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Date : 20020828

Dossier : T-2185-01

Référence neutre: 2002 CFPI 917

Vancouver (Colombie-Britannique), le mercredi 28 août 2002

EN PRÉSENCE DE MADAME LE JUGE DAWSON

ENTRE:

                                                             H. JOANNE JOHNSON

                                                                                                                                              demanderesse

                                                                              - et -

                                       SA MAJESTÉ LA REINE, LA GENDARMERIE

                                                    ROYALE DU CANADA (G.R.C.),

                                          LE COMMISSAIRE ADJOINT W. SWEENY

                                                                                                                                                     défendeurs

                                  MOTIFS DE L'ORDONNANCE ET ORDONNANCE

LE JUGE DAWSON

[1]                 Les présents motifs font suite à deux requêtes présentées à la Cour lors de sa session générale tenue à Edmonton (Alberta) le 6 août 2002.


[2]                 La première requête, présentée au nom des défendeurs, vise à une ordonnance prorogeant le délai de production de la défense modifiée (ou de ce qui semble plus exactement être une défense faisant suite à la déclaration modifiée), à un jugement sommaire rejetant la prétention énoncée dans la déclaration et, subsidiairement, à une ordonnance radiant l'acte de procédure parce qu'il ne révèle aucune cause d'action valable et ne renferme pas un énoncé concis des faits importants sur lesquels s'appuie la demanderesse.

[3]                 La deuxième requête, produite au nom de la demanderesse, vise à un jugement par défaut selon les conditions exposées dans la déclaration modifiée.

[4]                 Un examen des antécédents procéduraux et des réclamations essentielles avancées dans cette action est nécessaire pour situer ces requêtes dans leur contexte.

(i)          Nature de la réclamation et antécédents procéduraux

[5]                 Mme Johnson, qui est autoreprésentée, a introduit cette action le 13 décembre 2001. Dans sa déclaration, elle poursuivait la Gendarmerie royale du Canada, le commissaire adjoint, Division « K » de la G.R.C., une personne qui serait l'actuel commissaire adjoint de la G.R.C., ainsi que M. Un tel. L'essentiel de sa réclamation apparaît aux paragraphes 5, 6, 9, 10, 11, 12, 13 et 14 de la déclaration, qui sont rédigés ainsi :

[Traduction]

(5)            En avril 1983, la demanderesse a été approchée et invitée à rendre quelques services confidentiels visés par la Loi sur la protection des témoins, chapitre 15 des Statuts du Canada (Loi sur les témoins).

(6)            Entre autres, les indications données à la demanderesse par le caporal défendeur Douglas MacDonald étaient que la demanderesse devrait être protégée et couverte par les droits et privilèges prévus par la Loi sur les témoins.


[...]

(9)            Les déclarations du préposé/mandataire de la G.R.C. aux fins de faire participer la demanderesse au programme des témoins sont notamment les suivantes :

a)              Protection - À l'égard de ceux qui voudraient se venger contre l' « ex-mari » de la demanderesse pour avoir agi comme « informateur » . Parce que la demanderesse était son « épouse » , cette protection serait étendue à la demanderesse car la vengeance pourrait être réputée une « culpabilité » par association, même si la demanderesse n'était pas une « informatrice » ou une criminelle.

b)              Réinstallation - quand et aussi souvent que cela serait jugé nécessaire en raison de a).

c)              Responsabilité à l'égard de toutes les dettes et charges existantes sous notre nom de Hinton. Aucune trace d'aucune sorte sous forme de papier n'allait subsister. Il s'agissait là d'une mesure de sécurité.

d)              Nouvelles pièces d'identité, notamment carte-santé, permis de conduire, N.A.S., certificats de naissance et permis de mariage qui indiqueront nos nouvelles identités, etc.

e)              Responsabilité financière à l'égard de l'hébergement, de la nourriture, des soins de santé, de l'habillement, de l'éducation, du transport et des divertissements dans le cadre du programme.

f)              Un paiement final en espèces pour le cas où le projet serait accompli.

g)              Un pardon royal pour les accusations criminelles existantes à l'égard de mon ex-mari, par radiation de toutes les charges portées contre lui, destruction de son casier judiciaire et demande de pardon royal (c.-à-d. que H. Joanne Johnson n'avait pas de casier judiciaire à cette époque en 1983).

h)              Toutes les nécessités existantes à mesure qu'elles se manifesteraient, afin de garantir la santé, la sécurité, la qualité de vie, la subsistance et autant que possible la création d'une vie normale, y compris la stabilité.

(10)          À tous les moments pertinents, la demanderesse a cru que les affirmations susmentionnées étaient véridiques, exactes et faites de bonne foi, pour se rendre compte ensuite qu'elles étaient destinées à la tromper.

(11)          De vive voix et par écrit, la demanderesse a prié les défendeurs ou exigé des défendeurs qu'ils se conforment aux conditions prévues par la Loi sur les témoins, mais sans succès.


(12)          En conséquence du manquement aux obligations fiduciaires et aux modalités des déclarations, la demanderesse a subi des dommages atteignant plus ou moins 378 000 $, qui seront prouvés durant le procès.

(13)          Il y a eu aussi violation des droits à l'égalité garantis par la Charte, en particulier l'article 15, parce que les défendeurs ont délibérément ignoré la notion d'égalité de traitement par rapport à « Leon » et autres concernés par ce même Programme des témoins ou, subsidiairement, parce qu'ils ont commis une faute lourde, qui a causé à la demanderesse des dommages de 15 000 000 $.

(14)          Les défendeurs, la G.R.C., le commissaire adjoint W. Sweeny, le caporal MacDonald et le caporal Lynch (et d'autres) sont responsables des dommages que la demanderesse a subis par suite des actes susmentionnés.

[6]                 À titre de réparation, la demanderesse réclame d'importants dommages-intérêts, une ordonnance de mandamus obligeant le commissaire adjoint à lui verser un soutien financier d'au moins 3 000 $ par mois, enfin les intérêts et les dépens.

[7]                 Une semaine après avoir déposé la réclamation, la demanderesse a voulu solliciter ex parte une ordonnance de mandamus, mais un juge de la Cour a ordonné que, puisqu'aucune justification n'avait été donnée à la Cour au soutien de la procédure ex parte, la requête soit signifiée de la manière ordinaire et soit instruite au cours de la session générale de la Cour à Edmonton en janvier.


[8]                 Le 22 janvier 2002, une défense fut déposée en réponse à la déclaration, défense qui, entre autres, niait l'existence d'une quelconque entente ou obligation. La défense reconnaissait l'existence d'un protocole d'entente conclu avec le mari de la demanderesse pour la fourniture de service de protection à la demanderesse et à son mari à compter du 13 juillet 1983, mais elle affirmait que toutes les conditions du protocole d'entente avaient été accomplies et que l'entente avait été résiliée le 7 décembre 1984.

[9]                 Lors de la séance générale de la Cour à Edmonton, en janvier, la requête en mandamus déposée par la demanderesse fut ajournée à la session générale de février, les défendeurs reçurent l'ordre de signifier et de produire avant une certaine date leur requête projetée en jugement sommaire, pour présentation à la session générale de février, et la Cour ordonna la nomination d'un juge responsable de la gestion de l'instance en cas d'échec de la requête en jugement sommaire.

[10]            Les défendeurs ont effectivement signifié et produit les documents se rapportant à leur requête en jugement sommaire, et la demanderesse a sollicité ex parte une ordonnance forçant le contre-interrogatoire du témoin qui avait déposé sous serment l'affidavit au soutien de la requête des défendeurs en jugement sommaire. Cette requête ne fut pas semble-t-il inscrite pour audition car l'avis de requête ne contenait aucune date proposée d'audition.

[11]            Lors de la session générale de la Cour en février, la requête de la demanderesse en mandamus et la requête des défendeurs en jugement sommaire furent ajournées sine die afin de permettre à la demanderesse de se faire représenter adéquatement et de modifier sa déclaration. La demanderesse dit qu'elle n'a pas demandé cet ajournement.

[12]            Le 21 mai 2002, la demanderesse a déposé une déclaration modifiée bien que ni une autorisation ni un consentement ne fussent donnés pour le dépôt du document. La déclaration modifiée désignait comme défendeur « Sa Majesté la reine » , la Gendarmerie royale du Canada (G.R.C.) et le commissaire adjoint, W. Sweeny. L'essentiel de la déclaration modifiée se présente ainsi :

[Traduction]

4.              Le 13 juillet 1983, un protocole d'entente (le protocole) fut conclu par la défenderesse, « Sa Majesté la reine » , par l'entremise de son préposé, le caporal G.F. Lynch, de la Gendarmerie royale du Canada (G.R.C.), et par « Leon » , qui représentait la demanderesse.

5.              Comme l'atteste la pièce « B » de l'affidavit de l'agent Begg, un employé de la G.R.C., daté du 1er février 2002 et contenu dans un document appelé « Reconnaissance et libération inconditionnelle » , les faits suivants, essentiels à la présente affaire, sont établis, à savoir :

A.             Les parties étaient M. et/ou Mme H. Joanne Johnson (la demanderesse) et « Sa Majesté la reine » , représentée par la G.R.C., la défenderesse.

B.             En raison de son rôle dans certaines enquêtes de la G.R.C., la vie, la sécurité et les biens de la demanderesse étaient déjà menacés ou compromis dès le 1er février 1983.

C.             La G.R.C. avait de plus reconnu et admis qu'elle demeurait responsable des dettes passées ou futures.

D.             Les signataires de la Reconnaissance et de la libération inconditionnelle étaient :

1.              Le mari de la demanderesse

2.              Le caporal T.G. Sommerfeld, de la G.R.C.

E.              La demanderesse n'a jamais signé le document susmentionné et appelé « Reconnaissance et libération inconditionnelle » , daté du 7 décembre 1984.


6.              Dans l'intervalle, la demanderesse fut approchée par le caporal Douglas MacDonald, de la G.R.C. Entre autres, les matières suivantes furent proposées par ledit caporal MacDonald et acceptées par la demanderesse.

A.             Réinstallation

B.             Nouvelles identités, notamment : carte-santé, permis de conduire, numéro d'assurance sociale, certificat de naissance et permis de mariage.

C.             Soutien financier pour : l'hébergement, la nourriture, les soins de santé, l'habillement, l'éducation et autres frais divers.

D.             Toutes les nécessités existantes à mesure qu'elles se manifestaient, afin de garantir à la demanderesse : la santé, la sécurité, le maintien de sa qualité de vie et la conduite d'une vie normale.

7.              Malgré les prières de la demanderesse pour que la défenderesse se conforme aux conditions arrêtées par la demanderesse et la défenderesse, la défenderesse a refusé et a continué de refuser de s'exécuter, et en conséquence, la demanderesse a subi une perte pécuniaire de 378 000 $, plus ou moins, qui sera prouvée durant le procès.

8.              EN APPLICATION du Programme de 1983 pour la protection des témoins, le Programme de protection des témoins fut adopté et sanctionné le 20 juin 1996, programme qui essentiellement offrait une protection continue aux personnes qui avaient apporté une aide aux organismes d'application de la loi, et la demanderesse bénéficiait encore des conditions de ce programme.

9.              De plus, les défendeurs, et chacun d'eux, avaient envers la demanderesse une obligation fiduciaire de prudence, celle de s'assurer que tous les faits se rapportant à la signature, par le mari de la demanderesse, de l'accord de libération ne soient jamais divulgués à la demanderesse. Les détails du document effectif n'ont jamais été discutés jusqu'à ce que l'affidavit de l'agent Stewart Begg fût signifié le 1er février 2002.

10.            Entre autres choses, la Loi sur le Programme de protection des témoins, Elizabeth II, chapitre 15, réitérait l'obligation de la défenderesse, de la G.R.C. et du commissaire adjoint d'apporter un soutien financier et juridique aux personnes telles que la demanderesse, qui avaient apporté une aide dans des mesures d'application de la loi.

[...]


13.            ET, les défendeurs n'ayant pas apporté le soutien nécessaire susmentionné, la demanderesse a affirmé que, dans la mesure où d'autres personnes se trouvant dans la situation de la demanderesse ont obtenu le soutien nécessaire, alors les droits à l'égalité garantis par la Charte des droits, en particulier l'article 15, ont été niés, entraînant pour la demanderesse des dommages de l'ordre de 15 000 000 $, plus ou moins.

14.            « Sa Majesté la reine » (la G.R.C.) et le commissaire adjoint, W. Sweeny, par leurs actions, par l'inaccomplissement de leurs obligations et par leurs manquements, à l'endroit de la demanderesse, sont solidairement responsables envers la demanderesse.

[13]            Les requêtes furent alors présentées lors de la session générale de la Cour le 18 juin 2002. La Cour a ordonné que la requête de la demanderesse en mandamus soit ajournée sine die, elle a ordonné que la requête des défendeurs en jugement sommaire soit impérativement instruite durant la session d'août de la Cour, et elle a ordonné que les défendeurs produisent dans un délai de 10 jours leur défense en réponse à la déclaration modifiée. Par inadvertance, la défense n'a pas été produite dans le délai, d'où la requête des défendeurs en prorogation du délai de production de la défense à l'égard de la déclaration modifiée.

[14]            Compte tenu de ce qui précède, je me propose d'examiner ce qui suit :

1.          L'état de la déclaration modifiée de la demanderesse.

2.          La requête de la demanderesse en jugement par défaut.

3.          La requête des défendeurs en radiation.

4.          La requête des défendeurs en jugement sommaire.


(ii)         L'état de la déclaration modifiée

[15]            L'article 75 des Règles de la Cour fédérale (1998) (les Règles) prévoit que la Cour peut sur requête autoriser une partie à modifier un document. En l'espèce, il est reconnu qu'il n'y a pas eu d'autorisation de modification de la déclaration. Cependant, l'article 56 des Règles prévoit que l'inobservation d'une disposition des Règles n'entache pas de nullité l'instance. C'est plutôt une irrégularité qui peut être corrigée en vertu des articles 58 à 60 des Règles.

[16]            Aucune requête soulevant l'irrégularité n'a été présentée, et la Cour a ordonné qu'une défense soit produite, dans un délai de 10 jours après la session générale de juin, en réponse à la déclaration modifiée.

[17]            Dans ces conditions, l'acte modifié n'est pas nul et sera considéré, aux fins de ces requêtes, comme la déclaration elle-même de la demanderesse.

(iii)        La requête de la demanderesse en jugement par défaut

[18]            Le paragraphe 210(1) des Règles est ainsi rédigé :


210.(1) Cas d'ouverture - Lorsqu'un défendeur ne signifie ni ne dépose sa défense dans le délai prévu à la règle 204 ou dans tout autre délai fixé par ordonnance de la Cour, le demandeur peut, par voie de requête, demander un jugement contre le défendeur à l'égard de sa déclaration.

210.(1) Motion for default judgment - Where a defendant fails to serve and file a statement of defence within the time set out in rule 204 or any other time fixed by an order of the Court, the plaintiff may bring a motion for judgment against the defendant on the statement of claim.


[19]            Ici, les défendeurs ont bien déposé une défense en réponse à la déclaration, et cette défense demeure dans le dossier. Dans les cas où une défense a été produite en réponse à une déclaration, je n'ai connaissance d'aucun précédent ni d'aucune règle posant que la non-production d'une défense en réponse à une déclaration modifiée donne à un défendeur le droit d'obtenir un jugement par défaut. Aucune règle ou précédent de cette nature n'a été cité.

[20]            Quoi qu'il en soit, le jugement par défaut n'est jamais automatique. C'est une ordonnance discrétionnaire. Voir par exemple l'affaire Audi Aktiengesellschaft c. Hayman Motors Ltd. [1999] A.C.F. no 530 (protonotaire). Vu les circonstances soumises à la Cour, et eu égard aux circonstances additionnelles où la demanderesse n'a pas donné avis de 14 jours francs de sa requête en jugement par défaut, ainsi que l'exige l'article 25 de la Loi sur la responsabilité civile de l'État et le contentieux administratif, L.R.C. (1985), ch. C-50, alors, dans l'exercice de mon pouvoir discrétionnaire, je rejette la requête de la demanderesse en jugement par défaut.

(iv)        La requête des défendeurs en radiation

[21]            Aucune cause d'action valable n'a été avancée à l'encontre du commissaire adjoint qui, selon la preuve, n'est pas « W. Sweeny » . Il n'existe pas un droit d'entité appelée « "Sa Majesté la reine" Gendarmerie royale du Canada (G.R.C.) » . Dans les procédures introduites devant la Cour fédérale, la Couronne peut être désignée « Sa Majesté la reine du chef du Canada » .

[22]            Par conséquent, la déclaration modifiée est radiée à l'encontre de tous les défendeurs, à l'exception de Sa Majesté la reine. Comme je ne puis voir la moindre cause d'action à l'encontre de ces défendeurs, et comme aucune n'a été invoquée, la déclaration est radiée sans autorisation de la modifier pour que soit affirmée une cause d'action à leur encontre. Voir Larden c. Canada (1998), 145 F.T.R. 140 (protonotaire), aux pages 149 et 150.

[23]            Le reste de la déclaration modifiée est, dans l'exercice de mon pouvoir discrétionnaire, radié, bien qu'avec autorisation de demander à la Cour une ordonnance modifiant la déclaration à l'encontre de Sa Majesté la reine du chef du Canada.

[24]            La déclaration est radiée à l'encontre de Sa Majesté la reine au motif que, telle qu'elle est maintenant plaidée, elle ne révèle aucune cause d'action et qu'elle peut préjudicier ou retarder le procès équitable de l'action. Je conclus ainsi pour les raisons suivantes :

1.          Les paragraphes 4 et 5 semblent invoquer un accord, mais les conditions de cet accord ne sont pas alléguées, et la violation de telles conditions n'est pas non plus alléguée à l'aide de faits importants suffisants pour donner lieu à une cause d'action. On ne sait trop à quel accord se réfère le paragraphe 7. Il ne suffit pas qu'une réclamation contienne de simples affirmations sans indiquer les faits sur lesquels se fondent ces affirmations. Voir Vojic c. Canada, [1987] 2 C.T.C. 203 (C.A.F.).


2.          Dans la mesure où le paragraphe 6 semble alléguer la conclusion d'un autre accord, les conditions du présumé accord qui donnent lieu à la réclamation ne sont pas énoncées comme elles devraient l'être, et le présumé manquement n'est pas non plus adéquatement plaidé dans le paragraphe 7.

3.          Les paragraphes 8 et 10, tels qu'ils sont invoqués, ne constituent pas une cause d'action et ne sont pas reliés à une autre allégation ni à la demanderesse.

4.          Le paragraphe 9, qui affirme une obligation fiduciaire, est incompréhensible dans sa rédaction actuelle. Les faits importants censés donner lieu à l'existence de l'obligation et à la violation de la présumée obligation ne sont pas plaidés adéquatement.

5.          Le paragraphe 13 n'invoque pas correctement une cause d'action selon l'article 15 de la Charte canadienne des droits et libertés.

6.          Après audition des arguments de la demanderesse, la réparation réclamée ne semble pas correspondre à ses griefs.


[25]            Les défendeurs et la Cour n'ont pas à conjecturer la réclamation de la demanderesse ou à présumer ou inférer les allégations manquantes. Dans cette mesure, la réclamation telle qu'elle est rédigée desservirait ou retarderait sans aucun doute le procès équitable de l'action. Il serait impossible aussi pour la Cour de bien diriger son déroulement dans des procédures où les questions sont définies par la déclaration modifiée.

[26]            Pour ces motifs, la Cour rendra une ordonnance radiant, selon les termes qu'elle précisera, la déclaration modifiée. Il ne m'est donc pas nécessaire d'examiner la requête en prorogation du délai de production d'une défense à l'égard de la déclaration modifiée. Cependant, sans la radiation de la déclaration, j'eusse accordé la prorogation demandée puisqu'une explication raisonnable a été donnée pour la non-production du document dans le délai. Je ne vois aucun préjudice, et les intérêts de la justice militent en faveur de l'octroi de la prorogation.

[27]            J'ai examiné la requête des défendeurs en jugement sommaire, mais je la juge prématurée pour les raisons suivantes.


[28]            D'abord, l'argument selon lequel il n'y a pas de véritable point en litige pour cause de prescription de la réclamation est fondé sur le fait que la demanderesse avait jusqu'au 12 décembre 2000 pour agir en justice. Cet argument est fondé sur l'idée que le délai de prescription a commencé à courir le jour où la demanderesse aurait refusé de signer un document intitulé « Reconnaissance et libération inconditionnelle » . Ce document, dont on affirme qu'il émanait de la demanderesse et de son mari « collectivement et individuellement, ainsi que solidairement » , n'a été signé que par le mari de la demanderesse. Le document reconnaît certains services fournis par la G.R.C. et reconnaît que la G.R.C. n'avait pas d'autres obligations. Cependant, la demanderesse affirme que l'entente initiale a été conclue par son mari en son nom (et c'est ce que dit le document), et qu'elle a demandé à maintes reprises l'aide que les défendeurs s'étaient engagés à lui apporter. Selon la preuve, la demanderesse n'a jamais signé l'entente résiliant l'accord initial. Il me semble que, dans ces conditions, il pourrait bien y avoir un véritable point en litige sur la question de savoir s'il existe un engagement avec rupture ininterrompue. À mon avis, la preuve produite par les défendeurs ne dispose pas entièrement de toutes les prétentions de la demanderesse.

[29]            Deuxièmement, les défendeurs invoquent l'affidavit de l'agent Begg. J'ai l'impression que l'on a essentiellement ignoré le souhait de la demanderesse de contre-interroger le témoin, un souhait exprimé dans une correspondance adressée à l'avocat des défendeurs.

[30]            Troisièmement, les défendeurs s'appuient sur une demande d'aveu qui aurait été signifiée à la demanderesse. Cependant, il n'a été déposé aucune preuve attestant que la demande a été signifiée à la demanderesse.


[31]            Quant au droit de la demanderesse de solliciter l'autorisation de modifier la déclaration à l'encontre de Sa Majesté la reine, la demanderesse n'a pas été représentée par un avocat dans l'instance. C'est son droit, mais, si elle décide de solliciter l'autorisation de modifier la déclaration, elle ferait bien, à tout le moins, de s'adresser à un avocat compétent pour qu'il prépare ou examine sa procédure écrite afin de s'assurer qu'elle fait état d'une cause d'action valable et afin d'éviter dans la mesure du possible d'autres requêtes de nature procédurale et d'autres délais.

[32]            Je n'accorde pas l'autorisation de déposer une procédure écrite modifiée, mais uniquement le droit de demander l'autorisation, parce que, à ce jour, la demanderesse a déposé deux versions d'une déclaration qui ne répondent pas aux exigences des Règles se rapportant aux procédures écrites. Afin d'éviter d'autres requêtes de nature procédurale, la demanderesse devrait être tenue de démontrer que la procédure écrite proposée répond aux exigences des Règles. Elle pourra le faire en annexant toute procédure écrite proposée à la requête en autorisation de modification.

[33]            Dans sa plaidoirie, l'avocat des défendeurs a indiqué que les défendeurs ne demandaient pas de dépens. Il n'est donc pas adjugé de dépens.

[34]            Pour ces motifs :


                                           ORDONNANCE

1.          La requête de la demanderesse en jugement par défaut est rejetée.

2.          La déclaration modifiée, qui, il convient de le mentionner, englobe la déclaration, est radiée à l'encontre de tous les défendeurs autres que Sa Majesté la reine du chef du Canada, sans que soit autorisée une modification.

3.          La déclaration modifiée, qui, encore une fois, pour plus de certitude, comprend la déclaration, est radiée à l'encontre de Sa Majesté la reine, avec autorisation pour la demanderesse de prier la Cour, sur requête dûment signifiée à l'avocat des défendeurs, d'autoriser la modification des actes de procédure. Un projet de procédure écrite modifié devrait être annexé à cette requête.

4.          Il n'est pas adjugé de dépens à l'égard de ces requêtes.

  

          « Eleanor R. Dawson »          

Juge

Traduction certifiée conforme

Suzanne M. Gauthier, trad. a., LL.L.


                          COUR FÉDÉRALE DU CANADA

                     SECTION DE PREMIÈRE INSTANCE

                       AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

  

No DU GREFFE :                    T-2185-01

  

INTITULÉ :                              H. Joanne Johnson c. Sa Majesté la reine, la Gendarmerie royale du Canada (G.R.C.), le commissaire adjoint W. Sweeny

  

LIEU DE L'AUDIENCE :      Edmonton (Alberta)

  

DATE DE L'AUDIENCE :    le 6 août 2002

  

MOTIFS DE L'ORDONNANCE

ET ORDONNANCE :           MADAME LE JUGE DAWSON

  

DATE DES MOTIFS :           le 28 août 2002

  

COMPARUTIONS :

  

Mme Joanne Johnson                                              POUR LA DEMANDERESSE (autoreprésentée)

  

M. Bruce Hughson                                                 POUR LES DÉFENDEURS

  

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

  

Mme Joanne Johnson                                              POUR LA DEMANDERESSE (autoreprésentée)

Edmonton (Alberta)

  

M. Morris Rosenberg                                            POUR LES DÉFENDEURS

Sous-procureur général du Canada

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