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Date : 20010601

Dossier : T-2205-98

OTTAWA (Ontario), le 1er juin 2001

EN PRÉSENCE DE MONSIEUR LE JUGE ROULEAU

ENTRE :

DIANE CARRIÈRE, MÉLANIE CARRIÈRE, représentée par Diane Carrière,

sa tutrice aux fins du procès, et MARC-ANDRÉ CARRIÈRE, représenté par

                  Diane Carrière, sa tutrice aux fins du procès

                                                                                               demandeurs

ET :

LA GENDARMERIE ROYALE DU CANADA, un mandataire de

                    Sa Majesté la Reine du chef du Canada, et

     LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA, représentant

                      Sa Majesté la Reine du chef du Canada

                                                                                                 défendeurs

                                           ORDONNANCE

[1] À la requête de l'avocat des défendeurs, je modifie par les présentes l'intitulé pour qu'il devienne :

   DIANE CARRIÈRE, MÉLANIE CARRIÈRE, représentée par Diane Carrière,

    sa tutrice aux fins du procès, et MARC-ANDRÉ CARRIÈRE, représenté par

                                  Diane Carrière, sa tutrice aux fins du procès

                                                                                                                                  demandeurs


ET :

                                                    SA MAJESTÉ LA REINE

                                                                                                                                 défenderesse

« P. Rouleau »

Juge

Traduction certifiée conforme

Suzanne M. Gauthier, LL.L., Trad.a.


Date : 20010601

Dossier : T-2205-98

OTTAWA (Ontario), le 1er juin 2001

EN PRÉSENCE DE Monsieur le juge Rouleau

ENTRE :

DIANE CARRIÈRE, MÉLANIE CARRIÈRE, représentée par Diane Carrière,

sa tutrice aux fins du procès, et MARC-ANDRÉ CARRIÈRE, représenté par

                  Diane Carrière, sa tutrice aux fins du procès

                                                                                               demandeurs

ET :

                                  SA MAJESTÉ LA REINE

                                                                                           défenderesse

                                           ORDONNANCE

[1]         La requête de la défenderesse est accordée et la déclaration des demandeurs est radiée conformément à la règle 221(1)a) des Règles de la Cour fédérale.

« P. Rouleau »

Juge

Traduction certifiée conforme

Suzanne M. Gauthier, LL.L., Trad.a.


Date : 20010601

Dossier : T-2205-98

Référence neutre : 2001 CFPI 569

ENTRE :

                                                         

DIANE CARRIÈRE, MÉLANIE CARRIÈRE, représentée par Diane Carrière,

sa tutrice aux fins du procès, et MARC-ANDRÉ CARRIÈRE, représenté par

Diane Carrière, sa tutrice aux fins du procès

demandeurs

ET :

                                  SA MAJESTÉ LA REINE

                                                                                           défenderesse

                          MOTIFS DE L'ORDONNANCE

LE JUGE ROULEAU

[1]                 La défenderesse demande que soit rendue, conformément à la règle 221(1)a) des Règles de la Cour fédérale, une ordonnance radiant la déclaration des demandeurs au motif qu'elle ne révèle aucune cause d'action valable.


[2]                 Les demandeurs sont la veuve et les enfants de l'officier Frank Carrière, qui s'est noyé le 30 novembre 1997 dans l'exercice de ses fonctions de plongeur de la GRC. À la suite de son décès, Mme Carrière a reçu des pensions en application de la Loi sur la pension de retraite de la GRC et en application de la Loi sur les pensions. Le 25 novembre 1998, les demandeurs ont déposé leur déclaration auprès de la Cour, dans laquelle ils alléguaient que la défenderesse avait commis une faute et que cette faute avait entraîné le décès de l'officier Carrière. Les demandeurs réclament une indemnité dépassant 50 000 $, sans compter les intérêts et les dépens. Plus précisément, ils réclament des dommages-intérêts généraux, des dommages-intérêts spéciaux, des intérêts avant jugement, des dommages-intérêts exemplaires, des dommages-intérêts majorés pour blessures et souffrances, et finalement des dépens.

[3]                 Le 3 août 1999, la défenderesse a présenté à la Cour une requête en radiation de la déclaration au motif qu'elle constituait un abus de procédure ou dépassait la compétence de la Cour. Par décision en date du 19 août 1999, Monsieur le juge Pelletier a rejeté la requête sans préjudice du droit de la défenderesse de présenter une requête en radiation de la déclaration selon la règle 221(1)a). Les demandeurs ont fait appel de cette décision et, le 27 mars 2000, Monsieur le juge Sexton a ordonné que l'appel soit suspendu jusqu'à ce qu'il soit disposé de la requête en radiation.


[4]                 L'essentiel de l'argument de la Couronne au soutien de sa requête en radiation est que l'action des demandeurs dépasse la compétence de la Cour parce qu'elle est irrecevable en vertu du paragraphe 32(2) de la Loi sur la pension de retraite de la GRC, L.R.C. (1985), ch. R-11, de l'article 111 de la Loi sur les pensions, L.R.C. (1985), ch. P-7 et de l'article 9 de la Loi sur la responsabilité civile de l'État et le contentieux administratif, L.R.C. (1985), ch. C-50. Ces dispositions sont reproduites ci-après :

Loi sur la pension de retraite de la Gendarmerie royale du Canada


32.2 Toutes les réclamations de pension selon la présente partie doivent être étudiées et jugées de la même manière que les réclamations sous le régime de la Loi sur les pensions, et toutes les dispositions de cette loi non incompatibles avec la présente partie s'appliquent, avec les adaptations nécessaires, à l'égard de toute réclamation prévue par la présente partie.

32(2) All claims for pension under this Part shall be dealt with and adjudicated on in like manner as claims under the Pension Act, and all provisions of that Act not inconsistent with this Part apply with such modifications as the circumstances require in respect of any claim under this Part.


Loi sur les pensions


111. Nulle action ou autre procédure n'est recevable contre Sa Majesté ni contre un fonctionnaire, préposé ou mandataire de Sa Majesté relativement à une blessure ou une maladie ou à son aggravation ayant entraîné une invalidité ou le décès dans tous cas où une pension est ou peut être accordée en vertu de la présente loi ou de toute autre loi, relativement à cette invalidité ou à ce décès.

111. No action or other proceeding lies against Her Majesty or against any officer, servant or agent of Her Majesty in respect of any injury or disease or aggravation thereof resulting in disability or death in any case where a pension is or may be awarded under this Act or any other Act in respect of the disability or death.


Loi sur la responsabilité civile de l'État et le contentieux administratif


9. Ni l'État ni ses préposés ne sont susceptibles de poursuites pour toute perte - notamment décès, blessures ou dommages - ouvrant droit au paiement d'une pension ou indemnité sur le Trésor ou sur des fonds gérés par un organisme mandataire de l'État.

9. No proceedings lie against the Crown or a servant of the Crown in respect of a claim if a pension or compensation has been paid or is payable out of the Consolidated Revenue Fund or out of any funds administered by an agency of the Crown in respect of the death, injury, damage or loss in respect of which the claim is made.



[5]                 Dans l'arrêt Langille c. Canada (Ministre de l'Agriculture), (1992) 2 C.F. 208, la Cour d'appel fédérale faisait les observations suivantes à propos de l'article 9 [alors le paragraphe 4(1)] de la Loi sur la responsabilité de l'État :

Le paragraphe 4(1) interdit dans sa rédaction anglaise tout recours « in respect of a claim if . . . compensation has been paid . . . out of the Consolidated Revenue Fund . . . in respect of . . . damage or loss in respect of which the claim is made » ( « si ... une indemnité a été payée ... sur le Fonds du revenu consolidé ... relativement à ... (des) dommages ou autres pertes » ). La portée de l'expression anglaise « in respect of » est très large. En effet, dans l'arrêt Nowegijick c. La Reine, [1983] 1 R.C.S. 29, à la page 39, le juge Dickson (alors juge puîné) dit de la même expression anglaise employée dans une autre loi fédérale :

À mon avis, les mots [ « in respect of » ] ont la portée la plus large possible. Ils signifient, entre autres, « concernant » , « relativement à » ou « par rapport à » . Parmi toutes les expressions qui servent à exprimer un lien quelconque entre deux sujets connexes, c'est probablement l'expression « in respect of » qui est la plus large.

[6]                 Dans l'arrêt Sarvanis c. Canada, [2000] A.C.F. no 12, la Cour d'appel a de nouveau examiné l'interprétation de l'article 9 de la Loi sur la responsabilité civile de l'État et le contentieux administratif, et, s'appuyant sur la décision rendue par elle dans l'affaire Langille, elle a conclu ainsi :

Nous ne sommes pas convaincus que le premier point relevé par le juge des requêtes soit jugeable. L'article 9 embrasse à la fois les pensions et les indemnités, peu importe que la pension vise ou non à indemniser intégralement. Il est par conséquent égal que les prestations d'invalidité que touche l'intimé ne soient pas une indemnité.


Nous ne sommes pas convaincus non plus que le second argument représente un point vraiment jugeable. Nous pensons que, malgré la différence entre les faits, l'interprétation que notre Cour a donnée de l'article 9 dans Langille, susmentionné, est également applicable en l'espèce. Ainsi qu'elle l'a noté dans cette dernière cause, l'article 9 a une formulation très générale. À notre avis, la « pension » en l'espèce était payée sur le Trésor « relativement aux » blessures subies par l'intimé le 16 juin 1992. De fait, dans sa propre demande de pension d'invalidité RPC, il indiquait que la cause de la blessure était l'accident dont il était victime ce jour-là.

[7]                 Appliquant ces principes de droit aux faits de l'affaire dont je suis saisi, je suis persuadé que, selon l'article 32 de la Loi sur la pension de retraite de la GRC, l'article 9 de la Loi sur la responsabilité civile de l'État et le contentieux administratif et l'article 111 de la Loi sur les pensions, l'action des demandeurs est irrecevable, dans la mesure où les demandeurs ont reçu des pensions versées sur le Trésor « relativement » au décès prématuré de l'officier Carrière, puisque dans leur action présente ils demandent également réparation pour le même préjudice.

[8]                 Les demandeurs soutiennent qu'ils ne cherchent pas une double réparation, mais plutôt qu'ils demandent des dommages-intérêts qui ne sont pas visés par les prestations découlant de la Loi sur les pensions et des lois apparentées. Cependant, c'est précisément le genre de réclamation que les lois n'autorisent pas. Dans l'arrêt Langille, la Cour d'appel s'exprimait ainsi :

La seule différence est que les intimés cherchent en l'espèce au moyen de leur action délictuelle à obtenir à l'égard de ladite destruction une indemnité en sus de celle qui leur a été versée sur le Fonds du revenu consolidé en 1978. À notre avis, le paragraphe 4(1) [aujourd'hui l'article 9] de la Loi sur la responsabilité de la Couronne les en empêche.

(Non souligné dans l'original)


[9]                 Ce raisonnement vaut également pour la réclamation des demandeurs dans la présente affaire.

[10]            Pour ces motifs, la requête de la défenderesse est accordée et la déclaration des demandeurs est radiée conformément à la règle 221(1)a) des Règles de la Cour fédérale.

« P. Rouleau »

Juge

OTTAWA (Ontario)

le 1er juin 2001

Traduction certifiée conforme

Suzanne M. Gauthier, LL.L., Trad.a.


COUR FÉDÉRALE DU CANADA

SECTION DE PREMIÈRE INSTANCE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

No DU GREFFE :                                                    T-2205-98

INTITULÉ DE LA CAUSE :                                 DIANE CARRIÈRE, MÉLANIE CARRIÈRE, représentée par Diane Carrière, sa tutrice aux fins du procès, et MARC-ANDRÉ CARRIÈRE, représenté par Diane Carrière, sa tutrice aux fins du procès

et

SA MAJESTÉ LA REINE

LIEU DE L'AUDIENCE :                                      Halifax (Nouvelle-Écosse)

DATE DE L'AUDIENCE :                                    le 26 avril 2001

MOTIFS DE L'ORDONNANCE PAR :            MONSIEUR LE JUGE ROULEAU

DATE DES MOTIFS :                                            le 1er juin 2001

ONT COMPARU

D. Brian Newton, c.r.                                                 pour les demandeurs

Ronald Lacey

John J. Ashley                                                             pour la défenderesse

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

Newton & Associates                                                 pour les demandeurs

Dartmouth (Nouvelle-Écosse)

Morris Rosenberg                                                        pour la défenderesse

Sous-procureur général du Canada

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