Date : 20190410
Dossier : IMM‑4573‑18
Référence : 2019 CF 445
[TRADUCTION FRANÇAISE CERTIFIÉE, NON RÉVISÉE]
Toronto (Ontario), le 10 avril 2019
En présence de madame la juge Heneghan
ENTRE :
|
RENZ MARION MANINGAS
|
demandeur
|
et
|
LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ
ET DE L’IMMIGRATION
|
défendeur
|
JUGEMENT ET MOTIFS
[1]
Monsieur Renz Marion Maningas (le « demandeur »
) sollicite le contrôle judiciaire de la décision de la Section d’appel de l’immigration (la « SAI »
) de la Commission de l’immigration et du statut de réfugié du Canada (la « CISR »
), par laquelle sa demande pour que soient prises des mesures spéciales fondées sur des motifs d’ordre humanitaire a été rejetée.
[2]
Le demandeur est un citoyen des Philippines. Il est entré au Canada en septembre 2008 en tant que résident permanent à la suite de son mariage avec une citoyenne canadienne, mariage qui s’est soldé par un divorce en mars 2009.
[3]
En janvier 2015, le demandeur a fait l’objet d’un rapport d’interdiction de territoire pour fausses déclarations, particulièrement en ce qui concerne son admission au Canada dans le cadre d’une demande de parrainage d’un époux. Une mesure d’expulsion a donc été prise le 20 mars 2017 contre le demandeur par la Section de l’immigration de la CISR.
[4]
Le demandeur a interjeté appel à la SAI. Il n’a pas contesté la légalité de la décision de la Section de l’immigration, mais a plutôt demandé que la SAI exerce son pouvoir discrétionnaire en matière de motifs d’ordre humanitaire. Cette compétence est conférée par l’alinéa 67(1)c) de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, LC 2001, ch 27, qui est rédigé comme suit :
|
|
|
|
|
|
[5]
Dans la décision qu’elle a rendue le 29 août 2018, la SAI a rejeté l’appel du demandeur. Elle a conclu que les fausses déclarations sur son mariage étaient très graves et que, après examen des facteurs présentés dans la décision Ribic c Canada (Ministre de l’Emploi et de l’Immigration) [1985] DSAI no 4, il n’y avait pas suffisamment de motifs justifiant la prise de mesures spéciales.
[6]
La décision de la SAI est susceptible de contrôle en fonction de la norme de la décision raisonnable. Selon l’arrêt Dunsmuir c Nouveau‑Brunswick [2008] 1 RCS 190, la norme de la décision raisonnable exige que la décision soit justifiable, transparente et intelligible, et qu’elle appartienne aux issues possibles et acceptables pouvant se justifier au regard des faits et du droit.
[7]
Le demandeur soutient maintenant que la décision est déraisonnable pour plusieurs raisons, notamment parce que la SAI n’a pas apprécié les éléments de preuve présentés et qu’elle n’a pas tenu compte de l’intérêt supérieur de ses enfants, qui vivent aux Philippines avec leur mère, dans la maison des parents du demandeur.
[8]
Le ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration soutient que la décision de la SAI satisfait à la norme de la décision raisonnable.
[9]
Je ne suis pas d’accord.
[10]
J’accepte les observations du demandeur selon lesquelles la SAI a déraisonnablement omis d’aborder la question des difficultés auxquelles sa famille et lui étaient exposés. Plutôt que d’adopter une approche globale, la SAI a apparemment fait une évaluation limitée en se concentrant sur les difficultés immédiates auxquelles ces derniers feraient face si le demandeur devait être renvoyé.
[11]
Le fait de n’accorder que peu d’importance aux éventuelles difficultés a été considéré comme une erreur susceptible de contrôle dans la décision Shallow c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) (2012), 410 FTR 314.
[12]
À mon avis, la SAI a interprété de façon tout aussi restrictive l’intérêt supérieur des enfants du demandeur, et elle n’a pas suivi les directives de la Cour suprême du Canada dans l’arrêt Kanthasamy c Canada (Citoyenneté et Immigration), [2015] 3 RCS 909, contrairement à ce qu’a fait la Cour dans la décision Ndlovu c Canada (Immigration, Réfugiés et Citoyenneté), 2017 CF 878.
[13]
Il n’est pas nécessaire d’examiner les autres arguments du demandeur. Je suis convaincue qu’il a démontré l’existence d’erreurs de droit qui justifient l’intervention de la Cour.
[14]
Par conséquent, la présente demande de contrôle judiciaire est accueillie, la décision de la SAI est annulée et l’affaire est renvoyée à un tribunal de la SAI différemment constitué pour nouvel examen. Il n’y a aucune question à certifier.
JUGEMENT dans le dossier IMM-4573-18
LA COUR STATUE que la demande de contrôle judiciaire est accueillie. La décision de la Section d’appel de l’immigration de la Commission de l’immigration et du statut de réfugié du Canada est annulée, et l’affaire est renvoyée à un tribunal de la Section d’appel de l’immigration différemment constitué pour nouvel examen. Il n’y a aucune question à certifier.
« E. Heneghan »
Juge
Traduction certifiée conforme
Ce 16e jour d’avril 2019.
Karine Lambert, traductrice
COUR FÉDÉRALE
AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER
DOSSIER :
|
IMM‑4573‑18
|
INTITULÉ :
|
RENZ MARION MANINGAS c LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION
|
LIEU DE L’AUDIENCE :
|
TORONTO (ONTARIO)
|
DATE DE L’AUDIENCE :
|
LE 8 AVRIL 2019
|
JUGeMENT et motifs :
|
LA JUGE HENEGHAN
|
DATE DES MOTIFS :
|
LE 10 AVRIL 2019
|
COMPARUTIONS :
Natalie Domazet
|
POUR LE DEMANDEUR
|
Nimanthika Kaneira
|
POUR LE DÉFENDEUR
|
AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :
Mamann, Sandaluk & Kingwell LLP
Avocats
Toronto (Ontario)
|
POUR LE DEMANDEUR
|
Procureur général du Canada
Toronto (Ontario)
|
POUR LE DÉFENDEUR
|