Décisions de la Cour fédérale

Informations sur la décision

Contenu de la décision

Date : 20040608

Dossier : IMM-4286-03

Référence : 2004 CF 826

Toronto (Ontario), le 8 juin 2004

EN PRÉSENCE DE MONSIEUR LE JUGE MOSLEY

ENTRE :

                                                                 OMAR AKRAM

                                                                                                                                           demandeur

                                                                             et

                         LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION

                                                                                                                                             défendeur

                                MOTIFS DE L'ORDONNANCE ET ORDONNANCE


[1]                La présente demande concerne la transition de l'ancienne, et maintenant abrogée, Loi sur l'immigration, L.R.C. 1985, ch. I-2 (l'ancienne Loi), et l'ancien, et maintenant abrogé, Règlement sur l'immigration de 1978, DORS/78-172 (l'ancien Règlement), à la Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés, L.C. 2001, ch. 27 (la LIPR), et au Règlement sur l'immigration et la protection des réfugiés, DORS/2002-227 (le nouveau Règlement). La demande de résidence permanente au Canada présentée par M. Akram a été évaluée et rejetée suivant la LIPR et le nouveau Règlement cinq mois après leur entrée en vigueur. Le demandeur demande que la décision de l'agente des visas soit annulée et que l'affaire soit renvoyée afin qu'elle soit examinée à nouveau.

LES FAITS

[2]                M. Akram est citoyen du Pakistan. Il a présenté une demande de résidence permanente au Canada en tant que travailleur qualifié indépendant et la profession qu'il avait l'intention d'exercer au Canada était celle d'ingénieur électronicien en conception et développement, un champ d'activités pour lequel il avait la formation et l'expérience.

[3]                M. Akram a signé ses formulaires de demande le 14 janvier 2002. La section de l'immigration du Haut-commissariat du Canada à Londres, en Angleterre, a reçu sa demande et une lettre de son conseiller en immigration le 20 février 2002. La lettre du conseiller en immigration contient les commentaires suivants :

[TRADUCTION]

Il existe des éléments de preuve convaincants donnant à penser que les points d'appréciation qui seront attribués à ce demandeur suivant le Règlement projeté, qu'on s'attend à voir entrer en vigueur le 28 juin 2002, ne reflètent pas son potentiel d'emploi ni les possibilités de réussite de son établissement. Nous vous demandons d'en tenir compte lorsque vous vérifierez l'admissibilité et nous vous prions d'exercer favorablement le pouvoir discrétionnaire suivant le R.11.3a).

[4]                Le 28 juin 2002, l'ancienne Loi et l'ancien Règlement ont été abrogés et la LIPR et le nouveau Règlement sont entrés en vigueur. La LIPR avait reçu la sanction royale le 1er novembre 2001. Les modifications apportées aux critères d'appréciation applicables aux demandes de résidence permanente sont énoncées dans le nouveau Règlement. Ce Règlement a été publié dans la Gazette du Canada, Partie I, vol. 135, no 50, le 15 décembre 2001, à la page 4477. Les dispositions transitoires projetées se rapportant aux travailleurs qualifiés étaient incluses dans cette publication préalable.

[5]                Une deuxième publication préalable du nouveau Règlement a eu lieu le 9 mars 2002, dans la Gazette du Canada, Partie I, vol. 136, no 10, à la page 558. Le nouveau Règlement dans sa version définitive a été publié dans la Gazette du Canada, Partie II, Édition spéciale, vol. 136, no 9, le 14 juin 2002. La publication incluait un Résumé de l'étude d'impact de réglementation (REIR) et informait en outre le public que les travailleurs qualifiés indépendants qui présentaient une demande de résidence permanente au Canada devaient maintenant obtenir 75 points d'appréciation.

La décision faisant l'objet du contrôle


[6]                Par une lettre datée du 27 novembre 2002, l'agente des visas a rejeté la demande de résidence permanente au Canada présentée par le demandeur. L'agente a expliqué que M. Akram était apprécié seulement suivant la LIPR et le nouveau Règlement parce que sa demande avait été reçue après le 1er janvier 2002 et était en instance avant l'entrée en vigueur de la LIPR et du nouveau Règlement : article 190 de la LIPR et article 361 du nouveau Règlement. L'agente a ensuite conclu ce qui suit :

[TRADUCTION]

Suivant le Règlement, les demandeurs de la catégorie des travailleurs qualifiés (fédéral) sont appréciés sur le fondement des exigences prévues au paragraphe 75(2) et suivant les critères énoncés au paragraphe 76(1). L'appréciation de ces critères sert à déterminer si un travailleur qualifié pourra réussir son établissement économique au Canada. Les critères sont l'âge, les études, la connaissance des langues officielles du Canada, l'expérience, l'exercice d'un emploi réservé et la capacité d'adaptation.

Votre demande a été évaluée sur le fondement de l'emploi pour lequel vous avez demandé une évaluation - ingénieur, conception et développement - CNP 2133. Le tableau ci-après énonce les points attribués pour chacun des critères de sélection :

[...] [Seulement 67 points ont été attribués au demandeur.]

Vous n'avez pas obtenu suffisamment de points pour être admissible à immigrer au Canada, le nombre minimal requis étant de 75 points. Veuillez noter que nous vous avons attribué le nombre maximal de points pour votre compétence en langue anglaise en nous fondant sur votre auto-évaluation. Cependant, lors de la présentation de demandes à l'avenir, vous devrez fournir des éléments de preuve au soutien de votre compétence en langue anglaise (comme l'exige le Règlement) [...]. Suivant la LIPR, les éléments utilisés pour évaluer les points à l'égard de la capacité d'adaptation y sont mentionnés et étant donné que vous ne remplissez aucune des conditions, aucun point ne vous a été attribué pour ce facteur. Vous n'avez pas obtenu suffisamment de points pour me convaincre que vous pourrez réussir votre établissement au Canada.

LA QUESTION EN LITIGE

[7]                Le défendeur a-t-il manqué à l'obligation d'agir avec équité en omettant de fournir au demandeur, avant de rejeter sa demande, un avis à l'égard des modifications à la loi?


ANALYSE DES POSITIONS DES PARTIES

[8]                Le demandeur prétend qu'il avait un droit d'être informé par le défendeur des modifications apportées aux critères d'appréciation applicables aux demandes de résidence permanente lorsque la LIPR et le nouveau Règlement sont entrés en vigueur. Au paragraphe 2 de son affidavit déposé dans la présente instance, M. Akram déclare qu'au début de décembre 2001 il n'y avait pas, sur le site Web du ministère du défendeur, d'avis à l'égard des modifications projetées aux lois en matière d'immigration ou aux critères d'appréciation applicables aux résidents permanents. Selon le demandeur, l'omission du défendeur de lui avoir fourni des renseignements à l'égard des nouveaux critères d'appréciation l'a empêché de participer de façon valable au processus de sa demande. Le demandeur se fonde sur l'arrêt Choi c. Canada (Ministre de l'Emploi et de l'Immigration) (C.A.), [1992] 1 C.F. 763, pour prétendre que le défendeur avait l'obligation de l'informer des nouveaux critères d'appréciation avant de rejeter sa demande.


[9]                Le demandeur prétend que l'agente des visas a manqué aux principes d'équité en matière de procédure en omettant de l'aviser des nouveaux critères qui s'appliquaient à sa demande suivant la LIPR et le nouveau Règlement, afin qu'il puisse essayer de satisfaire à ces critères avant qu'elle rende sa décision à l'égard de sa demande. Il signale l'existence d'une nouvelle circonstance - l'établissement de sa tante au Canada - qui lui aurait donné cinq points additionnels s'il avait eu l'occasion de présenter ce fait à l'agente des visas. Le demandeur reconnaît que les cinq points additionnels ne lui auraient pas donné les 75 points requis suivant le nouveau régime. Il a prétendu lors de l'audience que si le dossier devait être renvoyé au tribunal afin que l'affaire soit examinée à nouveau, l'évaluation devrait être faite suivant les nouveaux critères et le nouveau seuil - le nombre de points à obtenir étant maintenant 67 points. En outre, il a prétendu qu'il avait au départ demandé que l'agente des visas exerce son pouvoir discrétionnaire de façon favorable et qu'étant donné qu'une telle possibilité existe toujours suivant le régime actuel en matière d'immigration, on ne sait pas s'il aurait pu recevoir une appréciation plus favorable dans l'ensemble s'il avait été mis au courant des modifications à la loi et s'il avait eu l'occasion de fournir des observations additionnelles.

[10]            La position du défendeur est que l'agente des visas n'a pas manqué à l'obligation d'agir avec équité lorsqu'elle a apprécié suivant la LIPR la demande présentée par le demandeur et que le demandeur n'a pas démontré qu'elle ait commis une autre erreur susceptible de contrôle lors du traitement de sa demande suivant les critères de sélection énoncés dans la LIPR. Le défendeur soutient que ni l'agente des visas ni le ministère du défendeur, Citoyenneté et Immigration Canada (CIC), n'avaient l'obligation d'aviser le demandeur d'une modification à la loi. Un avis public des modifications projetées à la LIPR a été fait par une publication dans la Gazette du Canada et le défendeur prétend qu'une personne est réputée connaître les conditions de la loi au moment où la loi est publiée dans la Gazette du Canada.


[11]            À l'égard des demandes de résidence permanente, le défendeur s'appuie sur la décision Yu c. Canada (Ministre de l'Emploi et de l'Immigration) (1995), 11 Imm. L.R. (2d) 176 (C.F. 1re inst.), dans laquelle il a été statué que les demandeurs ont l'obligation de s'assurer qu'ils satisfont aux critères et aux exigences de la loi et des règlements et qu'un agent du défendeur n'a pas l'obligation d'informer un demandeur de préoccupations qui résultent directement de la loi.

[12]            Le défendeur s'appuie en outre sur le principe selon lequel l'ignorance de la loi n'est pas une excuse étant donné que le demandeur aurait pu, avec ou sans l'assistance d'un représentant de son choix, examiner les dispositions de la loi afin de comprendre les exigences de la LIPR et de les respecter. Afin de maintenir l'application des règles de droit, l'ignorance de la loi ne peut être acceptée à titre d'excuse. La nouvelle loi a reçu la sanction royale le 1er novembre 2001 et le public a compris que le nouveau régime législatif était [TRADUCTION] « imminent » et qu'il était possible que les demandes en instance soient traitées différemment.


[13]            En outre, selon le défendeur, le demandeur savait ou devait savoir depuis le 15 décembre 2001, lorsque le Règlement projeté a fait l'objet d'une publication préalable dans la Gazette du Canada, Partie I, que les critères de sélection pour immigrer au Canada étaient modifiés et que, comme cela était décrit dans le REIR, les demandes déposées à une certaine date ou après celle-ci seraient évaluées suivant la LIPR. Le défendeur fait en outre valoir que la dernière version du nouveau Règlement a été publiée et rendue publique le 14 juin 2002, en établissant le nombre de points à obtenir à 75 points et en énonçant les nouveaux critères de sélection, et qu'il appartenait au demandeur d'informer l'agente des visas de tout autre renseignement ou de fournir toute documentation au soutien de sa demande. Le demandeur a eu plusieurs mois après l'entrée en vigueur de la LIPR pour ce faire avant que sa demande soit appréciée et rejetée suivant les nouveaux critères.

[14]            Le défendeur signale la lettre, dont un extrait est mentionné précédemment, envoyée par le conseiller en immigration du demandeur, au Canada, au bureau d'immigration de Londres, qui montre que le conseiller était clairement au courant en février 2002 que les critères de sélection faisaient l'objet de modifications et qu'il était peu probable que la demande du demandeur soit acceptée si l'agente n'exerçait pas favorablement son pouvoir discrétionnaire.

[15]            Le défendeur prétend que la décision récente Kazi c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), [2003] A.C.F. no 1212 (C.F.) (QL), est différente de la présente affaire en ce que dans l'affaire Kazi le demandeur n'avait pas eu une période raisonnable pour remplir sa demande ou la mettre en état après l'entrée en vigueur de la LIPR et du nouveau Règlement alors que dans la présente affaire le demandeur a eu plus de cinq mois pour informer CIC de tout nouveau renseignement qu'il souhaitait ajouter à sa demande afin de satisfaire aux nouveaux critères de sélection. Le renseignement à l'égard de l'établissement de sa tante n'aurait eu aucun effet important sur l'issue de la demande étant donné que le demandeur n'aurait quand même pas obtenu les 75 points requis.

[16]            Le paragraphe 2(2) et l'article 190 de la LIPR sont pertinents à la présente demande de contrôle judiciaire :



2(2) Sauf disposition contraire de la présente loi, toute mention de celle-ci vaut également mention des règlements pris sous son régime.

2(2) Unless otherwise indicated, references in this Act to "this Act" include regulations made under it.

190. La présente loi s'applique, dès l'entrée en vigueur du présent article, aux demandes et procédures présentées ou instruites, ainsi qu'aux autres questions soulevées, dans le cadre de l'ancienne loi avant son entrée en vigueur et pour lesquelles aucune décision n'a été prise.

190. Every application, proceeding or matter under the former Act that is pending or in progress immediately before the coming into force of this section shall be governed by this Act on that coming into force.


[17]            Suivant l'article 361 du nouveau Règlement, comprenant les plus récentes modifications entrées en vigueur en date du 1er décembre 2003, DORS/2003-383, le 1er janvier 2002 est la date importante pour établir si les demandes doivent être examinées suivant la LIPR ou l'ancienne Loi. Si la demande présentée par un demandeur a été reçue par CIC à cette date ou après cette date, la demande doit être évaluée suivant la LIPR et le nouveau Règlement.


[18]            À mon avis, bien que l'on puisse compatir à la situation du demandeur, je n'accepte pas sa prétention selon laquelle le défendeur était tenu de l'informer directement des modifications qui étaient survenues par l'adoption de la LIPR et du nouveau Règlement et des conséquences qu'avaient les dispositions transitoires sur l'évaluation de sa demande. J'ai conclu ainsi pour les motifs suivants : (1) le principe de droit selon lequel l'ignorance de la loi ne peut pas être utilisée à titre de moyen de défense ou, comme en l'espèce, à titre d'arme pour prétendre à un droit procédural d'être informé des modifications de la loi est un principe qui est largement défavorable au demandeur; (2) aux fins de son dossier d'immigration, le demandeur était assisté par un conseiller en immigration qui était clairement au courant des modifications projetées; (3) dans son affidavit déposé dans la présente instance, le demandeur reconnaît qu'il n'a examiné les critères pour immigrer au Canada en tant que travailleur qualifié qu'en décembre 2001, mais il ne mentionne pas dans son affidavit avoir fait d'autres tentatives pour être informé du processus d'immigration ou avoir eu des difficultés à obtenir des renseignements à l'égard des lois canadiennes en matière d'immigration après ce moment; (4) il appartient aux demandeurs de démontrer qu'ils respectent les exigences de sélection imposées par les lois canadiennes en matière d'immigration : voir la décision Yu, précitée, et l'arrêt Canada (Ministre de l'Emploi et de l'Immigration) c. Chiarelli, [1992] 1 R.C.S. 711; (5) l'arrêt Choi, précité, est différent de l'affaire en l'espèce; et (6) la décision Kazi, précitée, est également différente de la présente affaire.

[19]            Seuls les points cinq et six doivent être traités en détail et c'est ce que je fais ci-après. Le demandeur s'appuie sur l'arrêt de la Cour d'appel fédérale Choi, précité, au soutien de sa prétention selon laquelle le défendeur était tenu de fournir un avis à l'égard des modifications de la loi se rapportant à sa demande de résidence permanente. L'arrêt Choi traitait d'une situation dans laquelle le ministère du défendeur avait omis de fournir des renseignements exacts à un demandeur, l'induisant ainsi en erreur dans une certaine mesure. De plus, ces renseignements avaient été fournis au demandeur après qu'il eut fait une demande d'information précise au bureau des visas. Je ne suis pas d'avis que cette décision appuie la prétention selon laquelle le défendeur est tenu de façon générale d'informer les demandeurs des modifications qui surviennent dans le régime législatif.

[20]            Ensuite, je suis d'accord avec le défendeur lorsqu'il affirme que la décision Kazi, précitée, rendue par M. le juge Martineau, n'est pas directement applicable à la présente affaire étant donné la longue période dont le demandeur a bénéficié entre l'entrée en vigueur de la LIPR le 28 juin 2002 et la décision définitive à l'égard de sa demande le 27 novembre 2002. Le demandeur a eu près de cinq mois au cours desquels les nouveaux critères de sélection ont été publiés dans leur version définitive et sont devenus obligatoires à titre de nouvelle loi au Canada. Il a eu une occasion raisonnable de compléter les renseignements et d'en ajouter sur sa demande de résidence permanente, en tenant compte des nouveaux critères de sélection, et il a choisi de ne pas le faire. Une lecture de la décision du juge Martineau dans son ensemble révèle que le moment du rejet de la demande présentée par le demandeur dans cette affaire était un facteur important dans la décision et fait ressortir la conclusion de la Cour selon laquelle l'agent des visas avait l'obligation d'aviser le demandeur qu'il serait apprécié suivant les nouveaux critères de sélection et de lui fournir une période raisonnable pour qu'il puisse présenter tout renseignement additionnel afin de compléter sa demande avant que soit rendue une décision à l'égard de sa demande.


[21]            Dans la décision Kazi, le juge Martineau a déclaré qu'étant donné qu'on ne pouvait pas s'attendre à ce qu'un demandeur respecte un règlement qui n'était pas encore en vigueur avant le 28 juin 2002, le rejet de la demande du demandeur le 18 juillet 2002, seulement 33 jours après que la loi modifiée eut été publiée, avait lieu dans une période déraisonnablement courte pour lui permettre d'être informé de la nouvelle loi et pour qu'il puisse fournir tout renseignement additionnel à l'agent des visas. Compte tenu de ces faits, le juge Martineau a déclaré que l'agent des visas aurait dû voir à ce que le demandeur soit « sans délai informé » qu'il serait maintenant apprécié suivant les nouveaux critères et aurait dû lui donner une période raisonnable pour fournir les renseignements additionnels.

[22]            Dans la décision Rani c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), [2002] A.C.F. no 1477 (1re inst.) (QL), M. le juge Beaudry a déclaré ce qui suit au paragraphe 40 :

Il est noté qu'en l'espèce, la demanderesse, dans l'affaire Yu, a soutenu que si on le lui avait demandé, elle aurait donné les renseignements dont l'agent des visas avait besoin. Toutefois, la maxime bien connue selon laquelle l'ignorance de la loi n'est pas une excuse sous-tend les remarques précitées. La demanderesse aurait pu consulter la Loi et le Règlement et, de son propre chef ou avec l'aide d'un avocat, elle aurait pu les examiner afin de comprendre ce qu'elle devait faire et de préparer une preuve valable pour satisfaire à cette obligation. Il n'incombait pas à l'agente des visas de dire à la demanderesse si elle s'était acquittée de son obligation, ou même jusqu'à quel point elle réussissait à s'en acquitter. La demanderesse connaissait ses expériences et ses compétences mieux que l'agente des visas ne les connaissait avant de la rencontrer. Il lui incombait donc de présenter sa meilleure preuve.


[23]            À mon avis, un tel raisonnement est applicable à la présente affaire. Le demandeur n'était aucunement tenu de fournir à l'agente des visas des renseignements se rapportant aux nouveaux critères de sélection avant le 28 juin 2002. Toutefois, après l'entrée en vigueur de la LIPR, il existe une présomption que le demandeur connaissait lui-même la loi ou avait obtenu par son conseiller les renseignements à l'égard des nouveaux critères de sélection. Le demandeur a eu plus de cinq mois au cours desquels il pouvait obtenir l'information à cet égard et présenter des renseignements additionnels traitant des nouveaux critères de sélection. Toutefois, il a omis de le faire malgré le fait que son conseiller était, depuis aussi tôt que février 2002, clairement au courant que les critères de sélection seraient modifiés. Il m'apparaît pertinent qu'aucun effort n'ait été fait au cours de cette période pour informer l'agente de nouvelles circonstances relatives à la tante du demandeur. Compte tenu de la période écoulée avant que la décision soit rendue, l'agente des visas n'était pas tenue d'informer le demandeur des nouveaux critères de sélection et du fait qu'il fallait obtenir 75 points.

[24]            Pour les motifs précédemment énoncés, la demande est rejetée.

Certification d'une question grave de portée générale

[25]            Le demandeur a demandé que la question posée par le juge Martineau dans la décision Kazi, précitée, soit certifiée dans la présente instance, à savoir :

[TRADUCTION] L'agent des visas qui, le 28 juin 2002 ou par la suite, évalue une demande présentée le 1er janvier 2002 ou par la suite conformément à l'ancienne Loi et à l'ancien Règlement, est-il tenu d'aviser le demandeur que la demande sera évaluée selon de nouveaux critères conformément à la nouvelle Loi et au nouveau Règlement et d'inviter le demandeur à remplir le formulaire de demande et à mettre la demande en état dans un délai raisonnable, fixé par l'agent des visas, avant de procéder à une appréciation selon les nouveaux critères?

[26]            Le défendeur prétend que la question ne devrait pas être certifiée étant donné qu'elle ne serait pas déterminante de l'appel.


[27]            Une question qui est certifiée suivant l'article 74 de la LIPR devrait être une question qui transcende les intérêts des parties directement touchées par le litige et qui considère avec attention des questions de grande importance ou de portée générale; voir les décisions Gyamfuah c. Canada (Ministre de l'Emploi et de l'Immigration) (1994), 80 F.T.R. 58, et Dragan c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration) (2003), 228 F.T.R. 52. En outre, la question devrait être déterminante de l'appel; voir la décision Bath c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), [1999] A.C.F. no 1207 (1re inst.) (QL).

[28]            Le demandeur n'a pas profité de la possibilité qui lui était offerte de présenter des renseignements additionnels à l'agente des visas au cours d'une longue période écoulée jusqu'à ce que la loi soit modifiée et par la suite. On doit imputer au demandeur la connaissance démontrée par son conseiller à l'égard des critères qui étaient en voie d'être modifiés alors que sa demande était en instance et celle selon laquelle il était peu probable que sa demande soit accueillie suivant les nouveaux critères à moins que l'agente exerce favorablement son pouvoir discrétionnaire. Le renseignement additionnel qu'il prétend qu'il aurait fourni s'il avait été informé, l'établissement de sa tante, n'aurait eu aucun effet important sur l'issue de sa demande. Je ne suis pas convaincu que la question posée serait par conséquent déterminante de l'appel selon les faits du dossier dont je dispose. Par conséquent, je refuse de certifier la question.


                                        ORDONNANCE

LA COUR ORDONNE que la présente demande de contrôle judiciaire soit rejetée. Aucune question n'est certifiée.

                                                                         _ Richard G. Mosley _              

                                                                                                     Juge                            

Traduction certifiée conforme

Danièle Laberge, LL.L.


                                     COUR FÉDÉRALE

                      AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

DOSSIER :                                         IMM-4286-03

INTITULÉ :                                        OMAR AKRAM

                                                                                           demandeur

c.

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET

DE L'IMMIGRATION

                                                                                             défendeur

LIEU DE L'AUDIENCE :                  TORONTO (ONTARIO)

DATE DE L'AUDIENCE :                LE 7 JUIN 2004

MOTIFS DE L'ORDONNANCE

ET ORDONNANCE :                        LE JUGE MOSLEY

DATE DES MOTIFS :                       LE 8 JUIN 2004

COMPARUTIONS :

M. Max Chaudhary

POUR LE DEMANDEUR

Mielka Visnic

POUR LE DÉFENDEUR

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

M. Max Chaudhary

Chaudhary Law Office

Toronto (Ontario)

POUR LE DEMANDEUR

Morris Rosenberg

Sous-procureur général du Canada

Toronto (Ontario)

POUR LE DÉFENDEUR


             COUR FÉDÉRALE

                                 Date : 20040608

                    Dossier : IMM-4286-03

ENTRE :

OMAR AKRAM

                                          demandeur

et

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET

DE L'IMMIGRATION

                                           défendeur

MOTIFS DE L'ORDONNANCE

ET ORDONNANCE


 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.