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Date : 20011221

Dossier : T-1597-00

Référence neutre : 2001 CFPI 1427

                                 CONTRÔLE JUDICIAIRE DE L'OMISSION

                                DE FAIRE UNE DIVULGATION COMPLÈTE

                    DÉSOBÉISSANCE À UNE ORDONNANCE DU TRIBUNAL

(PAR. 127(1) DU CODE CRIMINEL)

DÉSOBÉISSANCE À UNE LOI (PAR. 126(1) DU CODE CRIMINEL)

ENTRE :

LLOYD GRANT WEDOW

demandeur

- et -

SERVICE CORRECTIONNEL DU CANADA, ÉTABLISSEMENT DE BOWDEN,

MITCH KASSEN, MARCEL CHIASSON et RICHARD TOBIN

défendeurs

MOTIFS DE L'ORDONNANCE ET ORDONNANCE

LE JUGE CAMPBELL


[1]                Le demandeur est détenu à l'établissement de Bowden en Alberta. Le 18 décembre 1999, l'amie du demandeur, Mme Debbie Sauer, a essayé de lui rendre visite, mais on ne lui pas permis d'entrer parce que le détecteur ionique de l'établissement a révélé qu'elle transportait de la cocaïne et de l'héroïne. On a demandé à Mme Sauer de partir et, malgré ses demandes verbales, on ne lui a ni montré ni donné les résultats écrits du test.

[2]         Le même jour, le demandeur a écrit au directeur de l'établissement, M. Kassen, pour lui demander des renseignements au sujet de l'incident, et notamment pour lui demander de lui fournir les résultats du test, le rapport de l'incident ainsi que le nom et les titres des agents ayant participé au test. Le 20 décembre 1999, Mme Sauer a également écrit au directeur de l'établissement pour lui demander les indications relevées au moyen du détecteur et tout rapport sur l'incident.

[3]         Le directeur de l'établissement a répondu aux lettres du demandeur et de Mme Sauer le 7 janvier 2000. Dans la lettre qu'il a envoyée au demandeur, le directeur de l'établissement a tout simplement dit que les renseignements demandés ne seraient pas fournis et n'a donné aucun motif à l'appui de sa décision. La réponse qu'a donnée le directeur de l'établissement à la demande de Mme Sauer constitue ce que je considère comme étant la décision actuellement à l'étude, savoir : [TRADUCTION] « Le service n'est pas tenu de vous fournir un rapport écrit sur les indications relevées au moyen du détecteur » .


[4]         La question centrale soulevée dans le présent contrôle judiciaire est de savoir si le directeur de l'établissement était tenu de fournir au demandeur et à Mme Sauer, par écrit, les résultats du test effectué au moyen du détecteur ionique. À mon avis, il était légalement tenu de le faire.

[5]         Le paragraphe 71(1) de la Loi sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition, 1990, ch. 20, (la Loi) reconnaît à chaque détenu le droit d'entretenir, dans la mesure du possible, des relations, notamment par des visites ou de la correspondance, avec sa famille et ses amis, et ce, sous réserve des mesures prises pour assurer la sécurité. Le Règlement sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition DORS/92-620 (le Règlement) et la Directive du commissaire no 770 (1997) intitulée « Visites » (la Directive) appuient l'existence de ce droit. Quand des considérations de sécurité justifient le refus ou la suspension des visites, les deux textes prévoient une procédure particulière à suivre. L'alinéa 91(2)a) du Règlement est rédigé comme suit :


91(2) Lorsque l'interdiction ou la suspension a été autorisée en vertu du paragraphe (1) :

b) le directeur du pénitencier ou l'agent doit informer promptement le détenu et le visiteur des motifs de cette mesure et leur fournir la possibilité de présenter leurs observations à ce sujet.


91(2) Where a refusal or suspension is authorized under subsection (1),

(b) the institutional head or staff member shall promptly inform the inmate and the visitor of the reasons for the refusal or suspension and shall give the inmate and the visitor an opportunity to make representations with respect thereto.


[6]         L'article 18 b. de la Directive confère des droits semblables en matière d'équité procédurale, mais il exige également que les motifs du refus de la visite soient donnés par écrit. Cette disposition se lit comme suit :



18. Lorsqu'une interdiction ou une suspension de visite est autorisée en vertu du paragraphe 17 :

b. le directeur doit rapidement informer par écrit le détenu et le visiteur des motifs de cette mesure et leur fournir la possibilité de présenter leurs observations à ce sujet (le titre de la personne à qui adresser ces observations devrait être indiqué);


18. Where a refusal or suspension of visit is authorized under paragraph 17:

b. the institutional head shall inform the inmate and the visitor promptly, in writing, of the reasons for the refusal or suspension and shall give the inmate and visitor an opportunity to make representations with respect thereto. The title of the person to whom they should address their representations should be indicated


L'étendue de cette divulgation n'est limitée que par la Loi sur la protection des renseignements personnels. En l'espèce, il ne s'agit pas d'une considération pertinente parce que les renseignements personnels des parties, autres que le demandeur et Mme Sauer, ne sont pas en cause.

[7]         Il reste encore à déterminer si ce régime de droits exige expressément que les résultats du test soient fournis au demandeur et à Mme Sauer. À mon avis, c'est tout à fait le type de cas que sont censés viser le Règlement et la Directive. On n'a pas permis à Mme Sauer d'entrer parce que le détecteur ionique a révélé qu'elle transportait des drogues, et, selon moi, être informé par écrit de ce motif signifie se faire donner le résultat écrit du test effectué au moyen du détecteur ionique.


[8]         En outre, je suis d'avis que le Règlement et la Directive confèrent au demandeur et à Mme Sauer des droits en matière d'équité procédurale auxquels on a contrevenu en l'espèce; chacun d'eux avait légalement droit d'être informé promptement par écrit des résultats du test effectué au moyen du détecteur ionique. Cette exigence de célérité signifie qu'on aurait dû fournir au demandeur et à Mme Sauer les résultats écrits au moment du refus. À mon avis, l'omission de le faire est illégale.

O R D O N N A N C E

[9]         En conséquence, la présente demande de contrôle judiciaire est accueillie, et je déclare par les présentes que la décision du directeur de l'établissement est illégale. J'accorde au demandeur, à titre de dépens, les débours prouvés qu'il a faits pour le dépôt de la présente demande.

« Douglas R. CAMPBELL »

Juge

Calgary (Alberta)

Le 21 décembre 2001

Traduction certifiée conforme

Julie Boulanger, LL.M.


          COUR FÉDÉRALE DU CANADA

     SECTION DE PREMIÈRE INSTANCE

Date : 20011221

Dossier : T-1597-00

CONTRÔLE JUDICIAIRE DE L'OMISSION DE FAIRE UNE DIVULGATION COMPLÈTE DÉSOBÉISSANCE À UNE ORDONNANCE

DU TRIBUNAL (PAR. 127(1) DU

CODE CRIMINEL)

DÉSOBÉISSANCE À UNE LOI (PAR. 126(1) DU

CODE CRIMINEL)

ENTRE :

                LLOYD GRANT WEDOW

                                                             demandeur

                                   - et -

SERVICE CORRECTIONNEL DU CANADA, ÉTABLISSEMENT DE BOWDEN, MITCH KASSEN, MARCEL CHIASSON et RICHARD TOBIN

                                                              défendeurs

                                                                           

MOTIFS DE L'ORDONNANCE ET ORDONNANCE

                                                                            


                                           COUR FÉDÉRALE DU CANADA

                                      SECTION DE PREMIÈRE INSTANCE

                                        AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

DOSSIER :                                  T-1597-00

INTITULÉ :                                 LLOYD GRANT WEDOW c.      SERVICE CORRECTIONNEL DU CANADA et autres

                                                                       

LIEU DE L'AUDIENCE :          CALGARY (Alberta)

DATE DE L'AUDIENCE :         Le 20 décembre 2001

MOTIFS DE L'ORDONNANCE ET ORDONNANCE : LE JUGE CAMPBELL

DATE DES MOTIFS :               Le 21 décembre 2001

COMPARUTIONS :

M. Lloyd Wedow                                                                POUR LE DEMANDEUR

Mme Deborah Babiuk-Gibson                                             POUR LES DÉFENDEURS

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :    

M. Lloyd Grant Wedow

Innisfail (Alberta)                                                                 POUR LE DEMANDEUR

M. Morris Rosenberg

Sous-procureur général du Canada                                      POUR LES DÉFENDEURS


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