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Date : 20000313


Dossier : T-2553-91

OTTAWA (Ontario), le lundi 13 mars 2000

EN PRÉSENCE DE MADAME LE JUGE B. REED


ENTRE :

     THEODORE HODGSON, HARLEY HODGSON, DENNIS

     HODGSON, LARRY HODGSON, AMY PUGH, PEGGY LUNDIE,

     ALMA DUWAR et CAROL LEEB,

     demandeurs,

(intimés)


et


LA BANDE INDIENNE D'ERMINESKIN NO 942 et

LE CONSEIL DE LA BANDE INDIENNE D'ERMINESKIN

défendeurs

(appelants)

et


SA MAJESTÉ LA REINE DU CHEF DU CANADA,

représentée par le MINISTRE DES AFFAIRES INDIENNES

ET DU NORD

défenderesse

(intimée)


ORDONNANCE

     VU l'avis de la requête qui a été déposée le 20 septembre 1999 pour le compte des défendeurs, la bande indienne d'Ermineskin et le conseil de la bande indienne d'Ermineskin (les défendeurs Ermineskin), en vue de former un appel contre l'ordonnance que M. John A. Hargrave, protonotaire, a rendue le 10 septembre 1999, requête qui vise à obtenir une ordonnance en annulation de l'ordonnance du protonotaire Hargrave, de même que les réparations suivantes :

1.      Une ordonnance en radiation des demandes que les demandeurs ont présentées contre les défendeurs Ermineskin en vue d'obtenir des dommages-intérêts et un compte rendu; et
2.      Une ordonnance enjoignant aux demandeurs de modifier la déclaration modifiée modifiée (la déclaration actuelle) de la façon suivante :
     a)      en radiant les paragraphes 10 et 11 de la déclaration actuelle;
     b)      en remplaçant le mot « défendeurs » , aux paragraphes 13 et 14 de la déclaration actuelle, par les mots « défenderesse, Sa Majesté la Reine, représentée par le ministre des Affaires indiennes et du Nord » ; et
     c)      en ajoutant les mots « contre la défenderesse, Sa Majesté la Reine, représentée par le ministre des Affaires indiennes et du Nord » au début des paragraphes b) à h) de la demande de réparation de la déclaration actuelle.
3.      Les dépens relatifs à la requête de la première instance et de la présente instance; et
4.      Toute autre réparation que la Cour jugera équitable.

     ET pour les motifs d'ordonnance qui ont été exposés aujourd'hui;


     LA COUR ORDONNE :

     1.      Que la requête soit rejetée;

     2.      Que les dépens suivent l'issue de la cause.




« B. Reed »

                                         juge












Traduction certifiée conforme


Bernard Olivier, B.A., LL.B.




Date : 20000313


Dossier : T-2553-91



ENTRE :


     THEODORE HODGSON, HARLEY HODGSON, DENNIS

     HODGSON, LARRY HODGSON, AMY PUGH, PEGGY LUNDIE,

     ALMA DUWAR et CAROL LEEB,

     demandeurs,

(intimés)


     et


     LA BANDE INDIENNE D'ERMINESKIN NO 942 et

     LE CONSEIL DE LA BANDE INDIENNE D'ERMINESKIN

                                                         défendeurs

(appelants)


et



SA MAJESTÉ LA REINE DU CHEF DU CANADA,

représentée par le MINISTRER DES AFFAIRES INDIENNES

ET DU NORD

défenderesse

(intimée)


MOTIFS DE L'      ORDONNANCE

LE JUGE REED


[1]      Il s'agit d'un appel contre la décision dans laquelle le protonotaire a refusé de radier certaines parties de la déclaration des demandeurs.

[2]      Dans leur déclaration, les demandeurs cherchent à obtenir un jugement déclaratoire portant qu'ils sont membres de la bande indienne d'Ermineskin no 942 depuis le 16 novembre 1937 ou encore depuis leur date de naissance respective, s'il s'agit de la date la plus tardive. Ils cherchent également à obtenir un jugement déclaratoire portant qu'ils ont droit à tous les avantages que les membres de la bande ont reçus, un jugement déclaratoire portant qu'ils ont droit à tous les avantages qui pourraient être offerts à l'avenir aux membres de la bande, un compte rendu de tous les avantages, de même que des dommages-intérêts généraux. Les demandeurs soutiennent que Sa Majesté la Reine du chef du Canada, représentée par le ministre des Affaires indiennes et du Nord (le ministère public), et les défendeurs Bande indienne d'Ermineskin no 942 et Conseil de la bande indienne d'Ermineskin, sont conjointement et solidairement responsables.

[3]      Le protonotaire Hargrave a décrit la déclaration et la requête des défendeurs Bande indienne d'Ermineskin no 942 et Conseil de la bande indienne d'Ermineskin de façon claire et concise. J'adopte la description suivante qu'il a fournie aux paragraphes 2 à 6 de ses motifs :

[2]      Dans leur déclaration, les demandeurs allèguent être les enfants et descendants de Fred et de Mina Hodgson, qui sont membres de la bande indienne d'Ermineskin ou ont le droit d'être inscrits à titre de membres de la bande.
[3]      Par une résolution datée du 16 novembre 1937, le conseil de la bande d'Ermineskin a reconnu comme membres de la bande Fred et Mina Hodgson, ainsi qu'Amy Pugh, Alma Duwar et Larry Hodgson.
[4]      Le 7 janvier 1944, le ministre des Mines et des Ressources aurait censément retranché de la liste de la bande, par erreur, les noms de Mina et de Fred Hodgson ainsi que de cinq des demandeurs, décision que le ministre, malgré les demandes qui avaient été faites, notamment par le chef et le conseil de la bande d'Ermineskin, a refusé de réexaminer.
[5]      Les paragraphes 10 et 11 de la déclaration, que la bande veut faire radier, sont ainsi libellés :
[TRADUCTION]

10.      La bande indienne d'Ermineskin no 942 défenderesse et le conseil de la bande d'Ermineskin défendeur ont publiquement déclaré que les dispositions de la Loi sur les Indiens qui traitent de l'appartenance aux effectifs de la bande sont inconstitutionnels et que toute décision relative à l'appartenance est un droit ancestral que les bandes individuelles possèdent et qui ne peut pas être limité par une disposition de la Loi sur les Indiens.

11.      Malgré les nombreuses demandes que les demandeurs ont faites, la bande indienne d'Ermineskin no 942 défenderesse et le conseil de la bande d'Ermineskin défendeur ont refusé et continuent à refuser d'honorer la résolution du conseil de la bande datée du 16 novembre 1937.


. . .

[6]      Au mois de mai 1987, conformément à la Loi sur les Indiens, la bande d'Ermineskin a adopté ses propres règles ainsi qu'un code d'appartenance. Les demandeurs affirment que malgré de nombreuses demandes, tous les défendeurs et notamment la bande d'Ermineskin, ont refusé d'examiner la question de l'appartenance des demandeurs aux effectifs de la bande comme le prévoient les règles et le code d'appartenance (paragraphe 13 de la déclaration). Cela nous amène au fond de la déclaration, le paragraphe 14, qui dit que tous les défendeurs ont violé l'obligation fiduciaire qu'ils ont envers tous les demandeurs. À l'appui de la violation, il est notamment allégué que les noms des demandeurs ont été retranchés de la liste de la bande, que les noms des descendants nés subséquemment n'ont pas été ajoutés à la liste et que l'on a omis de protéger les intérêts des demandeurs, de sorte que ces derniers ont été privés de l'avantage qu'ils auraient eu à titre de membres de la bande d'Ermineskin. Voici le paragraphe 14 au complet :

[TRADUCTION]

14. Chacun des défendeurs a une obligation fiduciaire envers chacun des demandeurs et cette obligation fiduciaire a été violée par chacun des défendeurs, en ce sens notamment :

a) qu'ils ont permis le retranchement des noms des demandeurs Larry Hodgson, Harley Hodgson, Amy Pugh, Alma Duwar et Peggie Lundie de la liste de la bande d'Ermineskin au 7 janvier 1944, de sorte que les demandeurs ont été privés des avantages, financiers ou autres, qu'ils auraient obtenus à titre de membres de la bande d'Ermineskin entre le 7 janvier 1944 et la date de l'instruction;

b) qu'ils ont omis d'ajouter les noms des demandeurs Theodore Hodgson, Dennis Hodgson et Carol Leeb à la liste de la bande d'Ermineskin, à leurs dates respectives de naissance, de sorte que les demandeurs ont été privés des avantages, financiers ou autres, qu'ils pourraient avoir obtenus à titre de membres de la bande d'Ermineskin entre leurs dates respectives de naissance et la date de l'instruction;

c) qu'ils ont omis d'informer les demandeurs des avantages auxquels ils avaient peut-être droit et qu'ils n'ont pas protégé les intérêts des demandeurs en prenant des mesures qui ont eu pour effet de priver ces derniers des avantages, financiers ou autres, auxquels ils ont droit à titre de membres de la bande indienne d'Ermineskin.

La bande d'Ermineskin veut que toutes les mentions de la bande, comme dans l'expression « chacun des défendeurs » , soient enlevées des paragraphes 13 et 14 et de toutes les parties de la demande de réparation sauf à l'alinéa a). Ces modifications montreraient clairement que c'est la Couronne qui serait tenue d'accorder réparation, en particulier en ce qui concerne toute réparation pécuniaire découlant d'un jugement déclaratoire reconnaissant le droit à des avantages et à des dommages-intérêts, des intérêts et des dépens.

[4]      Dans le cas où l'appel serait accueilli, la seule partie de la demande des demandeurs qu'il resterait à trancher en ce qui concerne les défendeurs Ermineskin serait la demande de jugement déclaratoire portant que les demandeurs sont membres de la bande depuis 1937. Les défendeurs Ermineskin souhaitent toujours prendre part à l'action dans la mesure où il y est question de cette demande.

[5]      Les défendeurs Ermineskin soutiennent que les radiations et modifications en cause relativement à la déclaration doivent être faites vu que : 1) notre Cour n'a pas compétence pour traiter d'une demande de réparation pécuniaire, présentée contre eux, par suite de la violation d'une obligation fiduciaire; 2) les faits exposés dans la déclaration ne sauraient étayer une demande selon laquelle il leur incombait ou il leur incombe, à l'égard des demandeurs, une obligation fiduciaire.

[6]      Toutes les parties conviennent que les questions litigieuses que soulève le présent appel [TRADUCTION] « revêtent une importance cruciale en ce qui concerne l'issue de l'affaire » . En conséquence, pour trancher un appel formé contre l'ordonnance d'un protonotaire, je suis tenue d'exercer mon propre pouvoir discrétionnaire de novo conformément à Canada c. Aqua-Gem Investments Ltd., [1993] 2 C.F. 425, à la page 463.

Compétence

[7]      Les défendeurs Ermineskin ne contestent pas le fait que notre Cour a compétence pour traiter de décisions prises par le conseil de bande, conformément aux articles 18 et 18.1 de la Loi sur la Cour fédérale, étant donné que celui-ci est un « office fédéral » . Cependant, ils soutiennent que notre Cour n'a pas compétence pour entendre une demande, présentée par un individu (y compris un membre de la bande) contre le conseil de bande, fondée sur la violation d'une obligation fiduciaire (voir Bande indienne de Stoney c. Conseil de la bande indienne de Stoney, [1996] 3 C.F.D-052 (1re inst.), au paragraphe 22), ou encore une demande de dommages-intérêts pour violation d'un contrat ou délit civil (voir Beauvais c. La Reine et le Mohawk Council of Kanawake, [1982] 1 C.F. 171 (C.F. 1re inst.) et Trotchie c. La Reine, [1981] 2 C.N.L.R. 147 (C.F. 1re inst.)). Voici d'autres décisions auxquelles on a renvoyé pour démontrer la compétence restreinte de notre Cour : Bande indienne de Lower Similkameen c. Allison, [1997] 1 C.F. 475 (1re inst.), au paragraphe 19; Varnam c. Canada (Ministre de la Santé et du Bien-être social), [1988] 2 C.F. 454 (C.A.F.); Bande indienne de Lubicon Lake c. La Reine, [1981] 2 C.F. 317 (1re inst.); et Alda Enterprises Ltd. c. La Reine, [1978] 2 C.F. 106 (1re inst.).

[8]      L'avocate des défendeurs Ermineskin soutient que le protonotaire n'a pas appliqué le bon critère lorsqu'il a tranché la question de savoir si les actes de procédure devaient être radiés en vertu de la Règle 221(1)a) pour absence de compétence. Le protonotaire a dit qu'il fallait que « la chose [soit] claire, évidente et certaine » pour qu'à ce stade-ci, une requête en radiation fondée sur l'absence de compétence de notre Cour soit accueillie. L'avocate fait valoir que le critère qu'il convient d'appliquer consiste à savoir si'il est clair et évident que l'acte de procédure des demandeurs n'aura aucune incidence, vu l'absence de compétence de notre Cour.

[9]      Je suis d'accord qu'une requête en radiation, fondée sur la Règle 221(1)a) [anciennement la Règle 419(1)a)], présentée au motif que la Cour n'a pas la compétence voulue diffère d'autres requêtes en radiation fondée sur cette règle. Dans le cas d'une requête en radiation présentée au motif que la Cour n'a pas la compétence voulue, le demandeur peut produire des éléments de preuve pour étayer cette prétention. Dans d'autres cas, le demandeur doit accepter que le contenu de tous les actes de procédure est exact (voir MIL Davie Inc. c. Hibernia Management & Development Co. (1988), 226 N.R. 369 (C.A.F.); sur ce point, voir l'ouvrage de Sgayias, Kinnear, Rennie et Saunders, Federal Court Practice 2000, aux pages 506 et 507.

[10]      Je ne souscris pas au point de vue des défendeurs Ermineskin selon lequel le protonotaire a appliqué le mauvais critère. Certaines questions de compétence ne peuvent être facilement tranchées avant que tous les éléments de preuve n'aient été produits. Dans d'autres cas, de telles questions peuvent être facilement tranchées dans le cadre d'une requête en radiation. Le critère de savoir si la chose est claire et évidente s'applique à la radiation d'actes de procédure pour absence de compétence de la même façon qu'il s'applique à la radiation de tout acte de procédure au motif qu'il ne fait état d'aucune cause raisonnable d'action. L'absence de compétence doit être « claire et évidente » pour justifier la radiation d'actes de procédure à ce stade préliminaire.

[11]      Les critères applicables en matière de compétence de la Cour fédérale ont été énoncés dans l'arrêt ITO-International Terminal Operators Ltd. c. Miida Electronics Inc., [1986] 1 R.C.S. 752, à la page 766 : 1) Il doit y avoir attribution de compétence par une loi du Parlement fédéral; 2) Il doit exister un ensemble de règles de droit fédérales qui soit essentiel à la solution du litige et constitue le fondement de l'attribution légale de compétence; 3) La loi invoquée dans l'affaire doit être une loi du Canada. La Loi sur les Indiens, L.R.C. (1985), ch. I-5 satisfait aux deuxième et troisième exigences en l'espèce.

[12]      En ce qui concerne la première exigence, pour les fins de la présente affaire, il suffit de renvoyer aux décisions Roberts c. Canada, [1989] 1 R.C.S. 322, et Paul c. Bande indienne de Kingsclear (1997), 132 F.T.R. 145. Dans l'affaire Roberts, deux bandes indiennes soutenaient avoir des droits à l'égard des mêmes terres de réserve. Dans l'affaire Paul, un homme et son épouse faisaient valoir des intérêts opposés à l'égard d'une résidence familiale située sur des terres de réserve. Dans les deux cas, la Couronne possédait le titre de propriété et avait une obligation fiduciaire à l'égard des parties. Il a été conclu que la Cour avait compétence en vertu du paragraphe 17(4) de la Loi sur la Cour fédérale :

(4) The Trial Division has concurrent original jurisdiction to hear and determine proceedings to determine disputes where the Crown is or may be under an obligation, in respect of which there are or may be conflicting claims.

(4) La Section de première instance a compétence concurrente, en première instance, dans les procédures visant à régler les différends mettant en cause la Couronne à propos d'une obligation réelle ou éventuelle pouvant faire l'objet de demandes contradictoires.

[13]      Les faits de la présente affaire ressemblent à ceux des affaires Roberts et Paul. En l'espèce, la demande que les demandeurs font valoir a trait au statut de membre d'une bande et aux avantages que confère un tel statut. Les demandeurs font valoir que la Couronne a violé ses obligations fiduciaires lorsqu'elle a permis la radiation des noms de certains des demandeurs en 1944 et lorsqu'elle a omis d'ajouter les noms des demandeurs à la liste de la bande d'Ermineskin, jusqu'à la date du procès. Ils soutiennent également que les défendeurs Ermineskin ont violé leur obligation fiduciaire lorsqu'ils ont omis de respecter une résolution du conseil de bande qui remonte à 1937 et d'ajouter les noms des demandeurs à la liste de la bande lorsqu'ils ont obtenu le contrôle de celle-ci.

[14]      L'avocat de la Couronne soutient que ces allégations portent sur des demandes contre la Couronne au titre fédéral à l'égard de laquelle les demandes concurrentes suivantes peuvent être déposées ou sont susceptibles de l'être :

     a)      Dans le cas où il existerait une obligation fiduciaire à l'égard de la prétendue omission de respecter la résolution que le conseil de bande a adoptée le 16 novembre 1937 - s'agit-il d'une obligation qui incombe au Canada, aux défendeurs Ermineskin, ou aux deux?;
     b)      Dans le cas où les demandeurs ont le droit d'être inscrits en tant que membres par suite de cette prétendue violation de cette obligation fiduciaire, les demandeurs ont-ils droit aux « avantages » que les membres auraient reçus dans le passé? Dans l'affirmative, la Couronne ou les défendeurs Ermineskin sont-ils responsables du paiement de ces « avantages » ? Existe-t-il des obligations différentes découlant d' « avantages » différents? Par exemple, l'obligation de la Couronne diffère-t-elle selon que les « avantages » sont définis comme des distributions de capital, des distribution de revenu ou d'autres avantages, tel le logement de réserve?

[15]      La Couronne a soutenu en défense, et les défendeurs Ermineskin ont fait valoir dans leur mémoire, qu'après que la bande d'Ermineskin a obtenu le contrôle du statut de membre, la Couronne n'était plus responsable de l'ajout ou de la radiation de noms sur la liste de la bande. Les demandeurs contestent cet argument et avancent que la Couronne a toujours une certaine responsabilité à cet égard. Ce litige à l'égard du maintien de l'autorité (ou d'une éventuelle responsabilité fiduciaire) entraîne également des obligations éventuellement contradictoires.

[16]      Je ne suis pas convaincue qu'il est clair et évident que la Cour n'a pas compétence pour trancher les demandes que les défendeurs Ermineskin cherchent à faire radier.

L'obligation fiduciaire

[17]      Les défendeurs Ermineskin soutiennent que la demande que les demandeurs font valoir ne contient aucune cause raisonnable d'action contre eux étant donné qu'en droit, ils ne leur incombe aucune obligation fiduciaire à l'égard de ces derniers, compte tenu des faits de l'espèce.

[18]      Les défendeurs Ermineskin soutiennent que : 1) même si plusieurs décisions judiciaires reconnaissent qu'un conseil de bande peut avoir une obligation fiduciaire à l'égard de membres de la bande dans certaines circonstances, ces décisions ne s'appliquent pas à l'espèce; et 2) les demandeurs n'ayant jamais été, au cours de la période pertinente, membres de la bande d'Ermineskin, il n'existe pas d'obligation fiduciaire à leur égard.

[19]      Les demandeurs ont soutenu que les défendeurs Ermineskin ont violé les obligations fiduciaires qu'ils avaient à leur égard lorsqu'ils ont omis, entre autres, de respecter la résolution que le conseil de bande a adoptée le 16 novembre 1937. Selon le paragraphe 6 de la déclaration modifiée modifiée, qui doit être considérée comme exacte en ce qui concerne cet aspect de la requête des défendeurs, la résolution du conseil de bande conférait le statut de membre de la bande d'Ermineskin aux parents des demandeurs et à trois de ceux-ci.

[20]      L'avocat de la Couronne soutient qu'il n'est pas clairement inutile pour les demandeurs de soutenir que les défendeurs Ermineskin, qui avaient adopté une résolution conférant le statut de membre à leurs parents ainsi qu'à trois d'entre eux, peuvent avoir une obligation fiduciaire à l'égard de ces personnes ou de leurs descendants en vertu de cette résolution. Ces personnes ont été membres de la bande à un certain moment. La question de savoir s'ils peuvent maintenant soutenir qu'il existe toujours une obligation fiduciaire à leur égard ne peut être tranchée dans le cadre d'une requête fondée sur la Règle 221(1)a).

[21]      L'avocat de la Couronne soutient que les défendeurs Ermineskin n'ont pas cité de précédents décisifs démontrant qu'il existe un principe juridique établi selon lequel il y a une obligation fiduciaire dans les circonstances. L'avocat soutient que vu l'absence de tels précédents, cet aspect de la requête en radiation des défendeurs Ermineskin peut être tranché sur le fondement des remarques que le juge Dickson de la Cour suprême du Canada a faites dans l'arrêt Guerin c. La Reine, [1984] 2 R.C.S. 335, aux pages 384 et 385 :

Comme en matière de négligence, il faut se garder de conclure que les catégories de fiduciaires sont exhaustives. Voir, par exemple, les arrêts Laskin v. Bache & Co. Inc. (1971), 23 D.L.R. (3d) 385 (C. A. Ont.), à la p. 392; Goldex Mines Ltd. V. Revill (1974),7 O.R. 216 (C.A. Ont.), à la p. 224.

[22]      J'estime que les arguments de la Couronne sont convaincants.


Conclusion

[23]      Pour ces motifs, le présent appel est rejeté.


« B. Reed »

                                         juge


OTTAWA (ONTARIO)

Le 13 mars 2000.







Traduction certifiée conforme


Bernard Olivier, B.A., LL.B.

COUR FÉDÉRALE DU CANADA

SECTION DE PREMIÈRE INSTANCE


AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER



NO DU GREFFE :              T-2553-91

INTITULÉ DE LA CAUSE :      Theodore Hodgson et autres

                     c.

                     Bande indienne d'Ermineskin no 942 et

                     le Conseil de la bande indienne d'Ermineskin et autres

LIEU DE L'AUDIENCE :          Edmonton (Alberta)

DATE DE L'AUDIENCE :          le mardi 8 février 2000

MOTIFS D'ORDONNANCE EXPOSÉS PAR MADAME LE JUGE REED

EN DATE DU :              13 mars 2000



ONT COMPARU :


Ronald E. Johnson                          POUR LE DEMANDEUR

Maria Morellato                          POUR LES DÉFENDEURS

                                 Bande indienne d'Ermineskin no 942                                  et Conseil de la bande indienne                                  d'Ermineskin

James Baird                              POUR LA DÉFENDERESSE Sa                                  Majesté la Reine du chef du Canada


AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Roddick & Johnson, Edmonton (Alberta)              POUR LE DEMANDEUR

Blake Caassels & Graydon, Vancouver (C.-B.)          POUR LES DÉFENDEURS

Morris A. Rosenberg, Sous-procureur général du Canada      POUR LA DÉFENDERESSE

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