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Date : 20020926

Dossier : T-1100-97

Référence neutre : 2002 CFPI 1007

ENTRE :

                                                     ELI LILLY AND COMPANY

et ELI LILLY CANADA INC.

                                                                                                                                  demanderesses

                                                                          - et -

                                                                  APOTEX INC.

                                                                                                                                      défenderesse

                                                  MOTIFS DE L'ORDONNANCE

LE PROTONOTAIRE ARONOVITCH                  

[1]                Les présents motifs portent sur la première de deux requêtes instruites ensemble. La seconde requête, qui sera tranchée séparément, vise à réunir la présente procédure avec une action postérieure portant sur le même médicament que celui qui fait l'objet du litige dans la présente affaire.

[2]                Par la présente requête, la défenderesse (Apotex) cherche à ajouter Novopharm Limited (Novopharm) comme défenderesse reconventionnelle et à apporter certaines modifications à sa défense et demande reconventionnelle dans le cadre de la poursuite sous-jacente d'Eli Lilly pour contrefaçon de brevet.             

[3]                Fondamentalement, les modifications que souhaite apporter Apotex sont l'ajout d'allégations de rupture de contrat et d'immixtion dans les intérêts économiques d'Apotex en vue, selon ce qui est prétendu, d'un arrangement ou d'une conspiration par Eli Lilly et Novopharm visant à diminuer la concurrence. La question en litige porte sur le point de savoir si ces allégations sont appropriées dans une défense et si elles peuvent être formulées par voie de demande reconventionnelle en dommages-intérêts pour des violations de la Loi sur la concurrence, L.R.C. (1985), ch. C-34, modifiée (la Loi sur la concurrence).

LE CONTEXTE

[4]                Ainsi que je l'ai indiqué, la requête d'Apotex s'inscrit dans le cadre d'une action en contrefaçon de brevet intentée par Eli Lilly. Il est utile de rappeler le contexte dans lequel l'action a été intentée pour mieux comprendre les modifications que veut apporter Apotex.

[5]                En 1984, Eli Lilly a obtenu les lettres patentes canadiennes 1,166,248 (le brevet 248) à l'égard de la nizatidine, médicament pour le traitement de l'ulcère. Le brevet 248 couvre à la fois le procédé de fabrication de la nizatidine et le médicament lui-même, c'est-à-dire le composé nizatidine lorsqu'il est fabriqué selon ce procédé.

[6]                Novopharm avait obtenu une licence obligatoire d'Eli Lilly, pour la nizatidine, en vertu du paragraphe 39(4) de la Loi sur les brevets, L.R.C. (1985), ch. P-4, (la Loi sur les brevets) dans sa version de l'époque. En 1992, en prévision de l'abolition du régime des licences obligatoires, Novopharm et Apotex ont conclu un accord aux termes duquel, si l'une des parties devait se retrouver sans licence sous le nouveau régime, l'autre partie convenait de lui vendre, de lui fournir ou de faire le nécessaire pour lui vendre ou lui fournir la nizatidine. Cet accord sera désigné comme l' « accord d'approvisionnement » .

[7]                Il convient de noter les modalités essentielles de l'accord d'approvisionnement. L'accord permet à la partie non titulaire de licence de donner à la partie licenciée l'instruction d'acquérir le médicament en vrac d'une source désignée, ou de ses propres sources, en vue de la revente à la partie non titulaire de licence. L'accord prévoit également que la partie licenciée doit remettre les versements de redevances qu'elle est tenue de faire selon la licence obligatoire valide et d'observer pour le reste les modalités de la licence et de la maintenir en règle.

[8]                En 1993, Apotex a demandé un avis de conformité en vertu du Règlement sur les médicaments (avis de conformité), DORS/93-133, modifié (le Règlement). Eli Lilly ayant déposé une liste des brevets pertinents dans le registre tenu par le ministre, Apotex a signifié un avis d'allégation à Eli Lilly. L'avis d'allégation portait que les brevets pertinents ne seraient pas contrefaits, puisqu'Apotex se proposait d'obtenir la nizatidine de Novopharm, laquelle était titulaire d'une licence valide pour le médicament. Eli Lilly a tenté d'interdire la délivrance de l'avis de conformité sur le fondement que Novopharm avait accordé une sous-licence illégale à Apotex de sorte qu'Apotex ne pouvait acquérir de nizatidine de Novopharm sans contrefaire le brevet 248.

[9]                En se prévalant de sa propre licence, Novopharm a également demandé un avis de conformité relativement à la nizatidine. Eli Lilly a intenté une procédure d'opposition en vertu du Règlement, toujours sur le fondement que l'accord d'approvisionnement constituait une sous-licence illégale et que, par suite, Eli Lilly était autorisée à mettre fin à la licence obligatoire de Novopharm.

[10]            Les procédures et les appels interjetés ont abouti en Cour suprême et ont finalement été tranchés par l'arrêt de la Cour suprême en 1998. Dans l'arrêt Eli Lilly & Co. c. Novopharm Ltd. [1998] 2 R.C.S. 129, la Cour suprême a statué, notamment, que l'accord d'approvisionnement ne constituait pas une sous-licence et qu'Apotex avait le droit de le mettre en application.


[11]            Dans l'intervalle, Apotex, qui avait déposé une deuxième demande d'avis de conformité, a obtenu cet avis de conformité en avril 1997, par la voie d'un mandamus. En mai de la même année, Eli Lilly a intenté la présente action en contrefaçon. Comme la question de l'effet de l'accord d'approvisionnement était alors devant les tribunaux, Apotex n'a pas plaidé la licence comme moyen de défense au moment où elle a déposé sa première défense et demande reconventionnelle en septembre 1997.

[12]            À la suite de l'arrêt de la Cour suprême, Apotex a obtenu l'autorisation de modifier ses actes de procédure dans la présente instance pour inclure la licence comme moyen de défense et a cherché à faire exécuter l'accord d'approvisionnement par Novopharm. Après avoir opposé une certaine résistance et autres procédures, Novopharm s'est conformée à l'accord en acquérant d'un fournisseur étranger de la nizatidine en vrac, qu'elle a ensuite revendue à Apotex vers 1999.

LA CONTROVERSE ACTUELLE

[13]            Apotex veut apporter deux séries de modifications. Les modifications proposées aux alinéas 13a), b), f) et g) et au sous-alinéa h)(i) du projet d'acte de procédure, qui traitent des aspects techniques de la contestation par Apotex de la validité du brevet 248, ne sont pas contestées et seront autorisées. C'est la seconde catégorie de modifications, ayant trait aux arrangements qu'auraient pris Eli Lilly et Novopharm pour entraver l'accès d'Apotex à la nizatidine autorisée, qui demeure controversé.


[14]            La présente requête a été formée après une première série d'interrogatoires préalables. Selon le témoignage d'Apotex, elle a appris, au cours de ces interrogatoires préalables et à la suite de la signification d'un affidavit supplémentaire d'Eli Lilly, que la contestation par cette dernière de la licence d'Apotex était fondée sur le fait qu'Eli Lilly aurait annulé la licence obligatoire de Novopharm. Des documents récemment produits révèlent, au dire d'Apotex, que Novopharm avait contrevenu aux modalités de la licence en ne remettant pas les versements de redevances à l'égard de la nizatidine achetée pour le compte d'Apotex. Apotex prétend également qu'elle a appris pour la première fois au cours de ces interrogatoires préalables qu'Eli Lilly avait également conclu un accord distinct de licence volontaire avec Novopharm en vue de lui fournir de la nizatidine, mais à des conditions qui empêchaient Novopharm de revendre la nizatidine autorisée à un tiers, notamment à Apotex. Apotex dit que ce second accord volontaire était en vigueur à l'époque où Novopharm achetait le médicament en vue de le revendre à Apotex et omettait de remettre les redevances à Eli Lilly pour ces achats. Apotex pense donc qu'Eli Lilly et Novopharm ont conspiré en vue de provoquer une violation de l'accord d'approvisionnement, cherchant ainsi à éliminer Apotex de la concurrence sur le marché de la nizatidine.

[15]            Au départ, Apotex souhaitait formuler des allégations contre Eli Lilly et Novopharm pour fautes contractuelles et délictuelles, ainsi que pour violation de la Loi sur la concurrence, et en demander réparation. Aussi, les modifications originales de la défense et demande reconventionnelle alléguaient qu'Eli Lilly et Novopharm étaient passibles de dommages-intérêts comme suit : Novopharm pour rupture de l'accord d'approvisionnement avec Apotex; Eli Lilly pour avoir provoqué une violation des modalités de l'accord d'approvisionnement et de la licence obligatoire et, pour s'être immiscée de manière illicite dans les intérêts économiques d'Apotex en concluant le second accord, volontaire, avec Novopharm. Des dommages-intérêts sont également demandés sous le chef distinct de la conspiration ou de l'arrangement qu'auraient conclu illégalement Eli Lilly et Novopharm dans le but et avec l'effet de limiter indûment la concurrence, en contravention de l'article 45 de la Loi sur la concurrence.

[16]            S'agissant de sa défense, Apotex souhaite ajouter que, par suite de la conduite alléguée dans la demande reconventionnelle, Eli Lilly est empêchée par une fin de non-recevoir d'invoquer toute prétendue résiliation de la licence obligatoire et n'a pas le droit de demander de réparation à l'égard d'une contrefaçon qu'Eli Lilly, selon les allégations, aurait provoquée sciemment.


RÉVISIONS DES MODIFICATIONS PROPOSÉES

[17]            Quelques jours avant l'audition de la requête, l'avocat d'Apotex a écrit à la Cour qu'Apotex ne chercherait plus à modifier la demande reconventionnelle pour y demander réparation sous forme de dommages-intérêts pour la rupture de l'accord d'approvisionnement et l'immixtion dans les relations contractuelles d'Apotex. Apotex n'a pas retiré ni modifié de quelque façon les allégations qui soutenaient ces prétentions. Toutefois, à l'audition de la requête, Apotex a pris la position qu'elle voulait maintenir les allégations, mais que certaines modifications étaient appropriées par suite du retrait des demandes en dommages-intérêts.

[18]            Les allégations qu'elle veut conserver, telles qu'elles sont modifiées, sont exposées ci-dessous. En somme, les allégations relatives à la rupture de l'accord d'approvisionnement, à la violation anticipée de la licence et, à l'immixtion dans les intérêts économiques d'Apotex sont maintenant présentées comme étant au soutien de la conspiration en vue de diminuer la concurrence.

[traduction]

31. Apotex expose que l'accord d'approvisionnement est un contrat valide et exécutoire, qu'à tous les moments pertinents les demanderesses savaient qu'il était valide et en vigueur et que les demanderesses, sciemment et fautivement, ont incité Novopharm à contrevenir à ses modalités et à contrevenir à sa licence obligatoire, causant ainsi un préjudice à Apotex.

32. Apotex expose donc que, dans le cadre de la conspiration, dans la mesure où il sera jugé qu'une partie de la nizatidine qu'elle a acquise de Novopharm contrefait une revendication du brevet 248 et n'est pas couverte par licence, Novopharm a rompu l'accord d'approvisionnement, et spécifiquement les clauses 1, 4, 6 et 8 de celui-ci.

33. Apotex expose également que, dans le cadre de la conspiration, dans la mesure où il sera jugé qu'une partie de la nizatidine qu'elle a acquise de Novopharm contrefait une revendication du brevet 248 et n'est pas couverte par licence, les demanderesses et défenderesses reconventionnelles ont incité Novopharm à rompre l'accord d'approvisionnement avec Apotex et à perdre sa licence obligatoire en concluant ledit arrangement à des conditions qui (i) empêchaient Novopharm de revendre à Apotex la nizatidine acquise des demanderesses, (ii) obligeaient Novopharm à retenir les versements de redevances payables à Eli Lilly and Company à l'égard des achats de nizatidine effectués par Apotex auprès de Novopharm, et (iii) obligeaient Novopharm à s'abstenir de contester toute allégation faite par Lilly que la licence obligatoire aurait été violée.


34. Apotex expose également que, dans le cadre de la conspiration, dans la mesure où il sera jugé qu'une partie de la nizatidine qu'elle a acquise de Novopharm contrefait une revendication du brevet 248 et n'est pas couverte par licence, les demanderesses et défenderesses reconventionnelles se sont immiscées, délibérément et fautivement, dans les intérêts économiques d'Apotex en concluant ledit arrangement illicite avec Novopharm à des conditions qui empêchaient Novopharm de revendre à Apotex la nizatidine acquise auprès des demanderesses, en violation de l'accord d'approvisionnement et de la licence obligatoire, et qu'elles l'ont fait avec l'intention de causer un préjudice à Apotex, en sachant que ce préjudice serait probablement causé.

35. Apotex expose également que, dans le cadre de la conspiration, dans la mesure où il sera jugé qu'une partie de la nizatidine qu'elle a acquise de Novopharm contrefait une revendication du brevet 248 et n'est pas couverte par licence, les demanderesses et défenderesses reconventionnelles et Novopharm, sciemment et délibérément, se sont engagées dans une conspiration, un accord ou un arrangement pour provoquer une rupture de contrat illicite, ces agissements illicites ayant été entrepris dans le but et avec l'effet de causer un préjudice à Apotex, en sachant que ledit préjudice à Apotex en résulterait probablement, et en est effectivement résulté.

36. Apotex expose également que, dans la mesure où il sera jugé qu'une partie de la nizatidine qu'elle a acquise de Novopharm contrefait une revendication du brevet 248 et n'est pas couverte par licence, les demanderesses et défenderesses reconventionnelles et Novopharm sont responsables à l'égard d'Apotex pour s'être engagées, sciemment et délibérément, dans un accord ou un arrangement de conspiration dans le but et avec l'effet d'empêcher, de prévenir, de limiter ou de réduire indûment la concurrence au Canada à l'égard du médicament nizatidine en contravention de l'article 45 de la Loi sur la concurrence, L.R.C. (1985), ch. C-34, modifiée. [Non souligné dans l'original.]

La réparation suivante est maintenant demandée, en plus des déclarations d'invalidité et de non-contrefaçon :

[traduction] ...

e) à titre plus subsidiaire encore, s'il est jugé que le brevet n ° 1,166,248 est valide et contrefait par Apotex, des dommages-intérêts en vertu de l'article 36 de la Loi sur la concurrence.

...

[19]            Il va sans dire que la demande reconventionnelle telle que modifiée ci-dessus, les dispositions de la défense qui portent sur la conduite alléguée dans la demande reconventionnelle, ainsi que les allégations de conduite anti-concurrentielle et la demande à ce titre, demeurent contentieuses.

ANALYSE

[20]            Je commencerai par un examen des principes applicables aux modifications qui sont bien établis en droit. En général, une partie obtiendra l'autorisation de modifier ses actes de procédure à tout moment, pour autant que les modifications ne créent pas un préjudice qui ne pourrait être indemnisé par l'attribution de dépens (voir les arrêts Scottish & York Insurance Co. c. Canada [1999] A.C.F. n ° 277 (C.A.F.); VISX Inc. c. Nidek Co., [1998] A.C.F. n ° 1766).


[21]            La modification proposée doit satisfaire au même critère que celui qui s'applique à la requête en radiation. Donc, la modification ne sera pas refusée à moins que l'acte de procédure proposé soit manifestement futile et sans aucune chance de succès. Cette charge de la preuve onéreuse incombe à la partie qui s'oppose à la modification.

[22]            En vue de déterminer qu'il est évident et manifeste que l'acte de procédure ne révèle pas de moyen de défense ou de demande reconventionnelle, les faits allégués sont présumés vrais, à moins qu'ils soient tout à fait invraisemblables (voir l'arrêt Volkswagen Canada Inc. c. Access International Automotive Ltd. [2001] CAF 79 au par. 12, A.C.F. n ° 446).

[23]            D'autres principes applicables aux requêtes en radiation sont à propos dans les circonstances. Parmi ceux-ci, le principe voulant que la Cour adopte une attitude libérale et généreuse dans l'interprétation des actes de procédure en cause. Également, qu'il ne convient pas de trancher, dans le contexte d'une requête en radiation, les points contestés de fait ou de droit. En dernier lieu, il faut faire place aux plaidoiries qui sont nouvelles ou qui n'ont pas encore été testées dans des domaines où le droit n'est pas fixé.

[24]            En appliquant ces principes, je traiterai d'abord des allégations de violation de la Loi sur la concurrence.

[25]            Eli Lilly s'oppose à ces modifications, notamment sur le fondement que la cause d'action est prescrite puisqu'elle ne respecte pas le délai de deux ans prévu au paragraphe 36(4) de la Loi sur la concurrence. Les parties pertinentes de la Loi sont reproduites en annexe aux présents motifs.


[26]            Que les agissements reprochés aient eu lieu à la date de l'accord volontaire entre Eli Lilly et Novopharm conclu le 16 novembre 1998 ou à la date de l'annulation de la licence obligatoire opérée le 21 septembre 1999, soutient Eli Lilly, le délai de prescription était écoulé au moment où Apotex a signifié pour la première fois les modifications proposées, le 5 décembre 2001.

[27]            Il y a lieu de rappeler ici les principes applicables à la radiation sur le fondement de la prescription. Ils ont été examinés de façon approfondie dans la récente décision Bande indienne de Fox Lake c. Reid Crowthers & Partners Ltd., [2002] A.C.F. n ° 823. Essentiellement, les délais de prescription ne sont pas ordinairement un motif de radiation d'un acte de procédure. La prescription doit plutôt être plaidée et invoquée comme moyen de défense. Le fondement de ce principe est que le point de départ de la prescription est généralement couvert par l'enquête préalable et qu'il constitue une conclusion de fait qu'il ne convient pas de tirer sur une base interlocutoire. C'est le cas en l'espèce. Je ne suis donc pas disposée à refuser la modification sur ce fondement.

LES ALLÉGATIONS RELATIVES À LA CONCURRENCE

[28]            Eli Lilly et Novopharm attaquent les allégations relatives à la concurrence avec deux autres moyens que je traiterai ensemble. Selon le premier de ces moyens, Apotex ne peut obtenir gain de cause sur le fondement de ses allégations puisque ses actes de procédure, même en supposant qu'ils soient vrais, n'établissent pas qu'Apotex a subi un préjudice. Le second moyen porte que la preuve présentée par Eli Lilly est en désaccord avec les modifications qu'Apotex veut apporter. Comme dans le cas du moyen tiré de la prescription, Eli Lilly s'appuie sur la preuve qu'elle a présentée dans le contexte de la présente requête.


[29]            À mon sens, ces moyens soulèvent des questions qui devraient plutôt être plaidées comme moyens de défense. On me demande d'évaluer des éléments de preuve extrinsèques et contradictoires sur lesquels il appartient au juge présidant l'instruction de se prononcer. Je puis tenir compte de cette preuve lorsqu'on prétend que les actes de procédure devraient être radiés parce qu'ils sont frivoles, constituent un abus de procédure ou ne sont pas de la compétence de la Cour. Même dans ce contexte toutefois, aucun élément de preuve présenté ici n'est concluant ou non controversable. S'agissant de la question du préjudice, en particulier, une fois un élément plaidé par Apotex, il faut le supposer prouvé.

[30]            Venons-en maintenant à l'argument de principe plaidé par Eli Lilly et Novopharm, selon lequel l'utilisation des droits de propriété intellectuelle ne constitue pas une restriction ou une diminution indue de la concurrence et ne peut donc donner lieu à une demande valide en droit. Eli Lilly invoque principalement l'arrêt Molnlycke AB c. Kimberly Clark of Canada Ltd., (1991) 36 C.P.R. (3d) 393. Dans cet arrêt, la Cour d'appel examinait une défense et demande reconventionnelle alléguant une conduite anti-concurrentielle découlant de la cession d'un brevet. La Cour a statué qu'en l'espèce, l'obtention d'un brevet, la cession de celui-ci et les agissements du breveté pour faire respecter son monopole ne constituaient pas une diminution indue de la concurrence.

[31]            Eli Lilly invoque également les décisions Procter & Gamble Co. c. Kimberly-Clark of Canada Ltd., (1990) 29 C.P.R. (3d) 545 et VISX Inc. c. Nidek Co. (1995), 68 C.P.R. (3d) 272 (C.F. 1re inst.); conf. par (1996), 72 C.P.R. (3d) 19 (C.A.F.), dans lesquelles la Cour a radié des moyens de défense alléguant des contraventions à la Loi sur la concurrence et faisait ainsi obstacle à la demande de réparation d'equity pour contrefaçon de brevet formée par les demanderesses.

[32]            Je ne pense pas que la décision Procter & Gamble établisse la règle que les allégations de violation de la Loi sur la concurrence sont irrecevables et n'ont pas leur place dans les poursuites pour contrefaçon de brevet. La préoccupation de la Cour dans cette décision était plutôt de savoir si les allégations de fixation d'un prix abusif formulées par la défenderesse contre le breveté avaient quelque pertinence par rapport à l'action en contrefaçon des demanderesses. À propos de la théorie des « mains propres » , le juge Hugessen, alors juge à la cour d'appel, a donné les explications suivantes :


... Pour que l'equity refuse, en vertu de la doctrine des « mains propres » , une réparation à laquelle une partie aurait autrement droit, il faut que la conduite passée de cette partie soit directement reliée à la cause d'action même invoquée dans la demande, en l'espèce le brevet [voir l'arrêt City of Toronto v. Polai [1970] 1 O.R. 483 (C.A.)]. Or, dans la présente affaire, non seulement la pratique alléguée de prix abusivement bas ne peut pas être liée au brevet (quel tort y a-t-il si le détenteur d'un monopole légal fixe le prix de ses produits à un niveau inférieur à leur coût et à qui ce préjudice est-il causé?), mais cette pratique réduirait en fait la possibilité pour les demanderesses de recouvrer les profits de la défenderesse.

[33]            La décision a été appliquée par le juge Rothstein, alors juge à la Section de première instance, dans l'affaire VISX, précitée, dans laquelle il a été redit que la Cour n'accueillera pas, comme empêchement à la réparation d'equity, des allégations de fautes qui ne sont pas pertinentes par rapport à la demande formée par la demanderesse. Dans le même sens que dans l'arrêt Procter & Gamble, le juge Rothstein a conclu qu'en l'espèce, les allégations des défenderesses portant qu'un breveté tentait de percevoir des droits et des redevances en vertu de son monopole, devaient être radiées, parce que ces allégations n'étaient pas « liées directement au brevet ... ou à la question de savoir si les défenderesses ont commis un délit de contrefaçon à l'égard de ce brevet » .

[34]            Un arrêt plus récent, l'arrêt Volkswagen, précité, est également pertinent. Il porte sur des allégations de conduite anti-concurrentielle à la fois en défense et en demande reconventionnelle, cette fois-ci dans le contexte d'une violation alléguée du droit d'auteur.

[35]            En première instance, les allégations ont été radiées de la défense et de la demande reconventionnelle. La Cour d'appel a confirmé la radiation à l'égard de la demande reconventionnelle au motif qu'il existait des conditions prévues dans la Loi auxquelles les demanderesses reconventionnelles n'avaient pas satisfait et qui les empêchaient de demander par reconvention des dommages-intérêts pour violation de l'article 32 de la Loi sur la concurrence.

[36]            Toutefois, des considérations différentes s'appliquaient aux mêmes allégations formulées en défense. Dans les circonstances décrites ci-dessous, la Cour a refusé de radier des allégations de limitations indues à la concurrence formulées par la défenderesse et a jugé qu'on pouvait faire valoir qu'il y avait un lien suffisant avec la violation du droit d'auteur :


... En l'espèce, Access International veut faire valoir que la cession du droit d'auteur sur le logo VW et celui d'Audi à Volkswagen Canada est une conduite décrite au paragraphe 32(1) de la Loi sur la concurrence, parce que Volkswagen Canada aurait obtenu le droit d'auteur dans le dessein de limiter ou d'empêcher indûment la concurrence en ce qui concerne les pièces et accessoires Volkswagen et Audi authentiques. Cette allégation est bien différente des allégations examinées dans les affaires Visx et Procter & Gamble. À mon avis, il serait au moins possible de faire valoir qu'il existe en l'espèce un lien suffisant entre le droit d'auteur et la défense de l'absence de conduite sans reproche qui serait susceptible d'entraîner le refus de la réparation reconnue en equity.

[37]            Pour en venir aux faits de l'espèce, Apotex allègue que, dans la mesure où il sera jugé qu'elle a contrefait le brevet 248, la contrefaçon a été provoquée par la conduite anti-concurrentielle d'Eli Lilly, à savoir sa conspiration alléguée avec Novopharm pour empêcher Apotex d'avoir accès à une source de nizatidine qui n'entraîne pas de contrefaçon. N'eût été de la conduite attaquée, il n'y aurait pas eu de contrefaçon, soutient Apotex. Les circonstances ne sont donc pas les mêmes que dans les affaires Procter & Gamble et VISX. Il n'y a aucun doute qu'en l'espèce, le lien direct est établi. La modification est donc appropriée dans la défense et sera autorisée.

[38]            S'agissant de la demande reconventionnelle, Apotex adopte la position que la jurisprudence citée par Eli Lilly, en tout cas, est souvent invoquée pour radier une défense et ne s'applique pas aux demandes reconventionnelles. Apotex indique que les Règles de la Cour fédérale (1998) (les Règles), n'exigent pas d'autorisation pour former une demande reconventionnelle et que l'autorisation n'est nécessaire en l'espèce qu'en raison du fait que la demande reconventionnelle n'a pas été signifiée dans les délais prévus par les Règles.


[39]            Je souscris à la position d'Apotex sur ce point. On ne nous a pas cité d'affaires portant sur une demande reconventionnelle pour conduite anti-concurrentielle, dans le contexte d'une action en contrefaçon de brevet, dans l'optique des nouvelles Règles de la Cour fédérale. En principe, selon les nouvelles Règles, toute cause d'action indépendante qui peut être jointe à l'action principale peut donner lieu à une demande reconventionnelle. Eli Lilly prétend que la demande en dommages-intérêts est, de toute façon, irrecevable puisqu'Apotex n'a allégué rien d'autre que le simple exercice par Eli Lilly de ses droits de brevet, conformément au principe établi dans l'arrêt Molnlycke, précité. Je ne puis souscrire à cette position, parce que la conduite attaquée en l'espèce va bien au-delà de ce qui était allégué dans l'affaire Molnlycke.

LA JONCTION DE NOVOPHARM

[40]            Malgré l'argumentation vigoureuse de l'avocat en faveur de la position contraire, je conclus que des faits suffisants ont été allégués pour que l'on puisse plaider qu'ils fondent une demande pour violation de la Loi sur la concurrence et je passe maintenant à la question de savoir si Novopharm devrait être jointe comme défenderesse reconventionnelle. Apotex fait valoir à bon droit que, de façon générale, l'autorisation de la Cour n'est pas nécessaire pour joindre un défendeur à une demande reconventionnelle selon le paragraphe 191(1) des Règles. Toutefois, l'alinéa 191(2)b) des Règles exige que la défense et demande reconventionnelle soit signifiée « aux autres parties » dans les 30 jours suivant sa délivrance. Apotex ne s'est pas conformée à cette règle et demande donc une prorogation de délai ou, à titre subsidiaire, une ordonnance de jonction des parties en vertu de l'article 104 des Règles.

[41]            Comme il semble qu'Apotex n'ait été mise au courant que récemment de faits déterminants additionnels relatifs aux activités attaquées d'Eli Lilly et de Novopharm, tout particulièrement l'existence d'une licence volontaire distincte concédée à Novopharm par Eli Lilly, le retard de la signification est expliqué et justifié. De toute façon, le seul fait du retard n'est pas suffisant pour empêcher une demande reconventionnelle dont on peut soutenir qu'elle révèle une cause d'action valable ou la jonction dans une action d'une partie qui pour le reste peut être partie à une action. Je suis également convaincue, sur le fondement des faits allégués, qu'il est nécessaire que Novopharm soit présente devant la Cour dans cette affaire, pour trancher de manière complète et efficace toutes les questions en litige se rapportant à la licence obligatoire, à l'accord d'approvisionnement et à la conduite anti-concurrentielle qui est alléguée.

[42]            Après avoir reçu la demande ayant trait à la concurrence, j'en viens maintenant aux autres ajouts proposés à la demande reconventionnelle. Comme je l'ai indiqué plus haut, les demandes en dommages-intérêts à l'égard des fautes contractuelles et délictuelles alléguées ont été retirées par Apotex avant l'audience, et avec raison. La Cour n'a pas compétence pour accorder la réparation demandée (voir la décision Innotech Pty. Ltd. c. Phoenix Rotary Spike Harrows Ltd., [1997] A.C.F. n ° 855). Toutefois, Apotex plaide maintenant qu'il faut autoriser le maintien des allégations dans les actes de procédure au titre de faits à l'appui de la conspiration en vue de violer la Loi sur la concurrence, laquelle relève clairement de la compétence de la Cour. À cet égard, l'avocat d'Apotex signale la décision Titan Linkabit Corp. c. S.E.E. See Electronic Engineering Inc., (1992), 58 F.T.R. 1 (C.F. 1re inst.), dans laquelle le juge en chef adjoint Jerome a jugé :

À mon avis, les actes de procédure des défendeurs portent de manière incidente seulement sur le contrat entre les parties et étayent la défense de non-contrefaçon. Les allégations des défendeurs relatives à la violation du contrat sont faites, non pas pour obtenir une réparation pour rupture du contrat, mais pour étayer la défense de non-contrefaçon. On ne demande pas à la Cour, comme ce fut le cas dans les affaires Blacktop et Flexi-Coil, de déterminer la validité du contrat entre les parties, ni de déterminer s'il y a eu violation du contrat. La question se pose principalement de savoir s'il y a eu atteinte au droit d'auteur des demanderesses ainsi qu'il a été allégué dans la déclaration; la question contractuelle soulevée par les défendeurs ne fait pas l'objet tout entier de l'action et ne s'y rapporte que de manière incidente. [Non souligné dans l'original.]

[43]            Pour arriver à cette conclusion, le juge en chef adjoint Jerome s'appuyait sur le passage suivant de l'arrêt de la Cour suprême du Canada dans l'affaire Kellogg Co. c. Kellogg, [1941] R.C.S. 242 :

[traduction] ... la Cour de l'Échiquier n'a aucune compétence pour trancher une question concernant purement et simplement un contrat intervenu entre deux personnes [...], mais en l'espèce l'objet visé par l'allégation de l'appelant ne concerne que de façon incidente le contrat d'emploi [...] L'allégation porte principalement sur l'invention qui, selon ses dires, est la sienne et dont il prétend être le propriétaire en raison du contrat et d'autres faits exposés dans l'allégation. Le contrat et les revendications fondées sur celui-ci sont invoqués pour établir que l'appelant a droit à la fois aux droits qui découlent de l'invention et à un brevet établi à son propre nom.

[44]            Eli Lilly soutient que les allégations devraient être radiées parce qu'elles correspondent plutôt aux circonstances décrites par le juge Rouleau dans la décision R. W. Blacktop Ltd. c. Artec Equipment Co., (1991) 39 C.P.R. (3d) 432 à la page 439 :

Dans la présente affaire, il s'agit d'une action en contrefaçon du brevet des parties demanderesses. Les prétentions des parties demanderesses qui portent sur l'inexécution du contrat et de l'obligation de fiduciaire ne visent pas à établir la contrefaçon. Les prétentions des parties demanderesses ne sont pas incidentes aux contrats entre les parties. Au contraire, ces prétentions sont soumises dans le seul but d'établir qu'il y a eu inexécution desdits contrats. Les prétentions ne sont pas incidentes au droit d'action de manière à conférer compétence à cette Cour, en vertu de l'arrêt Kellogg (plus haut).

[45]            En l'espèce, les faits se rapportant à l'accord d'approvisionnement et à la conspiration alléguée visant à violer l'accord ne sont pas plaidés en vue d'obtenir l'exécution du contrat. C'est là une question qui ne relève pas de la compétence de la Cour et qui pourra être plaidée dans une autre instance. En l'espèce, la licence, l'accord d'approvisionnement et les violations de celui-ci sont plaidés à l'appui d'allégations de non-contrefaçon. Ils sont donc très certainement incidents à la contravention de brevet. Ces allégations sont formulées pour attaquer une conduite et pour établir une base factuelle en vue de fonder une action relative à la concurrence, qui relève clairement de la compétence de la Cour. La présente affaire correspond donc tout à fait aux circonstances traitées dans la décision Titan.

[46]            Sous un autre angle, la conspiration alléguée en vue de provoquer une violation de l'accord d'approvisionnement afin d'invalider la licence, en somme les allégations formulées dans les paragraphes 31 à 35 de la demande reconventionnelle qui sont attaqués, constituent fondamentalement des précisions au sujet de la conspiration en vue de diminuer la concurrence. C'est sur le fondement de ces allégations qu'Apotex prétend qu'il y a eu violation de la Loi sur la concurrence. J'autoriserai donc les paragraphes tels qu'ils ont été modifiés et, en même temps, les modifications proposées des paragraphes 10 et 11 de la défense qui renvoient à la demande reconventionnelle.

[47]            Une ordonnance sera prononcée conformément aux présents motifs.

                  « Roza Aronovitch »

Protonotaire

Traduction certifiée conforme

Martine Guay, LL. L.


                                                                      Annexe A

Recouvrement de dommages-intérêts

36. (1) Toute personne qui a subi une perte ou des dommages par suite :

a) soit d'un comportement allant à l'encontre d'une disposition de la partie VI;

b) soit du défaut d'une personne d'obtempérer à une ordonnance rendue par le Tribunal ou un autre tribunal en vertu de la présente loi,

peut, devant tout tribunal compétent, réclamer et recouvrer de la personne qui a eu un tel comportement ou n'a pas obtempéré à l'ordonnance une somme égale

au montant de la perte ou des dommages qu'elle est reconnue avoir subis, ainsi que toute somme supplémentaire que le tribunal peut fixer et qui n'excède pas le coût total, pour elle, de toute enquête relativement à l'affaire et des procédures engagées en vertu du présent article.

Restriction

(4) Les actions visées au paragraphe (1) se prescrivent :

a) dans le cas de celles qui sont fondées sur un comportement qui va à l'encontre d'une disposition de la partie VI, dans les deux ans qui suivent la dernière des dates suivantes :

(i) soit la date du comportement en question,

(ii) soit la date où il est statué de façon définitive sur la poursuite;

b) dans le cas de celles qui sont fondées sur le défaut d'une personne d'obtempérer à une ordonnance du Tribunal ou d'un autre tribunal, dans les deux ans qui suivent la dernière des dates suivantes :

(i) soit la date où a eu lieu la contravention à l'ordonnance du Tribunal ou de l'autre tribunal,

(ii) soit la date où il est statué de façon définitive sur la poursuite.

Recovery of damages

36. (1) Any person who has suffered loss or damage as a result of

(a) conduct that is contrary to any provision of Part VI, or

(b) the failure of any person to comply with an order of the Tribunal or another

court under this Act,

may, in any court of competent jurisdiction, sue for and recover from the person who engaged in the conduct or failed to comply with the order an amount equal to the loss or damage proved to have been suffered by him, together with any additional amount that the court may allow not exceeding the full cost to him of any investigation in connection with the matter and of proceedings under this section.

Limitation

(4) No action may be brought under subsection (1),

(a) in the case of an action based on conduct that is contrary to any provision of Part VI, after two years from

(i) a day on which the conduct was engaged in, or

(ii) the day on which any criminal proceedings relating thereto were finally disposed of,

whichever is the later; and

(b) in the case of an action based on the failure of any person to comply with an order of the Tribunal or another court, after two years from

(i) a day on which the order of the Tribunal or court was contravened, or

(ii) the day on which any criminal proceedings relating thereto were finally disposed of,

whichever is the later.


                                                 COUR FÉDÉRALE DU CANADA

                                            SECTION DE PREMIÈRE INSTANCE

                                              AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

DOSSIER :                                        T-1100-97

INTITULÉ :                                      

ELI LILLY AND COMPANY

et ELI LILLY CANADA INC.

-et-

APOTEX INC.

LIEU DE L'AUDIENCE :                OTTAWA (ONTARIO)

DATE DE L'AUDIENCE :               19 JUILLET 2002

MOTIFS DE L'ORDONNANCE DE MADAME LE PROTONOTAIRE ARONOVITCH

DATE DES MOTIFS :                     26 SEPTEMBRE 2002

COMPARUTIONS :

M. PATRICK S. SMITH                                                          POUR LES DEMANDERESSES

M. DAVID M. SCRIMGER                                                     POUR LA DÉFENDERESSE

M. J. ALAN AUCOIN                                                             POUR LA DÉFENDERESSE NOVOPHARM LTD. DANS LE DOSSIER T-1697-01

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

GOWLING LAFLEUR HENDERSON LLP                            POUR LES DEMANDERESSES

OTTAWA (ONTARIO)

GOODMANS LLP                                                                  POUR LA DÉFENDERESSE

TORONTO (ONTARIO)

BLAKE CASSELS & GRAYDON LLP                                  POUR LA DÉFENDERESSE

TORONTO (ONTARIO)                                                         NOVOPHARM LTD. DANS LE DOSSIER T-1697-01


Date : 20020926

Dossier : T-1100-97

Ottawa (Ontario), le 26 septembre 2002

EN PRÉSENCE DE : MADAME LE PROTONOTAIRE ARONOVITCH

ENTRE :

                                                     ELI LILLY AND COMPANY

et ELI LILLY CANADA INC.

                                                                                                                                  demanderesses

                                                                          - et -

                                                                  APOTEX INC.

                                                                                                                                      défenderesse

                                                                ORDONNANCE

VU la requête présentée pour Apotex visant à obtenir :

1.                        Une ordonnance autorisant la modification de la troisième défense et demande reconventionnelle modifiée, datée du 16 avril 2001, conformément à l'annexe A de l'avis de requête modifié d'Apotex, telle qu'elle a été modifiée de nouveau (voir les motifs de l'ordonnance, prononcés aujourd'hui);    

2.                        Une ordonnance prorogeant le délai de délivrance et de signification de la demande reconventionnelle modifiée;


POUR les motifs prononcés aujourd'hui;

LA COUR ORDONNE :

1.                        La requête est accueillie.

2.                        Apotex est autorisée à signifier et à déposer sa défense et demande reconventionnelle modifiée au plus tard dix (10) jours à compter de la date de la présente ordonnance.

3.                        Les dépens de la requête seront adjugés à Apotex si elle obtient gain de cause.

4.                        Les coûts de l'ajournement, fixés aux montants de 2 000 $ et 5 000 $, y compris les débours, sont accordés à Eli Lilly et à Novopharm, respectivement, quelle que soit l'issue de la cause.

« Roza Aronovitch »

       Protonotaire

Traduction certifiée conforme

Martine Guay, LL. L.


Date : 20020926

Dossier : T-1100-97

Ottawa (Ontario), le 26 septembre 2002

EN PRÉSENCE DE : MADAME LE PROTONOTAIRE ARONOVITCH

ENTRE :

                                                     ELI LILLY AND COMPANY

et ELI LILLY CANADA INC.

                                                                                                                                  demanderesses

                                                                          - et -

                                                                  APOTEX INC.

                                                                                                                                      défenderesse

                                                                ORDONNANCE

VU la requête présentée par la défenderesse Apotex visant à obtenir :


1.             Une ordonnance joignant la présente procédure à la procédure dans le dossier du greffe n ° T-1697-01 ou une ordonnance indiquant la façon appropriée de poursuivre l'instruction de la présente action et de la procédure dans le dossier du greffe n ° T-1697-01;

a)           Les interrogatoires préalables effectués et à effectuer par les parties dans chacun des dossiers du greffe nos T-1100-97 et T-1697-01 et toutes les procédures interlocutoires s'y rapportant seront communs à chacune des actions dans ces dossiers;

b)           Les procédures dans les deux dossiers seront gérées par le même protonotaire et le même juge responsable de la gestion de l'instance;

c)           Une seule conférence préparatoire sera tenue sur les deux dossiers;

d)           La preuve d'experts présentée par les deux parties sera commune aux deux dossiers et sera réputée avoir été déposée dans chaque procédure;

e)           L'instruction de l'action dans chaque dossier aura lieu en même temps.

f)            Un exemplaire de la présente ordonnance sera versé dans le dossier du greffe n ° T-1697-01.


2.                       Les dépens de la présente requête.

APRÈS examen des documents déposés par les parties;

VU les observations des parties;

Je souscris aux observations formulées par Eli Lilly et Novopharm sur ce point. Aussi, dans l'exercice de mon pouvoir discrétionnaire en tant que protonotaire responsable de la gestion de l'instance, je rejetterai la requête. En particulier, les principales questions et la preuve à présenter dans ces actions se rapportent à la validité des brevets et à la contrefaçon. Or, les brevets en cause dans les deux actions ne sont pas les mêmes. À vrai dire, la seconde action porte sur deux nouveaux brevets et plus de 100 éléments de l'état de la technique non reliés.

Je ne vois pas de points communs entre les questions de droit ou de fait, si ce n'est à l'égard d'un aspect limité des deux poursuites. La preuve n'est pas parallèle non plus dans sa plus grande partie et l'issue d'une affaire ne réglera pas l'autre affaire. Le dossier T-1100-97 porte sur une procédure rendue à un stade avancé, dans laquelle l'enquête préalable est pratiquement terminée. Le dossier T-1697-01 est au stade initial. La défense n'a pas encore été signifiée dans cette procédure. Le fait d'autoriser la jonction au stade actuel ne simplifierait pas ces procédures; cela les compliquerait plutôt et les retarderait, manifestement au détriment d'Eli Lilly.


Je pense qu'on pourrait atteindre une bonne partie de l'efficience visée en utilisant les interrogatoires préalables concernant les questions de concurrence effectués dans une action dans le cadre de l'autre action, avec peut-être un supplément minime d'interrogatoire préalable pour tenir compte des circonstances de la seconde action.

Cela dit, je conviens qu'il y aura probablement des avantages à ce que les deux actions soient gérées par le même juge et le même protonotaire et je prononcerai une ordonnance à cet effet.

LA COUR ORDONNE :

1.       La requête est accueillie dans la mesure indiquée ci-dessous et rejetée pour le reste.

2.       Les procédures dans les deux dossiers seront gérées par le même juge responsable de la gestion de l'instance et le même protonotaire responsable de la gestion de l'instance.

3.              Un exemplaire de la présente ordonnance sera versé au dossier du greffe n ° T-1697-01.


4.              Les parties ont vingt (20) jours à compter de la date de la présente ordonnance pour signifier et déposer, conjointement ou séparément, un calendrier pour les stades ultérieurs dans le dossier T-1100-97 et dans le dossier T-1697-01.

5.              Les dépens de la présente requête seront attribués à Eli Lilly et à Novopharm si elles obtiennent gain de cause.

« Roza Aronovitch »

       Protonotaire

Traduction certifiée conforme

Martine Guay, LL. L.


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