Décisions de la Cour fédérale

Informations sur la décision

Contenu de la décision

Date : 20041210

Dossier : T-834-04

Référence : 2004 CF 1725

Ottawa (Ontario), le 10 décembre 2004

En présence de :         MONSIEUR LE JUGE von FINCKENSTEIN

ENTRE :

                                                      GLAXOSMITHKLINE INC.

                                                                                                                                    demanderesse

                                                                             et

LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA

ET LE MINISTRE DE LA SANTÉ

                                                                                                                                          défendeurs

                                MOTIFS DE L'ORDONNANCE ET ORDONNANCE


[1]                La demanderesse, GlaxoSmithKline Inc. (GSK), a présenté une demande de contrôle judiciaire d'une décision du ministre de la Santé portant que deux brevets dont GSK était titulaire ne répondaient pas aux conditions prescrites et, par conséquent, n'étaient pas admissibles à l'inscription au registre des brevets (le registre).

[2]                Selon le titre 8 de la partie C du Règlement sur les aliments et drogues, C.R.C., ch. 870, tout fabricant de drogues qui souhaite annoncer ou vendre une drogue nouvelle au Canada doit d'abord obtenir un avis de conformité autorisant l'annonce et la vente de la drogue visée. Pour obtenir un avis de conformité, le fabricant dépose une présentation de drogue nouvelle auprès du ministre de la Santé (le ministre). Selon le Règlement sur les médicaments brevetés (avis de conformité) (le Règlement sur les AC), le fabricant qui dépose une présentation de drogue en vue d'obtenir un avis de conformité ou qui a obtenu un tel avis peut soumettre une liste de brevets admissibles à ajouter au registre à l'égard de la drogue faisant l'objet de la demande d'avis de conformité ou de l'avis de conformité délivré. Conformément au paragraphe 3(1) du Règlement sur les AC, le ministre peut refuser d'ajouter ou supprimer un brevet soumis par un fabricant si le brevet n'est pas admissible à l'inscription au registre selon les exigences de l'article 4 du Règlement sur les AC.


[3]                Le 29 mars 2004, le ministre a décidé que les brevets canadiens 1,298,479 (le brevet 479) et 2,031,393 (le brevet 393) soumis par GSK ne sont pas admissibles à l'inscription au registre des brevets à l'égard du PAXIL CR, drogue contenant des comprimés de chlorhydrate de paroxétine à libération contrôlée. Le brevet 479 vise un dispositif de libération à régime contrôlé d'ingrédients actifs tandis que le brevet 393 porte sur des comprimés comportant une libération à régime contrôlé d'ingrédients actifs.

La question soulevée

[4]                Le brevet 393 et le brevet 479 satisfont-ils à l'alinéa 4(2)b) du Règlement sur les AC?

La norme de contrôle

[5]                Les deux parties conviennent que la norme de contrôle est celle de la décision correcte. Voir Ely Lilly Canada Inc c. Canada (2003), 300 N.R. 76.

Les dispositions législatives applicables

[6]                Les dispositions réglementaires pertinentes sont l'article 3 et l'alinéa 4(2)b) du Règlement sur les AC qui sont ainsi conçus :


3. (1) Le ministre tient un registre des renseignements fournis aux termes de l'article 4. À cette fin, il peut refuser d'y ajouter ou en supprimer tout renseignement qui n'est pas conforme aux exigences de cet article.

(2) Le registre est ouvert à l'inspection publique durant les heures de bureau.

(3) Aucun renseignement soumis aux termes de l'article 4 n'est consigné au registre avant la délivrance de l'avis de conformité à l'égard duquel il a été soumis.

(4) Pour décider si tout renseignement fourni aux termes de l'article 4 doit être ajouté au registre ou en être supprimé, le ministre peut consulter le personnel du Bureau des brevets. DORS/98-166, art. 2.

4. (1) La personne qui dépose ou a déposé une demande d'avis de conformité pour une drogue contenant un médicament ou qui a obtenu un tel avis peut soumettre au ministre une liste de brevets à l'égard de la drogue, accompagnée de l'attestation visée au paragraphe (7).

(2) La liste de brevets au sujet de la drogue doit contenir les renseignements suivants :

a) la forme posologique, la concentration et la voie d'administration de la drogue;

b) tout brevet canadien dont la personne est propriétaire ou à l'égard duquel elle détient une licence exclusive ou a obtenu le consentement du propriétaire pour l'inclure dans la liste, qui comporte une revendication pour le médicament en soi ou une revendication pour l'utilisation du médicament, et qu'elle souhaite voir inscrit au registre;

(non souligné dans l'original)

3. (1) The Minister shall maintain a register of any information submitted under section 4. To maintain it, the Minister may refuse to add or may delete any information that does not meet the requirements of that section.

(2) The register shall be open to public inspection during business hours.

(3) No information submitted pursuant to section 4 shall be included on the register until after the issuance of the notice of compliance in respect of which the information was submitted.

(4) For the purpose of deciding whether information submitted under section 4 should be added to or deleted from the register, the Minister may consult with officers or employees of the Patent Office. SOR/98-166, s. 2.

4. (1) A person who files or has filed a submission for, or has been issued, a notice of compliance in respect of a drug that contains a medicine may submit to the Minister a patent list certified in accordance with subsection (7) in respect of the drug.

(2) A patent list submitted in respect of a drug must

(a) indicate the dosage form, strength and route of administration of the drug;

(b) set out any Canadian patent that is owned by the person, or in respect of which the person has an exclusive licence or has obtained the consent of the owner of the patent for the inclusion of the patent on the patent list, that contains a claim for the medicine itself or a claim for the use of the medicine and that the person wishes to have included on the register;

(Underlining added)

L'analyse


[7]                  Avant de décider si les brevets en cause satisfont au Règlement sur les AC, il faut d'abord interpréter les brevets. Les deux parties conviennent que l'interprétation des brevets doit être guidée par le principe énoncé dans l'arrêt Whirlpool Corp. c. Camco Inc. 9 C.P.R. (4th) 129, où le juge Binnie, citant le juge Diplock dans l'arrêt Catnic Components Ltd. c. Hill and Smith Ltd., [1982] RPC 183, a déclaré :

... Lord Diplock a décrit ainsi l'interprétation téléologique, aux pp. 242 et 243 :

[TRADUCTION] Vos Seigneuries, le mémoire descriptif d'un brevet est une déclaration unilatérale du breveté, faite dans ses propres mots et s'adressant à ceux qui sont susceptibles d'avoir un intérêt concret dans l'objet de son invention (c'est-à-dire qui sont « versés dans l'art » ), par laquelle il les informe de ce qu'il prétend être les caractéristiques essentielles du nouveau produit ou du nouveau procédé pour lequel les lettres patentes lui confèrent un monopole. Ce sont seulement les nouvelles caractéristiques qu'il prétend essentielles qui constituent ce qu'on appelle l' « essence » de la revendication. Le mémoire descriptif d'un brevet doit recevoir une interprétation téléologique plutôt que l'interprétation purement littérale découlant du genre d'analyse terminologique méticuleuse que les avocats sont trop souvent tentés de faire en raison de leur formation. La question qui se pose dans chaque cas est la suivante : les personnes ayant une connaissance et une expérience pratiques du genre de travail auquel l'invention est destinée à servir comprendraient-elles que le breveté voulait que l'interprétation stricte d'une expression ou d'un mot descriptifs particuliers figurant dans une revendication constitue une condition essentielle de l'invention, de manière à ce que toute variante soit exclue du monopole revendiqué même s'il se peut qu'elle n'ait aucun effet important sur la façon dont l'invention fonctionne. [En italique dans l'original.]

[45] L'interprétation téléologique repose donc sur l'identification par la cour, avec l'aide du lecteur versé dans l'art, des mots ou expressions particuliers qui sont utilisés dans les revendications pour décrire ce qui, selon l'inventeur, constituait les éléments « essentiels » de son invention....

[8]                Le témoin expert de GSK, M. James McGinity, professeur de pharmacie à l'Université du Texas à Austin, au Texas, a également annexé à son affidavit en pièce B un document qui expose de manière claire les principes d'interprétation des brevets qu'on lui a demandé d'utiliser. Je joins ces principes à titre d'Annexe A car ils présentent succinctement, à mon avis, tous les principes applicables à l'interprétation des brevets.

[9]                M. McGinity, la seule personne versée dans l'art de l'interprétation des brevets qui a témoigné, a déclaré au sujet des brevets en litige :

[traduction] En général, le brevet 479 et le brevet 393 visent des préparations ou formulations de comprimés pharmaceutiques à libération contrôlée.

[10]            Le brevet 393 expose des revendications à l'égard de comprimés contenant des ingrédients actifs. De l'avis de M. McGinity dans son affidavit :

[traduction] ... la personne versée dans l'art des formulations pharmaceutiques conclurait que tout ingrédient actif approprié utilisé dans une formulation de comprimés à libération contrôlée pourrait tomber dans la portée de ces revendications.

21. Je crois comprendre que GSK commercialise des comprimés de chlorhydrate de paroxétine en liaison avec la marque de commerce PAXIL CR. Il est donc clair que le médicament chlorhydrate de paroxétine est un ingrédient actif qui convient à la formulation en comprimés à libération contrôlée, comme ceux qui sont revendiqués dans les revendications du brevet 479.

22. Par conséquent, il est clair que les revendications 1 à 7 du brevet 393 couvrent les comprimés à libération contrôlée du médicament chlorhydrate de paroxétine. En fait, un fabricant arrivant en deuxième lieu qui souhaiterait commercialiser des comprimés à libération contrôlée de chlorhydrate de paroxétine pourrait étudier les revendications du brevet 393 pour élaborer sa propre formulation ou préparation en vue de commercialiser ces comprimés.

[11]            Le brevet 479 expose des revendications pour un dispositif de libération contrôlée d'ingrédients actifs. Le défendeur concède que le dispositif comprend effectivement des comprimés. Le brevet 479 spécifie que l'ingrédient actif libéré peut être constitué de médicaments. M. McGinity conclut donc au paragraphe 26 :


[traduction] Il résulte qu'une personne versée dans l'art des formulations pharmaceutiques, dotée d'un esprit désireux de comprendre l'invention, conclura que le terme « dispositif » s'étend aux formulations ou préparations de comprimés à libération contrôlée. En réalité, les revendication du brevet 479 renvoient simplement à une formulation de comprimé à libération contrôlée ayant une technologie Geomatrix différente de celle qui est revendiquée dans le brevet 393.

[12]            Par conséquent, les deux brevets concernent des procédés de libération contrôlée d'ingrédients actifs. M. McGinity résume ainsi la chose au paragraphe 35 :

[traduction] Le brevet 393 et le brevet 479 comprennent tous les deux dans la portée de leurs revendications respectives des comprimés à libération contrôlée du médicament chlorhydrate de paroxétine.

[13]            Cependant, l'alinéa 4(2)b) prescrit que le brevet qui doit être inclus dans la liste comporte une « revendication pour le médicament en soi » ou une « revendication pour l'utilisation du médicament » . Ces deux termes sont définis dans le Règlement sur les AC :

« revendication pour le médicament en soi » S'entend notamment d'une revendication, dans le brevet, pour le médicament en soi préparé ou produit selon les modes du procédé de fabrication décrits en détail et revendiqués ou selon leurs équivalents chimiques manifestes.

« revendication pour l'utilisation du médicament » Revendication pour l'utilisation du médicament aux fins du diagnostic, du traitement, de l'atténuation ou de la prévention d'une maladie, d'un désordre, d'un état physique anormal, ou de leurs symptômes.

(Non souligné dans l'original.)

"claim for the medicine itself" includes a claim in the patent for the medicine itself when prepared or produced by the methods or processes of manufacture particularly described and claimed or by their obvious chemical equivalents;

"claim for the use of the medicine" means a claim for the use of the medicine for the diagnosis, treatment, mitigation or prevention of a disease, disorder or abnormal physical state, or the symptoms thereof;

(Underlining added)

[14]            Dans les revendications de chaque brevet, il n'y a toutefois aucune revendication explicite à l'égard du médicament chlorhydrate de paroxétine ni à l'égard de son utilisation.

[15]            La demanderesse a renvoyé à une abondante jurisprudence qui établit la distinction entre le médicament en soi et un dispositif ou une méthode d'administration du médicament. Dans la décision Glaxo Group Ltd c. Novopharm Ltd. (1998) 87 CPR (3rd) 525, il a été conclu qu'un inhalateur utilisé pour administrer un médicament aux patients ne renferme pas de revendications portant sur le médicament en soi. De la même manière, il a été conclu que des timbres transdermiques (voir Novartis Pharmaceuticals Canada Inc c. Canada ( Ministre de la Santé), 2003 CAF 299) ou une capsule mécanique introduite dans le rumen d'un ruminant (voir Ely Lilly c. Canada, 2003 CFPI 676) ne sont pas des revendications pour le médicament lui-même mais pour l'administration du médicament.

[16]            La décision Pfizer Canada Inc c. Canada, 2004 CF 370 visait un brevet qui décrit la fabrication d'un comprimé permettant la libération contrôlée de la formulation médicamenteuse au patient après un certain intervalle suivant l'ingestion. Le juge Mosley a conclu que le brevet en litige visait le mode d'administration de n'importe quelle des 27 drogues énumérées et non la drogue elle-même (le chlorhydrate de vérapamil). Par conséquent, il a confirmé la décision du ministre de ne pas inscrire le brevet sur la liste.


[17]            Cette jurisprudence établit clairement que les brevets portant sur l'administration d'un médicament ne peuvent pas être inscrits au registre en vertu de l'alinéa 4(2)b), mais elle n'aide pas à trancher si les brevets litigieux en l'espèce comportent une « revendication pour le médicament en soi » ou une « revendication pour l'utilisation du médicament » . Il existe cependant une série de décisions dans lesquelles des brevets ont été jugés admissibles à l'inscription au registre en vertu de l'alinéa 4(2)b).

[18]            La décision Hoffman-LaRoche Ltd c. Canada (1995) 62 CPR (3d) 58 concernait quatre brevets portant sur le médicament flunisolide; nommément des revendications touchant le flunisolide sous forme A, le flunisolide sous forme cristalline, les formulations pharmaceutiques contenant le flunisolide sous forme A et des revendications portant sur un procédé de préparation du flunisolide sous forme A.

[19]            De la même manière, dans la décision Apotex c. Ministre de la Santé (1999) 87 CPR (3d) 271, il a été soulevé de manière incidente que le brevet visé n ° 2,178,637 n'était pas conforme aux dispositions du paragraphe 4(2) du Règlement sur les AC. Toutefois, Madame la juge McGillis a noté au paragraphe 47 : « Le brevet 637 a été délivré pour des comprimés de paroxétine et leur procédé de fabrication et il comporte des revendications portant sur de nouvelles formulations de paroxétine préparées sans eau » . La paroxétine était le médicament nommément visé dans cette affaire.


[20]            Enfin, dans la décision Ely Lilly (2003) 23 CPR 4th 289, Madame la juge Sharlow a confirmé l'inscription au registre d'un brevet relatif à un procédé nouveau de production de ceftazidime pentahydratée (médicament commercialisé par Ely Lilly sous le nom de « Tazidime » ). Le brevet en cause renfermait des revendications pour une formulation de ceftazidime (tenue pour un médicament) avec du lactose amorphe utilisé pour combattre la toxicité inhérente à la ceftazidime. Par conséquent, le médicament particulier était encore une fois mentionné dans le brevet en cause.

[21]            Au contraire, le brevet 393 et le brevet 479 renvoient tous les deux à des [traduction] « ingrédients actifs » . Il n'y est pas fait mention du chlorhydrate de paroxétine, le médicament en question. Le courant jurisprudentiel cité ci-dessus établit clairement que les brevets qui peuvent être inscrits au registre (c'est-à-dire qui répondent à l'alinéa 4(2)b)) doivent comporter une revendication portant sur le médicament visé dans le brevet. La personne versée dans l'art de l'interprétation des brevets peut trouver à raison (comme l'a fait M. McGinity) que des ingrédients actifs, comme ceux qui sont mentionnés dans le brevet 393 et le brevet 479, comprennent le chlorhydrate de paroxétine. Cependant, même la personne versée dans l'art de l'interprétation des brevets ne peut pas établir d'équivalence entre ingrédient actif et chlorhydrate de paroxétine. Pourtant les dispositions de l'alinéa 4(2)b) exigent que le brevet renferme une revendication pour le médicament en soi, soit une revendication dans le brevet pour le médicament lui-même lorsqu'il est préparé ou produit par les méthodes ou procédés de fabrication spécifiquement décrits et revendiqués. Ce n'est pas le cas du brevet 393 et du brevet 479.


[22]            Le brevet 393 et le brevet 479 sont tous les deux des brevets de procédés, selon la définition donnée dans la décision Deprenyl Research Ltd c. Apotex Inc (1994) 55 CPR (3d) 171 à la page 175. Ils sont une nouvelle façon de produire la libération contrôlée du chlorhydrate de paroxétine, mais ils ne revendiquent pas le médicament lui-même (le chlorhydrate de paroxétine). Ces procédés peuvent être utilisés pour ce médicament, mais également pour d'autres produits. Le brevet 479, par exemple, mentionne que les ingrédients actifs peuvent être des herbicides, des engrais et des désodorisants.

[23]            Par conséquent, la logique de la décision Deprenyl (précitée) s'applique. Comme le dit le juge en chef adjoint Jerome, au paragraphe 17 :

... l'expression « revendication pour le médicament en soi » , employée dans le Règlement sur les médicaments brevetés (avis de conformité), désigne une revendication pour le médicament en soi, dans le sens ordinaire et naturel des mots, et une revendication pour le médicament préparé selon un procédé particulier, dans le sens ordinaire et naturel des mots employés à l'art. 2. Aucun élément du libellé du texte de loi ne fait penser que l'expression vise en outre une revendication pour un procédé particulier employé pour produire un médicament. Une telle interprétation serait, à mon sens, un élargissement injustifié du sens naturel des mots utilisés dans le Règlement.

[24]            Par conséquent, je conclus que le brevet 393 et le brevet 476 ne sont pas admissibles à l'inscription au registre en vertu de l'alinéa 4(2)b) du Règlement sur les AC. Pour ces motifs, la demande ne peut être accueillie.


                                        ORDONNANCE

LA COUR ORDONNE :

1.         La demande est rejetée.

2.         Les dépens sont adjugés aux défendeurs.

« K. von Finckenstein »

                                                                                                     Juge                       

Traduction certifiée conforme

_______________________

Richard Jacques, LL.L.


ANNEXE A

PRINCIPES JURIDIQUES D'INTERPRÉTATION DES BREVETS

Interprétation téléologique

Dans l'interprétation d'un brevet, et pour donner effet aux inventions véritables, le mémoire descriptif du brevet doit recevoir une interprétation téléologique plutôt que l'interprétation purement littérale découlant du genre d'analyse terminologique méticuleuse que les avocats sont trop souvent tentés de faire en raison de leur formation.

Whirlpool, précité, à la page 148.

Catnic Components Ltd. c. Hill & Smith Ltd., [1982] R.P.C. 183 at 243 (H.L.).

En outre, la Cour suprême a statué :

Toutefois, une règle fondamentale d'interprétation des revendications a toujours voulu que les revendications reçoivent une seule et même interprétation à toutes les fins.

Whirlpool, précité, à la page 149.

Par conséquent, l'interprétation utilisée pour les questions de contrefaçon et de validité devrait être celle qu'on utilise pour établir si un brevet renferme une revendication pour le médicament en soi, et s'il peut donc être inscrit au registre des brevets pour une drogue contenant un médicament.

La clé de l'interprétation téléologique est l'identification des éléments essentiels de l'invention. L'interprétation d'un brevet est une question de droit pour la Cour. Toutefois, elle doit être menée avec les connaissances d'une personne versée dans l'art, dans la mesure où ces connaissances sont communiquées par les experts qui témoignent au procès.

Whirlpool, précité, à la page 147.

Free World Trust c. Électro Santé Inc. (2000), 9 C.P.R. (4th) 168 (C.S.C.) à la page 192

[ci-après Free World].

Beecham Canada Ltd. c. Proctor & Gamble Co. (1982), 61 C.P.R. (2d) 1 à la page 9 (C.A.F.)

Les éléments non essentiels peuvent être substitués ou omis sans que la construction ou le fonctionnement de l'invention décrite dans les revendications n'en soit substantiellement modifié alors que certains éléments sont essentiels pour que l'appareil fonctionne comme l'a prévu l'inventeur et conformément aux revendications.

Free World, précité, à la page 193.


Le rejet de l'interprétation téléologique signifierait l'adoption d'une méthode non fondée sur l'objet visé qui ne tiendrait pas compte du contexte des mots et du sens qui leur est donné.

Whirlpool, précité, à la page 149.

L'interprétation téléologique ne sort pas de la portée du mémoire descriptif. Le juge de première instance peut examiner le reste du mémoire descriptif, y compris le dessin, pour comprendre le sens [d'un mot particulier] utilisé dans les revendications, mais non pour élargir ou restreindre la portée de la revendication telle qu'elle était écrite et, ainsi, interprétée.

Whirlpool,, précité, à la page 153.

La personne versée dans l'art

La personne versée dans l'art est définie comme suit :

[TRADUCTION] un être fictif ayant des compétences et des connaissances usuelles dans l'art dont relève l'invention et un esprit désireux de comprendre la description qui lui est destinée. Cette notion de la personne fictive a parfois été assimilée à celle de l' « homme raisonnable » retenue en matière de négligence. On suppose que cette personne va tenter de réussir, et non rechercher les difficultés ou viser lchec.

Free World Trust, précité, à la page 189; citant Fox, H.G. The Canadian Patent Law and Practice Relating to Letters Patent for Inventions, 4th ed. (Toronto: Carswell, 1969) à la page 184.

Autres principes généraux d'interprétation des revendications

Un brevet est un texte visé par la définition du mot « règlement » dans la Loi d'interprétation et il doit donc recevoir l'interprétation la plus compatible avec la réalisation de son objet.

Whirlpool, précité, à la page 150.

L'interprétation du brevet ne doit être ni indulgente ni dure, mais devrait être raisonnable à la fois pour le public et le titulaire du brevet. Un brevet doit être lu par un esprit désireux de comprendre, et non pas par un esprit désireux de ne pas comprendre. Cela signifie nécessairement qu'on prête une grande attention au but et à l'intention de l'auteur. La Cour ne doit pas adopter une approche trop formaliste ou trop rusée et devrait s'efforcer de donner effet à l'interprétation qui donnera à l'inventeur la protection de ce qu'il a inventé de bonne foi.

Whirlpool, précité, à la page 149.

Consolboard Inc. c. MacMillan Bloedel (1981), 56 C.P.R. (2d) 145 à la page 157 (C.S.C.).


L'approche du dictionnaire est à rejeter dans l'interprétation des revendications. Elle impliquerait de faire appel à une preuve extrinsèque au mémoire descriptif. De plus, interpréter les revendications d'un brevet par la méthode du dictionnaire équivaut à examiner les mots du point de vue du grammairien ou de l'étymologiste plutôt que du point de vue et à la lumière des connaissances d'une personne versée dans l'art.

Whirlpool, précité, à la page 153.


                             COUR D'APPEL FÉDÉRALE

                      AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

DOSSIER :                T-834-04

INTITULÉ :               GlaxoSmithkline Inc. c. Le procureur général du Canada

et le ministre de la Santé

                                                     

LIEU DE L'AUDIENCE :                              Ottawa

DATE DE L'AUDIENCE :                            Le 6 décembre 2004

MOTIFS DE L'ORDONNANCE : Le jugevon Finckenstein

DATE DES MOTIFS :                                   Le 10 décembre 2004

COMPARUTIONS :

James Mills

Beverley Moore

POUR LA DEMANDERESSE

Frederick Woyiwada

POUR LE DÉFENDEUR

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Gowling Lafleur Henderson LLP

POUR LA DEMANDERESSE

Morris Rosenberg

Sous-procureur général du Canada

POUR LE DÉFENDEUR


 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.