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Date : 19990422


99-T-9

EN PRÉSENCE DE MADAME LE JUGE SHARLOW

E n t r e :


687764 ALBERTA LTD., faisant affaire

sous la raison sociale de

WEST END HEALTH AND HOME CARE CENTRE,


demanderesse,


- et -


MINISTRE DE LA SANTÉ,


défendeur.

     ORDONNANCE

     L'autorisation de proroger le délai prescrit pour présenter une demande de contrôle judiciaire est refusée.

     Karen R. Sharlow

                                 Juge

Traduction certifiée conforme

Bernard Olivier, LL.B.


Date : 19990422


99-T-9

E n t r e :


687764 ALBERTA LTD., faisant affaire

sous la raison sociale de

WEST END HEALTH AND HOME CARE CENTRE,


demanderesse,


- et -


MINISTRE DE LA SANTÉ,


défendeur.

     MOTIFS DE L'ORDONNANCE

LE JUGE SHARLOW


[1]      La Cour est saisie d'une demande visant à obtenir, en vertu du paragraphe 18.1(2) de la Loi sur la Cour fédérale, une ordonnance prorogeant le délai prescrit pour présenter une demande de contrôle judiciaire.


Les faits


[2]      La demanderesse est une société exploitant une entreprise de pharmacie et de vente de matériel sanitaire. Elle revendique le droit de facturer directement le gouvernement du Canada pour les produits médicaux qu'elle fournit à des personnes qui bénéficient du Programme des services de santé non assurés (PSSNA) administré par la Direction générale des services médicaux du ministère de la Santé.


[3]      La demanderesse affirme que ce droit s'acquiert lorsqu'on devient partie à un " contrat de fourniture " conclue avec une société appelée Canadian Health Management Corporation Inc. (First Canadian). First Canadian est responsable de certains des aspects de l'administration du programme PSSNA aux termes d'un contrat qu'elle a signé avec le gouvernement du Canada, en l'occurrence le [TRADUCTION] " contrat de renseignements sur les services de santé non assurés et le traitement des demandes ". On ne m'a cité aucun texte législatif ou réglementaire qui parle de tels contrats de fourniture.


[4]      Le 1er décembre 1998, la demanderesse a conclu deux contrats de fourniture avec First Canadian. Les deux contrats sont identiques, sauf en ce qui concerne les produits auxquels ils s'appliquent.


[5]      Il est stipulé dans chacun des contrats de fourniture que la date d'expiration est le 31 décembre de l'année suivante, mais que le contrat est prorogé de plein droit pour des termes successifs d'une année à moins que l'une ou l'autre partie ne mette fin au contrat en faisant parvenir un préavis écrit à l'autre partie au moins 90 jours avant l'expiration du terme initial ou de tout terme subséquent. L'article 8 prévoit deux autres façons de mettre fin au contrat et d'en empêcher la reconduction. Ainsi, l'alinéa 8b) stipule que, si l'une des parties au contrat fait défaut de respecter l'une des obligations qui lui sont imposées par le contrat et si elle ne remédie pas à son défaut dans un délai déterminé après avoir été constituée en défaut, l'autre partie a le droit de résilier le contrat sur préavis écrit de quatorze jours. L'alinéa 8c) prévoit que l'une ou l'autre partie peut procéder à la résiliation motivée du contrat sans préavis et sans pénalité.


[6]      Le 9 décembre 1998, First Canadian a envoyé un avis à la demanderesse pour obtenir la résiliation motivée des deux contrats de fourniture. Le motif de la résiliation n'a pas été précisé et la demanderesse affirme ne pas être au courant de ce motif. Si la validité de la résiliation est confirmée, la demanderesse n'aura pas le droit de facturer au Canada le matériel sanitaire qu'elle a fourni à compter du 9 décembre 1998 aux particuliers visés par le programme.


[7]      Entre le 9 et le 24 décembre 1998, l'avocat de la demanderesse a entrepris des démarches pour obtenir des explications au sujet de la résiliation. Le 10 décembre 1998, First Canadian lui a envoyé une lettre dont voici quelques extraits :

     [TRADUCTION]         
     Nous [First Canadian] sommes devenus le fournisseur actuel [de Santé Canada] le 1er décembre de cette année. Le contrat intervenu entre votre cliente [la demanderesse] et First Canadian Health ne vise que le Programme des services de santé non assurés. C'est la Direction générale des services médicaux de Santé Canada qui se charge de toute la gestion du programme. Le rôle de First Canadian Health consiste à statuer sur les demandes et à payer les fournisseur conformément aux directives que lui donne la Direction générale des services médicaux.         
     L'ordre de résilier le contrat en question, qui ne vise que le Programme des services de santé non assurés, provenait de la Direction générale des services médicaux de Santé Canada. La résiliation était motivée, le motif étant le non-respect du Programme des services de santé non assurés.         

[8]      Aucune autre explication n'a été donnée. Le 7 janvier 1999, la demanderesse a introduit une action en justice contre First Canadian devant la Cour du Banc de la Reine de l'Alberta. Les réparations qu'elle sollicite dans cette action sont les suivantes : premièrement, un jugement déclarant que les contrats de fourniture constituent un engagement contractuel obligatoire ; deuxièmement, une injonction interdisant à First Canadian de résilier illicitement les contrats de fourniture et, finalement et à titre subsidiaire, des dommages-intérêts pour la résiliation illicite des contrats de fourniture.

[9]      La demanderesse a saisi la Cour du Banc de la Reine d'une requête en injonction provisoire en vue de faire interdire à First Canadian de résilier les contrats. Le 9 février 1999, les affidavits qui ont été produits au soutien de cette demande ont fait l'objet d'un contre-interrogatoire de la part de l'avocat de First Canadian. Le docteur Harry Hodes, un représentant du ministère de la Santé, était présent lors de ce contre-interrogatoire, avec le consentement de la demanderesse. La requête en injonction est toujours en instance, après avoir été ajournée sine die.

[10]      La demanderesse affirme que la présence du docteur Hodes lors du contre-interrogatoire a amené la demanderesse à conclure que la décision de résilier les contrats de fourniture avait été prise par un fonctionnaire du ministère de la Santé et non par First Canadian.

[11]      La demanderesse reconnaît qu'elle a le droit d'entreprendre des démarches en vue de constituer le ministre de la Santé partie à l'action en instance devant le tribunal de l'Alberta, mais elle soutient que, si la résiliation était une décision du ministère de la Santé, le paragraphe 18(1) de la Loi sur la Cour fédérale1 empêche la Cour du Banc de la Reine de l'Alberta de prononcer une ordonnance annulant la décision de résilier les contrats. La demanderesses affirme que c'est la seule mesure qui aurait pour effet de forcer la remise en vigueur des contrats de fourniture à compter du 9 décembre 1998.

[12]      Je ne sais pas avec certitude si la compétence du tribunal albertain saisi d'une action en inexécution de contrat est aussi limitée que ce que craint la demanderesse. Si la demanderesse a tort sur ce point, sa demande de contrôle judiciaire ferait inutilement double emploi, et l'autorisation de proroger le délai devrait lui être refusée pour ce seul motif. Je préfère toutefois accorder à la demanderesse le bénéfice du doute et partir du principe que, si elle obtenait gain de cause dans sa demande de contrôle judiciaire, la demanderesse obtiendrait la meilleure réparation possible, sinon la seule.

[13]      Si la décision de résilier les contrats a effectivement été prise le 9 décembre 1998 et qu'elle peut légitimement faire l'objet d'un contrôle judiciaire, le paragraphe 18.1(2) de la Loi sur la Cour fédéral exigeait que la demande de contrôle judiciaire soit introduite dans les 30 jours suivant cette date. Or, la présente demande de prorogation de délai a été déposée le 5 mars 1999.

Principes à appliquer

[14]      Il n'existe pas de règle absolue qui permette de déterminer dans tous les cas s'il y a lieu d'accorder l'autorisation de proroger le délai prescrit pour introduire une instance. La raison d'être du délai est de donner effet au principe que les procès doivent avoir une fin. En revanche, en accordant aux tribunaux le pouvoir discrétionnaire de proroger les délais, on reconnaît qu'il peut être nécessaire de proroger un délai pour rendre justice aux parties. Il faut tenir compte de ces considérations opposées pour décider s'il y a lieu ou non d'accorder la prorogation demandée2.

[15]      C'est dans la jurisprudence que l'on trouve les facteurs dont il faut tenir compte en la matière. Le facteur le plus important est celui qui oblige le demandeur à démontrer qu'il dispose d'arguments solides lui permettant d'obtenir la réparation demandée ou, pour reprendre l'expression utilisée dans certaines décisions, qu'il a des chances raisonnables d'obtenir gain de cause. En outre, le retard doit être expliqué ou justifié et le demandeur doit présenter des éléments de preuve pour démontrer qu'il a exercé ses droits avec une diligence raisonnable. Habituellement, le demandeur essaie de démontrer qu'il avait véritablement l'intention, dans les délais prévus par la loi, de solliciter une réparation relativement à la décision contestée et il présente des éléments de preuve au sujet des démarches qu'il a accomplies pour faire les diligences nécessaires. Le tribunal doit tenir compte de tout préjudice subi par le défendeur ou les tiers.

Diligence raisonnable de la demanderesse

[16]      Le défendeur affirme que le défaut de la demanderesse de reconnaître la lettre du 10 décembre 1998 comme élément de preuve tendant à démontrer que la décision est susceptible de contrôle judiciaire devrait militer contre sa demande de prorogation de délai. Je ne suis pas de cet avis. Au 10 décembre 1998, la demanderesse n'avait aucun moyen de savoir si le contenu de la lettre était véridique. À cet égard, il suffit de signaler que l'auteur de cette lettre n'était pas un fonctionnaire du ministère de la Santé.

[17]      Sur la question de la diligence raisonnable, je dois également tenir compte du témoignage du demandeur selon lequel, au cours de la période préalable à l'introduction de l'action albertaine, aucune explication n'a été donnée à la demanderesse pour justifier la résiliation, malgré ses demandes répétées en ce sens et ce, malgré le fait que First Canadian " et, je suppose, le défendeur " devaient être au courant de ces faits. Il ressort également de la preuve que la demanderesse a contesté dès le début la décision de résilier les contrats, mais qu'elle a été entravée par le manque d'information. Il convient de souligner que le défendeur ne prétend pas qu'il a subi un préjudice en raison du temps que la demanderesse a laissé s'écouler avant d'introduire son instance en contrôle judiciaire.

[18]      Si l'existence de la lettre du 10 décembre 1998 était le seul argument en faveur du défendeur, je ferais droit à la présente demande.

Question de savoir si la décision de résilier les contrats n'est pas susceptible d'un contrôle judiciaire parce qu'il s'agit d'une décision commerciale

[19]      Le défendeur affirme que les principes de droit administratif ne devraient pas être appliqués à ce qui constitue essentiellement une question ressortissant au droit commercial privé (Socanav Inc. v. Northwest Territories (Commissioner) (1993), 16 Admin. L.R. (2d) 266 (C.S.T.N.-O.). À l'appui de la thèse contraire, la demanderesse cite le jugement Hughes Let Co. v. Manitoba (Minister of Government Services) (1991), 72 Man. R. (2d) 81 (C.B.R. Man.) à l'appui de la proposition que le contrôle judiciaire constitue une réparation appropriée en ce qui concerne tout manquement au devoir général d'agir avec équité qui est imposé dans le cas de toutes les décisions de l'Administration qui ont une incidence sur les droits, les intérêts, les biens, les privilèges et la liberté d'une personne3.

[20]      Il me semble qu'il n'est pas aussi facile que le prétend le défendeur de diviser les décisions en décisions susceptibles de contrôle judiciaire et en décisions non susceptibles de contrôle judiciaire. Je me reporte à cet égard au passage suivant de l'ouvrage de Brown et Evans, Judicial Review of Administrative Action in Canada4 at 1:2257 (renvois omis) :

     [TRADUCTION]         
     Ce ne sont pas toutes les décisions émanant d'organismes publics ou créés par la loi qui sont susceptibles d'un contrôle judiciaire au moyen de brefs de prérogative ou en vertu de lois sur la procédure de contrôle judiciaire. D'ailleurs, malgré l'origine législative de tous les pouvoirs que les organismes publics peuvent exercer, les tribunaux refusent habituellement de contrôler les décisions qui peuvent être qualifiées de " commerciales " par opposition à " publiques " au motif que, lorsqu'ils exercent des pouvoirs découlant de leur capacité de contracter, les organismes publics n'agissent pas à titre d'autorité publique.         

     [...]

     Plus récemment toutefois, il a été reconnu qu'on peut recourir aux contrats pour favoriser concrètement l'atteinte d'objectifs gouvernementaux. Qui plus est, étant donné que les pouvoirs dont une autorité publique est investie, notamment ceux qui ont trait aux contrats, sont limités sur le plan légal et qu'ils ne peuvent être exercés que pour les objets autorisés par la loi, et comme ils impliquent la dépense de fonds publics ou d'autres biens publics, il semble qu'en principe ils relèvent du pouvoir de contrôle des tribunaux.         

Le fait que la décision contestée soit une décision de résilier un contrat n'empêche pas en soi le contrôle judiciaire.

[21]      Il ne s'ensuit pas que le contrôle judiciaire soit ouvert dans chaque affaire portant sur la résiliation d'un contrat auquel le gouvernement est partie ou qui se rapporte de près ou de loin à un programme gouvernemental. Chaque fois qu'il y a convergence de droits contractuels et de droits conférés par la loi, chaque cas est un cas d'espèce lorsqu'il s'agit de décider s'il peut y avoir ouverture au contrôle judiciaire. La lettre du 10 décembre 1998 susmentionnée permet de conclure à l'existence d'une telle convergence en l'espèce, si l'on suppose que la lettre en question reflète fidèlement les faits.

Chances de succès de la demanderesse

[22]      La question la plus épineuse qui se pose est celle de savoir si la demanderesse a des chances raisonnables d'obtenir gain de cause.

[23]      Voici comment je résume la thèse de la demanderesse sur cette question. La Loi sur le Ministère de la Santé confère au ministre de la Santé le pouvoir de gérer et de diriger le ministère de la Santé et, partant, le programme PSSNA. Il faut présumer que la décision de résilier les contrats de fourniture a été prise dans l'exercice de ce pouvoir législatif et que, pour cette raison, elle est assujettie au contrôle judiciaire. La demanderesse a des chances raisonnables d'obtenir gain de cause dans sa demande de contrôle judiciaire en raison du défaut du demandeur d'aviser à l'avance la demanderesse de sa décision de résilier le contrat et du fait qu'il ne lui a pas donné l'occasion de se faire entendre avant que la décision ne soit prise.

[24]      Voici comme on peut résumer la thèse du défendeur sur ce point. Les contrats de fourniture sont la seule source de droits que possède la demanderesse pour contester la résiliation, et les seules parties à ces contrats sont la demanderesse et First Canadian. En concluant ces contrats, First Canadian agissait en son nom personnel et non en tant que mandataire du ministère de la santé ou d'un autre organisme gouvernemental. Indépendam-ment du rôle que le ministère de la Santé a pu jouer en ce qui concerne la décision de résilier les contrats, la décision elle-même a été prise exclusivement par First Canadian, qui exerçait alors son droit contractuel de procéder à une résiliation motivée. Dans le contexte de la décision de résilier les contrats, ni le ministère de la Santé ni le ministre de la Santé ne constituent un " office fédéral " au sens de la Loi sur la Cour fédérale , et, en conséquence, la décision de résilier les contrats échappe à tout contrôle judiciaire. Bien qu'on puisse à juste titre se demander si la résiliation était justifiée, il s'agit là d'une question qui peut et qui doit être examinée dans le cadre de l'action intentée devant la Cour du Banc de la Reine de l'Alberta.

[25]      L'argument du défendeur soulève toutefois un problème : il repose en effet sur la prémisse que la décision n'a pas été prise par le ministre de la Santé ou par un de ses délégués, méconnaissant ainsi le fait que la décision de résilier les contrats de fourniture comporte deux aspects. Autrement dit, il est possible que la décision de résilier les contrats ait été prise à la fois dans l'exercice d'un droit contractuel et dans l'exercice d'un pouvoir législatif délégué. Je suis loin de conclure que tel est le cas, mais cette possibilité existe. On ne m'a pas soumis suffisamment d'éléments de preuve pour me permettre de trancher la question dans un sens ou dans l'autre.

[26]      À cet égard, le défendeur a cité les dispositions suivantes du contrat conclu entre First Canadian et le gouvernement du Canada :

     [TRADUCTION]         
     L'entrepreneur [First Canadian] est engagé à titre d'entrepreneur indépendant dans l'unique but d'exécuter les travaux. Ni l'entrepreneur ni les membres de son personnel ne sont engagés à titre d'employés, de préposés ou de mandataires du Canada.         

[27]      Cette disposition n'est d'aucune utilité pour faire avancer le débat dans un sens ou dans l'autre. À sa face même, elle ne concerne que la relation contractuelle entre First Canadian et le gouvernement du Canada, et elle n'est donc pas nécessairement incompatible avec l'existence d'une délégation de pouvoirs de facto du ministre de la Santé à First Canadian. En tout état de cause, un mandat peut être créé par suite des agissements des parties en dépit d'une entente écrite contraire5.

[28]      Ainsi, bien que je ne sois pas en mesure de décider si la décision de résilier les contrats en cause découlait d'une délégation de facto ou d'un mandat, j'estime qu'on peu à juste titre le présumer dans le contexte de la présente demande, ce qui signifie que la décision devrait être assujettie au contrôle judiciaire.

[29]      La question n'est pas pour autant vidée. Bien qu'il soit en règle générale vrai que la personne visée par une décision susceptible d'un contrôle judiciaire ait droit à une procédure équitable et à un traitement juste, il est nécessaire de se demander à quelle protection procédurale la demanderesse pouvait prétendre, eu égard aux faits particuliers de l'espèce. Les modalités des contrats de fourniture sont pertinentes à cet égard.

[30]      Il vaut la peine de répéter que ce que la demanderesse reproche au défendeur c'est de ne pas lui avoir envoyé de préavis de résiliation des contrats de fourniture, ce qui l'a empêchée de se faire entendre avant que la décision de résilier les contrats ne soit prise. Les droits que possède la demanderesse en tant que fournisseur en vertu du programme PSSNA sont définis dans les contrats de fourniture par lesquels la demanderesse a accepté d'être liée. On ne m'a cité aucune loi ou aucun règlement qui définisse davantage ces droits ou qui les mentionne à tout le moins.

[31]      Les clauses de résiliation font partie des contrats. Il y a lieu de présumer que la demanderesse a accepté d'être liée par les clauses de résiliation tout autant que par les autres conditions des contrats. Nul n'a laissé entendre que le consentement de la demanderesse a été obtenu par des moyens irréguliers ou qu'il était invalide, ou encore que les clauses de résiliation sont illégales ou injustes ou que leur effet a été diminué par les agissements de First Canadian ou du défendeur ou par une promesse qu'ils auraient faite.

[32]      J'interprète donc les clauses de résiliation au pied de la lettre. Elles prévoient trois modes distincts d'extinction. Les deux premiers donnent expressément à la demanderesse droit à un préavis. Le troisième mode d'extinction est la résiliation motivée sans préavis. En l'espèce, c'est le troisième mode qui a été choisi pour mettre fin aux contrats de fourniture.

[33]      Il me semble, à la lecture de l'ensemble des clauses de résiliation, que la demanderesse a renoncé à tout droit d'être avisée au préalable de la décision de procéder à la résiliation motivée des contrats. Si c'est effectivement le cas, il faut également qu'elle ait renoncé à tout droit d'être entendue avant que la décision ne soit prise, parce que le seul but du préavis est de faciliter cette audition. Il s'ensuit que, même si la décision de résilier les contrats de fourniture constituait d'une certaine manière l'exercice d'un pouvoir légal ou encore un acte accompli par un mandataire du ministre de la Santé, elle ne peut être invoquée pour justifier une demande de contrôle judiciaire fondée sur l'absence de préavis.

[34]      Je conclus que la demanderesse n'a aucune chance raisonnable d'obtenir gain de cause dans sa demande de contrôle judiciaire. Pour ce motif, sa demande de prorogation de délai est rejetée.

                                 Karen R. Sharlow

                            

                                     Juge

Ottawa (Ontario)

Le 22 avril 1999.

Traduction certifiée conforme

Bernard Olivier, LL.B.

     COUR FÉDÉRALE DU CANADA

     SECTION DE PREMIÈRE INSTANCE

     AVOCATS ET PROCUREURS INSCRITS AU DOSSIER

No DU GREFFE :              99-T-9
INTITULÉ DE LA CAUSE :      687764 ALBERTA LTD., faisant affaire sous la raison
                     sociale de WEST END HEALTH AND HOME CARE
                     CENTRE c. MINISTRE DE LA SANTÉ
LIEU DE L'AUDIENCE :          Edmonton (Alberta)
DATE DE L'AUDIENCE :      13 avril 1999

MOTIFS DE L'ORDONNANCE prononcés par le juge Sharlow le 22 avril 1999

ONT COMPARU :

Me Walter S. McKall          pour la demanderesse
Me Lorraine Neill              pour le défendeur

PROCUREURS INSCRITS AU DOSSIER :

McCuaig Desrochers              pour la demanderesse

Edmonton (Alberta)

Me Morris Rosenberg          pour le défendeur

Sous-procureur général

du Canada

Ottawa (Ontario)

__________________

     1Voici un extrait du paragraphe 18(1) de la Loi sur la Cour fédérale :
         Sous réserve de l'article 28, la Section de première instance a compétence exclusive, en première instance, pour :
         a)      décerner une injonction, un bref de certiorari, de mandamus, de prohibition ou de quo warranto, ou pour rendre un jugement déclaratoire contre tout office fédéral [...]

     2Grewal c. Ministre de l'Emploi et de l'Immigration, [1985] 2 C.F. 263 (C.A.F.), Consumers' Ass'n (Can.) c. Ontario Hydro [No. 2], [1974] 1 C.F. 460 (C.A.F.).

     3Dans le jugement Hughes Land , la Cour s'est fondée sur les propos tenus par le juge Dickson dans l'arrêt Martineau c. Comité de discipline de l'établissement de Matsqui, (1979), [1980] 1 R.C.S. 602, et sur ceux qu'a formulés le juge Strayer dans le jugement Thomas Assaly Corporation Ltd. c. La Reine, (1990), 44 Admin. L.R. 89 (C.F. 1re inst.).

     4D. Brown and J. Evans, Judicial Review of Administrative Action in Canada (Toronto: Canvasback Publishing, 1998)

     5Commissioner of Inland Revenue v. Orion Caribbean Ltd., [1997] S.T.C. 923, [1997] N.L.O.R. No. 537 (QL) (C.J.C.P.).

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