Décisions de la Cour fédérale

Informations sur la décision

Contenu de la décision

Date : 20030829

Dossier : T-1805-98

Référence : 2003 CF 1008

ENTRE :

                                    LE RÉVÉREND FRÈRE MICHAEL BALDASARO

                                      ET LE RÉVÉREND FRÈRE WALTER TUCKER

                                                                                                                                                   demandeurs

                                                                                   et

                                                            SA MAJESTÉ LA REINE

                                                                                                                                               défenderesse

                                                    MOTIFS DE L'ORDONNANCE

LE JUGE GIBSON

INTRODUCTION


[1]                 Les présents motifs font suite à l'instruction, à Hamilton (Ontario), le 23 juin 2003, d'une requête en jugement sommaire présentée au nom de la défenderesse en vue du rejet avec dépens de la présente action. On a déposé la requête de la défenderesse le 16 décembre 2002. On fait valoir dans la requête que les demandeurs n'ont pas soulevé une véritable question litigieuse en prétendant que leur consommation de marijuana constitue une pratique religieuse que protège l'alinéa 2a) de la Charte canadienne des droits et libertés[1] (la Charte), et que cette consommation contrevient à la Loi réglementant certaines drogues et autres substances[2].

CONTEXTE

[2]                 Dans leur déclaration modifiée, les demandeurs allèguent qu'ils sont des citoyens canadiens ainsi que des ministres de l'Assemblée de l'Église de l'Univers, et qu'ils ont recours à l' « arbre de Vie » , soit le cannabis, le cannabis sativa, la marijuana ou le chanvre (la marijuana), « [traduction] [...] dans leur vie quotidienne, sur les conseils du Seigneur Dieu révélés dans la Sainte Bible, Apocalypse, chapitre 22, verset 2 » . Voici ce verset :

Au milieu de la place, de part et d'autre du fleuve, il y a des arbres de Vie qui fructifient douze fois, une fois chaque mois; et leurs feuilles peuvent guérir les païens.

[3]                 Les demandeurs allèguent en outre ce qui suit :

[traduction]

Il n'y a pas de motif raisonnable et probable non plus que de raison valable de recourir à la Loi réglementant certaines drogues et autres substances qui justifie une infraction et(ou) une peine relativement à l'arbre de Vie de Dieu, le cannabis, le cannabis sativa, la marijuana, le chanvre et(ou) l'un de leurs dérivés.

Au soutien de cette dernière allégation, les demandeurs citent un long passage d'un jugement de la Cour de justice de l'Ontario, Division générale (région du sud-ouest).

[4]                 Les demandeurs allèguent ensuite ce qui suit :

[traduction]

Les demandeurs savent, en tant que personnes handicapées, que la marijuana a des effets bénéfiques sur leur santé, leur bien-être et leur qualité de vie, et que les priver de cette plante médicinale constitue pour eux tous un traitement et une peine cruels et inusités.

Notre liberté d'association et notre sécurité sont enfreints quotidiennement, parce que nous pouvons nous attendre à tout moment à ce que des représentants des forces de l'ordre de l'État défoncent nos portes et pointent des armes sur nous, comme ils l'ont fait dans le passé, en raison de l'exercice de notre culte religieux.

On viole notre liberté d'association. Nous avons peur de nous réunir et de nous rassembler et de subir les attaques des agents de l'État.

Notre liberté et nos vies sont menacées en raison de nos pratiques et croyances religieuses.

Toutes les autres voies nous sont fermées, le gouvernement refusant de reconnaître qu'une erreur a pu être commise à l'égard de cette plante. Nous nous sommes défendus devant les cours pénales provinciales au cours des 30 dernières années à l'encontre de cette loi civile et non pénale en matière de santé. Ces cours ont intérêt à préserver le statu quo, et ont déclaré ne pas être compétentes pour modifier la loi actuelle. Toutes les voies, sauf la présente, semblent donc fermées.

Nos libertés religieuses sont menacées quotidiennement par la loi actuelle qui interdit notre Sacrement de la Marijuana et par la guerre actuellement menée contre nous pour ce motif. Le fait qu'on nous ait traînés devant les cours pénales provinciales, qu'on nous ait déclarés coupables et emprisonnés et qu'on nous ait condamnés à payer des amendes en raison de nos pratiques et de notre utilisation rituelle dudit Sacrement nous porte directement préjudice. Cette loi constitue une question sérieuse à trancher, qui donne lieu à des contestations constitutionnelles à instruire et des mesures de redressement à adjuger dans le cadre d'une instance devant une cour compétente.

Les exceptions à la loi que l'on demande de déclarer se fondent sur la liberté de religion, l'utilisation et l'utilisation à des fins médicales. Notre but n'est pas de porter atteinte à la loi. [Non souligné dans l'original.]

[5]                 Les demandeurs, par suite, sollicitent les mesures de redressement suivantes :


a.             une déclaration de droit obligatoire [...] portant que la Loi réglementant certaines drogues et autres substances est inconstitutionnelle et échappe à la compétence du Parlement, en ce qui a trait à l'arbre de Vie, au cannabis, au cannabis sativa, à la marijuana, au chanvre et(ou) à l'un de leurs dérivés, parce qu'elle viole et enfreint les principes de justice fondamentale, ainsi que les articles 1, 2a)b)c)d), 7, 8, 9, 11d), 12, 15(1), 24(1), 26, 27, 31, 52(1), 91, 91.27 et 92.9 et 13 de la Charte canadienne des droits et libertés, de 1867 à 1998;

b.             une ordonnance [...] annulant les dispositions de la Loi réglementant certaines drogues et autres substances en ce qui a trait à l'usage, la culture et la distribution de l'arbre de Vie, du cannabis, du cannabis sativa, de la marijuana et du chanvre pour toutes fins spirituelles, médicales, de guérison et autres;

c.             une ordonnance de prohibition [...] interdisant au gouvernement du Canada et à ses mandataires d'appliquer la loi susmentionnée à l'encontre des membres et du clergé de l'Assemblée de l'Église de l'univers jusqu'à ce que la présente affaire puisse être instruite et faire l'objet d'une décision finale et définitive, ainsi que les autres mesures de redressement jugées appropriées.

Aucune ordonnance de prohibition n'a été délivrée dans le cadre de l'action à ce stade-ci. Bien qu'on fasse allusion, dans les passages précités, à la violation de diverses dispositions de la Charte, j'estime qu'on y cible particulièrement la liberté fondamentale de « religion » visée à l'alinéa 2a) de la Charte.


[6]                 Le déroulement de la présente action n'a pas été rapide et sans difficulté. Il y a eu de nombreuses requêtes interlocutoires, dont deux présentées par la défenderesse pour faire radier l'action. La première requête en radiation a été couronnée de succès et la déclaration des demandeurs a été radiée avec autorisation de modifier, ce qui a donné lieu à la déclaration modifiée déjà mentionnée et partiellement reproduite. Madame la juge Sharlow, alors de la Section de première instance de la Cour fédérale, a instruit la seconde requête en radiation visant la déclaration modifiée. Cette requête a été rejetée. Les motifs du juge Sharlow[3], datés du 13 décembre 1999, sont directement pertinents aux fins de la présente requête en jugement sommaire. Par souci de commodité, les paragraphes 20 à 29 en sont reproduits intégralement dans l'annexe jointe aux présents motifs.

[7]                 Les paragraphes 27 et 28 des motifs du juge Sharlow, de nouveau reproduits ci-après, sont particulièrement pertinents :

Par ailleurs, il y a au moins deux causes dans lesquelles les tribunaux ont été persuadés d'autoriser une « exception constitutionnelle » aux lois relatives à la marijuana pour des motifs médicaux R. c. Parker (1997), 12 C.R. (5th) 251 (C.P. Ont.) ; Wakeford c. Canada (1999), 173 D.L.R. (4th) 726 (C.S. Ont.). Il reste à savoir si le raisonnement élaboré dans ces causes peut être étendu de façon à protéger le droit à la liberté de religion.

La Couronne se préoccupe, et à bon droit, de l'absence d'une grille factuelle pour la détermination des questions constitutionnelles soulevées par les demandeurs, comme celle qui existerait si cette contestation constitutionnelle était soulevée dans le contexte d'une poursuite intentée en vertu des lois contestées. Toutefois, il y a des allégations factuelles dans la déclaration modifiée qui se rapportent précisément aux demandeurs et à leur religion, et qui concernent les propriétés de la marijuana et d'autres substances qui y sont désignées. La preuve quant à la véracité de ces allégations sera faite à l'instruction ou peut-être à l'étape des interrogatoires préalables. Si la preuve des demandeurs est insuffisante pour établir les faits allégués, leur demande pourrait être rejetée. Mais il n'y a pas de raison de radier la déclaration à la présente étape.                                                                                                                [Non souligné dans l'original.]

LES QUESTIONS EN LITIGE

1)         Questions préjudicielles


[8]                 Les demandeurs ont demandé de pouvoir déposer deux affidavits supplémentaires qu'on aurait signés le 4 mai 2003, soit bien après le délai accordé par la Cour pour le dépôt d'affidavits par les demandeurs à l'appui de la présente requête. Par instruction datée du 21 mai 2003, le protonotaire Lafrenière a prévu que les affidavits supplémentaires « [traduction] [...] présentés pour dépôt après le délai fixé dans l'ordonnance du 27 décembre 2002 seront rejetés » . Les demandeurs ont tenté d'en appeler devant moi de l'instruction du protonotaire Lafrenière. Une instruction de la Cour n'est pas susceptible d'appel[4]. À titre de question préjudicielle, j'ai rejeté l' « appel » des demandeurs au début de l'audience relative à la requête en jugement sommaire.

[9]                 Les avocats de la défenderesse m'ont fait remarquer que les affidavits produits par les demandeurs auraient été signés par le frère Baldasaro, pour ce qui est de l'affidavit du frère Tucker, et par ce dernier, pour ce qui est de l'affidavit du frère Baldasaro.

[10]            Dans Huang c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration)[5], le juge Evans a écrit ce qui suit, au paragraphe 6 :

Il est évidemment souhaitable que les affidavits soient soumis selon les formes prescrites par les Règles. Sinon, ils risquent de ne pas être admis en preuve dans les instances introduites devant notre Cour.

[11]            Les demandeurs sont bien conscients de cette situation, mais ils ont fait valoir devant moi qu'on devrait leur accorder un traitement spécial parce qu'ils sont « [traduction] [...] ministre[s] du culte [...] » . J'ai informé les demandeurs que leur rôle de ministres du culte ne leur conférait pas un statut particulier, comme celui des commissaires à l'assermentation. Je leur ai déclaré que, par suite, je ne reconnaîtrais aucune valeur probante à leurs affidavits[6].


2)         La requête en jugement sommaire

[12]            J'estime que les questions en litige dans le cadre de la présente requête en jugement sommaire sont, dans les termes les plus simples : premièrement, le critère à appliquer relativement à un jugement sommaire; deuxièmement, la question de savoir si on a satisfait à ce critère; troisièmement, la question de savoir si des dépens devraient être attribués à l'une ou l'autre partie en regard de la requête.

a)         Principes applicables à un jugement sommaire

[13]            On n'a pas véritablement contesté devant moi quels principes étaient applicables dans le cadre d'une requête en jugement sommaire. J'estime que mon collègue le juge Russell a admirablement résumé ces principes dans Apotex Inc. c. Canada[7], aux paragraphes 9 et 10 de ses motifs :

Les parties n'ont pas de différend important en ce qui concerne les principes généraux applicables dans une requête en jugement sommaire fondée sur les articles 213 à 219 des Règles de la Cour fédérale (1998). Conformément à ce qui est exposé dans des décisions telles que Granville Shipping Co. c. Pegasus Lines Ltd. S.A. et al. (1996), 111 F.T.R. 189, je dois conclure soit que les réclamations en cause ne présentent aucune véritable question litigieuse, soit que la question en litige est tellement douteuse qu'elle ne mérite pas d'être examinée de façon approfondie. Aussi, chaque affaire doit être interprétée dans son propre contexte et devrait être instruite si les faits nécessaires ne sont pas dégagés ou si une question sérieuse est soulevée au sujet de la crédibilité


Le fardeau d'établir qu'il n'existe pas de véritable question litigieuse repose sur le requérant, mais les deux parties doivent « présenter leurs meilleurs arguments » pour que le juge des requêtes puisse trancher cette question, et le juge doit « examiner de près » le fond et, si possible, tirer des conclusions de fait et de droit si les documents le permettent : F. Von Langsdorff Licensing Limited c. S.F. Concrete Technology Inc. (1999), 165 F.T.R. 74.

Je fais miens les motifs précités.

b)         A-t-on satisfait au critère applicable à un jugement sommaire?

i)          Introduction

[14]            Comme on l'a déjà mentionné dans les présents motifs, les demandeurs sollicitent des mesures de redressement sur le fondement des « [...] articles 1, 2a)b)c)d), 7, 8, 9,11d), 12, 15(1), 24(1), 26, 27, 31, 52(1), 91, 91.27 et 92.9 et 13 de la Charte canadienne des droits et libertés, de 1867 à 1998 » . Certaines des dispositions citées ne sont aucunement des dispositions de la Charte canadienne des droits et libertés, mais sont plutôt des dispositions des Lois constitutionnelles de 1867 à 1982. Quoi qu'il en soit, la preuve dont la Cour est saisie ne renferme aucun élément discernable permettant de fonder, sinon sur l'article 2 de la Charte, une demande de mesures de redressement. Voici le libellé de l'article 2 :


2. Chacun a les libertés fondamentales suivantes :

a) liberté de conscience et de religion;

b) liberté de pensée, de croyance, d'opinion et d'expression,

y compris la liberté de la presse et des autres moyens de communication;

c) liberté de réunion pacifique;

d) liberté d'association.

2. Everyone has the following fundamental freedoms:

a) freedom of conscience and religion;

b) freedom of thought, belief, opinion and expression, including freedom of the press and other media of communication;

c) freedom of peaceful assembly; and

d) freedom of association


[15]            Comme on l'a déjà dit, la déclaration modifiée des demandeurs ainsi que, de fait, la preuve valablement soumise à la Cour font ressortir la liberté de religion comme fondement principal de la demande, bien que, du moins implicitement, on puisse faire valoir d'autres libertés fondamentales mentionnées à l'article 2 de concert avec la liberté de religion.

[16]            Je ne décèle aucun élément important dans la preuve dont je suis valablement saisi qui puisse fonder une contestation de la Loi réglementant certaines drogues et autres substances dans son ensemble, mais uniquement des dispositions de cette loi constituant en infractions la possession, le trafic, la production ainsi que, peut-être, l'importation et l'exportation de la marijuana ou « arbre de Vie » , et les actes connexes. La déclaration modifiée fait mention d'utilisation à des « [traduction] fins médicales, de guérison et autres » en plus de questions d'ordre spirituel. J'estime, une fois encore, qu'il n'y a aucun élément de preuve important concernant une utilisation à de telles fins dans la preuve dont la Cour est valablement saisie. Quoi qu'il en soit, les tribunaux se sont prononcés en d'autres occasions sur pareilles utilisations de certaines drogues. On examinera donc uniquement dans les présents motifs la question de savoir si la preuve valablement soumise à la Cour présente une véritable question litigieuse, fondée sur la liberté de religion, en regard de la possession, de la production et du trafic, y compris l'importation et l'exportation, de marijuana, tel qu'on l'a précisé précédemment, et celle de savoir si cette question est ou non douteuse au point de ne pas mériter d'être approfondie.


ii)         La preuve des demandeurs soumise à la Cour

[17]            Comme je l'ai déjà mentionné, je ne reconnais aucune valeur probante aux affidavits des demandeurs. Cela étant dit, les avocats de la défenderesse ont soumis à la Cour une transcription de l'interrogatoire préalable des demandeurs. Il en ressort clairement, tel qu'en attestent certains extraits qui suivent, que l'interrogatoire des demandeurs s'est avéré ardu. D'autres extraits constituent le témoignage des demandeurs au sujet de l'utilisation, de la culture et de la dissémination de la marijuana, particulièrement en relation avec un sacrement de l'Assemblée de l'Église de l'Univers.

[18]            On a tenté pour la première fois d'interroger au préalable les demandeurs le 3 mai 2001. Les demandeurs ont refusé d'être interrogés séparément et ont déclaré que chacun était l' « avocat » de l'autre. L'avocat de la défenderesse a dit ce qui suit :

[traduction]

Je désire vous poser des questions sur vos croyances religieuses et sur votre Église, non pas pour démontrer qu'elles ne sont pas authentiques ou, désolé, démontrer qu'elles sont fausses parce que

[...]

- - - vous n'y prêtez pas véritablement foi -

Frère Tucker:          Laissez-moi tranquille à la fin. J'en fais partie depuis 30 ans. Croyez-vous que j'y aurais passé 30 années de ma vie sans y croire. Il y a quelque chose qui cloche chez vous les gens d'Ottawa, il n'y a pas à dire, quelque chose de déréglé dans vos têtes. Secouez-vous bien comme il faut. Vous savez que je pratique ma religion depuis 30 ans, et maintenant vous me dites : « Je ne sais pas si vous y prêtez véritablement foi » . Je me fiche éperdument que vous croyiez ou non que j'y prête véritablement foi; cela ne vous concerne tout simplement pas[8].


Le frère Tucker avait déjà formulé des commentaires assez semblables :

[traduction]

Si le gouvernement entend avec ses questions nier l'authenticité de notre Église ou de nos croyances religieuses, c'est peine perdue. Nous ne désirons même pas envisager de répondre à une telle question du gouvernement parce qu'à chaque fois que nous lui avons dévoilé nos croyances religieuses, ses forces policières nous ont attaqués. Nous ne voulons plus nous en remettre à vous. Je vous l'ai déjà dit. Nous ne nous laisserons pas mener à l'abattoir sans rien faire [...][9].

[19]            Cela étant dit, le frère Tucker a bien déclaré ce qui suit :

[traduction]

Ma religion consiste à adorer Dieu, à communiquer à cette fin et à consommer le chanvre cannabis, l'arbre de Vie, pour ma santé et mon bien-être spirituel[10].

[20]            Le frère Tucker a de nouveau comparu pour témoigner, le frère Baldasaro comparaissant avec lui. Voici des extraits de cet autre interrogatoire du frère Tucker :

[traduction]

Q.            Bien, votre Église prescrit-elle à ses membres de fumer de la marijuana?

R.            Non. Ils peuvent la manger, la porter, écrire dessus. Ils peuvent s'en entourer de quelque manière qu'ils désirent.

Q.            Mais ils n'ont pas à véritablement la consommer?

R.            Non, ils n'ont pas à la fumer[11].

[...]

Q.            Quand avez-vous fait l'expérience pour la première fois de ce lien spirituel par la consommation de marijuana?


R.            Bien, probablement à ma naissance.

Q.            Par la consommation de marijuana?

R.            Bien, probablement que lorsque j'ai commencé à prendre de la marijuana j'ai découvert que ce lien était plus fort.

Q.            Vous rappelez-vous en gros à quel moment c'était?

R.            Probablement ... ça devait être en 1968 ou 1966, probablement.

Q.            Bien, avant la fondation de votre Église?

R.            Comment?

Q.            Avant la fondation de votre Église?

R.            Oh mon Dieu oui.

Q.            C'était en 1969?

R.            Oui. J'en ai fumé, mais je n'ai jamais . . . je n'ai jamais . . . vraiment, ça n'est jamais devenu quelque chose d'important avant que l'Église ne soit fondée, et ça m'a aidé à devenir une meilleure personne et à établir des liens avec mes semblables et avec Dieu. Et c'est alors devenu dans ma vie un sacrement auquel je suis voué. Je me suis rendu compte que la marijuana . . . qu'en fumant de la marijuana, mes croyances, mon lien avec Dieu et celui avec mes semblables devenaient plus humains[12].

[...]

Q.             Avez-vous d'autres sacrements, mis à part celui de l'arbre de Vie, de la marijuana?

R.            Je n'en ai pas.

Q.            Y en a-t-il dans votre Église?

R.            Je n'en ai pas.

Q.            Dans votre Église, y en a-t-il?


R.            Je ne peux répondre pour qui que ce soit d'autre, mon frère. Je peux répondre que je n'en ai pas, et qu'autant que je sache . . . je n'en connais pas d'autres[13].

[21]            On a ensuite interrogé le frère Baldasaro, le frère Tucker comparaissant avec lui. Voici des extraits de l'interrogatoire du frère Baldasaro :

[traduction]

Q.            Vous dites avoir découvert par vous-même la marijuana en tant que sacrement; comment l'avez-vous découvert à la fin des années 1960?

R.            Quand j'ai commencé à en utiliser, j'imagine que c'était vers 1969-70, quand j'ai commencé à consommer de la marijuana.

Q.            C'était donc la première fois?

R.            Oui, et j'ai toujours cru en Dieu et j'ai trouvé que cela m'en rapprochait dans mes prières et tout. Ça m'a comme ouvert davantage à Dieu, m'a fait ressentir davantage mon appartenance à la création de Dieu. Ça m'a apaisé, puis j'ai commencé à lire la Bible en même temps. Toute ma vie je me suis intéressé à la religion et à Dieu, au sein de l'Église catholique, puis de l'Église anglicane quelque temps, et comme je l'ai dit je parlais à Dieu. Ma mère m'a enseigné à prier et Dieu m'a guidé. Mes croyances sont simplement - je ne peux même pas vous prouver que Dieu existe, sinon croire qu'il en est ainsi. J'imagine que c'est pour cela que croire est si important dans la religion.

Q.            Et si une autre substance vous avait rapproché de Dieu, disons le LDS ou quelque chose de semblable? Cela serait-il aussi devenu un sacrement pour vous?

R.            Bien, j'ai essayé et j'ai vu que cela ouvrait aussi la porte à beaucoup de choses, mais je crois que c'est sacré pour ceux qui l'utilisent. Je ne suis pas ici pour défendre cela. Je suis ici pour ce que moi j'utilise; ce que j'ai constaté favoriser ma relation avec Dieu c'est l'arbre de Vie, que les policiers n'ont pas cessé de dérober et ce pourquoi ils m'ont mis en prison toutes ces années[14].

[...]

Q.            Pourquoi selon vous ce sacrement, l'arbre de Vie, est-il une bonne chose au plan moral?


R.            Parce que cela rend les gens plus souples, cela les éveille et les rend plus réceptifs à Dieu, à la paix et à toute chose et cela est bon pour leur santé. La feuille de l'arbre peut guérir les païens. ...[15]

Q.            Qu'entendez-vous par cela?

R.            ... et j'ai observé ses avantages puis j'en ai observé d'autres - si vous voulez dire que le vin est un sacrement, je peux constater tout le mal que l'alcool a causé et, malgré cela, on le tolère comme sacrement, et vous ne demanderez pas à un prêtre pourquoi Dieu lui a dit de se servir du vin.

Bien, il peut dire que Jésus a déclaré ceci est mon corps et ceci est mon sang, et je pourrais mettre en question si c'est bien cela qu'il a voulu dire. Tout cela relève de la foi, ce en quoi je crois c'est de la foi. Ce dont j'ai parlé à Dieu dans mon placard lorsque j'ai consommé l'arbre de Vie, ce que je croyais être la marijuana pour ensuite parfois en douter jusqu'à ce que Dieu m'ouvre les yeux, par l'expérience, par les jugements de ces cours. C'est la seule plante parmi celles sur la terre que vous essayez d'éliminer, et elle est probablement du même niveau, si tant est, que la caféine. Pour moi, l'arbre de Vie c'est. . .

Q.            Ainsi, parce que l'arbre de Vie a ces effets positifs . . .

R.            Oui, et parce que j'ai fait l'expérience de ces effets.

Q.            . . . c'est ce qui lui confère son caractère religieux et en fait un sacrement?

R.            Non, non, je vous l'ai dit. Son caractère religieux vient de ce qu'il m'ouvre davantage à Dieu. En plus de tous les autres avantages, vous savez, je peux le porter, il me tient au chaud, il purifie aussi mon sang; il me réchauffe sous forme de thé et comme vêtement et, lorsque j'en fume, cela me rapproche de Dieu[16].

[...]

Q.             Mais ce que je vous ai demandé, c'est en quoi l'arbre de Vie est une bonne chose au plan religieux?

R.            Je vous l'ai déjà dit. Lorsque je prie Dieu, lorsque je fume, lorsque j'en fais brûler, lorsque j'inhale la fumée, cela m'ouvre à la communion, une communion privée, avec Dieu. Je ne vais pas vous dire ce dont je parle avec Dieu. Je ne peux vous donner cela. Je peux le faire dans mon placard ou le partager avec d'autres; l'expérimenter apporte beaucoup d'ouverture.

Q.             Pourquoi allez-vous dans votre placard?

R.            Parce que la Bible me l'a dit, Jésus me l'a dit.


Q.            La Bible?

R.            Oui, si tu veux prier, ne le fais pas dans des foules comme les pains. Va dans ton placard, referme la porte et parle à Dieu. Il t'écoute. Je peux placer un mur en ce moment même et parler à Dieu si j'ai à le faire.

Q.            Si c'est ce que la Bible dit, pourquoi donc pratiquez-vous en groupe le sacrement de l'arbre de Vie?

R.            Bien, pour partager. C'est une façon différente, collective, d'adorer Dieu. C'est pourquoi l'Église opère comme elle le fait. Ceux qui adorent Dieu de cette manière se rassemblent. Nous constituons une culture[17].

[...]

Q.            Vous voulez dire que Dieu vous a déclaré que c'était là l'arbre de Vie et qu'il fallait vous en servir pour les fins d'un sacrement?

R.            Oui, oui, Dieu ne m'a pas dit de ne pas le faire.

Q.            Mais si Dieu vous communiquait un autre message portant que...

R.            Attendez un instant, il nous faut les règles. Avez-vous vu les règles sur le site? Seules les femmes font les règles; elle peut changer d'idée à tout moment. Si Dieu est une femme, oui je vais avoir des ennuis, et ce qui est le fait d'un homme sera toujours faux. Si j'avais une copie, je vous la remettrais. Mais, sérieusement, je ne crois par que Dieu va changer d'idée. Dieu n'a pas la langue fourchue et ne reprend pas ce qu'il a donné. Dieu m'a montré cela et, vous savez, pendant les années où j'ai été emprisonné, des gens, des gardiens m'ont dit : « Vous allez peut-être regretter de mener ce combat » . J'examine bien la situation et, bien avant de fumer de la marijuana, j'ai travaillé pendant 17 ans avec des terrassiers à Yorkville, et j'ai constaté que ceux qui fumaient de la marijuana n'étaient pas des imbéciles. C'était habituellement des enseignants qui aidaient des toxicomanes et des alcooliques de Yorkville à s'en sortir.

Plus tard ainsi dans ma vie, bien plus tard, dans la vingtaine, lorsque j'ai fumé de la drogue et que je me suis relié à Dieu, c'est alors que cela m'est arrivé et a continué de m'arriver, de plus en plus fort. Je me suis aperçu qu'il y avait toute une culture derrière. En fait, c'est le plus ancien culte sur terre. Dieu a dit à Adam et Ève d'entretenir le jardin, de cultiver. C'est tout ce que nous sommes, et j'ai découvert que la plante la plus importante de ce jardin c'est l'arbre de Vie. Il produit ses effets, fait tout ce que Dieu en dit et je parle à Dieu et le prie le mieux lorsque je l'utilise. Tout le reste ce ne sont que des avantages. Je dois l'utiliser aux fins de ma religion, ma soeur, je dois l'utiliser pour mes prières.

Q.            Et à quel point croyez-vous en la nécessité de disséminer l'arbre de Vie? Est-ce là aussi une croyance bien sacrée pour vous?


R.            Je crois qu'il incombe à l'Église de le faire et c'est pour cela que nous sommes ici. Nous ne pouvons - nous ne voulons pas nous retrouver dans des situations où les policiers font des raids là où nous cultivons l'herbe sacrée. Je ne le veux pas. Je désire être protégé.

Q.            Croyez-vous que le besoin de disséminer fait également partie du sacrement?

R.            Entretenir le jardin, bien sûr. Qui va le cultiver? Si personne ne plante du blé, nous n'aurons pas de pain.

Q.            Recevez-vous des dons pour. . .

R.            Il le faudra.

Q.            ... le disséminer?

R.            Nous devrons recevoir des dons pour le faire[18].

[22]            Je suis par conséquent convaincu que la Cour est saisie d'éléments de preuve portant que les demandeurs croient sincèrement que la marijuana, ou l' « arbre de Vie » tel qu'ils le préfèrent, constitue un sacrement pour eux et pour leur Église. Elle favorise leur communication avec Dieu, leur paix intérieure ainsi que leur ouverture face à Dieu et à leurs semblables.

[23]            Pour ce qui est plus directement de la question de la culture et de la dissémination, le frère Baldasaro a reconnu que « nous » - je présume qu'il voulait parler de l'Église ou de lui-même et du frère Tucker - « devrons recevoir des dons » pour disséminer le produit de la culture du « jardin » .


iii)         Les règles de droit

[24]            Dans ses motifs où elle a rejeté une requête antérieure en radiation de la présente action, dont de longs extraits figurent en annexe des présents motifs, la juge Sharlow résume admirablement la jurisprudence ici applicable. Cela étant dit, les avocats de la défenderesse m'ont cité d'autres décisions qui sont dignes de mention.

[25]            Dans R. c. Edwards Books and Art Ltd.[19], le juge en chef Dixon a écrit ce qui suit, en son nom et en celui des juges Chouinard et Le Dain :

L'alinéa 2a) [de la Charte] a pour objet d'assurer que la société ne s'ingérera pas dans les croyances intimes profondes qui régissent la perception qu'on a de soi, de l'humanité, de la nature et, dans certains cas, d'un être supérieur ou différent. Ces croyances, à leur tour, régissent notre comportement et nos pratiques. La Constitution ne protège les particuliers et les groupes que dans la mesure où des croyances ou un comportement d'ordre religieux pourraient être raisonnablement ou véritablement menacés. Pour qu'un fardeau ou un coût imposé par l'État soit interdit par l'al. 2a), il doit être susceptible de porter atteinte à une croyance ou pratique religieuse. Bref, l'action législative ou administrative qui accroît le coût de la pratique ou de quelque autre manifestation des croyances religieuses n'est pas interdite si le fardeau ainsi imposé est négligeable ou insignifiant [...]                                              [Citation omise.]

[26]            Dans R. c. Videoflicks Ltd. et al.[20], le juge Tarnopolsky s'est exprimé ainsi au nom de la Cour :

[traduction]

Selon moi, lorsqu'une personne demande à être dispensée de l'application d'une exigence ou d'un règlement gouvernemental particulier, en invoquant la liberté de religion ou de conscience, elle doit pouvoir démontrer que son objection se fonde sur une croyance sincère associée à un mode de vie dicté par sa religion ou sa conscience. Sinon, l'alinéa 2a) de la Charte pourrait sans fin servir d'excuse pour échapper aux obligations juridiques non désirées.


[27]            Dans B. (R.) c. Children's Aid Society of Metropolitan Toronto[21], les juges Iacobucci et Major, qui ont reçu l'appui du juge Cory, se sont exprimés comme suit :

Tout comme il existe des limites à la liberté d'expression [...], il y a également des limites à la portée de l'al. 2a), particulièrement lorsqu'on a recours à cette disposition pour préserver une activité qui menace le bien-être physique et psychologique d'autrui. En d'autres termes, bien que la liberté de croyance puisse être vaste, la liberté d'agir suivant ces croyances est beaucoup plus restreinte, et c'est cette liberté qui est en cause en l'espèce. Dans les motifs de principe qu'il a rédigés, dans R. c. Big M Drug Mart Ltd., [...] le juge Dickson (plus tard juge en chef) souligne que la « liberté » n'existe pas dans l'absolu :

La liberté au sens large comporte l'absence de coercition et de contrainte et le droit de manifester ses croyances et pratiques. La liberté signifie que, sous réserve des restrictions qui sont nécessaires pour préserver la sécurité, l'ordre, la santé ou les moeurs publics ou les libertés et droits fondamentaux d'autrui, nul ne peut être forcé d'agir contrairement à ses croyances et à sa conscience.

                                                                                 [Citations omises; souligné dans l'original.]

[28]            Dans Université Trinity Western c. British Columbia College of Teachers[22], les juges Iacobucci et Bastarache, s'exprimant au nom de la majorité, ont déclaré ce qui suit :

[...] dans des cas comme celui dont nous sommes saisis, il convient généralement de tracer la ligne entre la croyance et le comportement. La liberté de croyance est plus large que la liberté d'agir sur la foi d'une croyance.


[29]            Eu égard au paragraphe 16 des présents motifs, je relève que les tribunaux se sont exprimés dans d'autres décisions sur l'utilisation à des « [...] fins médicales, de guérison et autres » de certaines drogues. La décision R. c. Parker[23] de la Cour d'appel de l'Ontario est d'intérêt particulier. Voici une partie du sommaire de cet arrêt :

[traduction]

Le prévenu était accusé, en application de la Loi sur les stupéfiants maintenant abrogée, d'avoir cultivé de la marijuana [...] Par suite d'une seconde perquisition chez lui, il a également été accusé de possession de marijuana, en application de la Loi réglementant certaines drogues et autres substances. Il souffrait d'épilepsie et avait fréquemment des crises graves, pouvant même être mortelles. On n'a eu que des succès mitigés en tentant de maîtriser ces crises grâce à des médicaments conventionnels. Il a pu observer qu'il pouvait réduire considérablement le nombre de ses crises en fumant de la marijuana. Le prévenu n'a pu trouver où s'approvisionner licitement en marijuana et en a donc fait la culture.

Au procès, on a arrêté les procédures relativement aux accusations. Le juge du fond a conclu que le prévenu avait besoin de marijuana pour maîtriser son épilepsie et que l'interdiction de la marijuana violait ses droits en vertu de l'article 7 de la Charte canadienne des droits et libertés. Pour protéger le prévenu et d'autres comme lui ayant besoin de marijuana à des fins médicales, le juge du fond a considéré la loi comme comportant implicitement une dispense visant les personnes qui possèdent ou cultivent de la marijuana pour « leurs fins personnelles approuvées par un médecin » . Le ministère public a interjeté appel.

[30]            La Cour d'appel de l'Ontario s'est prononcée comme suit sur l'appel, à la page 551 :

[traduction]En conséquence, je modifierais la mesure de redressement accordée par le juge du fond, et je déclarerais invalide l'interdiction de la marijuana prévue à l'article 4 de la Loi réglementant certaines drogues et autres substances. Je suspendrais l'effet de la déclaration d'invalidité pour une période de 12 mois à compter du prononcé des présents motifs. L'intimé est soustrait à l'interdiction de la marijuana, prévue à l'article 4 de la Loi réglementant certaines drogues et autres substances, pendant la période de l'invalidité suspendue, pour ce qui est de la possession de marijuana à des fins médicales. J'annulerais les parties du jugement où le juge Sheppard interprète l'ancienne Loi sur les stupéfiants et la Loi réglementant certaines drogues et autres substances comme comportant implicitement une dispense pour fins médicales, et j'ordonnerais la remise des pieds saisis lors de la perquisition de septembre 1997. À tous autres égard, je rejetterais l'appel du ministère public.

[31]            Ainsi, on ne peut dire que la contestation par les demandeurs de certaines dispositions de la Loi réglementant certaines drogues et autres substances, en ce qui a trait à la marijuana, n'a donné lieu à aucun précédent récent et couronné de succès, bien qu'aucune des contestations concernées n'était fondée sur la liberté de religion.

                         iv)        Conclusions

[32]            Compte tenu du raisonnement du juge Sharlow se fondant sur la jurisprudence qu'elle a citée ainsi que de la jurisprudence susmentionnée non citée par elle, et compte tenu des témoignages des défendeurs reproduits aux présentes, je tire deux conclusions relativement à l'action des demandeurs fondée sur la liberté de religion. Premièrement, la demande par les demandeurs de dispense d'application des dispositions de la Loi réglementant certaines drogues et autres substances en ce qui a trait à la dissémination de la marijuana, ou arbre de Vie, ne soulève aucune véritable question litigieuse; ou bien encore, la question est si douteuse qu'elle ne mérite pas d'être approfondie. À tous autres égards, deuxièmement, la défenderesse ne s'est pas acquittée du fardeau lui incombant de démontrer l'absence d'une véritable question litigieuse, ou le succès si douteux qu'il n'y a pas lieu d'examiner l'affaire plus avant.


[33]            Pour ce qui est de la dissémination et de la culture, sauf dans ce dernier cas à des fins personnelles, la preuve produite par les demandeurs est faible, au mieux. Compte tenu de la preuve ainsi présentée, je suis convaincu que l'intérêt général du public l'emporte de beaucoup sur l'intérêt des demandeurs à pouvoir cultiver et disséminer la marijuana, à titre de don ou contre rétribution, pour donner corps à leurs croyances et pratiques religieuses et à celles des membres de leur Église. Le fait qu'il existe des solutions de rechange pour satisfaire aux besoins légitimes d'acquisition et de possession de marijuana établis par d'autres personnes, pour leurs fins personnelles ou au soutien d'un sacrement de l'Église des demandeurs, est bien démontré par les arrangements décrits dans les motifs de l'ordonnance dans Patriquen c. Lucie McLung and others[24].

[34]            Pour ce qui est de la possession et de la culture par les demandeurs pour leurs fins personnelles ou au soutien d'un sacrement de leur religion, je ne puis conclure que l'action des demandeurs ne présente aucune véritable question litigieuse, ou que la question soulevée est si douteuse qu'elle ne mérite pas d'être approfondie. Le témoignage des demandeurs ci-haut reproduit est beaucoup plus probant quant aux simples possession et culture à des fins personnelles ou au soutien d'un sacrement fondé sur des croyances religieuses sincères, que ne l'est la preuve présentée relativement à tout autre aspect de la demande de mesures de redressement des demandeurs. Je suis convaincu, de même, sur le fondement de l'abondante jurisprudence citée par la juge Sharlow et de la jurisprudence additionnelle citée plus tôt aux présentes, qu'il y a ouverture à des mesures de redressement pour les demandeurs à cet égard, en fonction presque exclusivement de la crédibilité et de la force probante de leurs témoignages au procès.


CONCLUSION

[35]            Par suite, la défenderesse aura gain de cause pour bonne part, mais pas de manière absolue, dans la présente requête en jugement sommaire. La requête de la défenderesse sera accueillie à tous égards, sauf pour ce qui est de la demande de dispense par les demandeurs de l'application de la Loi réglementant certaines drogues et autres substances en ce qui a trait, eu égard aux faits d'espèce, à la possession et à la culture de la marijuana, ou arbre de Vie, pour leurs fins personnelles ou au soutien d'un sacrement de leur religion. Cette dernière demande devra être instruite ou donner lieu d'une autre manière à une décision définitive.

DÉPENS

[36]            Chacune des parties ayant partiellement gain de cause dans la présente requête en jugement sommaire, aucuns dépens ne seront adjugés.

                                                                          _ Frederick E. Gibson _             

                                                                                                             Juge                               

Ottawa (Ontario)

Le 29 août 2003

Traduction certifiée conforme

Suzanne M. Gauthier, trad. a., LL.L.


                                                   Annexe

                                  (6e paragraphe des motifs)

[20]          Finalement, la Couronne soutient que les demandeurs n'ont pas de cause raisonnable d'action parce qu'ils n'ont pas établi qu'il y avait eu soit une violation réelle de leurs droits en vertu de la Charte, soit une menace de violation. Comme on l'a indiqué ci-dessus, les demandeurs soutiennent que l'existence de la loi contestée crée une menace de poursuite qui porte atteinte à leur liberté de religion.

[21]          Un rapide survol de la jurisprudence ne m'a pas permis de trouver de cause qui appuie la proposition générale selon laquelle le droit à la liberté de religion ne peut jamais avoir priorité sur une loi qui rend illégale la possession d'un sacrement. En l'absence d'une telle autorité, je ne peux conclure que les demandeurs n'ont aucune chance d'avoir gain de cause.

[22]          Cela ne veut pas dire que la cause des demandeurs ne présente pas de difficultés. Ils demandent l'invalidation complète des lois relatives à l'usage de la marijuana parce que ces lois portent atteinte à la liberté de religion des membres de leur Église. La Couronne soutient que la réparation demandée est disproportionnée par rapport au problème et, au bout du compte, il se peut qu'un tribunal lui donne raison.

[23]          Il est tout à fait clair d'après la jurisprudence que la liberté de religion, bien qu'elle soit importante, n'est pas absolue. Un survol de certaines des causes pertinentes est donné dans l'arrêt The Queen v. Church of Scientology of Toronto (1987), 31 C.C.C. (3d) 449. Dans cet arrêt, la Cour d'appel de l'Ontario déclarait ceci aux pages 467 à 473 :

[TRADUCTION]

[...] L'appelante s'appuie sur la Charte qui, selon elle, reconnaît constitutionnellement la liberté de religion. L'Église de scientologie appelante s'appuie sur l'arrêt R. c. Big M Drug Mart Ltd. [...], [1985] 1 R.C.S. 295. Le principe directeur de ce jugement est énoncé par le juge en chef Dickson aux pages 336 et 337 :

Une société vraiment libre peut accepter une grande diversité de croyances, de goûts, de visées, de coutumes et de normes de conduite. Une société libre vise à assurer à tous l'égalité quant à la jouissance des libertés fondamentales et j'affirme cela sans m'appuyer sur l'art. 15 de la Charte. La liberté doit sûrement reposer sur le respect de la dignité et des droits inviolables de l'être humain. Le concept de la liberté de religion se définit essentiellement comme le droit de croire ce que l'on veut en matière religieuse, le droit de professer ouvertement des croyances religieuses sans crainte d'empêchement ou de représailles et le droit de manifester ses croyances religieuses par leur mise en pratique et par le culte ou par leur enseignement et leur propagation. Toutefois, ce concept signifie beaucoup plus que cela.

                 [...]


L'un des objectifs importants de la Charte est de protéger, dans des limites raisonnables, contre la coercition et la contrainte. La coercition comprend non seulement la contrainte flagrante exercée, par exemple, sous forme d'ordres directs d'agir ou de s'abstenir sous peine de sanction, mais également les formes indirectes de contrôle qui permettent de déterminer ou de restreindre les possibilités d'action d'autrui. La liberté au sens large comporte l'absence de coercition et de contrainte et le droit de manifester ses croyances et pratiques. La liberté signifie que, sous réserve des restrictions qui sont nécessaires pour préserver la sécurité, l'ordre, la santé ou les moeurs publics ou les libertés et droits fondamentaux d'autrui, nul ne peut être forcé d'agir contrairement à ses croyances ou à sa conscience.

Une majorité religieuse, ou l'État à sa demande, ne peut, pour des motifs religieux, imposer sa propre conception de ce qui est bon et vrai aux citoyens qui ne partagent pas le même point de vue. La Charte protège les minorités religieuses contre la menace de « tyrannie de la majorité » .

[...]

[...] nous pensons qu'il est approprié de noter que le simple fait qu'une organisation prétende être une religion n'empêche pas la Couronne ou tout autre plaideur de demander l'aide du tribunal pour déterminer s'il y a eu un délit criminel ou un préjudice civil.

[...]

Au Canada, il y a de nombreux cas dans lesquels les croyances sincères des membres de sectes ou de groupes religieux particuliers n'ont pas été reconnues comme des défenses efficaces contre les contraventions alléguées aux lois de ce pays. Dans R. v. Lewis (l903), 7 C.C.C. 261, [...] la présente Cour a statué qu'une objection de conscience à un traitement médical s'appuyant sur l'adhésion aux principes de la secte connue sous le nom de « Scientistes chrétiens » n'était pas une « excuse légitime » pour ne pas fournir de médicaments et une aide médicale conformément au Code. Dans R. v. Chomkowski (1973), 11 C.C.C. (2d) 562, [...] un témoin de Jehovah qui croyait ne pouvoir donner son haleine qu'à Dieu et non aux policiers a été condamné pour avoir refusé de souffler dans un ivressomètre. Voir également R. v. Reed (1983), 8 C.C.C. (3d) 153, dans lequel l'accusé a été condamné pour avoir troublé la paix, contrairement au Code, en criant et en perturbant une assemblée de personnes réunies pour célébrer un office religieux, même si, en tant qu'opposant aux Témoins de Jéhovah, il croyait avoir le droit d'exprimer sa liberté de conscience et de religion et de dénoncer les Témoins de Jéhovah. Dans R. v. « Bear's Shin Bone » (1899), 3 C.C.C. 329, [...] un Indien qui s'était marié à deux reprises, conformément à la coutume de sa tribu, a été reconnu coupable de bigamie.

Dans Baxter v. Baxter (1983), 6 D.L.R. (4th) 557,[...] le juge Pennell de la Haute Cour de justice de cette province a refusé l'argument d'un mari défendeur dans une instance de divorce qui prétendait que l'obtention d'un jugement irrévocable de divorce portait atteinte à son droit d'exercer librement sa religion et d'exprimer ses opinions, qui lui sont garantis par l'article 2 de la Charte. À la page 560, le juge Pennell déclare ceci :

Le fait que le gouvernement ne peut exiger d'une personne qu'elle renonce à la partie la plus infime de ses scrupules religieux ne signifie pas qu'elle peut exiger du gouvernement que celui-ci exclut son mariage des dispositions de la Loi sur le divorce, pour mieux mettre en pratique ses convictions religieuses.

De même, la Cour suprême de la Colombie-Britannique, dans Price, Fraser and McRae v. A.G. of British Columbia et al., [1976] 5 W.W.R. 656, a statué que même si les convictions religieuses d'un syndiqué pouvaient lui permettre de s'abstenir de se joindre au syndicat, il n'y avait pas violation de ses droits du fait qu'il était tenu de verser une contribution financière au syndicat au même titre que les autres membres.


Les tribunaux de notre pays n'ont pas hésité à intervenir dans les pratiques religieuses quand celles-ci sont contraires aux lois en vigueur ou même, dans certains cas, à des pratiques acceptables. Dans Re Singh et al. and The Queen (1985), 18 C.C.C. (3d) 31, un juge de première instance a refusé d'autoriser un membre de la religion sikh à porter sur lui une dague de cérémonie dans la salle d'audience. Le juge en chef Dewar a statué que le juge de première instance avait eu raison. Bien que l'accusé, membre baptisé de la religion sikh, était tenu d'après les principes de sa religion de porter le kirpan (la dague) en tout temps, le juge en chef Dewar, de la Cour du Banc de la Reine, a statué que la décision du juge de première instance n'était pas une contravention inconstitutionnelle à la liberté de religion de l'accusé qui lui est garantie par l'alinéa 2a) de la Charte. Le juge en chef a déclaré qu'une telle décision servait l'intérêt public supérieur pour que la justice soit administrée dans un environnement libre de toute influence qui pourrait tendre à contrarier le processus; la décision avait été prise dans l'exercice de la compétence du tribunal chargé de maintenir l'ordre et la sécurité dans la salle d'audience. Il s'agissait, par conséquent, d'une limite raisonnable prescrite par une règle de droit et dont la justification pouvait se démontrer dans le cadre d'une société libre et démocratique.

Dans R v. Harrold (1971), 3 C.C.C. (2d) 387, [...] dont l'autorisation d'appeler à la C.S.C. a été refusée le 5 mai 1971, l'accusé était membre d'un groupe religieux ayant pour mandat la propagation systématique de la connaissance spirituelle dans la société en général. L'accusé a été déclaré coupable d'avoir contrevenu au règlement anti-bruit de la ville de Vancouver. Le juge Tysoe, s'exprimant au nom de la Cour d'appel de la Colombie-Britannique, a déclaré à la page 374 : « Le droit à la liberté de religion ne permet à personne, qui s'abrite sous le parapluie de ses enseignements et de ses pratiques religieux, de contrevenir à la loi du pays, que celle-ci soit fédérale, provinciale ou municipale » . De même, dans R. v. Jack and Charlie (1982), 67 C.C.C. (2d) 289, [...] confirmé à 21 C.C.C. (3d) 481, [...] l'accusé a été déclaré coupable d'avoir chassé le cerf de Virginie hors saison malgré sa prétention selon laquelle il avait besoin de la viande de cet animal pour une cérémonie religieuse. Voir également Tucker et al. v. The Queen, [[1979] O.J. no 1532,] et R. v. Baldasaro, [[1982] O.J. no 2082] (deux décisions non publiées de la Cour d'appel de l'Ontario, la première ayant été rendue le 28 novembre 1979 et la deuxième le 15 novembre 1982; les autorisations d'appel à la CSC ont été refusées le 22 janvier 1980 et le 25 janvier 1983 respectivement), dans lesquelles la Cour a statué que malgré les prétentions des accusés concernant la nécessité de faire usage de marijuana dans leurs pratiques religieuses, ces personnes étaient assujetties à la Loi sur les stupéfiants.

Dans Fardella c. La Reine [...][1974] 2 C.F. 465, [...] la Cour d'appel fédérale a statué à la majorité que la condition imposée à un préposé aux soins des enfants d'obliger les élèves dont il avait la charge à assister aux services religieux ne contrevenait pas à ses droits en vertu de la Déclaration canadienne des droits, qui protégeait, entre autres, la liberté de religion. Il n'avait été porté atteinte d'aucune façon à son droit de croire ou de ne pas croire et à son droit d'assister ou non aux offices religieux, comme bon lui semblait. La condition selon laquelle il devait obliger les élèves relevant de sa charge à assister aux services religieux aurait pu porter atteinte à la liberté de religion des enfants ou de leurs parents s'ils avaient été contraints d'assister à ces services religieux - ce qui n'était pas le cas -, mais il n'y avait pas atteinte aux droits du préposé. La Cour a statué qu'il avait à bon droit été congédié parce qu'il ne s'était pas acquitté de cet aspect de ses fonctions.

[24] Je note que deux des causes citées dans la décision Church of Scientology se rapportent au cas des demandeurs en l'espèce. Ces causes n'indiquent pas clairement si les questions relatives à la Charte qui font l'objet de la présente action étaient ou pourraient avoir été soulevées dans ce genre d'instance. Mais, dans la cause plus récente, R. v. Baldasaro, [1984] O.J. no 2033 (QL), la Cour d'appel de l'Ontario a déclaré ceci :


[TRADUCTION]

Nous ne croyons pas que le juge de première instance a commis une erreur sur une question de droit en indiquant, dans son adresse au jury, que le fait que l'accusé ait été en possession de marijuana pour en faire usage dans l'accomplissement des rites de son Église n'était pas une défense à l'accusation portée. Les dispositions de la Charte canadienne des droits et libertés garantissant la liberté de religion n'offrent aucune défense dans ce cas.

[25] Ce passage appuie dans une certaine mesure l'argument de la Couronne selon lequel la cause des défendeurs n'est pas fondée. Toutefois, il est impossible de déterminer à partir des très courts motifs de la décision prononcée dans ce cas quels sont les faits qui ont mené à la condamnation. Il y avait peut-être dans cette affaire une preuve qui aurait pu établir les faits allégués dans la déclaration modifiée en l'espèce, et peut-être qu'il n'y en avait pas. Peut-être que l'argument constitutionnel que l'on se propose de soulever en l'espèce a été présenté, et peut-être qu'il ne l'a pas été.

[26] Un certain nombre de causes dans lesquelles il a été statué que l'interdiction dtre en possession de marijuana ne contrevient pas à l'article 7 de la Charte (le droit à la vie, à la liberté et à la sécurité de sa personne) favorise également la position de la Couronne : R. v. Hamon (1993), 85 C.C.C. (3d) 490, autorisation d'appel à la CSC refusée le 27 janvier 1994; R. v. Malmo-Levine (18 février 1998), Vancouver CC 970509 (C.S. C.-B.); R. v. Caine (20 avril 1998), Surrey 65381 (C.P. C.-B.); R. v. Hunter (14 avril 1997), Victoria 88807 (C.S. C.-B.); R. v. Clay (1997), 39 O.T.C. 81 [...] Dans l'une de ces causes, soit Malmo-Levine, la question de la liberté de religion protégée par l'article 2 de la Charte avait également été soulevée, mais elle a été rejetée d'après les faits de l'espèce; il n'y avait pas de fondement religieux aux convictions professées par l'accusé.

[27] Par ailleurs, il y a au moins deux causes dans lesquelles les tribunaux ont été persuadés d'autoriser une « exception constitutionnelle » aux lois relatives à la marijuana pour des motifs médicaux : R. v. Parker (1997), 12 C.R. (5th) 251 (C.P. Ont.); Wakeford c. Canada (1999), 173 D.L.R. (4th) 726 (C.S. Ont.). Il reste à savoir si le raisonnement élaboré dans ces causes peut être étendu de façon à protéger le droit à la liberté de religion.

[28] La Couronne se préoccupe, et à bon droit, de l'absence d'une grille factuelle pour la détermination des questions constitutionnelles soulevées par les demandeurs, comme celle qui existerait si cette contestation constitutionnelle était soulevée dans le contexte d'une poursuite intentée en vertu des lois contestées. Toutefois, il y a des allégations factuelles dans la déclaration modifiée qui se rapportent précisément aux demandeurs et à leur religion, et qui concernent les propriétés de la marijuana et d'autres substances qui y sont désignées. La preuve quant à la véracitéde ces allégations sera faite à l'instruction ou peut-être à ltape des interrogatoires préalables. Si la preuve des demandeurs est insuffisante pour établir les faits allégués, leur demande pourrait être rejetée. Mais il n'y a pas de raison de radier la déclaration à la présente étape.

[29]    La requête en radiation de la déclaration modifiée présentée par la Couronne est rejetée. Les coûts de la requête suivront l'issue de la cause.                                                                      [Certaines citations omises; paragraphe 28 non souligné dans l'original.]


                          COUR FÉDÉRALE DU CANADA

                       AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

DOSSIER :                     T-1805-98

INTITULÉ :                    LE RÉVÉREND FRÈRE WALTER A.TUCKER

ET LE RÉVÉREND FRÈRE MICHAEL J. BALDASARO

c.

SA MAJESTÉ LA REINE

LIEU DE L'AUDIENCE :                                HAMILTON (ONTARIO)

DATE DE L'AUDIENCE :                              LE 23 JUIN 2003

MOTIFS DE L'ORDONNANCE :              LE JUGE GIBSON

DATE DE L'ORDONNANCE :                     LE 29 AOÛT 2003

COMPARUTIONS :

LE RÉVÉREND FRÈRE WALTER A. TUCKER POUR LES DEMANDEURS

LE RÉVÉREND FRÈRE MICHAEL J.BALDASARO

ANDREA HORTON                              POUR LA DÉFENDERESSE

JAMES GORHAM

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

LE RÉVÉREND FRÈRE WALTER A.TUCKER POUR LES DEMANDEURS

LE RÉVÉREND FRÈRE MICHAEL J.BALDASARO

PHOENIX MISSION OF GOD

L'ASSEMBLÉE DE L'ÉGLISE DE L'UNIVERS

535, RUE BARTON EST

HAMILTON (ONTARIO)

L8L 2Y9


MORRIS ROSENBERG                        POUR LA DÉFENDERESSE

SOUS-PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA

MINISTÈRE DE LA JUSTICE

BUREAU RÉGIONAL DE L'ONTARIO

LA TOUR DE LA BOURSE

130, RUE KING OUEST

BUREAU 3400, C.P. 36

TORONTO (ONTARIO)

M5X 1K6



[1]         La partie I de la Loi constitutionnelle de 1982 (L.R.C. (1985), annexe II, n ° 44), édictée comme l'annexe B de la Loi de 1982 sur le Canada, 1982, ch. 11 (R.-U.).

[2]         L.C. 1996, ch. 19.

[3]         (1999), 180 F.T.R. 263.

[4]         Se reporter à Froom c. Canada (Ministre de la Justice) [2003] A.C.F. n ° 448 (C.A.).

[5]         [1999] A.C.F. n ° 106 (C.F. 1re inst.).

[6]         Transcription, aux pages 34 et suivantes.

[7]         [2003] A.C.F. n ° 593 (Q.L.), (C.F. 1re inst.), affaire qu'on ne m'a pas citée; appel interjeté le 17 avril 2003, dossier de la Cour A-188-03.

[8]       Témoignage cité dans le mémoire des faits et du droit de la défenderesse (onglets 1 à 30), second de deux volumes (le témoignage), onglet 19, pages 17 et 18.

[9]       Témoignage, onglet 19, pages 16 et 17.

[10]      Témoignage, onglet 19, pages 10 et 11.

[11]      Témoignage, onglet 21, page 134, questions 461 et 462.

[12]      Témoignage, onglet 21, pages 135 et 136, questions 467 à 472.

[13]      Témoignage, onglet 21, page 149, questions 549 à 551.

[14]      Témoignage, onglet 29, pages 189 et 190, questions 718 à 720.

[15]      Témoignage, onglet 29, page 202, question 754.

[16]      Témoignage, onglet 29, pages 202 et 203, questions 755 à 757.

[17]      Témoignage, onglet 29, pages 210 et 211, questions 786 à 789.

[18]      Témoignage onglet 29, pages 216 à 218, questions 808 à 813.

[19]       [1986] 2 R.C.S. 713, à la page 759.

[20]       (1984), 48 O.R. (2d) 395, à la page 423 (C.A. Ont.).

[21]       [1995] 1 R.C.S. 315, à la page 435.

[22]       [2001] 1 R.C.S. 772, à la page 814.

[23]       (2000), 49 O.R. (3d) 481.

[24]       2003 C.F. 927, le 29 juillet 2003 (C.F.), au paragraphe 4; décision qu'on ne m'a pas citée.


 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.