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Date : 19990416


Dossier : T-1219-98

Entre :


DANS L'AFFAIRE DU CODE CANADIEN DU TRAVAIL,

L.R.C. (1985), ch. L-2, tel que modifié

-et-

ET DANS L'AFFAIRE D'un ordre de paiement émis le 12 décembre 1997

à Raymond Laliberté, 5405, avenue Trudeau, Saint-Hyacinthe (Québec), J2S 7W9, administrateur de Transport Damaco International Ltée.,

en vertu du paragraphe 251.1 (1) du Code canadien du travail,

L.R.C. (1985), ch. L-2 tel que modifié et

concernant monsieur Pierre Beauregard et al

-et-

ET DANS L'AFFAIRE du dépôt à la Cour fédérale dudit ordre

de paiement en vertu du paragraphe 251.15(1) du Code canadien du travail


CONTRE


RAYMOND LALIBERTÉ

     Débiteur judiciaire

    

     ET

     LA PROCUREURE GÉNÉRALE DU CANADA

     Intervenante

     MOTIFS DE L"ORDONNANCE

LE JUGE TREMBLAY-LAMER :

[1]      Le débiteur judiciaire demande à la Cour de suspendre toutes les mesures d"exécution pouvant être prises contre lui en raison de l"enregistrement de l"ordre de paiement et ce, en attendant que la question de la constitutionnalité du système de recouvrement des salaires impayés soit décidée par la Cour.

[2]      Les critères applicables dans un tel cas sont ceux de l"arrêt R.J.R. MacDonald1 soit la question sérieuse, le préjudice irréparable et la balance des inconvénients. Prenons pour acquis, sans toutefois décider de la question, qu"il y ait une question sérieuse à trancher; la requête en suspension ne peut réussir puisque le débiteur judiciaire ne m"a pas convaincue que la balance des inconvénients penche en sa faveur.

[3]      La partie III du Code Canadien du travail2 a instauré un mécanisme administratif qui permet de contraindre les employeurs et les administrateurs de ces derniers à payer les salaires et autres indemnités qu"ils doivent à leurs employés. C"est donc en vertu de la partie III du Code que M. Laliberté fait face à des mesures d"exécution et ce, en tant qu"administrateur de jure . Ainsi, M. Laliberté conteste la constitutionalité des articles 251.11(2) et 251.18 pour lesquels il désire obtenir un jugement déclaratoire.

[4]      Le débiteur judiciaire n"allègue en aucun cas que les sommes ne soient pas dues aux travailleurs mais plutôt qu"elles devraient être payées par les administrateurs de facto plutôt que par le débiteur judiciaire, administrateur de jure.

[5]      Toutefois, si la suspension demandée était accordée, les travailleurs concernés devraient attendre qu"une décision finale soit rendue quant à la constitutionnalité des dispositions législatives pour recevoir les sommes auxquelles ils ont droit.

[6]      De plus, l"impact d"une telle décision dépasserait la situation personnelle immédiate du débiteur judiciaire puisqu"il n"y aurait aucun motif de ne pas surseoir à tous les ordres de paiement déjà donnés et à venir à l"égard de tout autre débiteur judiciaire en attendant une décision sur cette question.

[7]      Tel que je l"avais indiqué dans l"affaire Delisle3, je conclus de nouveau que l"intérêt public ne justifie pas de paralyser un système législatif en place au simple motif qu"il pourrait faire l"objet, éventuellement, d"une déclaration d"inconstitutionnalité.4

[8]      Quant au préjudice irréparable, bien que ma décision repose sur la balance des inconvénients, je note que la preuve au dossier à cet égard n"est pas concluante.

[9]      En effet, le débiteur judiciaire allègue qu"il pourrait être l"objet d"interrogatoires sur ses biens et d"une saisie éventuelle. Cependant, cette allégation est hypothétique puisqu"il n"y a pas de preuve au dossier que ce dernier possède des biens. Par ailleurs, comme dans l"affaire Côté c. Smith5, nous devons tenir compte de la possibilité que l"un des intimés décide de faire exécuter une saisie de biens contre l"autre administrateur.

[10]      En tout état de cause, la jurisprudence a établi que la preuve du tort irréparable doit être claire et non spéculative.6

[11]      Il n"y a pas une telle preuve dans le présent dossier.

[12]      En conséquence, la requête visant la suspension des mesures d"exécution est rejetée.

     "Danièle Tremblay-Lamer"

                                     Juge

OTTAWA (ONTARIO)

Le 16 avril 1999.

__________________

1      RJR - MacDonald Inc. v. Canada (Attorney General), [1994] 1 R.C.S. 311.

2      S.R., ch. L-1.

3      Gaétan Délisle c. Procureur général du Canada (le 20 février 1997), T-258-97 (C.F. 1ère inst.).

4      Manitoba (Procureur général) c. Metropolitan Stores Ltd., [1987] 1 R.S.C. 110.

5      Coté c. Smith (le 7 avril 1998), T-587-98 (C.F. 1ère inst.).

6      Centre Ice Ltd. c. National Hockey League (1994), 53 C.P.R. (3d) 34 à la p. 52 (C.A.F.).

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