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Date : 19990401


Dossier : T-1881-98

ENTRE :


JING YANG JUSTIN WANG,


demandeur,


et


LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION,


défendeur.


MOTIFS DE L"ORDONNANCE

LE JUGE REED

[1]      Il s'agit d'un appel de la décision d'un juge de la citoyenneté qui a conclu que le demandeur ne remplissait pas la condition de résidence prévue à l'alinéa 5(1)c) de la Loi sur la citoyenneté, L.R.C. (1985), ch. C-29.

[2]      Le demandeur est arrivé au Canada comme étudiant le 3 septembre 1989. Il a obtenu un baccalauréat en sciences de l'Université York. Après avoir reçu une autorisation d'emploi en 1994, il a commencé à travailler pour Dynamic Mutual Funds. Il a obtenu le droit d'établissement comme résident permanent le 12 septembre 1995 et a présenté une demande de citoyenneté deux ans plus tard, le 12 septembre 1997. La période de séjour au Canada avant l'obtention du droit d'établissement peut être prise en compte lorsqu'il s'agit de déterminer si le demandeur satisfait aux conditions de résidence. Le calcul de la période de résidence révèle qu'il lui manque environ 70 jours pour respecter l'exigence de 1 095 jours prévue à l'alinéa 5(1)c).

[3]      Je tiens à souligner que le père du demandeur a financé son séjour au Canada; il a acheté des condominiums en février 1997. L'épouse du demandeur est arrivée au Canada en 1995 et leur premier enfant y est né le 28 avril 1995. Son épouse a obtenu le droit d'établissement le 5 décembre 1995 et son père, le 7 avril 1997. Sa mère l'a aussi obtenu, mais elle n'est pas venue au Canada, ayant été atteinte du cancer en 1997.

[4]      Lors de l'entrevue qu'elle a fait subir au demandeur le 19 juin 1998 au sujet de sa demande de citoyenneté du 12 septembre 1997, le juge de la citoyenneté a établi que l'épouse du demandeur était retournée à Hong Kong, que son père était retourné en Chine, que sa mère était demeurée en Chine et que l'enfant né au Canada s'y trouvait également. Le demandeur résidait en Chine, ayant obtenu de son employeur, Dynamic Mutual Funds, un congé pour une période indéterminée débutant le 12 juillet 1997. À l'entrevue tenue à Toronto, le demandeur a expliqué au juge de la citoyenneté qu'il résidait en Chine depuis septembre 1997 en raison de la maladie de sa mère, qu'il n'envisageait pas pour le moment de revenir au Canada et qu'il devait rentrer en Chine deux jours après l'entrevue. Le juge de la citoyenneté a tenu compte de ces facteurs pour déterminer si les absences du demandeur entre le 12 septembre 1993 et le 12 septembre 1997 devaient compter comme périodes de résidence au pays.

[5]      Dans l'affaire Lam c. Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration (T-1310-98, 26 mars 1999), le juge Lutfy a fait une analyse exhaustive des facteurs à considérer dans la détermination de la norme de contrôle à appliquer dans le cas des appels de ce genre, qui ne se déroulent plus selon l'ancienne procédure d'audition de novo. Je conclus comme lui que la norme à appliquer est celle de " la décision correcte ".

[6]      L'avocate du demandeur soutient que le juge de la citoyenneté a commis trois erreurs dans sa décision : (1) elle a conclu que le demandeur était absent du Canada après le 7 juillet 1997, ce qui n'est pas le cas; (2) elle a fait abstraction du peu de jours qu'il lui manquait pour satisfaire à l'exigence de 1 095 jours; (3) elle a pris en compte des facteurs qui n'étaient pas pertinents, à savoir les événements postérieurs à sa demande de citoyenneté du 12 septembre 1997.

[7]      Je ne suis pas convaincue que le juge de la citoyenneté ait conclu que le demandeur était absent du Canada à compter du 7 juillet 1997. Elle a mentionné dans ses notes que cette date correspond au début du congé du demandeur pour une période indéterminée - et non au début de son absence du Canada -, ce qui correspond à l'énoncé correct de la preuve. Le dossier établi pour le calcul des absences du Canada indique que le demandeur aurait résidé au Canada entre le 7 juillet 1997 et le 12 septembre 1997; il m'est impossible de conclure que le juge de la citoyenneté a fait abstraction de ce dossier.

[8]      Je ne suis pas convaincue que le juge de la citoyenneté ait omis ou ignoré le fait qu'il ne manquait que quelques jours au demandeur pour satisfaire à l'exigence de 1 095 jours. Toutefois, le nombre réel de jours d'absence est inférieur au nombre qu'elle a inscrit. Comme elle a commencé son calcul à une date trop antérieure, elle a indiqué qu'il manquait 127 jours au demandeur, alors que le nombre réel aurait dû être 70 jours.

[9]      Le facteur déterminant en l'espèce est la question de savoir si le juge de la citoyenneté a commis une erreur de droit lorsqu'elle a pris en considération des événements postérieurs au 12 septembre 1997. Pour déterminer si les absences devaient être traitées comme périodes de résidence au pays, l'élément esssentiel à considérer est la qualité des liens de la personne avec le Canada. La décision du juge Thurlow dans l'affaire Re : Papadogiorgakis, [1978] 2 C.F. 208, est le fondement de la jurisprudence en la matière. La question à poser est de savoir si " un demandeur de la citoyenneté [...] élit domicile de façon évidente et définitive au Canada, dans l'intention bien claire d'avoir des racines permanentes dans ce pays [...] " (voir Re Ho , T-2871-96, 15 décembre 1997). Règle générale, la présence au pays comme étudiant ne répond pas à ce critère. Toutefois, le demandeur a résidé au Canada après avoir obtenu son diplôme.

[10]      Si les événements postérieurs à la demande de citoyenneté d'une personne aident à apprécier la qualité de ses liens avec le Canada préalablement à cette demande, ils sont pertinents dans l'évaluation du juge de la citoyenneté et on ne peut lui reprocher de les prendre en considération. Dans le cas qui nous occupe, les événements postérieurs au 12 septembre 1997 établissent clairement que même si le demandeur avait envisagé à un moment donné de s'établir en permanence au Canada, il n'avait plus cette intention à la date de sa demande de citoyenneté.

[11]      Par conséquent, je ne puis déceler aucune erreur dans la décision du juge de la citoyenneté et l'appel est rejeté.


" B. Reed "

                                             JUGE

TORONTO (ONTARIO)

Le 1er avril 1999.

Traduction certifiée conforme

Bernard Olivier, B.A., LL.B

COUR FÉDÉRALE DU CANADA

SECTION DE PREMIÈRE INSTANCE


AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

No DU GREFFE :              T-1881-98
INTITULÉ DE LA CAUSE :      JING YANG JUSTIN WANG
                     - c. -
                     MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE
                     L'IMMIGRATION
DATE DE L"AUDIENCE :          LE MERCREDI 24 MARS 1999
LIEU DE L"AUDIENCE :          TORONTO (ONTARIO)

MOTIFS D"ORDONNANCE EXPOSÉS PAR LE JUGE REED

EN DATE DU :              JEUDI PREMIER AVRIL 1999

ONT COMPARU :

Mme Mary Lam                      POUR LE DEMANDEUR
M. Stephen Gold                      POUR LE DÉFENDEUR

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Cecil L. Rotenberg                      POUR LE DEMANDEUR

Barristers & Solicitors

United Center

802-255, ch. Duncan Mill

North York (Ontario)

M3B 3H9

Morris Rosenberg                      POUR LE DÉFENDEUR

Sous-procureur général

du Canada

                             COUR FÉDÉRALE DU CANADA

                                 Date: 19990401

                        

         Dossier: T-1881-98

                             Entre :

                             JING YANG JUSTIN WANG,

     demandeur,

                             - et -

                             LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION,

                    

     défendeur.

                    

                            

            

                                                                                 MOTIFS DE L'ORDONNANCE

                            

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