droit d'auteur de la demanderesse qui n'ont pas été pris en compte pour la fixation des dommages-intérêts;

6.             les dommages-intérêts préétablis que la demanderesse peut choisir de recouvrer, avant le jugement définitif, au lieu des dommages-intérêts et des profits;;

7.             une injonction interdisant aux défendeurs, à leurs dirigeants, administrateurs, préposés, agents ou mandataires de violer le droit d'auteur de la demanderesse;

8.             l'attribution des dépens de la demande sur une base avocat-client;

9.             toute autre réparation que la Cour estime appropriée.

lesquelles demandes de réparation ont fait l'objet de modifications substantielles, formulées dans un exposé des faits et du droit déposé par la demanderesse le 15 juillet 2002 et confirmées par son avocat lors de l'audition de la demande, le 6 août 2002;

Et attendu que la défenderesse Firefly Books Ltd. (Firefly) demande pour sa part :

[Traduction ]

a)             que le recours institué contre Firefly en l'espèce soit rejeté avec dépens sur une base avocat-client;

b)             que la Cour ordonne que Firefly soit indemnisée intégralement ou, subsidiairement, que chacun des défendeurs, à l'exception de Edperbrascan Corporation, contribue au paiement de ses frais d'instance et de toute somme qu'elle pourrait être requise de verser à la demanderesse soit pour avoir publié les livres en vertu d'une licence accordée par Saroy Film Productions, soit pour avoir effectué le paiement de redevances à l'un ou à l'autre des co-défendeurs conformément aux termes du contrat de licence.


            LA COUR ORDONNE :

1)         L'enregistrement du droit d'auteur portant le numéro 254758, effectué le 15 octobre 1974 au nom de Pagurian Press Limited, est nul. Le registre des droits d'auteur est dès maintenant rectifié par la radiation de cet enregistrement;

2)         En ce qui concerne les droits de la demanderesse et des défendeurs, Saroy Films Productions of Canada Limited est la titulaire par cession du droit d'auteur sur les livres du défunt Thomas P. Kelley The Black Donnellys et Vengeance of the Black;

3)         Donnellys, publiés respectivement pour la première fois au Canada en avril 1954 et en novembre 1962, sauf pour ce qui est de la réversibilité du droit d'auteur prévue au paragraphe 14(1) de la Loi sur le droit d'auteur, réversibilité qui prendra effet le 14 février 2007 et subsistera jusqu l'expiration du droit d'auteur sur ces livres, et qui est dévolue à Theresia Winkler à titre d'exécutrice testamentaire de la succession du défunt auteur Thomas P. Kelley.;

4)         Sous réserve de ce qui précède et des dispositions qui suivent relativement aux dépens, la demande de Theresia Winkler est rejetée à lgard de tous les défendeurs.;


5)         Sous réserve de ce qui précède et des dispositions qui suivent relativement aux dépens, les réparations demandées par Firefly sont rejetées;

6)         La demanderesse a droit au paiement de ses dépens par Samuel Roy, Aztec Investments Limited, Elane Holdings Limited et Falwyn Developments Limited faisant affaires sous la raison sociale Samuel Roy Enterprises, et Saroy Film Productions of Canada Limited ( « les défendeurs Roy » ).

7)         Firefly a droit à la taxation de ses dépens contre les défendeurs Roy, à défaut d'entente à ce sujet, en fonction de l'extrémité supérieure de la colonne V du Tarif B prévu aux Règles de la Cour fédérale (1998). .

8)          Aucuns dépens ne sont adjugés en ce qui a trait àEdperbrascan Corporation.

____________________________

      J.C.F.C.   

Traduction certifiée conforme

Ghislaine Poitras, LL.L.


Date : 20020912

Dossier : T-1842-00

Référence neutre : 2002 CFPI 950

ENTRE :

                   THERESIA WINKLER, à titre personnel

         et en tant qu'exécutrice testamentaire de la succession

                               du défunt Thomas P. Kelley

                                                                                    demanderesse

                                                     et

            SAMUEL ROY, Aztec Investments Limited, Elane

            Holdings Limited et Falwyn Developments Limited

faisant affaires sous la raison sociale Samuel Roy Enterprises,

                 Saroy Film Productions of Canada Limited et

              Firefly Books Ltd. et Edperbrascan Corporation

                                                                                          défendeurs

                          MOTIFS DE L'ORDONNANCE

LE JUGE GIBSON:

INTRODUCTION


[1]                Les présents motifs découlent d'une demande présentée en application de diverses dispositions de la Loi sur le droit d'auteur[1] et de la partie V des Règles de la Cour fédérale (1998)[2] par laquelle la demanderesse, dans un avis de demande modifié, cherche à obtenir les mesures de réparation suivantes :

[Traduction]

1.             une déclaration portant que Theresia Winkler est la titulaire du droit d'auteur sur les livres The Black Donnellys et Vengeance of the Black Donnellys du défunt auteur Thomas P. Kelley, publiés respectivement pour la première fois au Canada en avril 1954 et en novembre 1962 (les livres), et qu ce titre Theresia Winkler a droit aux revenus découlant de leur vente;

2.             une déclaration selon laquelle l'enregistrement du droit d'auteur, effectué le 15 octobre 1974 en faveur de Pagurian Press Limited et portant le numéro 254758, est nul et doit en conséquence être radié;

3.             une déclaration établissant que les défendeurs ont violé le droit d'auteur de la demanderesse sur les livres;

4.             des dommages-intérêts pour violation du droit d'auteur;

5.             les profits résultant de la violation du droit d'auteur de la demanderesse qui n'ont pas été pris en compte pour la fixation des dommages-intérêts;

6.             les dommages-intérêts préétablis que la demanderesse peut choisir de recouvrer, avant le jugement définitif, au lieu des dommages-intérêts et des profits;

7.             une injonction interdisant aux défendeurs, à leurs dirigeants, administrateurs, préposés, agents ou mandataires de violer le droit d'auteur de la demanderesse;

8.             l'attribution des dépens de la demande sur une base avocat-client;

9.             toute autre réparation que la Cour estime appropriée.

[2]                La défenderesse Firefly Books Ltd. ( « Firefly » ) a déposé une réponse dans laquelle elle demande que :

a)             le recours institué contre Firefly en l'espèce soit rejeté avec dépens adjugés sur une base avocat-client;


b)             la Cour ordonne que Firefly soit indemnisée intégralement ou, subsidiairement, que chacun des défendeurs, à l'exception de Edperbrascan Corporation, contribue au paiement de ses frais d'instance et de toute autre somme qu'elle pourrait être requise de verser à la demanderesse soit pour avoir publié les livres en vertu d'une licence accordée par Saroy Film Productions, soit pour avoir effectué le paiement de redevances à l'un ou à l'autre des co-défendeurs conformément aux termes du contrat de licence.

[3]                Samuel Roy, Aztec Investments Limited, Elane Holdings Limited et Falwyn Developments Limited faisant affaires sous la raison sociale Samuel Roy Enterprises et Saroy Film Productions of Canada Limited (les défendeurs Roy) ont produit un affidavit utile, souscrit par Samuel Roy, auquel celui-ci a joint, quoique fort tardivement, des pièces également utiles ainsi qu'un exposédes faits et du droit très bref et à vrai dire de très peu d'utilité. Les défendeurs Roy ne réclament aucune mesure de réparation.

[4]                Edperbrascan Corporation n'a déposé aucun document et ntait pas représentée à l'audience qui s'est tenue à Toronto le 6 août 2002.


[5]                Il appert d'un exposémodifié des faits et du droit produit par la demanderesse le 15 juillet 2002 seulement que celle-ci se désiste totalement de ses demandes relatives à la violation, aux dommages-intérêts et aux profits, qu'elle renonce également àsa demande d'injonction et limite sa réclamation de dommages-intérêts préétablis et de dépens aux seuls défendeurs Roy. En revanche, sa demande de jugement déclaratoire portant qu'elle est titulaire du droit d'auteur inclut dorénavant (du moins l'exposé modifié apporte-t-il cette précision) la « réversibilité du droit d'auteur » en sa faveur ainsi qu'une demande additionnelle afin que la Cour ordonne que Firefly [TRADUCTION] « ...[lui] remette les redevances qu'elle détient » , une réparation qui découlerait logiquement d'un jugement déclarant la demanderesse titulaire du droit d'auteur, si un tel jugement était prononcé. Ces modifications de la demande ont été dans l'ensemble confirmées par les observations de l'avocat de la demanderesse, lors de l'audience.

LES PARTIES

[6]                Dans son testament, Thomas P. Kelley a désigné la demanderesse exécutrice testamentaire ou « administratrice de sa succession » . Il est décédé le 14 février 1982. Son épouse était décédée avant lui, le 1er février 1982. Mme Kelley étant décédée avant son époux et Mme Winkler, qui était la locatrice des Kelley, stant charitablement occupée de leur bien-être, la demanderesse a été l'unique bénéficiaire désignée dans le testament de M. Kelley. Ce testament a été dûment homologué.

[7]                M. Kelley a écrit plusieurs livres, parmi lesquels The Black Donnellys et Vengeance of the Black Donnellys (les livres des Donnelly), tous deux mentionnés dans la première mesure de réparation réclamée par la demanderesse dans sa demande originale. La détermination du titulaire du droit d'auteur sur les livres des Donnelly et, partant, de la personne investie du droit aux redevances qui en découlent, constitue ici la principale question en litige.


[8]                Il n'est pas contesté que Samuel Roy ait été, pendant toute la période visée en l'espèce, un homme d'affaires résidant à Toronto, en Ontario. Il est le principal actionnaire et administrateur de Saroy Film Productions of Canada Limited, une entreprise constituée en société conformément aux lois de l'Ontario et ayant son établissement principal ou siège social à Toronto. La raison sociale Samuel Roy Enterprises a, en tout temps utile, regroupé trois (3) sociétés constituées conformément aux lois ontariennes et ayant leur établissement principal à Toronto. Il s'agit des sociétés déjà mentionnées, Falwyn Developments Limited, Elane Holdings Limited et Aztec Investments Limited. M. Roy a toujours agi à titre d'administrateur et de dirigeant au sein de chacune d'elles.

[9]                Firefly Books Ltd. a été, pendant toute la période visée en l'espèce, une entreprise constituée en société conformément aux lois de l'Ontario et dont ltablissement principal est situé àWillowdale, en Ontario. Elle s'occupait, et s'occupe apparemment toujours, de la publication et de la distribution de livres.


[10]            Quant à Edperbrascan Corporation (Edperbrascan), elle est, semble-t-il, une société qui a succédé à plusieurs entreprises, parmi lesquelles Pagurian Press Limited qui, le 15 octobre 1974, a fait inscrire au registre un droit d'auteur sur l'oeuvre littéraire The Black Donnellys[3], alors déjà publiée. Selon la preuve, Pagurian Press a d'abord fait paraître The Black Donnellys en juillet 1978, puis elle a procédé à deux réimpressions du livre, en mai 1980 et en août 1982[4]. Elle a également imprimé Vengeance of The Black Donnellys, la première fois en janvier 1975 et deux autres fois encore, et elle en a publié une édition revue en septembre 1988[5]. La même preuve indique que Pagurian Corporation Limited se réclame d'un droit d'auteur [TRADUCTION] « ¼aux termes d'une entente avec Saroy Film Productions of Canada » depuis 1986 pour ce qui est du livre The Black Donnellys et depuis 1988 en ce qui concerne Vengeance of the Black Donnellys, et affirme par ailleurs que [TRADUCTION] « plus d'un million d'exemplaires » de The Black Donnellys mis en circulation par Pagurian Press Limited ont été écoulés. Les relations entre Pagurian Press Limited, Pagurian Press et Pagurian Corporation Limited n'ont pas été expliquées. J'ai supposé que ces précisions étaient sans incidence sur la décision que je dois rendre.

L'HISTORIQUE DE LA PUBLICATION DES LIVRES DES DONNELLYS

[11]            La preuve présentée en l'instance indique qu'avant sa publication par Pagurian Press Limited, The Black Donnellys avait d'abord été publié par Harlequin Books Limited en avril 1954, puis réimprimé par Harlequin quelque quatorze fois. Par la suite, Greywood Publishing Limited l'a fait paraître à son tour en juillet 1969 et l'a réimprimé quelque six fois. Enfin, avant que Pagurian Press Limited entre en jeu, Modern Canadian Library Limited a édité The Black Donnellys en janvier 1974, puis ànouveau à quatre occasions. Le livre aurait également été publié aux États-Unis et en Angleterre.


[12]            Quant à Vengeance of the Black Donnellys, Harlequin Books Limited l'a d'abord publié en novembre 1962 et l'a ensuite réimprimé quelque six fois. Greywood Publishing Limited l'a ensuite publié en juillet 1969 et l'a également réédité six fois. On ne m'a fait part d'aucun élément de preuve établissant ltendue de la distribution du livre ou donnant àentendre qu'il ait été publié à l'extérieur du Canada.

[13]            Des renseignements relevant du domaine public, qui n'ont cependant pas été versés au dossier, indiquent que la saga des Black Donnellys, qu'elle s'inspire des livres de M. Kelley ou d'une autre source, continue dtre offerte au grand public, ainsi que l'illustre le bref extrait que voici de la page 40 du magazine Maclean's publié en date du 22 avril 2002 :

[Traduction] En juin, le célèbre festival de théâtre dté de Blyth (Ontario) présente sous les étoiles la sanglante saga des Black Donnellys[6].

LE CONTEXTE


[14]            Auteur prolifique, il semble que Thomas P. Kelley ait pourtant été, du moins dans les dernières années de sa vie, quelque peu impécunieux. Par une lettre d'entente en date du 13 août 1968, il a consenti à Saroy Film Productions of Canada Limited une option permettant à cette dernière [Traduction] « ...d'acheter [de lui] le droit exclusif de publier et de porter à lcran les livres complets The Black Donnellys et Vengeance of The Black Donnellys, dont il est l'auteur, de même que tout droit connexe existant partout dans le monde¼ » [7]. Saroy Films Productions of Canada Limited a fait savoir par lettre en date du 15 octobre 1968 qu'elle exerçait son option[8]. Un accord de cession en bonne et due forme [9] est donc intervenu en contrepartie d'un paiement unique par Saroy Film Productions of Canada Limited à M. Kelley.

[15]            Deux stipulations de cet accord de cession sont déterminantes pour les fins de la décision à rendre. Voici la première :

[Traduction] PREMIÈREMENT :Par les présentes, le titulaire [Mr. Kelley] vend et cède à l'acheteur [Saroy Film Productions of Canada Limited], en toute exclusivité, tous droits relatifs à la production de films (y compris tous droits relatifs à la trame sonore, à la musique et aux dialogues) concernant les oeuvres [les livres des Donnelly] (et tous les éléments les composant, ci-dessus définis) présentement connus ou qui le deviendront ultérieurement, partout dans le monde, pour toujours. Les droits cédés comprennent notamment (sans porter atteinte à la généralité de ce qui précède):

     ...                                                                                    [non souligné dans l'original]

[16]            La deuxième stipulation importante est la suivante :

[Traduction] HUITIÈME : Aucun droit cédé dans cet accord ne continuera à appartenir ou ne sera rétrocédéau titulaire, quelle que soit lpoque à laquelle un ou plusieurs films pourraient être réalisés à partir des oeuvres et même si aucun film ntait réalisé à partir de celles-ci. L'acheteur projette de réaliser un ou plusieurs films à partir des oeuvres, mais il ne s'engage pas à le faire non plus qu'ils'engage à faire quelque usage particulier des oeuvres.

     ...                                                                                    [non souligné dans l'original]

[17]            Bien que chacune des stipulations précitées traite généralement de droits relatifs à des productions cinématographiques, il n'est pas contesté que la cession du droit d'auteur sur les livres des Donnelly que M. Kelley a consentie à Saroy Film Productions of Canada Limited est censée comprendre aussi bien les droits de publication que ceux relatifs à la production de films.


[18]            Plusieurs années après le décès de M. Kelley, la demanderessse a commencé à s'intéresser, àtitre d'exécutrice testamentaire et de bénéficiaire de la succession de celui-ci, à l'arrangement (quel qu'il ait été) intervenu entre M. Kelley et les défendeurs Roy. Ses démarches personnelles et celles de sa petite-fille pour obtenir des renseignements auprès de ces derniers se sont heurtées à un silence absolu. Samuel Roy n'a produit un court affidavit, auquel il a joint les documents constituant l'accord de cession conclu avec M. Kelley, qu'après le début de la présente instance.

[19]            En 1992, après, semble-t-il, que Pagurian Press Limited eut cessé de faire paraître les livres des Donnelly, Samuel Roy a communiqué avec le président de Firefly pour lui proposer d'en publier de nouvelles éditions. Firefly a accepté de ce faire sous contrat de licence avec Saroy Film Productions of Canada Limited, à la condition que Samuel Saroy confirme que Pagurian Press Limited renonçait à tout droit de publication concernant les livres des Donnelly. De vagues affirmations de Samuel Roy à ce sujet semblent avoir rassuré Firefly, qui a dès lors entrepris d'imprimer et de publier les livres et a versé des redevances à Saroy Film Productions of Canada Limited.


[20]            Lorsque la demanderesse a fait connaître à Firefly son intérêt dans les livres des Donnelly, celle-ci a immédiatement interrompu la distribution des livres et la remise des redevances accumulées qu'elle détenait, en attendant le règlement de tout litige. Firefly a offert son concours à la demanderesse en lui communiquant les renseignements et la documentation dont elle disposait au sujet de la publication et de la distribution, par l'entreprise, des livres des Donnelly, qu'elle effectuait manifestement en vertu d'une licence accordée par Saroy Film Productions of Canada Limited.

[21]            Le 14 mars 2000, la demanderesse a fait inscrire au registre, à titre de « titulaire » , son intérêt dans le droit d'auteur sur les livres des Donnelly.

[22]            Cette démarche a donné lieu à la présente instance.

LES DISPOSITIONS PERTINENTES DE LA LOI SUR LE DROIT D'AUTEUR

[23]            Les dispositions pertinentes de la Loi sur le droit d'auteur étant longues, elles sont reproduites en annexe..

LES QUESTIONS EN LITIGE

[24]            La demanderesse, dans son exposé modifié des faits et du droit, a énoncé les questions en litige suivantes :

            a)         la demanderesse est-elle la titulaire du droit d'auteur et du droit de réversibilité sur les livres des Donnelly?;

            b)        l'enregistrement du droit d'auteur en faveur de Pagurian doit-il être radié?


            c)         la demanderesse a-t-elle droit aux dommages-intérêts préétablis et àune ordonnance de versement des redevances non payées?

[25]            Les questions en litige que Firefly a énoncées dans son exposé modifié des faits et du droit, qui coïncident en partie avec celles formulées par la demanderesse, sont les suivantes:

            a)         la demanderesse est-elle la titulaire du droit d'auteur sur les livres des Donnelly?

            b)         la publication des livres des Donnelly par Firefly en vertu d'une licence accordée par Saroy Film Productions of Canada Limited viole-t-elle le droit d'auteur de la demanderesse sur ces livres?

            c)         la demanderesse a-t-elle droit aux redevances dues par Firefly en vertu de son contrat de licence avec Saroy Film Productions of Canada Limited pour la période débutant le 1er mai 1999, et que Firefly retient?

            d)         l'action de la demanderesse est-elle prescrite?

[26]            La seule question que les défendeurs Roy ont formulée dans leur exposé des faits et du droit est celle de savoir si l'accord intervenu entre Saroy Film Productions of Canada Limited et M. Kelley avait opéré en faveur de celle-ci la transmission du droit d'auteur sur les livres des Donnelly ou si, l'accord étant sans effet, le droit avait été transmis par testament à la demanderesse.

[27]            Comme je l'ai mentionnéprécédemment, Edperbrascan Corporation n'a déposé aucun document ni n'a comparu à l'audience. Elle n'a donc soumis aucune question àla Cour.


ANALYSE

            a)         La demande est-elle prescrite?

[28]            Le paragraphe 41(1) de la Loi sur le droit d'auteur (la Loi), reproduit en annexe, dispose que le tribunal saisi d'un recours en violation ne peut accorder de réparation que si, premièrement, une personne telle la demanderesse engage des procédures dans les trois ans qui suivent le moment où la violation a eu lieu, si elle avait connaissance de la violation au moment où elle a eu lieu ou s'il est raisonnable de s'attendre à ce qu'elle en ait eu connaissance àce moment, et si, deuxièmement, une personne telle la demanderesse engage des procédures dans les trois ans qui suivent le moment où elle a pris connaissance de la violation ou le moment où il est raisonnable de s'attendre à ce qu'elle en ait pris connaissance, si elle n'avait pas connaissance de la violation au moment où elle a eu lieu ou s'il n'est pas raisonnable de s'attendre àce qu'elle en ait eu connaissance à ce moment.

[29]            Le paragraphe 41(2) dispose que le tribunal ne peut faire jouer la prescription prévue au paragraphe 41(1) qu'en faveur de la partie qui l'a invoquée.

[30]            Les défendeurs Roy n'ont pas invoqué la prescription. Par conséquent, elle ne saurait jouer en leur faveur.

[31]            Firefly, par contre, a invoqué la prescription. L'avocat de Firefly soutient que la demanderesse avait connaissance ou aurait dû avoir connaissance dès 1993 du fait que Firefly publiait The Black Donnellys et, de la même façon, qu'elle savait ou aurait dû savoir dès 1995 qu'elle publiait Vengeance of the Black Donnellys.

[32]            Pour le compte de sa grand-mère, Coralie Ann Nott, la petite-fille de la demanderesse, s'intéresse de près à la question du droit d'auteur sur les livres des Donnelly depuis le décès de M. Kelley, c'est-à-dire depuis lge de douze ans, et elle y prête une attention encore plus grande depuis 1999; or, elle affirme n'avoir aperçu en librairie ldition des livres des Donnelly publiée par Firefly qu'en 1999 ou peu de temps auparavant. Jusqu'alors, ses efforts pour obtenir des défendeurs Roy des renseignements étayant leur revendication à un droit d'auteur sur les livres étaient restés vains.

[33]            Au mois de février 2000, Mme Nott a tout d'abord fait savoir à Firefly, par l'entremise de son avocat, quson avis Firefly publiait sans droit les livres des Donnelly. Firefly a répondu en lui fournissant une copie de la correspondance échangée avec les défendeurs Roy en vue d'autoriser Firefly à publier les livres des Donnelly. Cette correspondance, non plus, ne comportait aucun élément de preuve de fond tendant à établir que les défendeurs Roy pouvaient à bon droit accorder cette autorisation.

[34]            Le 14 mars 2000, Mme Nott, qui n'avait encore obtenu jusqu'alors aucune preuve satisfaisante du droit d'auteur des défendeurs Roy sur les livres des Donnelly, a fait inscrire sa grand-mère au registre à titre de titulaire du droit d'auteur sur ceux-ci.

[35]            La poursuite judiciaire a débuté le 4 octobre 2000 avec la production d'un avis de demande introductif d'instance.

[36]            Aucune des allégations qui précèdent, faites au nom de la demanderesse, n'a été contestée en contre-interrogatoire.

[37]            Pour ce qui est de la demande contre Firefly, je suis d'avis qu'il n'a pas été démontré que la demanderesse avait connaissance ou qu'il est raisonnable de s'attendre à ce qu'elle ait eu connaissance d'une violation du droit d'auteur sur les livres des Donnelly avant 1999. Je suis convaincu également que l'instance a étéintroduite dans les trois ans qui ont suivi le moment où la demanderesse a pris connaissance de la violation ou le moment où il était raisonnable de s'attendre à ce qu'elle en ait eu connaissance..

[38]            Bref, ni les défendeurs Roy ni Firefly ne peuvent avoir gain de cause pour motif de prescription de la demande.

b)         L'enregistrement du droit d'auteur par Pagurian

[39]            Le paragraphe 55(1) de la Loi, également reproduit en annexe, prévoit que la demande d'enregistrement d'un droit d'auteur sur une oeuvre peut être faite par l'auteur, le titulaire ou le cessionnaire du droit d'auteur, ou par le titulaire d'une licence accordant un intérêt dans ce droit, ou en leur nom.

[40]            Aux termes du paragraphe 57(4) de la Loi, la Cour peut, sur demande du registraire des droits d'auteur ou de toute personne intéressée, ordonner la rectification d'un enregistrement de droit d'auteur de diverses façons, notamment par la radiation d'une inscription qui a été faite par erreur ou qui est restée dans le registre par erreur.

[41]            Edperbrascan, en sa qualité de successeur de Pagurian Press Limited, n'a déposé aucun document ni n'a comparu à l'audience pour défendre l'enregistrement par Pagurian, en date du 15 octobre 1974, du droit d'auteur sur l'oeuvre littéraire déjà publiée The Black Donnellys.

[42]            Le paragraphe 53(2) de la Loiénonce que le certificat d'enregistrement du droit d'auteur constitue la preuve de l'existence du droit d'auteur et du fait que la personne figurant à l'enregistrement en est le titulaire. Dans l'arrêt Circle Films Enterprises Inc. c. Canadian Broadcasting Corp.[10], monsieur le juge Judson, s'exprimant au nom de la Cour, écrit, à la page 215 :

[Traduction]


Dans une affaire où il existe une preuve qui contredit le certificat [de droit d'auteur], la force probante de celui-ci peut en être affectée, mais en l'absence de toute preuve de cette nature, sa force probante ne saurait être minimisée parce qu'aucune preuve de propriété n'est requise dans la demande d'enregistrement et que le Bureau des droits d'auteur n'assume aucune responsabilité quant à la véracité des faits déclarés dans la demande et ne procède à aucun examen indépendant. Un demandeur qui présente ce certificat a produit un élément de preuve à l'appui de sa cause, et cet élément est suffisant pour inciter le tribunal des faits à agir en sa faveur en l'absence de toute preuve contradictoire.

[43]            Je suis d'avis qu'en l'espèce, il existe une preuve qui contredit le certificat d'enregistrement de Pagurian. Il n'est pas contesté que M. Kelley est bien l'auteur du livre The Black Donnellys. On peut se demander, eu égard à la preuve, si le droit d'auteur sur ce livre appartient à la demanderesse, qui l'aurait hérité du défunt M. Kelley, ou aux défendeurs Roy. En revanche, la seule preuve à l'appui du certificat d'enregistrement de Pagurian Press Limited consiste dans l'enregistrement lui-même et dans la simple affirmation qui se trouve dans les pages liminaires de ldition de The Black Donnellys publiée par Pagurian, dont copie a été déposée comme pièce jointe à l'affidavit souscrit par Juliet Fernandes le 26 octobre 2000[11].

[44]            Après avoir examinétoute la preuve, je suis convaincu qu'il existe suffisamment dléments pour réfuter la présomption dont jouit Pagurian aux termes du paragraphe 53(2) de la Loi. En conséquence, la Cour ordonne la radiation du certificat d'enregistrement établi le 15 octobre 1974 au nom de Pagurian Press Limited relativement au droit d'auteur sur le livre The Black Donnellys.

c)         Qui, de Saroy Film Productions of Canada ou de la demanderesse, est la titulaire du droit d'auteur sur les livres des Donnelly?


[45]            L'article 6 de la Loi prévoit que, sauf disposition contraire expresse de la Loi, le droit d'auteur subsiste pendant la vie de l'auteur, puis jusqula fin de la cinquantième année suivant l'année de son décès. La Loi ne prévoit aucune disposition contraire expresse en ce qui concerne les oeuvres telles les livres des Donnelly.

[46]            L'avocat de la demanderesse plaide que la cession du droit d'auteur sur les livres des Donnelly que M. Kelley a consentie à Saroy Film Productions of Canada Limited est nulle à l'encontre de la demanderesse par application des paragraphes 57(3) et 14(1) de la Loi, ou de l'un d'eux; subsidiairement, il soutient que cette cession est nulle à l'encontre de la demanderesse en ce qui a trait àla « période de réversibilité » du droit d'auteur. En l'espèce, la période de réversibilitécomprendrait le reste de la vingt-cinquième année suivant l'année du décès de l'auteur, soit 1982, et les vingt-cinq années durant lesquelles le droit d'auteur subsiste par la suite. J'examinerai séparément chacune de ces propositions.

                        i)          Le paragraphe 57(3) de la Loi : les circonstances entraînant la nullité d'un acte de cession ou d'une licence


[47]            Le paragraphe 57(3) de la Loi édicte qu'un acte de cession d'un droit d'auteur, notamment, doit être déclaré nul à l'encontre de tout cessionnaire du droit d'auteur ou titulaire d'un intérêt concédé dans ce droit qui le devient subséquemment àtitre onéreux sans avoir connaissance de l'acte de cession antérieur, àmoins que celui-ci n'ait été enregistré de la manière prévue par la Loi avant l'enregistrement de cet acte de cession ultérieur ou licence concédant un intérêt accordée ultérieurement à titre onéreux. Il s'agit donc de déterminer si, relativement à cette disposition, on peut considérer que la demanderesse est une cessionnaire du droit d'auteur ou la titulaire d'un intérêt concédé dans le droit d'auteur sur les livres des Donnelly à titre onéreux par M. Kelley, premier détenteur du droit d'auteur sur ces livres, et qu'elle n'avait pas connaissance de l'acte de cession antérieur.

[48]            Je tiens pour admis qu'au moment du décès de M. Kelley, la demanderesse n'avait aucune connaissance de la cession du droit d'auteur sur les livres des Donnelly consentie par M. Kelley àSaroy Film Productions of Canada Limited. Néanmoins, il reste à déterminer si la demanderesse, à titre d'exécutrice testamentaire et d'unique bénéficiaire désignée survivante du testament de M. Kelley, peut être considérée comme une cessionnaire àtitre onéreux du droit d'auteur ou une titulaire à titre onéreux d'un intérêt dans le droit d'auteur sur les livres des Donnelly. Énoncée simplement, la réponse, à mon avis, est « non » .


[49]            M. Kelley a fait son testament[12] sur une formule imprimée qui comporte des blancs, dont certains ont été remplis par celui-ci. Il y dispose que toutes ses [TRADUCTION] « ...dettes légitimes, frais d'obsèques et frais testamentaires seront payés par mon exécutrice testamentaire¼ » , c'est-à-dire la demanderesse. Il convient de noter qu'il ne transmet ni ne cède à la demanderesse, à titre d'exécutrice testamentaire, tous ses [TRADUCTION] « ...biens réels et biens personnels... » pour qu'elle en dispose suivant ses instructions, ni a fortiori ne lui accorde-t-il une licence dans ses biens. Après avoir donnéses instructions à la demanderesse de payer ses dettes légitimes, frais d'obsèques et frais testamentaires, le testateur énonce plutôt qu'il [TRADUCTION] « ...lègue les biens réels et les biens personnels que je posséderai à mon décès de la manière suivante, à savoir : »

À mon épouse Ethel Grace Kelley

Tous les profits découlant de mes livres et toutes sommes perçues de toute autre source, comme les productions cinématographiques, etc.

Seront payés à mon épouse.

En cas de décès de mon épouse, toute somme provenant de la vente de mes livres ou de toute autre source sera payée à [la demanderesse].

Je suis convaincu, je le répète, que le legs fait par testament à la demanderesse ne saurait être interprété comme une cession et moins encore comme une licence accordant à la demanderesse un intérêt dans le droit d'auteur que conservait M. Kelley sur les livres des Donnelly, puisque lpouse de celui-ci est décédée avant lui. Je constate, de plus, que le blanc qui suit l'introduction de la disposition relative au reliquat, dans le testament de M. Kelley, n'a pas été rempli.


[50]            En outre, même si je concluais que la demanderesse est cessionnaire ou titulaire d'une licence à titre d'exécutrice testamentaire ou de bénéficiaire du testament de M. Kelley, il reste qumon avis il ne saurait s'agir ici d'une cession ou d'une licence « à titre onéreux » . Au soutien de son argument selon lequel il s'agit bien d'une cession ou d'une licence « à titre onéreux » , l'avocat de la demanderesse invoque l'arrêt Deglman v. Guaranty Trust, et al [13]. À mon avis, l'affaire Deglman se distingue tout à fait de la présente affaire. À la page 729, monsieur le juge Cartwright, s'exprimant au nom de la majorité, écrit :

[Traduction]

L'argument dans cet appel est fondé sur le postulat qu'il existait entre le défendeur et la défunte Laura Constantineau Brunet un contrat verbal en vertu duquel le premier devait fournir à la seconde certains services en contrepartie de l'engagement de celle-ci de lui léguer la propriété sise au no 548, rue Besserer ....

Même si la demanderesse, qui était la locatrice des Kelley, s'est charitablement intéressée à leur bien-être durant les dernières années de leur vie, comme je l'ai déjà mentionné, aucun élément de preuve ne tend à établir qu'il ait jamais existé, entre la demanderesse et M. Kelley, un contrat, qu'il soit explicite, implicite, verbal ou autre, qui ait conduit M. Kelley à désigner la demanderesse comme son exécutrice testamentaire et seule bénéficiaire désignée survivante.

[51]            La demanderesse ne peut avoir gain de cause en appuyant son argumentation sur le paragraphe 57(3).

                        ii)         Le paragraphe 14(1) de la Loi : la concession d'un intérêt dans le droit d'auteur est-elle complètement inopérante?

[52]            Le paragraphe 13(4) de la Loi prévoit que le titulaire du droit d'auteur sur une oeuvre peut céder ce droit « ...pour la durée complète ou partielle de la protection » et qu'il peut également concéder par une licence un intérêt quelconque dans ce droit. Ce paragraphe précise qu'une telle cession ou concession n'est valable que si elle est rédigée par écrit et dûment signée.


[53]            Le paragraphe 14(1) de la Loi restreint manifestement la portée du paragraphe 13(4). Par souci de commodité, en voici le texte intégral :


14. (1) Lorsque l'auteur d'une oeuvre est le premier titulaire du droit d'auteur sur cette oeuvre, aucune cession du droit d'auteur ni aucune concession d'un intérêt dans ce droit, faite par lui - autrement que par testament - après le 4 juin 1921, n'a l'effet d'investir le cessionnaire ou le concessionnaire d'un droit quelconque, à l'égard du droit d'auteur sur l'oeuvre, pendant plus de vingt-cinq ans à compter de la mort de l'auteur; la réversibilité du droit d'auteur, en expectative à la fin de cette période, est dévolue, à la mort de l'auteur, nonobstant tout arrangement contraire, à ses représentants légaux comme faisant partie de ses biens; toute stipulation conclue par lui concernant la disposition d'un tel droit de réversibilité est nulle.                                  

                                                            [emphasis added]


14. (1) Where the author of a work is the first owner of the copyright therein, no assignment of the copyright and no grant of any interest therein, made by him, otherwise than by will, after June 4, 1921, is operative to vest in the assignee or grantee any rights with respect to the copyright in the work beyond the expiration of twenty-five years from the death of the author, and the reversionary interest in the copyright expectant on the termination of that period shall, on the death of the author, notwithstanding any agreement to the contrary, devolve on his legal representatives as part of the estate of the author, and any agreement entered into by the author as to the disposition of such reversionary interest is void.

                                                   [je souligne]


[54]       L'avocat de la demanderesse soutient que les mots que j'ai soulignés, dans les trois dernières lignes du paragraphe 14(1) de la Loi, signifient nécessairement qu'un contrat qui satisfait par ailleurs aux conditions énoncées au paragraphe 13(4) de la Loi est néanmoins nul àtous égards s'il opère cession du droit de réversibilité dans les circonstances décrites au paragraphe 14(1). Cette interprétation, dit-il, doit prévaloir pour deux raisons : premièrement, si on n'attribuait pas ce sens aux derniers mots du paragraphe, ils ne feraient que reproduire les mots soulignés dans la première partie de la disposition; deuxièmement, la structure grammaticale des dernières lignes ne permet aucune autre interprétation.


[55]            L'avocat de Firefly, en revanche, prétend que les paragraphes 13(4) et 14(1) de la Loi doivent s'interpréter en tenant compte l'un de l'autre et que l'interprétation que propose l'avocat de la demanderesse est totalement incompatible avec l'objectif du paragraphe 13(4) et avec les objectifs généraux de la Loi. Il invoque deux extraits de l'affaire Chappell & Co. Ltd. v. Redwood Music Ltd.[14],qui aborde une disposition équivalente au paragraphe 14(1) de la Loi dans la législation du Royaume-Uni. À la page 823, Lord Salmon y écrit :

[Traduction]

Je suis d'accord avec la Cour d'appel, selon laquelle cette disposition a été édictée dans le but de protéger les auteurs et leurs héritiers contre les conséquences que pourrait entraîner l'aliénation imprudente, de la part d'un auteur, des fruits de son talent et de son originalité.

À cette fin, la disposition prévoit que la cession d'un droit d'auteur consentie par le premier titulaire ne peut demeurer en vigueur durant plus de vingt-cinq ans suivant la mort de l'auteur; au terme de cette période, le droit d'auteur retourne à sa succession et est dévolu à ses représentants successoraux pour les vingt-cinq années qui restent.

Lord Russell of Killowen écrit pour sa part, aux pages 825 et 826 :

[Traduction]

Cette disposition légale édicte a) qu'aucune cession ou concession d'un intérêt par licence ne peut avoir pour effet de conférer au cessionnaire ou titulaire de l'intérêt concédé quelque droit ou intérêt relatif au droit d'auteur pour une période se prolongeant au-delà de la vingt-cinquième année suivant la mort de l'auteur de l'oeuvre; b) qula mort de l'auteur, la réversibilitédu droit d'auteur fait partie de sa succession et est dévolue à ses représentants successoraux pour les vingt-cinq années durant lesquelles subsistera encore le droit d'auteur; c) que toute cession du droit de réversibilitéconsentie par l'auteur est nulle. Il en résulte qu'il est impossible à l'auteur de céder son droit d'auteur, d'accorder une licence concédant un intérêt dans ce droit ou de convenir par contrat d'une telle cession ou concession de quelque façon qui empiète sur la période de vingt-cinq ans de la réversibilitédu droit d'auteur, même si ses représentants successoraux (ou un bénéficiaire qui a accepté la succession), eux, peuvent le faire en tout temps après le décès de l'auteur.


[56]            L'avocat de la demanderesse soutient qu'il n'y a pas lieu de prendre en compte les extraits précités, parce que les faits à l'origine de l'affaire Chappell diffèrent substantiellement des faits en l'espèce. Je suis d'avis que les distinctions dans les faits entre les deux affaires sont sans pertinence et que ces deux extraits sont au contraire tout-à-fait utiles à l'interprétation du paragraphe 14(1) de la Loi. Je donnerai donc au paragraphe 14(1) une interprétation compatible avec celle que fournissent les extraits précités. Je suis convaincu que l'interprétation préconisée par l'avocat de la demanderesse n'est pas en harmonie avec l'esprit général de la Loi non plus que, en particulier, avec lconomie des paragraphes 13(4) et 14(1) de la Loi, interprétés en tenant compte l'un de l'autre.

                        iii)        Le paragraphe 14(1) de la Loi : la réversibilité du droit d'auteur

[57]            Je suis convaincu que les stipulations du contrat de cession entre M. Kelley et Saroy Film Productions of Canada Limited qui sont reproduites dans ces motifs ont bien pour objet la cession du droit d'auteur, àtout le moins en ce qui concerne les productions cinématographiques, mais également, plus généralement, en ce qui concerne la réversibilitédu droit d'auteur. Dans la mesure où elles ont cet effet, ces stipulations sont nulles en ce qui a trait à la réversibilitédu droit d'auteur. Pour ce qui est de la période comprise entre le jour de la cession et le début de la période de réversibilité du droit d'auteur décrite au paragraphe 14(1), je conclus que la cession consentie par M. Kelley àSaroy Film Productions of Canada Limited est valide en vertu du paragraphe 13(4) de la Loi.


[58]            En application du paragraphe 14(1) de la Loi, la réversibilité du droit d'auteur est dévolue à la demanderesse, représentante légale de M. Kelley, comme faisant partie des biens de la succession de ce dernier. Les parties ne m'ont pas demandé, que ce soit dans les questions qu'elles ont formulées en l'espèce ou encore, de façon explicite, lors des débats, de me prononcer sur les répercussions de la dévolution du droit à la réversibilité à la demanderesse, à titre d'unique bénéficiaire désignée. Je ne m'engagerai pas dans l'analyse de cette question, pour laquelle, d'ailleurs, je doute sérieusement avoir compétence.

[59]            Je conclus en conséquence, en ce qui concerne les droits respectifs de Saroy Film Productions of Canada Limited et de la demanderesse, que Saroy Film Productions of Canada Limited est la titulaire du droit d'auteur sur les livres des Donnelly jusqula date du vingt-cinquième anniversaire du décès de M. Kelley, àsavoir jusqu'au 14 février 2007. Par la suite, la réversibilitédu droit d'auteur sur les livres sera dévolue à la demanderesse, à titre d'exécutrice testamentaire, en application du paragraphe 14(1) de la Loi.

d)         La demanderesse a-t-elle droit aux dommages-intérêts préétablis et aux redevances retenues?

[60]            Il résulte des conclusions qui précèdent que la demanderesse n'a pas droit aux dommages-intérêts préétablis que prévoit le paragraphe 38.1(1) de la Loi. Il s'ensuit également qu'elle n'a pas droit non plus aux redevances que Firefly a retenues après avoir été informée que la demanderesse prétendait détenir un intérêt dans le droit d'auteur sur les livres des Donnelly.

e)         Firefly a-t-elle violé le droit d'auteur?

[61]            À la lumière des conclusions qui précèdent, je suis convaincu également que Firefly, en publiant et distribuant les livres des Donnelly, n'a violéaucun intérêt de la demanderesse dans le droit d'auteur sur les livres.

            f)          Les réparations autres que celles concernant les dépens

[62]            La Cour déclare que l'enregistrement du droit d'auteur, effectué le 15 octobre 1974 en faveur de Pagurian Press Limited et portant le numéro 254758, est nul. Cet enregistrement sera radié conformément à l'alinéa 57(4)b) de la Loi puisqu'il constitue une inscription qui a été faite par erreur ou qui est restée par erreur dans le registre des droits d'auteur.

[63]            La Cour déclare de plus, en ce qui concerne les droits respectifs de la demanderesse et des défendeurs, que Saroy Film Productions of Canada Limited est la titulaire par cession du droit d'auteur sur les livres des Donnelly pour la période comprise entre le jour où M. Kelley a cédé son droit d'auteur sur ces livres à Saroy Films Productions of Canada Limited et le 14 février 2007. Pour le reste de la période durant laquelle subsiste le droit d'auteur par la suite, prévue à l'article 6 de la Loi, le droit d'auteur sur les livres des Donnelly est dévolu à la demanderesse, représentante légale de M. Kelley, comme faisant partie des biens de la succession de ce dernier.

[64]            Sous réserve des dispositions qui suivent relativement aux dépens, la demande de Theresia Winkler sera rejetée sous tous les autres rapports et à l'égard de tous les défendeurs.


[65]            Compte tenu des conclusions qui précèdent, et sous réserve également des dispositions qui suivent relativement aux dépens, les mesures de réparation qu'a demandées Firefly seront rejetées. Puisque les défendeurs Roy n'ont réclamé aucune mesure de réparation et que Edperbrascan, pour sa part, n'a déposé aucun document ni n'a comparu à l'audience, aucune mesure de réparation ne sera accordée à leur égard.

            g)         Les dépens

[66]            La demanderesse n'a réussi que de façon limitée dans sa demande. Cela dit, on ne peut certes lui reprocher d'avoir institué ce recours, compte tenu de l'absence totale de collaboration de la part des défendeurs Roy, qui, seuls, pouvaient apporter des réponses satisfaisantes aux questions que se posaient la demanderesse et sa petite-fille au sujet de la propriété du droit d'auteur sur les livres des Donnelly. Dans les circonstances, les dépens calculés selon le barême ordinaire seront adjugés à la demanderesse contre les défendeurs Roy.


[67]            Firefly a, elle aussi, subi des inconvénients, couru des risques et vraisemblablement été privée de certains revenus en raison de l'intransigeance des défendeurs Roy. Ceux-ci, en négligeant d'exposer de manière utile à la demanderesse leurs intérêts dans le droit d'auteur sur les livres des Donnelly lorsque la demanderesse les en a priés, et en négligeant de défendre efficacement ces intérêts lorsque mis en demeure de ce faire dans la présente instance, alors que Firefly fonde elle-même son droit sur le leur, ont imposé à Firefly d'assumer des honoraires d'avocat sans doute considérables afin de défendre ses propres intérêts et, par le fait même, de défendre ceux des défendeurs Roy. Compte tenu de toutes les circonstances, les dépens seront adjugés à Firefly contre les défendeurs Roy, et ils seront taxés, à défaut d'entente, en fonction de l'extrémité supérieure de la colonne V du tarif B prévu aux Règles de la Cour fédérale (1998).

[68]            Aucuns dépens ne seront adjugés en ce qui a trait à Edperbrascan Corporation.

_______________________________

      J.C.F.C.

Ottawa (Ontario)

12 septembre 2002

Traduction certifiée conforme

Ghislaine Poitras, LL.L.


                                            SCHEDULE



2. Les définitions qui suivent s'appliquent à la présente loi.

...

« _livre_ » Tout volume ou toute partie ou division d'un volume présentés sous forme imprimée, à l'exclusion_:

a) des brochures;

b) des journaux, revues, magazines et autres périodiques;

c) des feuilles de musique, cartes, graphiques ou plans, s'ils sont publiés séparément;

d) des manuels d'instruction ou d'entretien qui accompagnent un produit ou sont fournis avec des services.

...

« _droit d'auteur_ » S'entend du droit visé_:

a) dans le cas d'une oeuvre, à l'article 3;

b) dans le cas d'une prestation, aux articles 15 et 26;

c) dans le cas d'un enregistrement sonore, à l'article 18;

d) dans le cas d'un signal de communication, à l'article 21.

...

« représentants légaux » Sont compris parmi les représentants légaux les héritiers, exécuteurs testamentaires, administrateurs, successeurs et ayants droit, ou les agents ou fondés de pouvoir régulièrement constitués par mandat écrit.

...

« oeuvre » Est assimilé à une oeuvre le titre de l'oeuvre lorsque celui-ci est original et distinctif.

...

3. (1) Le droit d'auteur sur l'oeuvre comporte le droit exclusif de produire ou reproduire la totalité ou une partie importante de l'oeuvre, sous une forme matérielle quelconque, d'en exécuter ou d'en représenter la totalité ou une partie importante en public et, si l'oeuvre n'est pas publiée, d'en publier la totalité ou une partie importante; ce droit comporte, en outre, le droit exclusif_:

a) de produire, reproduire, représenter ou publier une traduction de l'oeuvre;

...

2. In this Act,

...

"book" means a volume or a part or division of a volume, in printed form, but does not include

(a) a pamphlet,

(b) a newspaper, review, magazine or other periodical,

(c) a map, chart, plan or sheet music where the map, chart, plan or sheet music is separately published, and

(d) an instruction or repair manual that accompanies a product or that is supplied as an accessory to a service;

...

"copyright" means the rights described in

(a) section 3, in the case of a work,

(b) sections 15 and 26, in the case of a performer's performance,

(c) section 18, in the case of a sound recording, or

(d) section 21, in the case of a communication signal;

...

"legal representatives" includes heirs, executors, administrators, successors and assigns, or agents or attorneys who are thereunto duly authorized in writing;

...

"work" includes the title thereof when such title is original and distinctive;

...

3. (1) For the purposes of this Act, "copyright", in relation to a work, means the sole right to produce or reproduce the work or any substantial part thereof in any material form whatever, to perform the work or any substantial part thereof in public or, if the work is unpublished, to publish the work or any substantial part thereof, and includes the sole right

(a) to produce, reproduce, perform or publish any translation of the work,

...

6. Sauf disposition contraire expresse de la présente loi, le droit d'auteur subsiste pendant la vie de l'auteur, puis jusqu'à la fin de la cinquantième année suivant celle de son décès.

...

13. (1) Sous réserve des autres dispositions de la présente loi, l'auteur d'une oeuvre est le premier titulaire du droit d'auteur sur cette oeuvre.

...

(4) Le titulaire du droit d'auteur sur une oeuvre peut céder ce droit, en totalité ou en partie, d'une façon générale ou avec des restrictions relatives au territoire, au support matériel, au secteur du marché ou à la portée de la cession, pour la durée complète ou partielle de la protection; il peut également concéder, par une licence, un intérêt quelconque dans ce droit; mais la cession ou la concession n'est valable que si elle est rédigée par écrit et signée par le titulaire du droit qui en fait l'objet, ou par son agent dûment autorisé.

...

14. (1) Lorsque l'auteur d'une oeuvre est le premier titulaire du droit d'auteur sur cette oeuvre, aucune cession du droit d'auteur ni aucune concession d'un intérêt dans ce droit, faite par lui - autrement que par testament - après le 4 juin 1921, n'a l'effet d'investir le cessionnaire ou le concessionnaire d'un droit quelconque, à l'égard du droit d'auteur sur l'oeuvre, pendant plus de vingt-cinq ans à compter de la mort de l'auteur; la réversibilité du droit d'auteur, en expectative à la fin de cette période, est dévolue, à la mort de l'auteur, nonobstant tout arrangement contraire, à ses représentants légaux comme faisant partie de ses biens; toute stipulation conclue par lui concernant la disposition d'un tel droit de réversibilité est nulle.

...

27. (1) Constitue une violation du droit d'auteur l'accomplissement, sans le consentement du titulaire de ce droit, d'un acte qu'en vertu de la présente loi seul ce titulaire a la faculté d'accomplir.

...

6. The term for which copyright shall subsist shall, except as otherwise expressly provided by this Act, be the life of the author, the remainder of the calendar year in which the author dies, and a period of fifty years following the end of that calendar year.

...

13. (1) Subject to this Act, the author of a work shall be the first owner of the copyright therein.

...

(4) The owner of the copyright in any work may assign the right, either wholly or partially, and either generally or subject to limitations relating to territory, medium or sector of the market or other limitations relating to the scope of the assignment, and either for the whole term of the copyright or for any other part thereof, and may grant any interest in the right by licence, but no assignment or grant is valid unless it is in writing signed by the owner of the right in respect of which the assignment or grant is made, or by the owner's duly authorized agent.

...

14. (1) Where the author of a work is the first owner of the copyright therein, no assignment of the copyright and no grant of any interest therein, made by him, otherwise than by will, after June 4, 1921, is operative to vest in the assignee or grantee any rights with respect to the copyright in the work beyond the expiration of twenty-five years from the death of the author, and the reversionary interest in the copyright expectant on the termination of that period shall, on the death of the author, notwithstanding any agreement to the contrary, devolve on his legal representatives as part of the estate of the author, and any agreement entered into by the author as to the disposition of such reversionary interest is void.

...

27. (1) It is an infringement of copyright for any person to do, without the consent of the owner of the copyright, anything that by this Act only the owner of the copyright has the right to do.

...


34. (1) En cas de violation d'un droit d'auteur, le titulaire du droit est admis, sous réserve des autres dispositions de la présente loi, à exercer tous les recours - en vue notamment d'une injonction, de dommages-intérêts, d'une reddition de compte ou d'une remise - que la loi accorde ou peut accorder pour la violation d'un droit.

...

(3) Les frais de toutes les parties à des procédures relatives à la violation d'un droit prévu par la présente loi sont à la discrétion du tribunal.

(4) Les procédures suivantes peuvent être engagées ou continuées par une requête ou une action_:

a) les procédures pour violation du droit d'auteur ou des droits moraux;

b) les procédures visées aux articles 44.1, 44.2 ou 44.4;

c) les procédures relatives aux tarifs homologués par la Commission en vertu des parties VII et VIII ou aux ententes visées à l'article 70.12.

Le tribunal statue sur les requêtes sans délai et suivant une procédure sommaire.

(5) Les requêtes visées au paragraphe (4) sont, en matière civile, régies par les règles de procédure et de pratique du tribunal saisi des requêtes si ces règles ne prévoient pas que les requêtes doivent être jugées sans délai et suivant une procédure sommaire. Le tribunal peut, dans chaque cas, donner les instructions qu'il estime indiquées à cet effet.

...

(7) Au présent article, « _requête_ » s'entend d'une procédure engagée autrement que par un bref ou une déclaration.

...

35. (1) Quiconque viole le droit d'auteur est passible de payer, au titulaire du droit qui a été violé, des dommages-intérêts et, en sus, la proportion, que le tribunal peut juger équitable, des profits qu'il a réalisés en commettant cette violation et qui n'ont pas été pris en compte pour la fixation des dommages-intérêts.

...

34. (1) Where copyright has been infringed, the owner of the copyright is, subject to this Act, entitled to all remedies by way of injunction, damages, accounts, delivery up and otherwise that are or may be conferred by law for the infringement of a right.

...

(3) The costs of all parties in any proceedings in respect of the infringement of a right conferred by this Act shall be in the discretion of the court.

(4) The following proceedings may be commenced or proceeded with by way of application or action and shall, in the case of an application, be heard and determined without delay and in a summary way:

(a) proceedings for infringement of copyright or moral rights;

(b) proceedings taken under section 44.1, 44.2 or 44.4; and

(c) proceedings taken in respect of

(i) a tariff certified by the Board under Part VII or VIII, or

(ii) agreements referred to in section 70.12.

(5) The rules of practice and procedure, in civil matters, of the court in which proceedings are commenced by way of application apply to those proceedings, but where those rules do not provide for the proceedings to be heard and determined without delay and in a summary way, the court may give such directions as it considers necessary in order to so provide.

...

(7) In this section, "application" means a proceeding that is commenced other than by way of a writ or statement of claim.

...

35. (1) Where a person infringes copyright, the person is liable to pay such damages to the owner of the copyright as the owner has suffered due to the infringement and, in addition to those damages, such part of the profits that the infringer has made from the infringement and that were not taken into account in calculating the damages as the court considers just.

...



37. La Cour fédérale, concurremment avec les tribunaux provinciaux, connaît de toute procédure liée à l'application de la présente loi, à l'exclusion des poursuites visées aux articles 42 et 43.

...38.1 (1) Sous réserve du présent article, le titulaire du droit d'auteur, en sa qualité de demandeur, peut, avant le jugement ou l'ordonnance qui met fin au litige, choisir de recouvrer, au lieu des dommages-intérêts et des profits visés au paragraphe 35(1), des dommages-intérêts préétablis dont le montant, d'au moins 500_$ et d'au plus 20 000_$, est déterminé selon ce que le tribunal estime équitable en l'occurrence, pour toutes les violations - relatives à une oeuvre donnée ou à un autre objet donné du droit d'auteur - reprochées en l'instance à un même défendeur ou à plusieurs défendeurs solidairement responsables.

...

41. (1) Sous réserve du paragraphe (2), le tribunal saisi d'un recours en violation ne peut accorder de réparations que si_:

a) le demandeur engage des procédures dans les trois ans qui suivent le moment où la violation a eu lieu, s'il avait connaissance de la violation au moment où elle a eu lieu ou s'il est raisonnable de s'attendre à ce qu'il en ait eu connaissance à ce moment;

b) le demandeur engage des procédures dans les trois ans qui suivent le moment où il a pris connaissance de la violation ou le moment où il est raisonnable de s'attendre à ce qu'il en ait pris connaissance, s'il n'en avait pas connaissance au moment où elle a eu lieu ou s'il n'est pas raisonnable de s'attendre à ce qu'il en ait eu connaissance à ce moment.

(2) Le tribunal ne fait jouer la prescription visée aux alinéas (1)a) ou b) qu'à l'égard de la partie qui l'a invoquée.

...

53.(2) Le certificat d'enregistrement du droit d'auteur constitue la preuve de l'existence du droit d'auteur et du fait que la personne figurant à l'enregistrement en est le titulaire.

...

55. (1) La demande d'enregistrement d'un droit d'auteur sur une oeuvre peut être faite par l'auteur, le titulaire ou le cessionnaire du droit d'auteur, ou le titulaire d'une licence accordant un intérêt dans ce droit, ou en leur nom.

...

57. (3) Tout acte de cession d'un droit d'auteur ou toute licence concédant un intérêt dans un droit d'auteur doit être déclaré nul à l'encontre de tout cessionnaire du droit d'auteur ou titulaire de l'intérêt concédé qui le devient subséquemment à titre onéreux sans connaissance de l'acte de cession ou licence antérieur, à moins que celui-ci n'ait été enregistré de la manière prévue par la présente loi avant l'enregistrement de l'instrument sur lequel la réclamation est fondée.

(4) La Cour fédérale peut, sur demande du registraire des droits d'auteur ou de toute personne intéressée, ordonner la rectification d'un enregistrement de droit d'auteur effectué en vertu de la présente loi_:

a) soit en y faisant une inscription qui a été omise du registre par erreur;

b) soit en radiant une inscription qui a été faite par erreur ou est restée dans le registre par erreur;

c) soit en corrigeant une erreur ou un défaut dans le registre.

Pareille rectification du registre a effet rétroactif à compter de la date que peut déterminer la Cour.

37. The Federal Court has concurrent jurisdiction with provincial courts to hear and determine all proceedings, other than the prosecution of offences under section 42 and 43, for the enforcement of a provision of this Act or of the civil remedies provided by this Act.

...

38.1 (1) Subject to this section, a copyright owner may elect, at any time before final judgment is rendered, to recover, instead of damages and profits referred to in subsection 35(1), an award of statutory damages for all infringements involved in the proceedings, with respect to any one work or other subject-matter, for which any one infringer is liable individually, or for which any two or more infringers are liable jointly and severally, in a sum of not less than_$500 or more than_$20,000 as the court considers just.

...

41. (1) Subject to subsection (2), a court may not award a remedy in relation to an infringement unless

(a) in the case where the plaintiff knew, or could reasonably have been expected to know, of the infringement at the time it occurred, the proceedings for infringement are commenced within three years after the infringement occurred; or

(b) in the case where the plaintiff did not know, and could not reasonably have been expected to know, of the infringement at the time it occurred, the proceedings for infringement are commenced within three years after the time when the plaintiff first knew, or could reasonably have been expected to know, of the infringement.

(2) The court shall apply the limitation period set out in paragraph (1)(a) or (b) only in respect of a party who pleads a limitation period.

...

53.(2) A certificate of registration of copyright is evidence that the copyright subsists and that the person registered is the owner of the copyright.

...

55. (1) Application for the registration of a copyright in a work may be made by or on behalf of the author of the work, the owner of the copyright in the work, an assignee of the copyright, or a person to whom an interest in the copyright has been granted by licence.

...

57.(3) Any assignment of copyright, or any licence granting an interest in a copyright, shall be adjudged void against any subsequent assignee or licensee for valuable consideration without actual notice, unless the prior assignment or licence is registered in the manner prescribed by this Act before the registering of the instrument under which the subsequent assignee or licensee claims.

(4) The Federal Court may, on application of the Registrar of Copyrights or of any interested person, order the rectification of the Register of Copyrights by

(a) the making of any entry wrongly omitted to be made in the Register,

(b) the expunging of any entry wrongly made in or remaining on the Register, or

(c) the correction of any error or defect in the Register,

and any rectification of the Register under this subsection shall be retroactive from such date as the Court may order.



                        COUR FÉDÉRALE DU CANADA

                    SECTION DE PREMIÈRE INSTANCE

                     AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

DOSSIER:                                         T-1842-00

INTITULÉ:                                          THERESIA WINKLER, à titre personnel et en tant qu'exécutrice testamentaire de la succession du défunt Thomas P. Kelley

c. SAMUEL ROY ET AL.

                                                     

LIEU DE L'AUDIENCE:                  Toronto (Ontario)

DATE DE L'AUDIENCE:                6 août 2002

MOTIFS DE L'ORDONNANCE: MONSIEUR LE JUGE GIBSON

DATE DES MOTIFS:                       12 septembre 2002

COMPARUTIONS:              

M. Peter W. J. Wells                                      POUR LA DEMANDERESSE        

LANG MICHENER

Mme Barbara Grossman                                POUR LA DÉFENDERESSE

FRASER MILNER CASGRAIN s.a.r.l.         Firefly Books Ltd.

M. Marc Koplowitz                                         POUR LES DÉFENDEURS                        

MARK KOPLOWITZ ASSOCIATES           Samuel Roy,

Aztec Investments Limited

Elane Holdings Limited et

Falwyn Developments Limited

faisant affaires sous la raison sociale

Samuel Roy Enterprises et Saroy Film Productions of Canada Limited



[1]           L.R.C. (1985), ch. C-42, modifié.

[2]           DORS/98-106

[3]               Dossier de la demanderesse, onglet 6C, page 96.

[4]               Dossier de la demanderesse, onglet 6A, page 90.

[5]               Dossier de la demanderesse, onglet 6B, page 94.

[6]            B. Bergman, « Paradise Found: Hidden Gems in the Hinterland » Maclean's 115:16 (22 avril 2002) 31, à la page 40.

[7]               Dossier des défendeurs Roy, page 4.

[8]               Dossier des défendeurs Roy, page 25.

[9]               Dossier des défendeurs Roy, pages 8 à 24; l'accord a été modifié : voir les pages 26 et 27 du dossier.

[10]              (1959), 20 D.L.R. (2d) 211 (C.S.C.)

[11]              Dossier de la demande, onglet 6A, page 90.

[12]              Dossier de la demanderesse, onglet 4C, pages 23 et 24.

[13]              [1954] R.C.S. 725.

[14]              [1980] 2 All E.R. 817 (H.L.).


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