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     Date : 19990326

     Dossier : T-1310-98

OTTAWA (ONTARIO), LE 26 MARS 1999

EN PRÉSENCE DE MONSIEUR LE JUGE LUTFY

     AFFAIRE INTÉRESSANT la Loi sur la citoyenneté,

     L.R.C. (1985), c. C-29

     ET un appel de la décision d'un juge

     de la citoyenneté

ENTRE :

     KIT MAY PHOEBE LAM,

     demanderesse,

     - et -

     LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION,

     défendeur.

     ORDONNANCE

     LA COUR, statuant sur l'appel formé à l'encontre de la décision en date du 28 avril 1998 du juge de la citoyenneté H. Peter Oberlander et après examen de l'argumentation écrite, audition de l'appel les 23 et 24 février 1999 à Vancouver (C.-B.) et examen des observations écrites supplémentaires soumises par les parties :

     ACCUEILLE l'appel.

                                 " Allan Lutfy "

                                         J.C.F.C.

Traduction certifiée conforme

Marie Descombes, LL.L.

     Date : 19990326

     Dossier : T-1310-98

     AFFAIRE INTÉRESSANT la Loi sur la citoyenneté,

     L.R.C. (1985), c. C-29

     ET un appel de la décision d'un juge

     de la citoyenneté

ENTRE :

     KIT MAY PHOEBE LAM,

     demanderesse,

     - et -

     LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION,

     défendeur.

     MOTIFS DE L'ORDONNANCE

LE JUGE LUTFY

[1]      Dans sa décision en date du 28 avril 1998, le juge de la citoyenneté a conclu que la demanderesse ne remplissait pas les conditions de résidence prescrites à l'alinéa 5(1)c) de la Loi sur la citoyenneté. La demanderesse avait, dans les quatre ans qui ont précédé la date de sa demande de citoyenneté, été physiquement présente au Canada 621 jours durant la période prescrite de 1 095 jours. La demanderesse interjette appel de cette décision en vertu du paragraphe 14(5) de la Loi et de la règle 300c) des Règles de la Cour fédérale (1998).

[2]      La demanderesse, qui est âgée de trente ans, a fait un premier séjour au Canada en septembre 1992. Elle est revenue au Canada en août 1993 lorsque son ami, Hau Keen Clement Lam, a immigré au Canada avec sa famille. Le 28 novembre 1993, la demanderesse est entrée au Canada de façon plus permanente afin de poursuivre sa relation avec M. Lam. Elle a épousé M. Lam le 5 février 1994. À son retour au Canada en novembre 1993, la demanderesse a habité avec son mari et la famille de ce dernier dans la résidence qu'il possédait à Port Coquitlam (C.-B.). En avril 1995, la demanderesse et son mari ont fait l'acquisition d'une maison à Vancouver dans l'intention d'y habiter une fois que les travaux de construction seraient terminés en juillet 1996.

[3]      La demanderesse a occupé un emploi rémunéré à Vancouver entre le mois d'octobre 1994 et le mois de février 1996. Elle a payé de l'impôt au Canada sur ce revenu d'emploi. Elle a obtenu la résidence permanente le 28 février 1995.

[4]      Après la réalisation d'une étude de faisabilité à Hong Kong en octobre et novembre 1995, le mari de la demanderesse a été chargé de mettre sur pied le nouveau bureau de Greenpeace Canada en Chine. Son affectation initiale devait commencer en février 1996 et prendre fin en juillet 1996. Pour diverses raisons, elle s'est prolongée jusqu'à la fin de 1998.

[5]      En février 1996, la demanderesse a décidé d'accompagner son mari en Chine. Son but premier était de fournir un soutien à son mari. Pendant la période de trente-six mois qui s'est écoulée entre l'entrée de la demanderesse au Canada et la prise de la décision d'accompagner son mari à l'étranger en février 1996, la demanderesse a quitté le Canada pendant un mois seulement en 1995 pour prendre des vacances à Hong Kong.

[6]      Le passage pertinent de la lettre de décision du juge de la citoyenneté est le suivant :

     [traduction] Selon la jurisprudence de la Cour fédérale, la personne qui veut établir sa résidence doit prouver qu'en pensée et en fait, elle a centralisé son mode de vie au Canada. Si cette résidence est établie, elle n'est pas compromise par des absences du Canada, à condition qu'il soit prouvé que la personne a quitté le Canada dans un but temporaire seulement et a toujours conservé une forme de résidence réelle au Canada. J'ai donc soigneusement examiné votre dossier pour déterminer si vous aviez établi une résidence au Canada avant vos absences, de manière à ce que ces absences puissent malgré tout être considérées comme des périodes de résidence.         
     Jusqu'à la date de votre demande de citoyenneté le 21 juillet 1997, vous avez été absente environ 482 jours, de sorte qu'il vous manque 474 jours pendant la période prescrite de 1 095 jours. Un examen des faits vous concernant et de la jurisprudence pertinente m'a amené à conclure que vous n'avez pas conservé des attaches suffisantes avec le Canada durant vos absences pour que ces absences prolongées soient considérées comme des périodes de résidence en vertu de la [L]oi.         

Une analyse de la norme de contrôle applicable s'impose pour statuer sur l'appel de cette décision.

[7]      Plusieurs dispositions de la Loi sur la citoyenneté sont pertinentes pour déterminer la norme de contrôle applicable dans le présent appel prévu par la loi1. Dans ce contexte, il est utile d'examiner les formalités habituellement suivies par la personne qui demande la citoyenneté.

[8]      L'auteur d'une demande de citoyenneté est un résident permanent âgé d'au moins dix-huit ans qui doit remplir les conditions relatives à la résidence, à la langue et à la connaissance du Canada qui sont prescrites aux alinéas 5(1)c), d) et e). Aux termes du paragraphe 14(1), un juge de la citoyenneté examine la demande et décide si ces conditions sont remplies. Si la demande est approuvée, le ministre délivre un certificat de citoyenneté en vertu du paragraphe 12(2). Les paragraphes 14(5) et 14(6) prévoient le droit d'interjeter appel de la décision du juge de la citoyenneté auprès de la Section de première instance de la Cour fédérale2, dont le jugement n'est pas susceptible d'appel3. Aux termes du paragraphe 26(1), le gouverneur en conseil peut nommer tout citoyen juge de la citoyenneté.

[9]      Selon les anciennes Règles de la Cour fédérale, un appel formé en vertu du paragraphe 14(6) était entendu par la voie d'un procès de novo4. Ce n'est plus le cas. Suivant la règle 300c) des Règles de la Cour fédérale (1998), un appel en matière de citoyenneté est interjeté par la présentation d'une demande. Toutefois, l'appel, prévu par la loi, de la décision d'un juge de la citoyenneté n'est pas une demande de contrôle judiciaire au sens de l'article 18.1 de la Loi sur la Cour fédérale5.

[10]      Dans l'affaire Kerho, Re6, qui a été décidée durant la période où les appels en matière de citoyenneté étaient entendus par la voie d'un procès de novo, le juge Teitelbaum a malgré tout nuancé son droit de substituer sa propre décision à celle du juge de la citoyenneté en ces termes :

     [...] même si l'appel est effectivement un procès de novo, il appartient à l'appelant de prouver que le juge de la citoyenneté a exercé son pouvoir discrétionnaire en se fondant sur un principe erroné, en comprenant mal les faits ou pour toute autre raison majeure exigeant mon intervention.         

[11]      L'examen de la norme de contrôle appropriée nécessite également la compréhension des décisions contradictoires rendues par la Section de première instance de la Cour fédérale au cours des deux dernières décennies, soit la période durant laquelle les appels en matière de citoyenneté étaient entendus par la voie d'un procès de novo. Certains juges de la Cour ont adopté le point de vue que la condition de résidence prescrite à l'alinéa 5(1)c) de la Loi implique quelque chose de plus qu'un simple calcul de jours. Ce point de vue a été exprimé pour la première fois par le juge en chef adjoint Thurlow (tel était alors son titre) dans l'affaire Papadogiorgakis7. Voici ce qu'il a déclaré :

     Il me semble que les termes "résidence" et "résident" employés dans l'alinéa 5(1)b ) de la nouvelle Loi sur la citoyenneté ne soient pas strictement limités à la présence effective au Canada pendant toute la période requise, ainsi que l'exigeait l'ancienne loi, mais peuvent aussi comprendre le cas de personnes ayant un lieu de résidence au Canada, qu'elles utilisent comme un lieu de domicile dans une mesure suffisante fréquente [sic] pour prouver le caractère effectif de leur résidence dans ce lieu pendant la période pertinente, même si elles en ont été absentes pendant un certain temps. [...]         
     Une personne ayant son propre foyer établi, où elle habite, ne cesse pas d'y être résidente lorsqu'elle le quitte à des fins temporaires, soit pour traiter des affaires, passer des vacances ou même pour poursuivre des études. Le fait que sa famille continue à y habiter durant son absence peut appuyer la conclusion qu'elle n'a pas cessé d'y résider. On peut aboutir à cette conclusion même si l'absence a été plus ou moins longue. Cette conclusion est d'autant mieux établie si la personne y revient fréquemment lorsque l'occasion se présente. Ainsi que l'a dit le juge Rand dans l'extrait que j'ai lu cela dépend [traduction] "essentiellement du point jusqu'auquel une personne s'établit en pensée et en fait, ou conserve ou centralise son mode de vie habituel avec son cortège de relations sociales, d'intérêts et de convenances, au lieu en question"8.         

Le principe posé dans l'affaire Papadogiorgakis a été résumé par le juge Dubé dans l'affaire Banerjee, Re9 : " C'est la qualité de l'attachement au Canada qui doit être examinée. " Le juge Dubé a réaffirmé son point de vue plus récemment dans l'affaire Ho, Re10 :

     Comme je l'ai dit à de nombreuses reprises, la résidence au Canada aux fins d'obtenir la citoyenneté n'implique pas la présence physique en tout temps. Le lieu où réside une personne n'est pas celui où elle travaille, mais bien celui où elle retourne après avoir travaillé. Donc, un demandeur de la citoyenneté qui élit domicile de façon évidente et définitive au Canada, dans l'intention bien claire d'avoir des racines permanentes dans ce pays ne doit pas être privé de la citoyenneté simplement parce qu'il doit gagner sa vie et celle de sa famille en travaillant à l'étranger. Les indices les plus éloquents du maintien de la résidence sont l'établissement permanent d'une personne et de sa famille dans le pays11. [Non souligné dans l'original.]         

[12]      Plusieurs autres juges de la Cour ont adopté un point de vue différent. Dans la décision qu'il a rendue récemment dans l'affaire Harry, Re12, le juge Muldoon a réitéré sa ferme conviction quant à l'interprétation correcte de l'alinéa 5(1)c) :

     20.      Attribuer la citoyenneté à ceux qui ne prennent pas la peine de se conformer aux dispositions solennellement édictées par le législateur non seulement constitue un crime de lèse-majesté, mais encore discrédite la citoyenneté canadienne. Les demandeurs sérieux et sincères doivent tout simplement observer la loi, comme toute autre personne, que cela leur plaise ou non. Quel terrible message transmet la Cour en annulant la décision d'un juge de la citoyenneté afin d'attribuer la citoyenneté à quelqu'un contrairement à la volonté du législateur! La Cour ne paraît pas bien en s'adonnant à ce genre de fausse munificence. Elle n'encourage pas ainsi le respect de la loi.         
     21.      Il semble clair que toutes les remarques qui précèdent ne sont pas simplement des conjectures ou des digressions judiciaires. Le législateur a modifié la Loi sur la citoyenneté à l'occasion depuis la promulgation des lois révisées. Il n'en a pas profité pour édicter quelque disposition que ce soit en matière de résidence, pour établir des exceptions ou pour prévoir que la citoyenneté peut être attribuée à tout requérant qui         
     - serait probablement un bon citoyen, mais ne remplit pas les conditions prévues à l'alinéa 5(1)c);         
     - a " axé " son " style de vie " sur le Canada pour une raison ou une autre, tout en étant absent;         
     - a envoyé ou déposé au Canada ses biens personnels (c'est-à-dire son compte bancaire, ses vêtements, sa voiture, etc.) tout en étant absent du Canada;         
     - s'est " canadianisé " en moins de temps que la période prescrite de trois années sur les quatre années précédant la date de la demande;         
     - doit s'absenter du Canada pour affaires ou pour une autre raison pendant plus d'un an au cours des quatre années précédant la date de la demande;         
     - a un conjoint, des enfants ou d'autres membres de la famille qui sont déjà citoyens.         
     22.      Cette tendance à ne pas tenir compte de la loi telle que le législateur l'a libellée semble remonter à l'affaire Papadogiorgakis [1978] 2 C.F. 208. Cette affaire a été tranchée par un éminent juge de l'époque, mais sa décision n'a pas force obligatoire, simplement parce que les jugements rendus en appel d'une décision du juge de la citoyenneté ne sont pas susceptibles d'appel. Ce facteur peut créer, et crée en fait, un incertitude scandaleuse en droit13.         

[13]      Un troisième point de vue, qui fait peut-être fond sur les éléments plus solides des deux autres, est formulé dans l'affaire Koo, Re14. Madame le juge Reed a conclu dans cette affaire que le critère approprié était le lieu où la personne " vit régulièrement, normalement ou habituellement ", ou a centralisé son mode d'existence. En statuant ainsi, le juge Reed a affirmé que les facteurs pertinents devraient être la durée des séjours au Canada de la personne, le lieu de résidence de la famille proche et de la famille étendue, l'étendue et la cause des absences physiques, la qualité des attaches avec le Canada par rapport à celles qui existent dans un autre pays et la question de savoir si le temps passé au Canada dénote que la personne revient dans son pays ou n'y est qu'en visite.

[14]      Le paragraphe 14(6) de la Loi interdit la formation d'un appel à l'encontre de la décision de la Section de première instance de la Cour fédérale. En conséquence, la Cour d'appel n'a pas eu la possibilité de démêler cette jurisprudence contradictoire. Les juges de la Section de première instance ont eu toute latitude pour formuler leur propre opinion. À mon avis, le juge de la citoyenneté peut adhérer à l'une ou l'autre des écoles contradictoires de la Cour, et, s'il appliquait correctement aux faits de la cause les principes de l'approche qu'il privilégie, sa décision ne serait pas erronée. Jusqu'ici, les juges de la Section de première instance de la Cour fédérale qui ont présidé un procès de novo se sont généralement sentis libres de substituer leur conception de la condition en matière de résidence à celle exprimée dans la décision portée en appel. Cette divergence de vues, tant au sein de la Cour que parmi les juges de la citoyenneté, est cause d'incertitude dans l'administration de la justice dans ce domaine.

[15]      La difficulté que posent les interprétations contradictoires que la Cour a données de l'alinéa 5(1)c) pourrait bientôt disparaître. En effet, le projet de loi C-6315 propose la promulgation d'une nouvelle Loi sur la citoyenneté au Canada qui entend préciser la condition en matière de résidence. Selon les nouvelles dispositions proposées, une personne ne réside au Canada " que lorsqu['elle] y est effectivement présente "16. Ce changement paraît enlever le pouvoir discrétionnaire de reconnaître à l'auteur d'une demande de citoyenneté des jours de résidence lorsqu'il est en fait absent du Canada. Le projet de loi C-63 supprimera en outre le droit d'appel actuellement prévu au paragraphe 14(5). Par conséquent, si le projet de loi C-63 est édicté, le débat actuel sur le critère juridique applicable à la résidence et la question de la norme de contrôle applicable dans un appel prévu par la loi en matière de citoyenneté n'aura plus de raison d'être.

[16]      La question qui doit être tranchée pendant cette période d'incertitude est celle de savoir si l'étendue du contrôle exercé par la Section de première instance est différente maintenant que l'appel est interjeté au moyen d'une demande au lieu d'être entendu comme un procès de novo.

[17]      De récentes décisions de la Cour suprême du Canada17 exposent les critères pertinents pour déterminer la norme de contrôle applicable dans un appel prévu par la loi. Ces critères sont la question de la clause privative, s'il y a lieu, la nature du problème soumis au tribunal administratif, l'objet de la loi, l'intention du législateur et l'expertise du décideur.

[18]      La Loi sur la citoyenneté ne contient pas de clause privative18. Elle confère un droit général d'appel de la décision d'un juge de la citoyenneté devant la Section de première instance de la Cour fédérale et n'exige pas l'obtention d'une autorisation. Par contre, le droit de présenter une demande de contrôle judiciaire d'une décision de la section du statut de réfugié est accordé sur autorisation19. Le jugement de la Section de première instance de la Cour fédérale qui siège en appel de la décision d'un juge de la citoyenneté est, " par dérogation à toute autre loi fédérale ", non susceptible d'appel20. La décision rendue par la Cour dans le cadre d'une demande de contrôle judiciaire en matière d'immigration ou de reconnaissance du statut de réfugié peut être portée en appel si le juge certifie que l'affaire soulève une question grave de portée générale21.

[19]      Le gouverneur en conseil peut nommer tout citoyen juge de la citoyenneté22. En l'absence d'une autre disposition dans la Loi, le juge de la citoyenneté est réputé avoir été nommé à titre amovible23. Le gouverneur en conseil a le même pouvoir étendu de nommer les membres de la Commission de l'immigration et du statut de réfugié, qui sont toutefois nommés à titre inamovible pour un mandat maximal de sept ans24. Je n'ai été saisi d'aucun élément de preuve concernant l'existence d'une présélection avant la nomination d'un juge de la citoyenneté ou d'un membre de la Commission de l'immigration et du statut de réfugié par le gouverneur en conseil.

[20]      La Loi sur la citoyenneté est une loi concernant principalement les conditions d'attribution de la citoyenneté et les formalités à suivre à cet égard, la perte de la citoyenneté et la réintégration dans la citoyenneté, et les mesures applicables lorsque des questions de sécurité nationale sont en jeu. L'auteur d'une demande de citoyenneté doit avoir obtenu la résidence permanente en vertu de la Loi sur l'immigration, dont les objets énoncés aux alinéas 3a), b) et c) ne sont peut-être pas sans rapport avec ceux de la Loi sur la citoyenneté :

3. It is hereby declared that Canadian immigration policy and the rules and regulations made under this Act shall be designed and administered in such a manner as to promote the domestic and international interests of Canada recognizing the need

3. La politique canadienne d'immigration ainsi que les règles et règlements pris en vertu de la présente loi visent, dans leur conception et leur mise en oeuvre, à promouvoir les intérêts du pays sur les plans intérieur et international et reconnaissent la nécessité :

(a) to support the attainment of such demographic goals as may be established by the Government of Canada in respect of the size, rate of growth, structure and geographic distribution of the Canadian population;

a) de concourir à la réalisation des objectifs démographiques établis par le gouvernement du Canada en ce qui concerne le chiffre, le taux de croissance, la structure et la répartition géographique de la population canadienne;

(b) to enrich and strengthen the cultural and social fabric of Canada, taking into account the federal and bilingual character of Canada;

b) d'enrichir et de renforcer le tissu culturel et social du Canada en tenant compte de son caractère fédéral et bilingue;

(c) to facilitate the reunion in Canada of Canadian citizens and permanent residents with their close relatives from abroad; ...

c) de faciliter la réunion au Canada des citoyens canadiens et résidents permanents avec leurs proches parents de l'étranger; [...]

[21]      La disposition la plus instructive concernant l'objet de la Loi sur la citoyenneté dans l'optique de la norme de contrôle est peut-être la décision du législateur d'investir les juges de la citoyenneté du pouvoir de décider si les conditions d'attribution de la citoyenneté sont réunies. Lorsqu'une décision favorable est rendue et qu'aucun appel n'est interjeté, le ministre attribue la citoyenneté en application de l'article 5. Dans l'affaire Southam Inc., le juge Iacobucci affirme que la délégation par le législateur de l'examen d'une question à un tribunal administratif peut en soi indiquer qu'une autre norme que celle de la décision correcte est nécessaire :

     Si le Parlement confie l'examen de certaines questions à un tribunal administratif plutôt qu'aux tribunaux ordinaires (du moins en première instance), il est permis de présumer que c'est parce que le tribunal administratif apporte un certain avantage que les juges ne sont pas en mesure d'offrir. Pour cette seule raison, le contrôle des décisions d'un tribunal administratif doit souvent se faire non pas en regard de la norme de la décision correcte, mais en fonction d'une norme exigeant de faire montre de retenue25.         

[22]      La nature du problème en matière de résidence est circonscrite. Pour appliquer l'alinéa 5(1)c), le juge de la citoyenneté doit décider si le résident permanent a, dans les quatre ans qui ont précédé la date de sa demande, accumulé au moins trois années de résidence au Canada. À mon avis, le juge de la citoyenneté a, pour décider si la condition en matière de résidence a été remplie, la même " expertise relative "26 que le membre de la section du statut de réfugié qui évalue le risque de persécution auquel serait exposé un réfugié s'il était renvoyé dans son pays d'origine. Dans l'arrêt Pushpanathan, le juge Bastarache reconnaît l'expertise des membres de la Commission de l'immigration et du statut de réfugié lorsqu'il s'agit d'apprécier le risque de persécution contre la personne d'un requérant s'il était renvoyé dans son pays d'origine27. Le juge de la citoyenneté paraît tout aussi bien placé pour apprécier la condition en matière de résidence, compte tenu de l'alinéa 5(1)c) et de la jurisprudence pertinente.

[23]      La Cour a souvent examiné la question de la norme de contrôle applicable aux appels formés à l'encontre des décisions de fonctionnaires des marques de commerce qui portent sur la " confusion " et le " caractère distinctif ". Le droit d'appel prévu par la loi est illimité28. Des éléments de preuve supplémentaires peuvent être soumis en appel29. Dans l'affaire La Brasserie Labatt Limitée c. Les Brasseries Molson, société en nom collectif30, le juge Heald a examiné le rôle de la Cour dans le cadre d'un appel relatif à une marque de commerce :

     Le juge Strayer a exposé avec justesse le rôle de la Cour lors d'un appel interjeté en vertu de l'article 56 de la Loi dans l'affaire McDonald's Corp. c. Silcorp Ltd. (1989), 24 C.P.R. (3d) 207 (C.F. 1re inst.), à la page 210, confirmé par 139 N.R. 319, 41 C.P.R. (3d) 67 (C.A.F.) :         
         Il semble clair qu'en matière d'oppositions, lorsque le litige porte essentiellement sur des faits relatifs à la confusion ou au caractère distinctif, la décision du registraire ou de la Commission constitue une conclusion de fait et non l'exercice d'un pouvoir discrétionnaire. Par conséquent, la Cour ne devrait pas réviser cette décision avec autant de retenue que s'il s'agissait de l'exercice d'un pouvoir discrétionnaire. La Cour est donc libre d'examiner les faits afin d'établir si la décision du registraire ou de la Commission était exacte; cependant cette décision ne devrait pas être annulée à la légère, compte tenu des connaissances spécialisées dont disposent ces instances décisionnelles : voir Benson & Hedges (Canada) Ltd. c. St. Regis Tobacco Corp. (1968), 57 C.P.R. 1, à la p. 8, 1 D.L.R. (3d) 462, [1969] R.C.S. 192, aux p. 199 et 200 (C.S.C.). Bien qu'à diverses reprises, la Cour d'appel fédérale ait jugé qu'en appel, la Cour avait l'obligation d'établir si le registraire avait ou non rendu une décision "manifestement erronée" ou s'il avait simplement "eu tort", il semble que le juge saisi d'un appel semblable à l'espèce soit tenu de tirer ses propres conclusions quant à l'exactitude de la décision du registraire. Ce faisant, il doit toutefois tenir compte de l'expérience et des connaissances particulières dont dispose le registraire ou la Commission et surtout prendre en considération, le cas échéant, le fait que de nouvelles preuves, dont ne disposait pas la Commission, ont été déposées devant lui31. [Non souligné dans l'original.]                 

Il est intéressant de souligner qu'on fait mention de la norme de la décision correcte et qu'on reconnaît d'autre part l'expérience et les connaissances particulières du fonctionnaire saisi d'un litige en matière de marques de commerce.

[24]      En d'autres termes, pour apprécier la condition de résidence que doit remplir un demandeur de citoyenneté, le risque de persécution contre la personne d'un réfugié ou la probabilité de confusion entre des marques de commerce, le décideur doit déterminer " si les faits satisfont au critère juridique "32. Il s'agit d'une question de fait et de droit. Dans l'arrêt Southam Inc., le juge Iacobucci a, après avoir qualifié le problème de question de fait et de droit, appliqué la norme de la décision raisonnable simpliciter ou, en d'autres termes, " manifestement erronée " ou " déraisonnable "33. Il a également affirmé que l'expertise " [...] est le facteur le plus important qu'une cour doit examiner pour arrêter la norme de contrôle applicable "34.

[25]      Si je comprends bien les commentaires que fait le juge Iacobucci dans l'arrêt Southam Inc., celui-ci reconnaît que la norme de contrôle peut changer : " Selon les facteurs en jeu dans un cas particulier, la norme peut se situer à un point donné entre celle de la décision correcte, soit la norme exigeant le moins de retenue, et celle du caractère manifestement déraisonnable, soit la norme en exigeant le plus35. " Pour conclure que la troisième norme devrait être celle de savoir si la décision du tribunal administratif est déraisonnable, il a fait la mise en garde suivante :

     [...] le décideur chargé du contrôle de la décision, et même un décideur appliquant la norme de la décision raisonnable simpliciter, sera souvent tenté de trouver un moyen d'intervenir dans les cas où il aurait lui-même tiré la conclusion contraire. Les cours d'appel doivent résister à cette tentation. Mon affirmation selon laquelle je ne serais peut-être pas arrivé à la même conclusion que le Tribunal ne devrait pas être considérée comme une invitation aux cours d'appel à intervenir dans les cas comme celui qui nous intéresse, mais plutôt comme une mise en garde contre pareille intervention et comme un appel à la retenue. La retenue judiciaire s'impose si l'on veut façonner un système de contrôle judiciaire cohérent, rationnel et, à mon sens, judicieux36.         

[26]      Un juge de la citoyenneté n'a peut-être pas l'expertise professionnelle des juges et des membres non juristes du Tribunal de la concurrence, mais il est nettement moins difficile de trancher la question de savoir si l'auteur d'une demande de citoyenneté remplit la condition en matière de résidence que de trancher les questions qui étaient en jeu dans l'arrêt Southam Inc. L'audience que préside le juge de la citoyenneté dure beaucoup moins longtemps que les quarante-deux jours durant lesquels le Tribunal de la concurrence a siégé dans l'affaire Southam Inc. Le fait d'être continuellement saisi d'une question claire et limitée, comme la condition en matière de résidence, peut aussi favoriser l'acquisition de l'expérience et des connaissances particulières évoquées dans les affaires portant sur les marques de commerce, supra, paragraphe 23. La spécialisation, et peut-être l'expertise, d'un juge de la citoyenneté s'apparente peut-être davantage à celle d'un membre non juriste de la section du statut de réfugié ou d'un décideur saisi d'une demande en matière de marques de commerce. Il est également utile de mentionner que la question de résidence que doit trancher le juge de la citoyenneté est moins compliquée que les questions soumises à des tribunaux administratifs possédant une expertise plus ou moins comparable.

[27]      La nature des problèmes, leur complexité et l'expérience particulière d'un tribunal administratif font ressortir quelques-unes des différences qui peuvent préconiser l'application d'une norme de contrôle qui varie en fonction des circonstances, même lorsqu'il s'agit d'une question de fait et de droit.

[28]      Il est utile d'examiner brièvement les rares formalités à suivre pour obtenir la citoyenneté. Selon l'article 12 du Règlement sur la citoyenneté, 199337, l'enregistrement du témoignage que reçoit le juge de la citoyenneté n'est pas obligatoire, même s'il s'agit d'un témoignage sous serment. L'absence d'une transcription ne portait pas à conséquence dans un appel de novo entendu par la Cour. Toutefois, dans un appel prévu par la loi qui est formé au moyen d'une demande, la seule façon de remédier à l'absence de la transcription consiste à déposer des affidavits circonstanciés contenant les renseignements que l'auteur de la demande de citoyenneté a fournis au juge de la citoyenneté38. À l'heure actuelle, le dossier ne contient habituellement que la preuve documentaire complète fournie par l'auteur de la demande et la décision motivée du juge de la citoyenneté. Cette décision est souvent assez courte.

[29]      Le Règlement sur la citoyenneté, 1993 ne prévoit ni n'empêche la participation du ministre lorsque le juge de la citoyenneté décide de demander à l'auteur de la demande de citoyenneté de comparaître pour fournir un complément d'information. Il convient en outre de faire remarquer qu'au cours des vingt dernières années, le ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration a rarement jugé bon d'exercer son droit d'interjeter appel de la décision d'un juge de la citoyenneté. Les appels formés au nom du ministre se sont multipliés au cours de la dernière année.

[30]      Le procès de novo permettait aux juges de la Section de première instance de trancher l'appel à partir d'un nouveau dossier et d'interpréter l'alinéa 5(1)c) en fonction de leur conception des décisions contradictoires. Certains juges ont peut-être préféré restreindre leur pouvoir discrétionnaire, ainsi que l'indique l'affaire Kerho, Re39. L'examen de la jurisprudence confirme simplement l'existence de décisions incompatibles relativement à des appels dont les faits n'étaient peut-être pas sensiblement différents.

[31]      En l'espèce, les facteurs objectifs ayant trait au rôle du juge de la citoyenneté appelé à se prononcer sur la condition en matière de résidence exigent une retenue plus grande que la norme de la décision correcte. Comme le juge de la citoyenneté est saisi d'une question de fait et de droit, la norme, encore une fois en termes objectifs, peut aller jusqu'à la décision déraisonnable simpliciter. J'hésite toutefois à tirer une conclusion aussi définitive dans l'état actuel des choses.

[32]      Une fois de plus, le présent appel en matière de citoyenneté est entendu durant une période unique de transition probable. Comme le juge Muldoon l'a déclaré dans l'affaire Harry, Re, " [l]'application judiciaire [de ce critère législatif] [...] fait l'objet d'une controverse depuis au moins deux décennies "40. Le critère juridique est embrouillé par les décisions contradictoires rendues par la Cour. L'appel est désormais formé au moyen d'une demande. Rien ne permet de conclure que les juges de la citoyenneté conduisent les instances différemment depuis l'entrée en vigueur des nouvelles Règles de la Cour. L'absence d'un enregistrement contenant les renseignements communiqués de vive voix au juge de la citoyenneté est plus inquiétante depuis qu'il n'y a plus de procès de novo. Le contenu de la décision portée en appel ne permet pas toujours de savoir quelle décision de la Cour a été suivie. L'examen du projet de loi C-63 par le Parlement pourrait entraîner des changements considérables au chapitre de l'examen et du règlement des demandes de citoyenneté, et du contrôle des décisions qui en résultent. Bref, même si les facteurs objectifs exigeaient que le contrôle des décisions des juges de la citoyenneté se fasse avec un plus haut degré de retenue, il ne convient pas, dans les circonstances, de s'écarter radicalement de la norme de contrôle actuelle.

[33]      La justice et l'équité, tant pour les demandeurs de citoyenneté que pour le ministre, appellent la continuité en ce qui concerne la norme de contrôle pendant que la Loi actuelle est encore en vigueur et malgré la fin des procès de novo. La norme appropriée, dans les circonstances, est une norme qui est proche de la décision correcte. Cependant, lorsqu'un juge de la citoyenneté, dans des motifs clairs qui dénotent une compréhension de la jurisprudence, décide à bon droit que les faits satisfont sa conception du critère législatif prévu à l'alinéa 5(1)c), le juge siégeant en révision ne devrait pas remplacer arbitrairement cette conception par une conception différente de la condition en matière de résidence. C'est dans cette mesure qu'il faut faire montre de retenue envers les connaissances et l'expérience particulières du juge de la citoyenneté durant la période de transition.

[34]      En l'espèce, le juge de la citoyenneté ne paraît pas s'être attaché aux circonstances de la présence de la demanderesse au Canada avant qu'elle n'accompagne son mari en Chine en février 1996. Durant cette période, elle n'a pas quitté le Canada, sauf pour prendre de courtes vacances, elle s'est mariée, elle a continué de vivre avec son mari au Canada et elle a exercé un emploi rémunéré au Canada. Il existe de fortes indications qu'elle a centralisé son mode de vie au Canada. Depuis que la demanderesse a rejoint son mari envoyé en mission par Greenpeace Canada, elle est retournée à Vancouver en juin 1996 pour régler des questions juridiques concernant leur nouvelle résidence et, en compagnie de son mari, pour célébrer les fêtes de fin d'année en décembre 1997 et pour assister à la cérémonie d'assermentation de son beau-père comme citoyen canadien en juillet 1997.

[35]      Dans une lettre datée du mois d'août 1997, une personne responsable des ressources humaines au bureau de Greenpeace à Toronto a décrit l'affectation du mari de la demanderesse en Chine en ces termes :

     [traduction] En raison de l'expérience et de la formation de M. Lam au sein de Greenpeace Canada, et de sa compréhension de la langue et de la culture chinoises, nous l'avons détaché pour qu'il participe au projet chinois de Greenpeace International, qui a reçu le mandat d'organiser les locaux et de mettre sur pied les activités de notre tout nouveau bureau, Greenpeace China, à Hong Kong. La coordonnatrice du projet est une Canadienne, Anne Dingwall. La présence de M. Lam est essentielle à la réussite du projet.         
     Pour fournir ses services, M. Lam doit, au nom de notre organisation, effectuer de nombreux voyages à Hong Kong et en Chine au cours des deux prochaines années et séjournera à l'étranger pendant des périodes prolongées. Nous croyons savoir que la femme de M. Lam, Kit May Phoebe Lam, l'accompagnera pendant ses séjours à l'étranger.         

Cette lettre fait ressortir la nature temporaire de l'affectation de M. Lam en Chine et le désir de son épouse d'être avec lui durant cette période.

[36]      Dans l'affaire Koo, Re, précitée, paragraphe 13, le juge Reed a déclaré que l'un des critères pertinents était la question de savoir si l'absence du Canada peut être imputable " à une situation manifestement temporaire (par exemple, avoir quitté le Canada pour travailler comme missionnaire, suivre des études, exécuter un emploi temporaire [et] accompagner son conjoint, qui a accepté un emploi temporaire à l'étranger) "41. D'après les renseignements que la demanderesse a fournis au juge de la citoyenneté, l'affidavit de son mari et la lettre de Greenpeace, la situation de la demanderesse correspond exactement à ce critère.

[37]      En guise de conclusion, il convient de rappeler les principales déclarations que fait le juge de la citoyenneté dans sa décision, supra, paragraphe 6. Il reconnaît que la personne qui a centralisé son mode d'existence personne au Canada peut s'absenter temporairement sans contrevenir à l'alinéa 5(1)c). Cette affirmation semble correspondre au principe énoncé dans l'affaire Papadogiogakis. Pourtant, il ne tire aucune conclusion sur la question de savoir si la demanderesse s'est établie au Canada entre 1993 et 1996. Il déclare ensuite : " Un examen des faits vous concernant et de la jurisprudence pertinente m'a amené à conclure que vous n'avez pas conservé des attaches suffisantes avec le Canada durant vos absences pour que ces absences prolongées soient considérées comme des périodes de résidence en vertu de la Loi. " Malgré les renseignements qu'il avait en sa possession sur la nature temporaire de l'affectation du mari de la demanderesse, le juge de la citoyenneté n'a pas, pour se prononcer ainsi, appliqué les critères énoncés dans l'affaire Koo, Re lorsqu'il a apprécié les faits. Ces deux erreurs justifient l'intervention de la Cour.


[38]      Par conséquent, le présent appel est accueilli.

                                 " Allan Lutfy "

                                         J.C.F.C.

Ottawa (Ontario)

Le 26 mars 1999

Traduction certifiée conforme

Marie Descombes, LL.L.

     SCHEDULE

5. (1) The Minister shall grant citizenship to any person who

(a) makes application for citizenship;

(b) is eighteen years of age or over;

(c) has been lawfully admitted to Canada for permanent residence, has not ceased since such admission to be a permanent resident pursuant to section 24 of the Immigration Act, and has, within the four years immediately preceding the date of his application, accumulated at least three years of residence in Canada calculated in the following manner:

(i) for every day during which the person was resident in Canada before his lawful admission to Canada for permanent residence the person shall be deemed to have accumulated one-half of a day of residence, and

(ii) for every day during which the person was resident in Canada after his lawful admission to Canada for permanent residence the person shall be deemed to have accumulated one day of residence;

(d) has an adequate knowledge of one of the official languages of Canada;

(e) has an adequate knowledge of Canada and of the responsibilities and privileges of citizenship; and

(f) is not under a deportation order and is not the subject of a declaration by the Governor in Council made pursuant to section 20.

...

12. (2) Where an application under section 5 or 8 or subsection 11(1) is approved, the Minister shall issue a certificate of citizenship to the applicant.

...

5. (1) Le ministre attribue la citoyenneté à toute personne qui, à la fois :

a) en fait la demande;

b) est âgée d'au moins dix-huit ans;

c) a été légalement admise au Canada à titre de résident permanent, n'a pas depuis perdu ce titre en application de l'article 24 de la Loi sur l'immigration, et a, dans les quatre ans qui ont précédé la date de sa demande, résidé au Canada pendant au moins trois ans en tout, la durée de sa résidence étant calculée de la manière suivante :

(i) un demi-jour pour chaque jour de résidence au Canada avant son admission à titre de résident permanent,

(ii) un jour pour chaque jour de résidence au Canada après son admission à titre de résident permanent;

d) a une connaissance suffisante de l'une des langues officielles du Canada;

e) a une connaissance suffisante du Canada et des responsabilités et avantages conférés par la citoyenneté;

f) n'est pas sous le coup d'une mesure d'expulsion et n'est pas visée par une déclaration du gouverneur en conseil faite en application de l'article 20.

[...]

12. (2) Le ministre délivre un certificat de citoyenneté aux personnes dont la demande présentée au titre des articles 5 ou 8 ou du

paragraphe 11(1) a été approuvée.

[...]

     Page 2

14. (1) An application for

(a) a grant of citizenship under subsection 5(1),

(b) a retention of citizenship under section 8,

(c) a renunciation of citizenship under subsection 9(1), or

(d) a resumption of citizenship under subsection 11(1)

shall be considered by a citizenship judge who shall, within sixty days of the day the application was referred to the judge, determine whether or not the person who made the application meets the requirements of this Act and the regulations with

respect to the application.

...

14. (5) The Minister or the applicant may appeal to the Court from the decision of the citizenship judge under subsection (2) by filing a notice of appeal in the Registry of the Court within sixty days after the day on which

(a) the citizenship judge approved the application under subsection (2); or

(b) notice was mailed or otherwise given under subsection (3) with respect to the application.

14. (6) A decision of the Court pursuant to an appeal made under subsection (5) is, subject to section 20, final and, notwithstanding any other Act of Parliament, no appeal lies therefrom.

...

26. (1) The Governor in Council may appoint any citizen to be a citizenship judge.

14. (1) Dans les soixante jours de sa saisine, le juge de la citoyenneté statue sur la conformité " avec les dispositions applicables en l'espèce de la présente loi et de ses règlements " des demandes déposées en vue de :

a) l'attribution de la citoyenneté, au titre du paragraphe 5(1);

b) la conservation de la citoyenneté, au titre de l'article 8;

c) la répudiation de la citoyenneté, au titre du paragraphe 9(1);

d) la réintégration dans la citoyenneté, au titre du paragraphe 11(1).

[...]

14. (5) Le ministre et le demandeur peuvent interjeter appel de la décision du juge de la citoyenneté en déposant un avis d'appel au greffe de la Cour dans les soixante jours suivant la date, selon le cas :

a) de l'approbation de la demande;

b) de la communication, par courrier ou tout autre moyen, de la décision de rejet.

14. (6) La décision de la Cour rendue sur l'appel prévu au paragraphe (5) est, sous réserve de l'article 20, définitive et, par dérogation à toute autre loi fédérale, non susceptible d'appel.

[...]

26. (1) Le gouverneur en conseil peut nommer tout citoyen juge de la citoyenneté.

     COUR FÉDÉRALE DU CANADA

     SECTION DE PREMIÈRE INSTANCE

     NOMS DES AVOCATS ET AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

NUMÉRO DU GREFFE :                  T-1310-98

INTITULÉ :                          Kit May Phoebe Lam c. Le ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration
LIEU DE L'AUDIENCE :                  Vancouver (C.-B.)

DATE DE L'AUDIENCE :              Le 24 février 1999

MOTIFS DE L'ORDONNANCE prononcés par le juge Lutfy le 26 mars 1999

COMPARUTIONS :

Robert Seto                          pour la demanderesse

Larissa Easson                      pour le défendeur

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Jang Cheung Lee

Vancouver (C.-B.)                      pour la demanderesse

Morris Rosenberg

Sous-procureur général du Canada              pour le défendeur

__________________

1      Les dispositions pertinentes sont annexées aux présents motifs.

2      Voir aussi l'article 21 de la Loi sur la Cour fédérale, L.R.C. (1985), ch. F-7, qui confère à la Section de première instance une compétence exclusive à l'égard des appels en matière de citoyenneté.

3      Le paragraphe 40(1) de la Loi sur la Cour suprême, L.R.C. (1985) ch. S-26, permet d'interjeter appel de " tout jugement, définitif ou autre, rendu par la Cour d'appel fédérale ou par le plus haut tribunal de dernier ressort habilité, dans une province, [...] ou par l'un des juges de ces juridictions inférieures [...] ". Cette disposition ne semble pas envisager l'éventualité d'un appel lorsque la décision de la Section de première instance de la Cour fédérale constitue une décision rendue par le plus haut tribunal de dernier ressort.

4      Règle 912 des Règles de la Cour fédérale, C.R.C. 1978, ch. 663.

5      L.R.C. (1985), ch. F-7. Voir Shun c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration) (1996), 206 N.R. 7 (C.A.F.); et Ma, Re c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), [1999] A.C.F. no 288 (QL) (1re inst.). Suivant l'article 18.5 de la Loi sur la Cour fédérale, l'appel, prévu par la loi, d'une décision d'un office fédéral ne peut faire l'objet d'un contrôle, sauf en conformité avec la loi prévoyant l'appel.

6      (1988), 21 F.T.R. 180, à la page 184.

7      [1978] 2 C.F. 208 (1re inst.).

8      Ibid., aux pages 213 et 214.

9      (1994), 25 Imm. L.R. (2d) 235 (C.F. 1re inst.), à la page 238.

10      [1997] A.C.F. no 1747 (1re inst.).

11      Ibid., au paragraphe 7.

12      (1998) 144 F.T.R. 141.

13      Ibid., aux paragraphes 20 à 22.

14      [1993] 1 C.F. 286 (1re inst.), aux pages 293 et 294.

15      Première session de la trente-sixième législature. Première lecture le 17 décembre 1998 et deuxième lecture le 1er mars 1999.

16      Article 2 du projet de loi C-63.

17      Pezim c. Colombie-Britannique (Superintendent of Brokers), [1994] 2 R.C.S. 557; Régie des transports en commun de la région de Toronto c. Dell Holdings Ltd., [1997] 1 R.C.S. 32, au paragraphe 47; Canada (Directeur des enquêtes et recherches) c. Southam Inc., [1997] 1 R.C.S. 748; et Pushpanathan c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), [1998] 1 R.C.S. 982.

18      Dans l'affaire Sivasamboo c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), [1995] A.C.F. 741 (QL) (1re inst.) 755, le juge Richard (alors juge puîné) a déclaré que le paragraphe 67(1) de la Loi sur l'immigration, L.R.C. (1985), ch. I-2, qui porte sur la section du statut de réfugié, n'est pas " [...] une clause privative en soi ".

19      Paragraphe 82.1(1) de la Loi sur l'immigration, ibid. On peut, de droit, présenter une demande de contrôle judiciaire de la décision d'un agent des visas puisqu'aucune autorisation n'est requise : paragraphe 82.1(2).

20      Supra, paragraphe 8 et note 3.

21      Article 83 de la Loi sur l'immigration, supra, note 18.

22      Paragraphe 26(1) de la Loi sur la citoyenneté.

23      Loi d'interprétation, L.R.C. (1985), ch. I-21, paragraphe 23(1).

24      Le paragraphe 61(2) de la Loi sur l'immigration, supra, note 18, dispose qu'au moins dix pour cent des membres de la section du statut et de la section d'appel sont obligatoirement des avocats ou des notaires membres d'un ordre professionnel depuis au moins cinq ans.

25      Southam Inc., supra, note 17, paragraphe 55.

26      Dans l'arrêt Pushpanathan, supra, note 17, paragraphe 33, le juge Bastarache parle de " l'expertise relative " du tribunal administratif, comparativement au tribunal d'examen, en ce qui concerne la question à l'étude : " L'évaluation de l'expertise relative comporte trois dimensions: la cour doit qualifier l'expertise du tribunal en question; elle doit examiner sa propre expertise par rapport à celle du tribunal; et elle doit identifier la nature de la question précise dont était saisi le tribunal administratif par rapport à cette expertise. "

27      Pushpanathan, supra, note 17, paragraphe 47.

28      Loi sur les marques de commerce, L.R.C. (1985), ch. T-13, paragraphe 56(1).

29      Ibid., au paragraphe 56(5).

30      (1996), 113 F.T.R. 39.

31      Ibid., aux pages 43 et 44.

32      Southam Inc., supra, note 17, paragraphe 35.

33      Ibid., aux paragraphes 56 et 60.

34      Ibid., au paragraphe 50.

35      Southam Inc., supra, note 17, paragraphe 30. Voir aussi Pushpanathan, supra, note 17, paragraphe 27.

36      Ibid., au paragraphe 80.

37      DORS/93-246, modifié par DORS/94-442.

38      Voir les arrêts Kandiah c. Canada (Ministre de l'Emploi et de l'Immigration) (1992), 141 N.R. 232 (C.A.F.) et Syndicat canadien de la fonction publique, section locale 301 c. Montréal (Ville), [1997] 1 R.C.S. 793, dans lesquels on envisage l'utilisation d'affidavits lorsque la cour siégeant en révision ne dispose pas de l'enregistrement des témoignages reçus par le tribunal administratif ou dispose d'un enregistrement incomplet.

39      Supra, note 6.

40      Supra, note 12, paragraphe 7.

41      Supra, note 14, page 294.

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