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Date : 19980708


Dossier : T-2432-97

OTTAWA (Ontario), le 8 juillet 1998

EN PRÉSENCE DU JUGE MacKAY

         AFFAIRE INTÉRESSANT un appel fondé sur l'article 56 de la Loi sur les marques de commerce, L.R.C. (1985), ch. T-13, à l'égard d'une décision en date du 10 septembre 1997 par laquelle le registraire a rejeté l'opposition de Garbo Creations Inc. à une demande de marque de commerce canadienne no 708,840 relativement à la marque GRETA GARBO et au dessin déposés par Harriet Brown & Company Inc.                 

ENTRE :

     GARBO GROUP INC.,

     appelante,

     et

     HARRIET BROWN & COMPANY INC. et

     LE REGISTRAIRE DES MARQUES DE COMMERCE,

     intimés.

     ORDONNANCE

     VU la requête en date du 11 juin 1998 que l'intimée Harriet Brown & Company Inc. a présentée en vue d'obtenir

     1.      une ordonnance infirmant l'ordonnance modifiée du protonotaire adjoint Peter A.K. Giles en date du 1er juin 1998, dans la mesure où cette ordonnance permet le contre-interrogatoire de Mme Joan Harting Barham à l'égard de son affidavit en date du 22 janvier 1998 et le contre-interrogatoire de M. Kevin O'Neil à l'égard de son affidavit en date du 28 janvier 1998;
     2.      toute autre réparation que la Cour juge indiquée;
     3.      les dépens afférents à la présente requête;

     APRÈS avoir entendu les deux parties à Toronto le 22 juin 1998 et différé sa décision et après avoir examiné les arguments alors présentés,

     LA COUR STATUE COMME SUIT :

     1.      La requête est rejetée, mais le délai supplémentaire accordé par l'ordonnance modifiée du protonotaire adjoint Giles en date du 1er juin 1998 commencera à courir à compter de la date de la présente ordonnance.

                             W. Andrew MacKay

                                     Juge

Traduction certifiée conforme

C. Bélanger, LL.L.


Date : 19980708


Dossier : T-2432-97

         AFFAIRE INTÉRESSANT un appel fondé sur l'article 56 de la Loi sur les marques de commerce, L.R.C. (1985), ch. T-13, à l'égard d'une décision en date du 10 septembre 1997 par laquelle le registraire a rejeté l'opposition de Garbo Creations Inc. à une demande de marque de commerce canadienne no 708,840 relativement à la marque GRETA GARBO et au dessin déposé par Harriet Brown & Company Inc.                 

ENTRE :

     GARBO GROUP INC.,

     appelante,

     et

     HARRIET BROWN & COMPANY INC. et

     LE REGISTRAIRE DES MARQUES DE COMMERCE,

     intimés.

     MOTIFS DE L'ORDONNANCE

LE JUGE MacKAY

[1]      L'intimée Harriet Brown & Company Inc. (Harriet Brown) demande une ordonnance infirmant l'ordonnance modifiée du protonotaire adjoint Giles en date du 1er juin 1998, dans la mesure où cette ordonnance permet le contre-interrogatoire relatif à l'affidavit de Mme Joan Harting Barham en date du 22 janvier 1998 et à l'affidavit de Kevin O'Neil en date du 28 janvier 1998.

[2]      La demande est formulée dans le contexte de procédures préparatoires à l'audition de l'appel que l'appelante a interjeté à l'égard d'une décision en date du 10 septembre 1997 par laquelle la Commission des oppositions des marques de commerce a rejeté l'opposition de l'appelante à la demande d'enregistrement de marques de commerce de l'intimée Harriet Brown. L'appel de Garbo a été engagé au moyen d'un avis qui a été déposé le 10 novembre 1997 en même temps que des affidavits à l'appui.

[3]      En réponse à l'appel, Harriet Brown a déposé et signifié sa réponse ainsi que des affidavits de Mme Joan Harting Barham et de M. Kevin O'Neil et a également déposé plus tard, avec le consentement de l'appelante, des affidavits de Marc André Huot et de Scott Reisfield. Ces affidavits ont été signifiés et déposés à la fin de janvier 1998.

[4]      En février 1998, l'avocat de Garbo a fait connaître son intention de déposer trois autres affidavits de réponse; le 27 février 1998, il a signifié ces affidavits et demandé le consentement relatif à leur dépôt, en plus d'indiquer son intention de présenter une requête visant à obtenir l'autorisation de contre-interroger Mme Harting Barham et M. O'Neil au sujet de leurs affidavits.

[5]      Lorsque l'appel de Garbo a été engagé et jusqu'au 25 avril 1998, les Règles de la Cour fédérale alors en vigueur permettaient le contre-interrogatoire relatif aux affidavits dans le cadre d'un appel en matière de marques de commerce uniquement suivant l'autorisation de la Cour (alors la règle 704(6)). En pratique, l'autorisation se limitait aux cas où l'affidavit était ambigu et le contre-interrogatoire devait porter uniquement sur la question jugée ambiguë. De plus, aucun contre-interrogatoire ne pouvait être entrepris avant le dépôt de tous les affidavits de la partie qui demandait l'autorisation de contre-interroger. Aucun délai ne s'appliquait à la demande d'autorisation en question.

[6]      Les 12 et 27 mars 1998, l'avocat de Garbo a écrit à l'avocat de Harriet Brown pour lui redemander s'il consentait à la production des affidavits de réponse supplémentaires, mais celui-ci a répondu par téléphone à la fin du mois de mars qu'il n'avait pas encore obtenu de directives de sa cliente au sujet du consentement demandé. Le 13 avril, l'avocat de Garbo a réécrit à l'avocat de Harriet Brown au sujet du consentement en lui demandant spécifiquement de ne pas invoquer le retard en réponse à toute demande d'autorisation de contre-interroger qui devrait être présentée, au besoin, lorsque les Règles de la Cour fédérale (1998) entreraient en vigueur le 25 avril 1998. Le 27 avril, après l'entrée en vigueur des nouvelles Règles, l'avocat de Harriett Brown a fait savoir à l'avocat de Garbo que sa cliente refusait de consentir au dépôt des affidavits supplémentaires.

[7]      Par la suite, le 11 mai, Garbo a déposé une requête devant être présentée de consentement, le 25 mai 1998, en vue d'obtenir une ordonnance l'autorisant à produire les trois affidavits supplémentaires au dépôt desquels Harriet Brown avait finalement refusé de consentir le 27 avril 1998, ainsi qu'une ordonnance lui accordant un délai supplémentaire pour contre-interroger Mme Harting Barham et M. O'Neil au sujet de leurs affidavits.

[8]      Les Règles qui sont entrées en vigueur le 25 avril 1998 n'énoncent aucune restriction quant au droit de contre-interroger l'auteur d'un affidavit déposé dans le cadre d'un appel relatif à une décision de la Commission des oppositions des marques de commerce. La règle 83 permet plutôt le contre-interrogatoire, tant dans ces cas que dans le cadre de toute autre requête, sans qu'il soit nécessaire d'obtenir une autorisation, pourvu qu'il ait lieu dans les 20 jours suivant le dépôt de l'affidavit concerné. Voici le texte de la nouvelle règle :

             

83. A party to a motion or application may cross-examine the deponent of an affidavit served by an adverse party to the motion or application.

83. Une partie peut contre-interroger l'auteur d'un affidavit qui a été signifié par une partie adverse dans le cadre d'une requête ou d'une demande.

[9]      Les Règles de 1998 renferment également d'autres dispositions pertinentes :

8. (1) On motion, the Court may extend or abridge a period provided by these Rules or fixed by an order.

(2) A motion for an extension of time may be brought before or after the end of the period sought to be extended.

8. (1) La Cour peut, sur requête, proroger ou abréger tout délai prévu par les présentes règles ou fixé par ordonnance.

(2) La requête visant la prorogation d'un délai peut être présentée avant ou après l'expiration du délai.


308. Cross-examination on affidavits must be completed by all parties within 20 days after the filing of the respondent's affidavits or the expiration of the time for doing so, whichever is the earlier.

308. Toute partie qui désire contre-interroger l'auteur d'un affidavit le fait dans les 20 jours suivant le dépôt des affidavits du défendeur ou dans les 20 jours suivant l'expiration du délai prévu à cette fin, selon celui de ces délais qui est antérieur à l'autre.


501. (1) Subject to subsection (2), these Rules apply to all proceedings, including further steps taken in proceedings that were commenced before the coming into force of these Rules.

501. (1) Sous réserve du paragraphe (2), les présentes règles s'appliquent à toutes les instances, y compris les procédures engagées après leur entrée en vigueur dans le cadre d'instances introduites avant ce moment.

[10]      La requête de l'appelante a été présentée devant le protonotaire adjoint Giles qui, après avoir entendu les avocats, a décidé que Garbo serait autorisée à contre-interroger Mme Harting Barham et M. O'Neil au sujet de leurs affidavits. Dans son ordonnance modifiée en date du 1er juin 1998, M. Giles a statué comme suit :

     [TRADUCTION] ORDONNANCE : En raison de l'ambiguïté évidente que comporte l'affidavit de Kevin O'Neil, il est nécessaire d'obtenir des éclaircissements. Selon l'ancienne procédure, le contre-interrogatoire ne pouvait avoir lieu que suivant une autorisation et il appert de la jurisprudence qu'il était préférable d'obtenir les éclaircissements au moyen d'un affidavit supplémentaire plutôt que d'un contre-interrogatoire. Selon les nouvelles Règles, le contre-interrogatoire est permis de plein droit, pourvu qu'il ait lieu dans le délai prescrit, et les affidavits supplémentaires ne peuvent être déposés que suivant l'obtention d'une autorisation. Dans la présente affaire, le délai relatif au contre-interrogatoire a expiré.         
         En ce qui a trait à l'obtention d'éclaircissements, il me semble que les Règles visent à privilégier le contre-interrogatoire plutôt que le dépôt d'un affidavit supplémentaire. Par conséquent, le délai relatif au contre-interrogatoire devrait être prorogé et la requête en vue d'obtenir l'autorisation de déposer des affidavits est rejetée. Le délai relatif au contre-interrogatoire concernant les affidavits des intimés est prorogé de 21 jours ou de la période dont les avocats pourront convenir, pourvu qu'elle ne dépasse pas 60 jours.         

Les questions en litige

[11]      L'avocat de Harriet Brown soutient que M. Giles a commis une erreur de droit en appliquant un critère qui ne convenait pas pour décider si une prorogation de délai devrait être accordée. Selon l'avocat, M. Giles se serait fondé sur le critère applicable d'après les anciennes Règles, soit la question de savoir si l'un des affidavits en litige était ambigu. Ayant conclu que l'affidavit de M. O'Neil était ambigu, argument que Garbo n'avait pas invoqué dans sa requête, mais n'ayant relevé aucune ambiguïté dans l'affidavit de Mme Harting Barham, il a permis le contre-interrogatoire à l'égard des deux affidavits sans imposer la restriction applicable aux termes des anciennes Règles quant à la portée dudit contre-interrogatoire.

[12]      Au cours des plaidoiries, j'ai demandé aux avocats quel était le critère à appliquer à l'égard de la prorogation de délai, s'agissait d'une demande d'autorisation de contre-interroger. J'ai demandé aux avocats d'examiner l'applicabilité du critère établi dans l'arrêt Grewal c. Ministre de l'Emploi et de l'Immigration, [1985] 2 C.F. 263 (C.A.F.), et je les remercie des commentaires utiles qu'ils ont présentés.

[13]      À mon avis, les nouvelles Règles s'appliquent à la présente demande, comme elles s'appliquaient à la requête en prorogation de délai dont M. Giles était saisie, conformément à la règle 501(1).

[14]      Selon les Règles de 1998, une prorogation de délai était nécessaire en l'espèce, étant donné que le délai de 20 jours prescrit à l'égard du contre-interrogatoire autorisé de plein droit au sujet des affidavits était expiré depuis longtemps lorsque Garbo a déposé sa requête le 11 mai. Conformément à la règle 308, ce délai a commencé à courir à compter de la date du dépôt de l'affidavit en question. La restriction qui s'appliquait selon l'ancienne Règle 704(6) quant à la portée du contre-interrogatoire, soit les questions jugées ambiguës, ne s'applique plus à mon avis à l'interrogatoire portant sur les affidavits déposés en l'espèce. Comme c'est le cas pour toute autre requête, le contre-interrogatoire portant sur l'affidavit n'est pas restreint par les Règles.

[15]      La seule véritable question que le protonotaire adjoint devait trancher à l'égard du contre-interrogatoire portant sur les affidavits en litige était celle de savoir s'il y avait lieu d'accorder une prorogation de délai aux fins de cet interrogatoire. Le critère applicable n'est pas la question de savoir si l'un des affidavits ou les deux étaient ambigus en partie ou s'il y avait lieu de privilégier le contre-interrogatoire plutôt que le dépôt d'affidavits supplémentaires selon les anciennes Règles ou les nouvelles. Si l'un ou l'autre de ces facteurs constitue le fondement de l'ordonnance modifiée du protonotaire adjoint Giles, les motifs de cette ordonnance sont alors erronés.

[16]      Toutefois, le débat n'est pas clos pour autant. Si j'ai bien compris, le critère applicable en l'espèce est celui qui concerne la prorogation du délai relatif à d'autres questions et qui a été établi dans l'arrêt Grewal précité. À mon avis, compte tenu des faits établis en l'espèce, il est évident que Garbo avait l'intention de procéder à un contre-interrogatoire au sujet des affidavits en question, mais qu'elle ne pouvait ainsi procéder sans obtenir d'autorisation, comme elle était tenue de le faire, avant le 25 avril 1998, avant d'avoir déposé toute sa preuve. Elle a cherché à déposer cette preuve avec le consentement de la partie adverse, ce qui lui a finalement été refusé. Garbo a ensuite demandé une prorogation du délai relatif au contre-interrogatoire ainsi que l'autorisation de déposer des affidavits supplémentaires.

[17]      Dans les circonstances, on ne peut, en toute équité, dire que Garbo a tardé à présenter sa demande lorsqu'il est devenu évident que la preuve qu'elle souhaitait déposer ne serait pas produite sans ordonnance de la Cour.

[18]      En dernier lieu, la prorogation de délai ne nuit aucunement à mon sens à Harriet Brown. Celle-ci soutient qu'elle subira un préjudice si une ordonnance permet maintenant un contre-interrogatoire illimité plutôt qu'un interrogatoire limité à la question ambiguë que M. Giles avait décelée dans l'affidavit de M. O'Neil, mais il ne s'agit pas d'un préjudice au sens habituel du mot. Cette différence découle uniquement de l'application des nouvelles Règles plutôt que des anciennes. Harriet Brown se trouve dans la même position que toute autre partie touchée par l'application des nouvelles Règles. Il ne s'agit pas d'un préjudice au sens juridique du mot. Les Règles permettent désormais d'obtenir une prorogation du délai relatif au contre-interrogatoire dans les cas opportuns.

[19]      Par conséquent, j'estime que, même si le motif sous-jacent à l'ordonnance modifiée que le protonotaire adjoint Giles a rendue le 1er juin 1998 est peut-être erroné, dans la mesure où il repose sur l'existence d'une ambiguïté dans l'un des affidavits en question ou dans les deux, le résultat de son ordonnance ne peut être considéré comme une erreur commise dans le cadre de l'exercice du pouvoir discrétionnaire dont il disposait pour accorder une prorogation du délai relatif au contre-interrogatoire. Le critère applicable à l'exercice de ce pouvoir discrétionnaire est énoncé dans l'arrêt Grewal, précité. L'application de ce critère ne permet pas de dire que l'ordonnance en question est erronée en ce qui a trait à la prorogation de délai accordée.

[20]      Sous réserve uniquement d'une nouvelle prorogation du délai d'application de cette ordonnance modifiée de façon que le délai supplémentaire commence à courir à compter de la date de la présente ordonnance, l'appel interjeté à l'égard de l'ordonnance modifiée est rejeté.

                             W. Andrew MacKay

                                     Juge

OTTAWA (Ontario)

Le 8 juillet 1998

Traduction certifiée conforme

C. Bélanger, LL.L.

     COUR FÉDÉRALE DU CANADA

     SECTION DE PREMIÈRE INSTANCE

     AVOCATS ET PROCUREURS INSCRITS AU DOSSIER

No DU GREFFE :              T-2432-97

INTITULÉ DE LA CAUSE :      Garbo Group Inc. c. Harriet Brown & Company Inc. et al

LIEU DE L'AUDIENCE :          Toronto (Ontario)

DATE DE L'AUDIENCE :      1er juin 1998

MOTIFS DE L'ORDONNANCE DU JUGE MacKAY

EN DATE DU :              8 juin 1998

ONT COMPARU :

Me Keri Johnston              POUR L'APPELANTE

Me C. Michelle Nelles

Me Mark Evans              POUR L'INTIMÉE

                    

PROCUREURS INSCRITS AU DOSSIER :

Malcolm Johnston & Associates

Toronto (Ontario)

Dimock Stratton, Clarizio

Toronto (Ontario)              POUR L'APPELANTE

Smart & Biggar

Toronto (Ontario)              POUR L'INTIMÉE                     

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