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Date : 20021104

Dossier : T-1743-02

Référence neutre : 2002 CFPI 1136

ENTRE :

                 CAMPNEY & MURPHY, Sociétéde personnes

                                                             demanderesse

                                    et

                BERNARD & PARTNERS, Sociétéde personnes

MARK W. HILTON

                                                               défendeurs

                    MOTIFS MODIFIÉS DE L'ORDONNANCE

LE PROTONOTAIRE HARGRAVE

CONTEXTE


[1]                 Dans la demande, sur laquelle prend appui la présente action, les associés du bureau d'avocats Campney & Murphy revendiquent le droit d'auteur, contre les défendeurs, sur divers documents constituant des précédents, le bureau Bernard & Partners ainsi que Me Hilton, lequel est aussi associé dans le bureau. Pour circonscrire un litige, on détermine l'existence de faits dans l'avis de demande et dans l'affidavit à l'appui. La demande est dirigée contre Bernard & Partners, bureau formé de six personnes, dont Me Hilton, chacune de ces personnes étant un ancien associé de Campney & Murphy. Cinq des associés de Bernard & Partners ont quitté Campney & Murphy : plutôt que de démissionner, ils ont demandé la dissolution de la société de personnes Campney & Murphy et la répartition des éléments d'actif. Je ferais remarquer ici que la dissolution n'a pas été demandée à la légère, mais plutôt pour des motifs qui, selon Bernard & Partners, sont sérieux, censés et objectifs. On prétend que la société de personnes Bernard & Partners a reçu copie de précédents de Me Hilton, qui les avait copiés avant de quitter Campney & Murphy.

[2]                 Étant donné que la présente instance, englobant la présente requête, est protégée par une ordonnance provisoire de confidentialité, je ne me pencherai que sur les faits nécessaires : je soulignerais ici que les ordonnances de confidentialité excluent les motifs qui ne révèlent pas de renseignements confidentiels, puisque ce sont des documents publics : voir Sierra Club du Canada c. Canada (Ministre des Finances), [2000] 2 C.F. 423, à la page 425.


[3]                 La requête de Bernard & Partners à l'origine des présents motifs a sollicité l'arrêt de la présente instance en faveur de la procédure d'arbitrage existante. Campney & Murphy a entamé très tôt une procédure d'arbitrage contre les associés de Bernard & Partners, hormis Me Hilton, et, le 11 mars 2002, la Cour suprême de la Colombie-Britannique lui a accordé une injonction ex parte, laquelle a été modifiée par accord des parties le 23 mai 2002 : elle prévoyait que ces dernières s'abstiendraient d'intenter des poursuites [TRADUCTION] « à l'égard des questions faisant l'objet de l'arbitrage » : je signale ici que, pour trancher la présente requête, je n'ai pas à déterminer si cette injonction a été violée par la présente instance tenue devant la Cour fédérale. Je signalerais également que Me Hilton, qui, si je comprends bien, était associé dans le bureau Campney & Murphy au début de la procédure d'arbitrage, a maintenant déposé en qualité d'associé de Bernard & Partners une défense dans cet arbitrage.

ANALYSE

Prétentions des avocats des défendeurs

        Les avocats de Bernard & Partners et de Me Hilton, intervenant en faveur de l'arrêt des procédures, ont mentionné la clause d'arbitrage qui est prévue dans le contrat de société de Campney & Murphy (le contrat), et dont la teneur est très générale. Cette clause prévoit l'arbitrage devant un seul arbitre, celui-ci pouvant être soit un avocat ou un juge à la retraite, soit un conseil composé de trois arbitres, si les parties ne peuvent s'entendre sur le choix d'un arbitre; elle stipule aussi en partie, ce qui suit :

[TRADUCTION] Tous les différends découlant du présent contrat ou s'y rapportant, ou relatifs à tout rapport juridique défini lié au présent contrat ou en découlant, y compris les différends relatifs à l'existence, à l'interprétation, à la validité, au sens, à l'exécution, à l'inexécution, à l'application, à la violation, au maintien ou à la résiliation du présent contrat, doivent être renvoyés à l'arbitrage et être définitivement tranchés sous le régime de la loi intitulée Commercial Arbitration Act of British Columbia par la désignation d'un seul arbitre (qui sera un avocat ou un juge à la retraite) si les parties au différend peuvent s'entendre sur le choix de l'arbitre, sinon par trois arbitres, le premier choisi par l'associé demandant l'arbitrage, le deuxième étant choisi à la majorité par les autres associés et le troisième (qui devra être un avocat ou un juge à la retraite) étant choisi par les deux autres arbitres ainsi nommés. La décision ou la détermination de l'arbitre ou des arbitres, selon le cas, sera définitive et s'imposera aux parties à l'arbitrage. S'agissant d'un conseil composé de trois arbitres, la décision ou la détermination de la majorité d'entre eux l'emporte.

  

On reste frappé par la portée de cette clause, qui s'étend à « [tous] les différends découlant du présent contrat ou s'y rapportant » .

[5]                 Les avocats de Bernard & Partners et de Me Hilton avancent, en outre, en faveur de l'arrêt des procédures, les arguments habituels tout en formulant certains arguments propres à la présente instance. Ces arguments comprennent l'article 15 du Commercial Arbitration Act of British Columbia (la Loi sur l'arbitrage), qui rend obligatoire l'arrêt des procédures, sauf si un tribunal détermine que la convention d'arbitrage est nulle et sans effet, inopérante ou inexécutable; ils portent que c'est la demanderesse, Campney & Murphy, qui a entamé la procédure d'arbitrage; que Campney & Murphy a introduit une action devant la Cour suprême de la Colombie-Britannique afin d'obtenir une injonction ex parte pour empêcher le litige et, ainsi, éviter l'arbitrage; que toutes les parties se sont entendues pour élargir l'injonction; que l'ancien avocat de Campney & Murphy a fait remarquer que la question de la reproduction des documents et du retour de ces documents découlait de son départ de Bernard & Partners et que le bureau Campney & Murphy était d'avis que l'arbitre avait compétence et, en fait, qu'il s'adresserait à l'arbitre pour que celui-ci établisse que l'ordonnance de consentement, interdisant les poursuites judiciaires, a été élargie de manière à s'appliquer à toutes les instances, et non seulement aux instances devant la Cour suprême de la Colombie-Britannique; que les précédents litigieux constituent un élément d'actif de la société de personnes, point concédé par Campney & Murphy, à la fois par ses avocats et par lettre et, selon Bernard & Partners, devant par conséquent être tranché par arbitrage; que, en réaction à la position de Campney & Murphy selon laquelle la question des documents copiés devrait faire l'objet de l'arbitrage, Bernard & Partners a donné son accord par écrit; et que Campney & Murphy a revendiqué un droit d'auteur sur les documents dans son deuxième avis de renvoi à l'arbitrage du 3 octobre 2002, adressé à Me Hilton, et a réclamé à titre de réparation la remise des documents.


Certaines règles de droit applicables

[6]                 Les avocats de Bernard & Partners et de Me Hilton ont invoqué les sources jurisprudentielles énoncées dans le mémoire déposé pour le compte de Campney & Murphy dans la demande d'injonction ex parte dont la Cour suprême de la Colombie-Britannique a été saisie contre les cinq premiers associés de Bernard & Partners. Les avocats de Campney & Murphy ne contestent pas cette jurisprudence.

[7]                 La Cour d'appel de la Colombie-Britannique a exposé les conditions préalables à une demande d'arrêt des procédures présentée sous le régime de l'article 15 de la Loi sur l'arbitrage :

[TRADUCTION]22. Trois conditions justifient l'application de l'article 15 :

                 a)          le demandeur doit démontrer qu'une partie à une convention d'arbitrage a introduit une poursuite judiciaire contre une autre partie à la convention d'arbitrage;

b)           la poursuite judiciaire doit porter sur une question dont les parties étaient convenues de soumettre à l'arbitrage;

                 c)              la demande doit être déposée opportunément, c'est-à-dire avant que le demandeur n'entreprenne une étape dans la poursuite judiciaire.

(Prince George (City) c. McElhanney Engineering Services Ltd. (1995), 9 B.C.L.R. (3d) 368, à la page 375)

J'ai gardé à l'esprit ces trois conditions. Dans l'arrêt Prince George, la Cour d'appel a tiré la conclusion suivante :

[TRADUCTION] Si la question se pose de savoir si les conditions préalables ont été remplies, l'arrêt des procédures devrait alors être prononcé et la question peut être réglée à l'arbitrage.

(Page 86)


La notion selon laquelle la partie qui demande l'arrêt des procédures n'a qu'à démontrer que sa cause est défendable s'inspire d'un passage que la Cour d'appel, dans l'arrêt Prince George, a adopté, l'ayant tiré de l'arrêt Gulf Canada Resources Ltd. c. Arochem International Ltd. (1992), 66 B.C.L.R. (2d) 113, décision antérieure de la Cour d'appel de la Colombie-Britannique, aux pages 120 et 121 :

[TRADUCTION] Dans une demande visant l'arrêt des procédures, le tribunal ne peut se prononcer définitivement sur ces questions que s'il est clair que le différend n'est pas régi par la convention d'arbitrage, qu'une partie n'est pas une partie à la convention d'arbitrage ou que la demande est inopportune.

Dans l'arrêt Gulf Canada, la Cour d'appel se reportait à une détermination définitive

concernant la question de savoir si un différend était régi par une clause de la convention d'arbitrage.

        On a attiré mon attention sur l'arrêt Turnbridge (c.o.b. Turnbridge & Turnbridge) c. Cansel Survey Equipment (Canada) Ltd., décision inédite rendue par le juge Sinclair Prowse, de la Cour suprême de la Colombie-Britannique, dans [2000] A. C.-B. no 333, en date du 17 février 2000. Dans cette décision, la Cour a énoncé comme suit le critère permettant de décider si l'arrêt des procédures devrait être prononcé : « ... l'une quelconque des prétentions est-elle clairement étrangère à la convention d'arbitrage ... » ; elle renvoyait alors aux arrêts Prince George (précité ) et Kaverit Steel and Crane Ltd. c. Kone Corp. (1992), 87 D.L.R. (4th) 129 (C.A. Alb.).


[3]                 Enfin, je devrais revenir à la notion qui veut que la clause d'arbitrage en l'espèce ayant trait aux différends « découlant du » contrat mérite une interprétation généreuse. Ici je mentionnerai d'abord l'arrêt The Oceanic Mindoro (1997), 26 B.C.L.R. (3d) 143, décision de la Cour d'appel de la Colombie-Britannique, à la page 150. Dans l'arrêt The Oceanic Mindoro, la Cour d'appel a mentionné puis adopté l'interprétation généreuse des mots [TRADUCTION] « découlant du » suivie dans l'arrêt Ethiopian Oilseeds c. Rio del Mar Foods Inc., [1990] 1 Lloyd's Law 86 (B.R.). Dans cet arrêt, le juge Hirst s'est fondé sur l'ouvrage Mustil and Boyd on Commercial Arbitration, 2e édition, à la page 120 :

[TRADUCTION] « découlant du »

Ces mots ont été interprétés au sens large. On a dit qu'ils englobent tous les différends, sauf un différend mettant en cause l'existence même d'un contrat. Si les contractants prévoient la détermination de leurs droits en cas de survenance de certains événements dans l'exécution du contrat et qu'un différend survient entre eux quant à leurs droits à la suite de la survenance de ces événements, alors le différend portant sur leurs droits découle du contrat.

[4]                 Dans l'arrêt The Oceanic Mindoro (précité), la Cour d'appel a adopté un passage tiré de l'arrêt S.A. Mineracao da Trindade-Samitri c. Utah International Inc. (1984), 745 F. 2d 190, à la page 194 :

[TRADUCTION] Les doutes quant à l'arbitrabilité devraient être « tranchés en faveur de l'application, » . . . les clauses excluant certains différends de l'arbitrage doivent être « claires et sans ambiguïté » ou « indubitablement claires » et . . . l'arbitrage devrait être ordonné « sauf si on peut affirmer en toute assurance que la clause d'arbitrage ne peut se prêter à une interprétation qui s'applique au différend dont il s'agit. »

  

Examen

[5]                 Tout les faits énoncés par Bernard & Partners et par Me Hilton en faveur de l'arbitrage ainsi qu'une portée très large accordée aux mots « découlant du » présentent un obstacle considérable à la poursuite de la présente instance par Campney & Murphy. Toutefois, on peut argumenter contre l'arrêt des procédures.

[6]                 Dans l'arrêt Prince George (précité), la Cour d'appel a déclaré qu'un tribunal ne devrait rendre une décision définitive dans une demande d'arrêt des procédures que s'il est manifeste qu'une partie est étrangère à une convention d'arbitrage. L'idée qui veut que les associés de Bernard & Partners ne soient pas parties à la convention d'arbitrage est absente du présent avis de demande tout autant que de l'affidavit à l'appui; toutefois, les avocats de Campney & Murphy, invoquant les documents produits, pour les besoins de la présente requête, par Bernard & Partners, affirment que le droit d'auteur n'a pas été violé par l'associé personnellement, mais plutôt par le cabinet doté de la personnalité morale de chaque associé. En effet, chacun des associés dans ce bureau de Bernard & Partners est associé par l'intermédiaire d'un cabinet doté de la personnalité morale.

[7]                 L'argument de Campney & Murphy, qui se fonde sur le fait que les associés de Bernard & Partners sont simplement des personnes morales, personnes se trouvant hors de la portée de l'arbitre, est une tactique de dernière minute. En effet, le fondement et l'idée voulant que la personnalité morale de Bernard & Partners ne soit qu'un paravent, constituait un argument qui ne s'est présenté que quelque trois semaines après le début de la présente instance. Jusqu'alors, l'action constituait probablement un abus de la procédure et elle le demeure, car les actes de procédure et l'affidavit à l'appui ne visent que les individus constituant le bureau Bernard & Partners, et non leurs personnes morales.


[8]                 Les avocats de Campney & Murphy font valoir que le préjudice a été causé non pas par les associés individuels de Bernard & Partners eux-mêmes, en leur qualité d'associés et, dans un cas, en qualité d'ancien associé de Campney & Murphy, mais plutôt par leurs cabinets dotés de la personnalité morale. Il s'agit là d'une position de dernière minute adoptée par les avocats de Campney & Murphy dans des observations écrites reformulées le 28 octobre 2002, soit à la date d'audience de cette requête en arrêt des procédures qui avait été ajournée. Il reste que c'est là un point défendable; en fait, c'est le seul argument défendable des associés de Campney & Murphy.

[9]                 Suivant l'argument fondé sur la personnalité morale, l'arbitre n'a aucune compétence à l'égard de Bernard & Partners et de Me Hilton, lesquels seraient en mesure de se cacher derrière leurs corporations professionnelles individuelles. Cet argument ne tient peut-être pas compte de l'aspect pratique, selon lequel il faudrait des avocats très braves pour dire à un arbitre de la stature de l'ancien juge en chef McEachern, qu'il peut ignorer complètement une convention d'arbitrage, ou la sentence d'un arbitre, tout simplement parce qu'ils s'étaient constitués en personne morale à des fins fiscales. Quoi qu'il en soit, la question devient alors la suivante : Comment faudrait-on considérer une société de personnes formée de corporations professionnelles?


[10]            Il est malheureux que cet argument fondé sur la personnalité morale ait été soulevé si tard, car, semble-t-il, les avocats de Campney & Murphy n'ont pas eu l'occasion d'effectuer la recherche juridique nécessaire. Évidemment, les avocats de Bernard & Partners et de Me Hilton, recevant cet argument à la dernière minute, n'ont pas eu l'occasion d'en traiter autrement que de façon générale. L'avocat de Me Hilton a souligné le fait que - argument auquel a souscrit l'avocat de Bernard & Partners - d'après les actes de procédure et l'affidavit à l'appui, ce serait les avocats individuels, et non les sociétés, qui seraient liés par la décision que rendrait la Cour fédérale, car toute cette instance ne vise que les individus. Il a ajouté que rien n'indiquait que les associés de Bernard & Partners ou Me Hilton auraient besoin de se cacher derrière leur personnalité morale et que toute la notion de personnalité morale, comme facteur dans la présente instance, n'était qu'une diversion, particulièrement parce que les associés qui avaient quitté Campney & Murphy et demandé la dissolution du cabinet demeuraient probablement, techniquement parlant, des associés de Campney & Murphy et que c'était le bureau Campney & Murphy qui était propriétaire des documents en question.

[11]            L'avocat de Me Hilton a également évoqué la notion de société de personnes, soit le rapport liant plusieurs personnes qui exercent une activité commerciale en vue d'en tirer un profit. Ce qui nous amène à un raisonnement qui, à mon sens, résout la question relative à la personnalité morale. L'ouvrage Welling on Corporate Law in Canada, Butterworths, 1991, aux pages 127 et suivantes, mentionne que, bien qu'une société puisse être considérée comme un mandant employant des mandataires humains, elle peut également être une mandataire, aucun obstacle n'empêchant une société d'agir en qualité de mandataire d'un particulier afin d'assurer la prestation de services.


Cela ne veut pas dire que, simplement parce que chaque associé de Bernard & Partners contrôle sa propre personnalité morale, ce cabinet constitue une sorte de paravent. Des documents démontrent plutôt que le rapport liant les associés de même que leur contrôle du cabinet sont conformes à la notion de la personne morale faisant office de mandataire, agissant [TRADUCTION] « au nom et pour le compte de ceux qui l'ont créée » : voir Patton c. Yukon Consolidated Gold Corp. Ltd. (1934), 3 D.L.R. 400, à la page 403 (C.A. Ont.), mentionnant les propos tenus par lord Buckmaster dans l'arrêt Rainham Chemical Works Ltd. c. Belvedere Fish Guano Co. Ltd., [1921] 2 A.C. 465, à la page 475 (Chambre des lords) :

[TRADUCTION] Ainsi, on ne saurait écarter une société dotée régulièrement de la personnalité morale, pour le motif qu'elle constitue un paravent, même si la preuve peut démontrer que dans ses activités elle n'agit pas pour son propre compte en qualité d'entité commerciale indépendante, mais tout simplement au nom et pour le compte de ceux qui l'ont créée.

La situation en l'espèce est manifestement celle d'une société agissant au nom et pour le compte de ceux qui l'ont créée, car les cabinets d'avocats ne peuvent fonctionner efficacement à titre de sociétés de personnes, si la personne morale, par opposition aux avocats individuels eux-mêmes, exerçait le contrôle. Par conséquent, l'argument selon lequel l'arbitre n'aurait aucune compétence à l'égard des prétendus auteurs de la violation du droit d'auteur est dénué de fondement.

CONCLUSION


[12]            En employant les mots « découlant du » , la clause d'arbitrage que prévoit le contrat de société de Campney & Murphy a une portée très large. Je n'ai pas besoin de décider, de façon absolue, si le différend actuel ayant trait à la reproduction de précédents est couvert par la clause d'arbitrage. Au contraire, je n'ai besoin que de décider si on peut soutenir que le différend est visé par la clause d'arbitrage. Cela dit, je dois dissiper tout doute quant à l'arbitrabilité en faveur de l'application de la clause d'arbitrage. Dès lors, je ne pourrais rejeter la demande relative à l'arrêt des procédures en faveur de l'arbitrage uniquement si je peux conclure en toute assurance que la clause d'arbitrage ne s'étend pas au différend, et ici j'inclus un examen de la question de savoir si les entités qui ont effectivement participé à la violation sont assujetties à la clause d'arbitrage.

[13]            Deux raisons, chacune étant à tout le moins défendable, permettent de démontrer que les individus qui auraient violé le droit d'auteur sont assujettis au processus d'arbitrage. D'abord, la présente instance devant la Cour fédérale, en l'état, est dirigée contre une société de personnes composée d'avocats individuels dont on dit qu'ils sont accusés d'avoir pris et utilisé des documents protégés appartenant au bureau Campney & Murphy. Cette question, comme en étaient convenues les parties à l'origine, est manifestement arbitrable. La société de personnes formée par des avocats individuels - en réalité ces avocats eux-mêmes - est assujettie à la clause d'arbitrage.

[14]            Ensuite, si ma première conclusion est erronée et que les auteurs du préjudice sont des entités qui ont été constituées à des fins de planification fiscale, ces personnes morales de chaque avocat du bureau Bernard & Partners, dont Me Hilton, agissaient, du moins peut-on soutenir, et, de fait, selon toute probabilité, en qualité de mandataires des avocats individuels. Cela étant le cas, il est indubitable que Bernard & Partners et Me Hilton sont effectivement les parties intéressées à la convention d'arbitrage, de sorte que la question de l'obtention et de l'utilisation des documents constituant des précédents, lesquels ont été tirés des dossiers de Campney & Murphy, peut être soumise à l'arbitrage.

[15]            Il y a arrêt de la présente instance, sauf s'agissant des dépens et de toute taxation, puisque la question, par consentement et en raison de l'existence de la procédure d'arbitrage, doit être soumise à l'arbitrage. En outre - et c'est là une démarche distincte - l'intérêt de la justice commande l'arrêt de la présente instance de façon à donner effet à la clause d'arbitrage à laquelle tous les intéressés ont souscrit.

  

                                                                                                                                 « John A. Hargrave »     

                                                                                                                                                  Protonotaire           

Vancouver (Colombie-Britannique)

Le 4 novembre 2002

  

Traduction certifiée conforme

Martine Guay, LL. L.


COUR FÉDÉRALE DU CANADA

SECTION DE PREMIÈRE INSTANCE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

DOSSIER :                                            T-1743-02

INTITULÉ :                                        Campney & Murphy, Société de personnes c. Bernard & Partners, Société de personnes, et Mark W. Hilton

LIEU DE L'AUDIENCE :                 Vancouver (Colombie-Britannique)

DATE DE L'AUDIENCE :              Le 28 octobre 2002

MOTIFS DE L'ORDONNANCE MODIFIÉE DE LA COUR : Le protonotaire Hargrave

DATE DES MOTIFS :                      Le 4 novembre 2002

  

COMPARUTIONS :                                   

Bruce Green                                                    POUR LA DEMANDERESSE

Craig Ash

Peter Bernard                                                  POUR LA DÉFENDERESSE, Bernard & Partners

Murray Tevlin                                                  POUR LE DÉFENDEUR, Mark W. Hilton

  

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Oyen Wiggs Green & Mutala                         POUR LA DEMANDERESSE

Avocats

Vancouver (Colombie-Britannique)

Bernard & Partners                                        POUR LA DÉFENDERESSE, Bernard & Partners

Avocats

Vancouver (Colombie-Britannique)

Tevlin Gleadle                                                  POUR LE DÉFENDEUR, Mark W. Hilton

Avocats

Vancouver (Colombie-Britannique)

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