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Dossier : T-1238-17

Référence : 2019 CF 200

[TRADUCTION FRANÇAISE CERTIFIÉE, NON RÉVISÉE]

Toronto (Ontario), le 18 février 2019

En présence de madame la juge Heneghan

ENTRE :

ROBERT JEWETT

demandeur

et

PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA

défendeur

JUGEMENT ET MOTIFS

I.  INTRODUCTION

[1]  M. Robert Jewett (le « demandeur ») demande le contrôle judiciaire de la décision rendue le 19 juillet 2017 par Mme L. Beck, chef d’équipe au Centre d’expertise d’allègement pour les contribuables de la Direction générale des appels de l’Agence du revenu du Canada (l’« ARC ») (la « chef d’équipe »), qui a rejeté la demande de renonciation aux intérêts présentée par le demandeur au titre du paragraphe 220(3.1) de la Loi de l’impôt sur le revenu, LRC 1985, c 1 (5suppl) (la « Loi »). Plus précisément, le demandeur souhaitait obtenir ce qui suit :

[traduction]

1.  l’annulation des intérêts pour l’année d’imposition 2002 accumulés entre le 1er janvier 2006 et le 1er mai 2008 et entre le 5 mars 2013 et le 5 octobre 2016;

2.  l’annulation des intérêts pour l’année d’imposition 2003 accumulés entre le 1er janvier 2006 et le 1er mai 2008 et entre le 25 juin 2011 et le 5 octobre 2016;

3.  aucune entente visant la renonciation aux intérêts pour les années d’imposition 2002 et 2003 accumulés par ailleurs depuis le 25 mai 2016.

[2]  Dans le cadre de la présente demande de contrôle judiciaire, le demandeur cherche à obtenir la réparation suivante :

[traduction]

1.  une ordonnance renvoyant l’affaire au ministre afin qu’une ou plusieurs personnes n’ayant jamais auparavant traité des affaires fiscales du demandeur, de son épouse ou de Thomson 28 Co. Ltd réexamine la décision du 19 juillet 2017 par laquelle l’ARC a refusé d’accorder l’allègement demandé sur le fond;

2.  une ordonnance adjugeant les dépens que la Cour pourrait, dans l’exercice de son pouvoir discrétionnaire, juger raisonnables et légitimes au regard de la présente demande;

3.  toute autre réparation que les avocats pourraient demander et que la Cour estime juste.

[3]  Aux termes du paragraphe 303(2) des Règles des Cours fédérales, DORS/98‑106 (les « Règles »), le procureur général du Canada est désigné à titre de défendeur dans la présente demande de contrôle judiciaire.

II.  LE CONTEXTE

[4]  Les faits présentés ci‑après sont tirés des affidavits déposés par les parties dans le cadre de la présente demande de contrôle judiciaire, ainsi que du dossier certifié du tribunal (le « DCT »).

[5]  Le demandeur a souscrit un affidavit le 6 septembre 2017 dans lequel il explique les tenants et les aboutissants de ses démêlés avec l’ARC relativement aux années d’imposition 2002 et 2003. Cet affidavit est accompagné de 29 pièces ayant trait aux diverses démarches entreprises par le demandeur dans le but d’obtenir un allègement en vertu de la Loi.

[6]  Le défendeur a déposé un affidavit souscrit le 11 octobre 2017 par Tracey MacGregor, agente d’allègement pour les contribuables de la Direction générale des appels de l’ARC. Dans son affidavit, Mme MacGregor énonce les démarches entreprises par le demandeur pour obtenir un allègement pour les contribuables et la réponse de l’ARC qui a abouti à la décision du 19 juillet 2017.

[7]  L’impôt à payer par le demandeur pour les années d’imposition 2002 et 2003 a été fixé aux termes du paragraphe 152(7) de la Loi du fait qu’il n’avait initialement pas présenté de déclarations de revenus. Il a finalement présenté ses déclarations de revenus pour les années d’imposition 2002 et 2003 le 16 mars 2012.

[8]  Le demandeur a interjeté appel devant la Cour canadienne de l’impôt des avis de cotisation établis par l’ARC pour les années d’imposition 1999, 2000 et 2001.

[9]  Dans une décision datée du 20 novembre 2009, le juge Miller de la Cour canadienne de l’impôt a renvoyé l’affaire au ministre du Revenu national pour nouvel examen et nouvelle cotisation, compte tenu des réductions qui auraient dû s’appliquer selon lui aux années d’imposition 1999, 2000 et 2001. Le juge a notamment conclu que le solde des cartes de crédit de 47 576 $ qui s’appliquait à l’année 2001 devrait être rayé des dépenses personnelles relatives à l’année 2001 et reporté à 2002, ce qui avait pour effet de réduire les dépenses personnelles du demandeur en 2001 de 7 296 $; voir la décision Jewett c Canada, [2010] 4 C.T.C. 2062.

[10]  À la suite de cette décision de la Cour canadienne de l’impôt, une nouvelle cotisation corrélative a été établie le 8 avril 2010 pour l’année d’imposition 2002, conformément au paragraphe 152(4.3) de la Loi. Par une lettre datée du 12 avril 2013, l’ARC a fait savoir qu’elle avait mis en application la décision du juge Miller et que le revenu du demandeur pour l’année d’imposition 2002 avait été augmenté de 47 576 $ en conséquence.

Le premier avis d’opposition

[11]  Le 2 mai 2008, le demandeur a présenté une demande en vue d’obtenir la prorogation du délai prescrit pour déposer un avis d’opposition aux cotisations établies pour les années d’imposition 2002 et 2003.

[12]  L’ARC, après avoir examiné l’avis d’opposition du demandeur, a confirmé le 25 juin 2009 que les avis de cotisation pour les années d’imposition 2002 et 2003 avaient été établis conformément à la Loi. Dans sa décision, la chef d’équipe a conclu que le délai prescrit pour déposer un avis d’opposition ne pouvait être prorogé du fait que l’ARC n’avait pas reçu les renseignements exigés dans le délai alloué à cette fin.

Le deuxième avis d’opposition

[13]  Le 24 juin 2011, le demandeur a présenté une deuxième demande en vue d’obtenir une prorogation du délai prescrit pour déposer un avis d’opposition pour les années d’imposition 1999 à 2003 et 2009.

[14]  Dans une lettre datée du 4 janvier 2012, Mme Lori Miller, chef des appels au Bureau des services fiscaux de Sudbury de l’ARC, a informé le demandeur que la demande de prorogation était approuvée, mais que l’ARC ne pouvait autoriser l’opposition visant l’avis de cotisation se rapportant à l’année d’imposition 2002 daté du 8 avril 2010 ou l’avis de cotisation se rapportant à l’année d’imposition 2003 daté du 1er février 2008.

[15]  L’ARC a au départ refusé les avis d’opposition visant les années d’imposition 2002 et 2003, pour ensuite reconnaître la validité de l’opposition pour l’année d’imposition 2002 au terme d’une correspondance entre le demandeur ou son représentant et l’ARC. Elle est arrivée à la conclusion que le délai était expiré pour l’année d’imposition 2003, mais a autorisé en partie l’opposition pour l’année d’imposition 2002.

La première demande d’allègement pour les contribuables

[16]  Le demandeur a déposé une demande d’allègement pour les contribuables le 3 juillet 2014 pour l’année d’imposition 2003, demande qui a été rejetée le 7 mai 2015. Les détails de cette demande n’ont cependant pas d’importance au regard de la décision qui fait l’objet du présent contrôle.

La deuxième demande d’allègement pour les contribuables

[17]  Le demandeur a présenté une deuxième demande d’allègement pour les contribuables le 25 mai 2016 dans laquelle il demandait l’annulation des intérêts accumulés entre le 25 mai 2006 et le 25 mai 2016 pour les années d’imposition 2002 et 2003 et une renonciation à tous les intérêts futurs pour ces mêmes années d’imposition. Il estimait cet allègement justifié en raison du temps excessif qu’il avait fallu à l’ARC pour se prononcer sur son opposition datée du 24 juin 2011, invoquant à cet effet l’alinéa 26f) de la circulaire IC07‑1 intitulée Dispositions d’allègement pour les contribuables (la circulaire « IC07‑1 »).

[18]  Le 5 décembre 2016, l’ARC a approuvé en partie la deuxième demande d’allègement pour les contribuables présentée par le demandeur et a annulé, au titre du paragraphe 220(3.1) de la Loi, l’arriéré d’intérêts qui s’était accumulé entre le 24 juin 2011 et le 5 mars 2013 pour son année d’imposition 2002.

[19]  L’ARC a cependant refusé de renoncer à l’arriéré d’intérêts accumulé entre le 1er janvier 2006 et le 24 juin 2011 et entre le 5 mars 2013 et le 5 octobre 2016 pour l’année d’imposition 2002 et depuis le 1er janvier 2006 pour l’année d’imposition 2003.

L’examen au second palier de la demande d’allègement pour les contribuables

[20]  Le 4 mai 2017, le demandeur a présenté une demande afin que soit réexaminée la décision relative à l’allègement pour les contribuables datée du 5 décembre 2016. Il a demandé l’annulation de l’arriéré d’intérêts qui s’était accumulé entre le 25 mai 2006 et le 24 juin 2011 et depuis le 6 mars 2013 pour les années d’imposition 2002 et 2003. Il a également demandé la renonciation à tous les intérêts futurs sur tout solde se rapportant aux années d’imposition 2002 et 2003.

[21]  Le demandeur souhaitait obtenir un allègement pour l’année d’imposition 2003, au motif que le défaut de son avocat de déposer un avis d’appel à la Cour canadienne de l’impôt constituait une « situation exceptionnelle » dans laquelle il est indiqué d’accorder un allègement en raison d’erreurs attribuables à un tiers. Il a cité à l’appui de cet argument l’article 35 de la circulaire IC07‑1.

[22]  Dans une décision datée du 19 juillet 2017, Mme Beck, chef d’équipe au Centre d’expertise d’allègement pour les contribuables de la Direction générale des appels, a approuvé en partie la demande du demandeur, concluant qu’un allègement était effectivement indiqué pour la période du 2 mai 2008 au 24 juin 2011 en raison d’actions de l’ARC. Cette décision a eu pour effet d’annuler l’arriéré d’intérêts qui s’était accumulé entre le 2 mai 2008 et le 24 juin 2011 pour les années d’imposition 2002 et 2003.

[23]  Mme Beck a émis l’avis qu’il y avait peut‑être eu des problèmes de communication entre le demandeur, son représentant et l’ARC pendant la période comprise entre la première opposition du demandeur datée du 2 mai 2008 et sa deuxième opposition datée du 24 juin 2011. La présente demande de contrôle judiciaire porte sur cette décision.

III.  LES OBSERVATIONS

Les observations du demandeur

[24]  Le demandeur fait valoir que la décision datée du 19 juillet 2017 est déraisonnable parce qu’elle repose sur une recommandation erronée de Mme Tracey MacGregor, qui, soutient‑il, a commis un certain nombre d’erreurs de fait.

[25]  Le demandeur avance que la décision en cause n’est pas justifiée au regard des faits parce qu’elle ne tient pas compte des retards de l’ARC. Il estime que l’ARC est à blâmer pour les retards survenus entre le 6 mars 2013 et le 5 mai 2014 pour ce qui est de l’année d’imposition 2002 et entre le 24 juin 2011 et le 6 décembre 2013 pour ce qui est de l’année d’imposition 2003 et que ces retards ne sont pas pris en compte dans la décision en cause.

Les observations du défendeur

[26]  Le défendeur affirme que la décision en cause est raisonnable. Il soutient que la chef d’équipe a à juste titre conclu que le demandeur n’avait pas droit à un allègement plus important que celui déjà accordé par l’ARC. Il avance que cette conclusion est raisonnable en raison du défaut du demandeur de présenter ses déclarations de revenus de la façon et dans les délais demandés par la Loi et du défaut de son avocat d’interjeter appel des avis de cotisation devant la Cour canadienne de l’impôt.

[27]  Le défendeur soutient que l’ARC n’est pas à blâmer pour les retards dans le traitement de l’opposition présentée par le demandeur concernant la cotisation corrélative pour l’année d’imposition 2002 entre le 6 mars 2013 et le 5 mai 2014. Il ajoute que tout retard dans le traitement de l’opposition du demandeur visant l’avis de cotisation pour l’année d’imposition 2003 entre le 24 juin 2011 et le 6 décembre 2012 procédait d’erreurs commises par l’avocat du demandeur, et non l’ARC.

[28]  Enfin, le défendeur soutient que le ministre a correctement usé de son pouvoir discrétionnaire puisqu’il a tenu compte des facteurs pertinents et de la situation du demandeur.

IV.  ANALYSE

[29]  La première question à examiner est celle de la norme de contrôle applicable en l’espèce.

[30]  Selon la décision Telfer c Agence du revenu du Canada, [2009] 4 C.T.C. 123, ce genre de décision discrétionnaire rendue en application de la Loi est susceptible de contrôle selon la norme de la décision raisonnable.

[31]  Il est établi dans l’arrêt Dunsmuir c Nouveau‑Brunswick, [2008] 1 RCS 190, que la norme de la décision raisonnable exige que la décision soit justifiable, transparente et intelligible et qu’elle appartienne aux issues possibles et acceptables pouvant se justifier au regard des faits et du droit.

[32]  L’argument central du demandeur veut que la décision repose sur des conclusions de fait déraisonnables. Le demandeur s’oppose aux conclusions tirées par Mme MacGregor.

[33]  Les questions de fait doivent être contrôlées suivant la norme de la décision raisonnable. Il en va de même du caractère raisonnable de la décision dans son ensemble.

[34]  Bien que les directives ministérielles n’équivalent pas à des textes de loi, plusieurs paragraphes de la circulaire IC07‑1 sont pertinents quant à la présente demande de contrôle judiciaire :

¶ 9. Un contribuable peut demander un allègement conformément aux dispositions de la Loi énumérées dans ce paragraphe. Après l’examen des faits et des circonstances pertinents propres à la situation du contribuable, un fonctionnaire délégué de l’ARC (voir le paragraphe 17) décidera s’il est approprié de :

a) renoncer ou annuler les pénalités et les intérêts en vertu du paragraphe 220 (3.1).

[...]

¶ 23. Le ministre peut accorder un allègement de l’application des pénalités et des intérêts lorsque les situations suivantes sont présentes et qu’elles justifient l’incapacité du contribuable à s’acquitter de l’obligation ou de l’exigence fiscale en cause :

a) circonstances exceptionnelles;

b) actions de l’ARC;

c) incapacité de payer ou difficultés financières.

[...]

¶ 26. Les pénalités et les intérêts peuvent également faire l’objet d’une renonciation ou d’une annulation si ces pénalités et intérêts découlent principalement d’actions prises par l’ARC, telles que :

[…]

f) des retards indus pour régler une opposition ou un appel, ou la réalisation d’une vérification.

[35]  J’en viens maintenant à la question de savoir si Mme MacGregor a tiré des conclusions de fait erronées et si la décision de la chef d’équipe est, dans l’ensemble, raisonnable.

[36]  Je ne suis pas prête à affirmer que Mme MacGregor a commis une erreur lorsqu’elle a tiré ses conclusions de fait concernant les antécédents du demandeur en matière de conformité à la Loi. Le demandeur a présenté ses déclarations de revenus pour les années d’imposition 2002 et 2003 en retard. Or, la décision de respecter ou non les délais prescrits pour la présentation des déclarations de revenus appartient au demandeur.

[37]  L’évaluation du respect des délais s’inscrit dans le mandat des employés de l’ARC.

[38]  Au paragraphe 11 de son affidavit, Mme MacGregor énonce les facteurs qu’elle a pris en considération pour formuler sa recommandation d’accorder un allègement partiel :

[traduction]

Pour en arriver à ma recommandation d’accorder au demandeur un allègement partiel des intérêts, j’ai analysé avec soin sa situation et j’ai été à même de constater qu’il lui avait été impossible de respecter ses obligations de paiement en raison de retards de l’ARC, en particulier :

  le 2 mai 2008, le demandeur a signifié sa demande de prorogation du délai prescrit pour déposer des oppositions visant les nouvelles cotisations établies par le ministre pour les années d’imposition 2002 et 2003;

  le 20 août 2008, le demandeur a signifié ses oppositions visant les nouvelles cotisations établies par le ministre pour les années d’imposition 2002 et 2003;

  le 18 février 2009, l’ARC a accusé réception des oppositions du demandeur visant les années d’imposition 2002 et 2003;

  le 26 octobre 2009 ou vers cette date, l’ARC a clos le dossier relatif aux oppositions du demandeur pour les années d’imposition 2002 et 2003;

  en mai ou juin 2010, des agents de l’ARC ont indiqué à tort au demandeur, par écrit et lors d’un appel téléphonique, que ses oppositions visant les années d’imposition 2002 et 2003 étaient toujours actives et à l’étude;

  le 24 juin 2011, le demandeur a signifié ses deuxièmes oppositions pour les années d’imposition 2002 et 2003.

[39]  Le demandeur a reçu un allègement partiel des intérêts pour l’année d’imposition 2002 pour la période comprise entre le 24 juin 2011 et le 5 mars 2013.

[40]  À l’issue de l’examen au second palier de la deuxième demande d’allègement présentée par le demandeur, il a été établi qu’il recevrait un allègement pour les intérêts se rapportant aux années d’imposition 2002 et 2003 accumulés entre le 2 mai 2008 et le 24 juin 2011.

[41]  Mme MacGregor cite dans son affidavit le rapport établi par M. John Asche, agent du Centre d’expertise d’allègement pour les contribuables, Commission des appels, Bureau des services fiscaux de Vancouver. Ce rapport est une pièce jointe à l’affidavit de Mme MacGregor.

[42]  Mme MacGregor cite également la décision de Mme Shelley O’Connor, chef d’équipe au Centre d’expertise d’allègement pour les contribuables, Bureau des services fiscaux de Vancouver, qui s’était prononcée sur la première demande d’allègement pour les contribuables présentée par le demandeur. Sa décision datée du 5 décembre 2016 est jointe à titre de pièce à l’affidavit de Mme MacGregor et accordait un allègement partiel.

[43]  Mme MacGregor, d’après son affidavit, a examiné un éventail de lettres et de documents présentés par le demandeur en vue d’obtenir un allègement plus important et les énumère au paragraphe 9 de son affidavit. Les documents examinés comprennent des avis de nouvelle cotisation, les antécédents du demandeur en matière de production de déclarations et de documents, ainsi que des pièces de correspondance.

[44]  Dans la présente demande, le demandeur s’élève essentiellement contre les conclusions de fait de Mme MacGregor qu’il estime déraisonnables, notamment la conclusion voulant que le retard n’ait pas été causé par le temps qu’a mis l’ARC à répondre à ses demandes.

[45]  Je ne suis pas prête à affirmer que Mme MacGregor a tiré des conclusions de fait déraisonnables.

[46]  Dans son rapport daté du 17 juillet 2017, qui est joint à son affidavit à titre de pièce, Mme MacGregor décrit en détail les documents qu’elle a consultés et circonscrit avec précision le cadre de son analyse. Elle énonce par ailleurs en termes clairs sa recommandation d’accorder un allègement d’intérêts pour les années d’imposition 2002 et 2003 pour la période comprise entre le 2 mai 2008 et le 24 juin 2011 en raison des retards de l’ARC. Elle ne recommande cependant pas d’accorder un allègement plus important, que ce soit en raison des retards de l’ARC ou pour d’autres circonstances.

[47]  Mme MacGregor explique comme suit  les raisons pour lesquelles elle ne recommande pas d’allègement plus important :

[traduction]

Je ne recommande pas d’allègement plus important pour les raisons suivantes :

Les contribuables sont généralement considérés comme responsables des erreurs commises par des tiers qui agissent en leur nom pour leurs affaires fiscales. Les tiers qui perçoivent des honoraires et qui fournissent des renseignements inexacts sont généralement considérés comme responsables face à leur client si celui‑ci s’est vu imposer des pénalités et des intérêts en raison de leurs actions. Cependant, il peut exister des situations exceptionnelles dans lesquelles il pourrait être indiqué d’accorder un allègement au contribuable en raison d’erreurs attribuables à un tiers. Il pourrait être indiqué d’envisager d’accorder un allègement de pénalités et d’intérêts, en tout ou en partie, lorsqu’une circonstance exceptionnelle indépendante de la volonté du représentant d’un contribuable a empêché celui‑ci de s’acquitter d’une obligation ou d’une exigence que lui impose la Loi de l’impôt sur le revenu. Un examen de votre dossier n’a pas permis de constater que votre comptable a été empêché de s’acquitter de ses obligations en raison de circonstances indépendantes de sa volonté.

[48]  Le demandeur soutenait qu’il y a eu des retards de la part de l’ARC entre le 6 mars 2013 et le 5 mai 2014 pour l’année d’imposition 2002, et entre le 24 juin 2011 et le 6 décembre 2013 pour l’année d’imposition 2003, mais Mme MacGregor n’était pas du même avis.

[49]  Mme MacGregor, si elle a admis qu’il y avait eu des retards de la part de l’ARC à quelques périodes, n’a pas pu donner raison au demandeur relativement à l’existence d’éléments de preuve attestant d’autres retards, affirmant que c’est le demandeur, et non l’ARC, qui est responsable des retards causés par les actions de ses comptables.

[50]  À mon avis, les conclusions de fait de Mme MacGregor sont étayées par la preuve dont elle disposait au moment où elle les a tirées. Sa recommandation satisfait aux critères de justification, de transparence et d’intelligibilité qui doivent s’appliquer selon l’arrêt Dunsmuir, précité.

[51]  Je conclus donc qu’il n’y a aucune erreur susceptible de contrôle judiciaire dans la façon dont la décision relative à la demande d’allègement du demandeur a été rendue. L’intervention de la Cour n’est pas justifiée, et la demande de contrôle judiciaire est rejetée.

[52]  Dans l’exercice du pouvoir discrétionnaire que me confèrent les Règles, je ne rends aucune ordonnance quant aux dépens.


JUGEMENT DANS LE DOSSIER T‑1238‑17

LA COUR STATUE que la demande de contrôle judiciaire est rejetée. Dans l’exercice du pouvoir discrétionnaire que me confèrent les Règles des Cours fédérales, DORS/98‑106, je ne rends aucune ordonnance quant aux dépens.

« E. Heneghan »

Traduction certifiée conforme

Ce 11e jour d’avril 2019

Julie Blain McIntosh



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