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Date : 20190408


Dossier : IMM-3171-18

Référence : 2019 CF 423

[TRADUCTION FRANÇAISE CERTIFIÉE, NON RÉVISÉE]

Ottawa (Ontario), le 8 avril 2019

En présence de monsieur le juge Russell

ENTRE :

LEENABEN KIRITBHAI MAHIDA

demanderesse

et

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

défendeur

JUGEMENT ET MOTIFS

I.  INTRODUCTION

[1]  Il s’agit d’une demande de contrôle judiciaire présentée en vertu du paragraphe 72(1) de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, LC 2001, c 27 à l’égard de la décision par laquelle un agent d’immigration du consulat général du Canada à Bangalore, en Inde [l’agent] a rejeté, le 6 juin 2018 [la décision], la demande de permis d’études de la demanderesse.

II.  CONTEXTE

[2]  La demanderesse, Leenaben Kiritbhai Mahida, est une citoyenne de l’Inde.

[3]  La demanderesse est titulaire d’une maîtrise en administration des affaires qu’elle a obtenue de l’Université Sikkim Manipal en Inde. Elle a présenté une demande d’admission et a été admise à l’Université du Nord de la Colombie‑Britannique [UNBC] dans un programme de maîtrise en administration des affaires pour le mois d’août 2018. Elle a demandé un permis d’études canadien à trois reprises et chaque fois on le lui a refusé. C’est le dernier rejet qui est à l’origine de la présente demande de contrôle judiciaire.

III.  DÉCISION FAISANT L’OBJET DU CONTRÔLE

[4]  L’agent a rejeté la demande de permis d’études de la demanderesse le 6 juin 2018. Compte tenu du but de sa visite, de ses biens personnels et de sa situation financière, l’agent n’était pas convaincu que la demanderesse quitterait le Canada à la fin de son séjour. De plus, l’agent a estimé que les études que la demanderesse envisageait de faire n’étaient pas raisonnables.

[5]  Dans de brefs motifs, l’agent a souligné que la demanderesse avait récemment obtenu un emploi de gestion et qu’elle était déjà titulaire d’un diplôme en administration des affaires. L’agent a examiné la prétention de la demanderesse selon laquelle son premier diplôme avait été fait en ligne et n’était pas suffisant pour accéder à un poste de haut niveau en Inde, mais a fait remarquer que le programme de l’UNBC semblait avoir un contenu similaire. L’agent a décidé qu’il serait illogique que la demanderesse suive un programme coûteux au Canada alors qu’il existait des programmes semblables en Inde, d’autant plus que la demanderesse devrait quitter son emploi pour venir étudier au Canada. L’agent a estimé qu’il y avait une contradiction dans l’affirmation de la demanderesse selon laquelle elle souhaitait vivre au Canada, mais aimerait également travailler dans l’immobilier en Inde.

[6]  L’agent a tenu compte de la somme que la demanderesse avait payée à l’UNBC et a conclu qu’elle avait seulement fait un dépôt et n’avait pas encore payé les frais de scolarité. De plus, l’agent a souligné que la demanderesse subvient aux besoins de ses parents. Son père est retraité et reçoit une pension, tandis que sa mère ne travaille pas à l’extérieur du foyer. L’agent a reconnu que la demanderesse semblait satisfaire aux exigences linguistiques, mais a fait observer qu’elle avait obtenu des notes plutôt faibles.

[7]  L’agent a conclu que la demanderesse n’avait pas démontré qu’elle était une véritable étudiante. L’agent a en outre estimé que les raisons de demeurer au Canada pouvaient l’emporter sur les raisons de retourner en Inde. L’agent a conclu que l’objet de la demande ne semblait pas authentique et n’était pas convaincu que la demanderesse s’en irait à la fin de ses études. La demande de permis d’études a été rejetée.

IV.  QUESTIONS EN LITIGE

[8]  Les questions à trancher en l’espèce sont les suivantes :

  1. Quelle est la norme de contrôle applicable?

  2. La décision était‑elle raisonnable?

V.  NORME DE CONTRÔLE

[9]  Dans l’arrêt Dunsmuir c Nouveau‑Brunswick, 2008 CSC 9 [Dunsmuir], la Cour suprême du Canada a déclaré qu’il n’est pas toujours nécessaire de se livrer à une analyse relative à la norme de contrôle. Ainsi, lorsque la norme de contrôle qui s’applique à la question particulière dont la cour est saisie a été établie de manière satisfaisante par la jurisprudence, il est loisible à la cour chargée du contrôle de l’adopter. Ce n’est que lorsque cette démarche se révèle infructueuse ou que la jurisprudence semble devenue incompatible avec l’évolution récente du droit en matière de contrôle judiciaire que la cour procédera à l’examen des quatre facteurs de l’analyse relative à la norme de contrôle (Agraira c Canada (Ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile), 2013 CSC 36, au paragraphe 48).

[10]  L’examen d’une demande de permis d’études est assujetti à la norme de la décision raisonnable (Patel c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2009 CF 602, au paragraphe 28). L’analyse d’une demande de permis d’études par un agent est une décision hautement discrétionnaire qui commande un degré élevé de retenue de la part des cours de révision (Akomolafe c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2016 CF 472, au paragraphe 12 [Akomolafe]; Omijie c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2018 CF 878, au paragraphe 10 [Omijie]).

[11]  Lors du contrôle d’une décision suivant la norme du caractère raisonnable, l’analyse tient « à la justification de la décision, à la transparence et à l’intelligibilité du processus décisionnel, ainsi qu’à l’appartenance de la décision aux issues possibles acceptables pouvant se justifier au regard des faits et du droit ». (Voir Dunsmuir, précité, au paragraphe 47, et Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) c Khosa, 2009 CSC 12, au paragraphe 59). Autrement dit, la Cour ne doit intervenir que si la décision est déraisonnable, en ce sens qu’elle n’appartient pas « aux issues possibles acceptables pouvant se justifier au regard des faits et du droit ».

VI.  DISPOSITIONS LÉGISLATIVES

[12]  Les dispositions suivantes du Règlement sur l’immigration et la protection des réfugiés, DORS/2002‑227 sont pertinentes à l’égard de la présente demande de contrôle judiciaire :

Permis d’études

Study permits

216 (1) Sous réserve des paragraphes (2) et (3), l’agent délivre un permis d’études à l’étranger si, à l’issue d’un contrôle, les éléments suivants sont établis :

216 (1) Subject to subsections (2) and (3), an officer shall issue a study permit to a foreign national if, following an examination, it is established that the foreign national

a) l’étranger a demandé un permis d’études conformément à la présente partie;

(a) applied for it in accordance with this Part;

b) il quittera le Canada à la fin de la période de séjour qui lui est applicable au titre de la section 2 de la partie 9;

(b) will leave Canada by the end of the period authorized for their stay under Division 2 of Part 9;

c) il remplit les exigences prévues à la présente partie;

(c) meets the requirements of this Part;

d) il satisfait aux exigences prévues aux paragraphes 30(2) et (3); s’il est tenu de se soumettre à une visite médicale en application du paragraphe 16(2) de la Loi,

(d) meets the requirements of subsections 30(2) and (3), if they must submit to a medical examination under paragraph 16(2)(b) of the Act; and

e) il a été admis à un programme d’études par un établissement d’enseignement désigné.

(e) has been accepted to undertake a program of study at a designated learning institution.

VII.  ARGUMENTS

A.  Demanderesse

[13]  La demanderesse soutient que la décision est déraisonnable parce que l’agent n’a pas tenu compte de l’ensemble des renseignements fournis. Plus précisément, l’agent n’a pas pris en considération toutes les parties de la lettre détaillée qu’a rédigée la demanderesse. Cette lettre expliquait pourquoi le premier MBA de la demanderesse n’était pas suffisant pour le type d’emploi qu’elle souhaitait obtenir. Un MBA international permettrait à la demanderesse d’accéder à des postes de plus haut niveau. De plus, les annonces de recrutement présentées par la demanderesse démontraient que certains postes exigeaient un diplôme obtenu dans le cadre d’un programme de MBA à temps plein. Il était déraisonnable de la part de l’agent de ne pas tenir compte de cet élément de preuve. La documentation de l’UNBC démontrait que le programme de MBA a été conçu à l’intention des personnes comme la demanderesse qui ont une vaste expérience de travail. L’agent n’a pas tenu compte de ce renseignement.

[14]  La demanderesse affirme qu’il était également déraisonnable de la part de l’agent de mettre en doute la capacité de la demanderesse de terminer le programme à temps plein en raison de ses notes. Cette conclusion est illogique compte tenu des bons résultats en anglais de la demanderesse et de son admission au programme très concurrentiel du MBA de l’UNBC.

[15]  La demanderesse soutient en outre que l’agent a mal interprété la notion de double intention. Plus précisément, il était déraisonnable de la part de l’agent de conclure qu’il était problématique que la demanderesse veuille vivre au Canada de manière permanente tout en souhaitant aussi travailler dans le domaine immobilier en Inde. Il est acceptable que la personne qui demande un permis d’études ait deux intentions. L’agent a toutefois considéré les deux intentions de la demanderesse comme un motif de refus.

B.  Défendeur

[16]  Le défendeur souligne que la décision rendue à l’égard d’une demande de permis d’études commande un degré élevé de retenue de la part de la cour de révision.

[17]  Le défendeur soutient qu’il était loisible à l’agent de conclure que les études proposées n’étaient pas logiques. Si la demanderesse n’est pas d’accord avec cette conclusion, elle n’a pas démontré en quoi elle n’est pas raisonnable.

[18]  Le défendeur affirme que l’agent a en fait tenu compte de la lettre de la demanderesse. La demanderesse n’est tout simplement pas d’accord avec le poids que l’agent a accordé à cet élément de preuve. L’agent a également tenu compte de l’explication qu’a donnée la demanderesse de sa décision de s’inscrire à un MBA à l’UNBC, mais a conclu que rien n’étayait cette explication. L’agent a en outre tenu compte des exigences en matière d’études contenues dans les offres d’emplois, mais la demanderesse n’a pas démontré qu’il n’était pas possible de satisfaire à ces exigences en suivant un programme dans une région géographique moins éloignée que la Colombie‑Britannique.

[19]  Le défendeur affirme qu’il était loisible à l’agent de tenir compte des chances de succès de la demanderesse dans le programme de l’UNBC compte tenu de ses notes. Il était également loisible à l’agent de tenir compte des raisons pour lesquelles la demanderesse pouvait vouloir demeurer au Canada et de celles pouvant l’inciter à retourner en Inde.

[20]  Le défendeur souligne qu’il incombe à la demanderesse d’établir qu’elle quitterait le Canada à l’expiration de son visa d’étudiante. La demanderesse ne s’est pas acquittée de ce fardeau.

VIII.  ANALYSE

[21]  La Cour a reconnu que l’analyse d’une demande de permis d’études par un agent est hautement discrétionnaire et commande un degré élevé de retenue lors d’un contrôle judiciaire. Voir les décisions Akomolafe et Omijie, toutes deux précitées.

[22]  Nonobstant le degré de retenue dont il faut faire preuve à l’égard de la décision de l’agent en l’espèce, je dois convenir avec la demanderesse qu’elle est déraisonnable. La raison en est que, compte tenu de la preuve dont disposait l’agent, la décision est souvent inexacte et incompréhensible.

[23]  Par exemple, l’agent conclut ce qui suit :

[traduction] Rien ne lui permet d’affirmer qu’un diplôme obtenu en ligne n’est pas utile, pas plus qu’elle ne donne une explication suffisante de sa décision de faire un autre MBA à ce moment‑ci, par opposition à plusieurs années avant.

[24]  La demanderesse a en fait abordé ces questions d’une manière complète et cohérente dans sa demande et a également présenté des documents à l’appui sous la forme d’annonces de recrutement récentes concernant les postes qu’elle convoite. Plusieurs de ces annonces indiquent clairement qu’au moins une partie des postes de niveau supérieur auxquels aspire la demanderesse dans le domaine de l’immobilier exigent non seulement une vaste expérience de travail (ce que possède la demanderesse), mais aussi un MBA d’une école de commerce de niveau 1, effectué à temps plein.

[25]  La demanderesse n’a jamais dit que son MBA en ligne (obtenu en 2006) n’était pas utile, et elle donne une explication complète et tout à fait cohérente quant à savoir pourquoi elle doit faire un autre MBA à ce moment‑ci, par opposition à plusieurs années avant :

[traduction]

La raison pour laquelle je souhaite reprendre mes études après 12 ans tient au fait que, dans les premières années de ma vie professionnelle (il y a 8 à 12 ans), il n’était pas très difficile de trouver un emploi, car pour les postes de niveau inférieur, les diplômes internationaux ou les diplômes à temps plein n’étaient pas très en demande. Mais aujourd’hui, pour les postes de niveau supérieur, les titulaires de diplômes internationaux se voient accorder davantage de reconnaissance et de préférence. Le handicap que je rencontre présentement réside dans le fait que j’ai effectué ma maîtrise‑MBA dans le cadre d’un programme d’enseignement à distance, et non dans un collège régulier à temps plein. Mon baccalauréat‑BBA est un diplôme régulier à temps plein. Pour un poste supérieur, le MBA régulier à temps plein est exigé. En Inde, on accorde beaucoup d’importance au diplôme de maîtrise étranger et au rayonnement des études.

[…]

Depuis 12 ans, j’acquiers de nouvelles idées et stratégies visant à me renforcer dans mon domaine professionnel, mais à ce stade‑ci, et bien que j’aie accumulé une expérience de travail suffisante, parce que je suis titulaire d’un diplôme obtenu dans le cadre d’un programme d’enseignement à distance, j’ai même de la difficulté à trouver un emploi au sein d’organisations réputées et à obtenir l’augmentation de salaire que je mérite. Ma principale difficulté est d’obtenir une promotion, car plusieurs collègues et candidats sont déjà titulaires d’un diplôme international. Ceux qui sont munis d’un MBA international et qui comptent dix années ou plus d’expérience dans mon domaine et profil occupent des postes de directeur général ou de chef des ventes et gagnent le double de mon salaire, tandis que je suis directrice des ventes. De plus, l’immobilier indien s’adresse à une clientèle indienne fortunée et non résidente pour laquelle le rayonnement international constitue un avantage supplémentaire, ce qui prouve que les diplômes internationaux sont très en demande comparativement aux diplômes nationaux. Pour étayer cette affirmation, j’ai joint à la présente lettre des offres d’emploi qui exigent un MBA à temps plein d’un établissement international ou réputé seulement.

[26]  L’agent ne tient tout simplement pas compte de cet élément de preuve et n’explique pas en quoi l’explication est insuffisante. Il ressort très clairement de la demande que son MBA actuel lui a permis d’entrer dans le domaine où elle souhaite travailler, mais que ce diplôme n’est pas suffisant pour lui permettre de progresser. C’est pourquoi elle a décidé de poursuivre ses études maintenant, et pas avant. Il s’agit d’une explication détaillée et tout à fait logique, et la réponse de l’agent est dénuée de toute justification, transparence ou intelligibilité.

[27]  L’affirmation de l’agent selon laquelle la demanderesse n’a pas démontré qu’elle a [traduction« les aptitudes aux études nécessaires pour réussir des études au Canada » est tout aussi incompréhensible. Cette conclusion semble reposer sur des [traduction« relevés de notes antérieurs [qui] montrent des notes moyennes à faibles ». Toutefois, l’agent reconnaît que la demanderesse [traduction« semble satisfaire aux exigences linguistiques minimales ». Cette reconnaissance est sans doute exacte, mais elle fait abstraction du fait que la demanderesse possède des aptitudes langagières supérieures aux exigences minimales et ne lui en reconnaît pas le mérite. Mais l’erreur la plus fragrante tient au fait que l’agent se contente d’examiner des notes obtenues dans le cadre des études antérieures de la demanderesse qui ont été effectuées il y a plus de dix ans. L’agent fait totalement abstraction des documents justificatifs présentés relativement à cette question, notamment des imprimés de site Web pertinents et une lettre de la directrice du programme de MBA de l’UNBC, Cheryl Wallace.

[28]  Je souscris à l’appréciation de la demanderesse quant à la pertinence et à l’importance de ces éléments de preuve :

[traduction]

25.  Nous soutenons que, parmi les documents dont l’agent n’a pas dûment tenu compte, il y avait les imprimés tirés du site Web de l’Université du Nord de la Colombie‑Britannique, dans lesquels l’université indique clairement que le programme de MBA de l’UNBC fait l’objet d’une admission concurrentielle et que les candidats doivent satisfaire à des exigences d’admission générales comprenant notamment la possession d’[traduction] « une expérience de travail à temps plein d’au moins trois ans dans un poste professionnel ou de gestion » ainsi que la [traduction] « preuve d’une éducation postsecondaire, y compris les relevés de notes officiels des établissements d’enseignement postsecondaire fréquentés ». Les imprimés de site Web indiquent également que les fonctions liées aux postes susmentionnés doivent comporter [traduction] « un niveau de complexité moyen, ou plus élevé, sur le plan de la gestion du personnel et de l’information, comme l’analyse de budget et la coordination des activités de subalternes ».

26.  De plus, nous soutenons que l’agent n’a pas dûment tenu compte de la lettre dans laquelle la directrice du programme de MBA de l’UNBC, Cheryl Wallace, affirme ce qui suit :

[traduction] « La présente vise à confirmer que Leenaben Mahida a été admise au programme de MBA de l’UNBC pour le mois d’août 2018. Dans le cadre de l’examen de sa demande d’admission, nous avons tenu compte de son diplôme de MBA antérieur. Nous estimons que notre programme de MBA permettra à Leenaben d’obtenir des titres de compétences d’une université canadienne de recherche reconnue qui faciliteront la progression de sa carrière et lui permettront d’accéder à des postes de gestion de plus haut niveau ».

Dans sa lettre, Mme Wallace souligne en outre que la majorité des étudiants qui suivent le programme sont des professionnels qui travaillent et que le programme vise à attirer des étudiants professionnels et matures. Elle ajoute ensuite ce qui suit :

[traduction] « Notre programme exige un nombre important d’années d’expérience afin que les étudiants puissent avoir des conversations intéressantes dans la classe. Notre programme attire des étudiants de plusieurs industries, ce qui donne lieu à l’expression de nombreux points de vue différents qui renforcent et transforment la façon de penser de chaque étudiant ».

27.  Compte tenu de la nature concurrentielle du programme susmentionné, l’université avait clairement examiné en détail les notes antérieures, les diplômes, l’expérience de travail et les compétences en langue anglaise de la demanderesse avant de l’admettre au programme d’études. Manifestement, les notes obtenues dans le cadre d’études achevées il y a plus de dix ans n’auraient pas pu constituer à elles seules un facteur déterminant. Comme l’indiquent les imprimés du site Web de l’université, l’admission à ce programme de MBA avancé nécessitait une expérience de travail à temps plein d’au moins trois ans dans un poste professionnel ou de gestion. Le programme s’adresse ainsi aux professionnels matures et la demanderesse, ayant satisfait à ces exigences, a été admise au programme. De plus, les résultats en langue anglaise de la demanderesse dépassaient le niveau minimal requis, et il est donc illogique que l’agent se soit appuyé sur ces résultats pour conclure que la demanderesse n’avait pas les aptitudes aux études nécessaires pour faire un MBA au Canada. Nous soutenons donc respectueusement qu’il était incompréhensible de la part de l’agent de conclure que la demanderesse ne serait probablement pas en mesure de terminer le programme d’études au Canada et qu’elle n’était donc pas une véritable étudiante. Nous soutenons également que l’agent n’a pas dûment tenu compte des renseignements contenus dans des imprimés de site Web et dans une lettre de la directrice du programme de MBA de l’UNBC, qui faisait état de la nature concurrentielle du programme d’études canadien et des exigences de celui‑ci. Nous soutenons donc que l’agent n’a pas tiré une conclusion logique quant à la question de savoir si la demanderesse pouvait réussir les études qu’elle envisageait de faire au Canada.

[Souligné dans l’original, références omises.]

[29]  En l’espèce, le défendeur n’a fourni aucune réponse adéquate ou convaincante sur ce point.

[30]  L’agent fait également l’affirmation importante suivante :

[traduction] La DP n’a pas réussi à démontrer que les études qu’elle envisage de faire sont logiques ou utiles à son éducation ou à son avancement professionnel, car elle déclare qu’elle aimerait vivre au Canada tout en ayant également l’intention de travailler dans l’immobilier en Inde.

[31]  Il n’y a rien de foncièrement illogique dans le fait que la demanderesse veuille éventuellement vivre au Canada (un objectif qu’elle pourrait ou non réaliser ultérieurement) tout en ayant l’intention de travailler dans l’immobilier en Inde jusqu’à ce que cet objectif soit réalisé, et indéfiniment si cet objectif n’est pas réalisé.

[32]  Par conséquent, je ne vois tout simplement pas en quoi cela étaye la conclusion de l’agent selon laquelle la demanderesse pourrait ne pas quitter le Canada à la fin de la période de séjour qui lui est applicable.

[33]  D’autres motifs étayant une conclusion défavorable sont fournis dans la décision, mais, comme l’indique clairement l’agent, il a mis en balance les raisons de demeurer au Canada et les liens de la demanderesse avec l’Inde. Les erreurs dont j’ai fait état sont extrêmement pertinentes à l’égard de ce processus de mise en balance et le rendent donc déraisonnable. L’affaire doit être renvoyée à un autre agent pour nouvel examen.

[34]  Les avocats conviennent qu’il n’y a aucune question à certifier, et la Cour est du même avis.


JUGEMENT DANS LE DOSSIER IMM-3171-18

LA COUR STATUE que :

  1. La demande est accueillie. La décision est annulée et l’affaire est renvoyée à un autre agent pour nouvel examen.

  2. Il n’y a aucune question à certifier.

« James Russell »

Juge

Traduction certifiée conforme

Ce 18jour d’avril 2019.

Diane Provencher, trad. a.


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


DOSSIER :

IMM‑3171‑18

 

INTITULÉ :

LEENABEN KIRITBHAI MAHIDA c LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

 

LIEU DE L’AUDIENCE :

Toronto (Ontario)

 

DATE DE L’AUDIENCE :

LE 6 MARS 2019

 

JUGEMENT ET MOTIFS :

LE JUGE RUSSELL

 

DATE DES MOTIFS :

LE 8 AVRIL 2019

 

COMPARUTIONS :

Brian Koh

POUR LA DEMANDERESSE

 

Margherita Braccio

POUR LE DÉFENDEUR

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Niren And Associates

Avocats spécialisés en immigration

Toronto (Ontario)

 

POUR LA DEMANDERESSE

 

Procureur général du Canada

Toronto (Ontario)

POUR LE DÉFENDEUR

 

 

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