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Date : 20181203


Dossier : IMM‑2934‑18

Référence : 2018 CF 1210

[TRADUCTION FRANÇAISE CERTIFIÉE, NON RÉVISÉE]

Ottawa (Ontario), le 3 décembre 2018

En présence de monsieur le juge Manson

ENTRE :

HONGYU ZHANG

demandeur

et

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

défendeur

JUGEMENT ET MOTIFS

I.  Introduction

[1]  La Cour est saisie d’une demande de contrôle judiciaire de la décision, datée du 9 mai 2018, de la Section de la protection des réfugiés [la SPR] de la Commission de l’immigration et du statut du réfugié, selon laquelle le demandeur n’est ni un réfugié au sens de la Convention ni une personne à protéger aux termes de l’article 96 et du paragraphe 97(1) de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, LC 2001 c 27 [la LIPR].

II.  Contexte

[2]  Le demandeur, Hongyu Zhang, est né le 2 février 1961, à Tieling, dans la province de Liaoning, en Chine. Il a une épouse et une fille, qui résident toutes deux encore en Chine. Le demandeur craint d’être persécuté en Chine parce qu’il pratique le Falun Gong.

[3]  Le demandeur allègue qu’il a commencé sa pratique du Falun Gong lorsqu’il était en Chine. Il a commencé à pratiquer le Falun Gong chez lui en décembre 2010, avant de participer à des séances de pratique en groupe en janvier 2011.

[4]  Selon le demandeur, le soir du 17 août 2012, son groupe de pratiquants a fait l’objet d’une descente effectuée par des membres du Bureau de la sécurité publique [le PSB]. Le demandeur n’était pas présent pendant la descente puisqu’il était au travail à la Tieling City Food Company, où il travaillait en tant que superviseur, mais il a reçu un appel d’un autre adepte l’informant de la descente. Il prétend qu’il a quitté immédiatement le travail et qu’il s’est caché chez un cousin pendant les trois mois et demi qui ont suivi. Le 3 décembre 2012, avec l’aide d’un passeur qui a pris les dispositions nécessaires pour lui obtenir un visa canadien, le demandeur a quitté la Chine muni de son propre passeport et il est venu au Canada.

[5]  Le 23 décembre 2012, le demandeur a présenté une demande d’asile au Canada.

[6]  Le demandeur et son avocat ont comparu à une audience devant un commissaire de la SPR le 13 avril 2018 [l’audience]. Le demandeur, à l’aide d’un interprète, a répondu aux questions posées par son avocat et la commissaire.

[7]  Dans une décision datée du 9 mai 2018, la SPR a conclu que le demandeur n’était pas un réfugié au sens de la Convention ni une personne à protéger, et elle a donc rejeté la demande d’asile du demandeur [la décision].

[8]  Devant la SPR, la question déterminante était celle de la crédibilité du demandeur. La SPR a rejeté plusieurs parties du témoignage du demandeur, ce qui a mené à la conclusion qu’il n’avait pas établi qu’il était en danger en Chine en raison de sa participation à des activités liées au Falun Gong.

III.  Questions en litige

[9]  Les questions en litige sont les suivantes :

  1. La question de savoir si les conclusions concernant la crédibilité tirées par la SPR au sujet des points suivants étaientraisonnables :
    1. la motivation du demandeur à pratiquer le Falun Gong;
    2. les actes du demandeur à la suite de la descente du PSB dont a fait l’objet son groupe de pratiquants;
    3. l’état des livres sur le Falun Gong en la possession du demandeur;
    4. le départ du demandeur de la Chine muni de son propre passeport.
  2. La question de savoir si la conclusion de la SPR selon laquelle le demandeur n’avait pas justifié une demande d’asile sur place était raisonnable.

IV.  Norme de contrôle

[10]  La norme de contrôle applicable est celle de la décision raisonnable.

[11]  Toutefois, la décision faisant l’objet du présent contrôle judiciaire comporte à la fois des conclusions concernant la crédibilité à proprement parler et des conclusions d’invraisemblance. Bien que ces deux types de conclusions soient susceptibles de contrôle selon la norme de la décision raisonnable, les conclusions concernant la crédibilité doivent faire l’objet d’une grande retenue dans le cadre d’un contrôle judiciaire alors que les conclusions d’invraisemblance doivent faire l’objet d’un examen plus poussé et exigent une explication claire.

[12]  Des conclusions d’invraisemblance ne devraient être tirées que dans les cas les plus évidents, lorsque les faits présentés s’éloignent tellement de ce à quoi on peut raisonnablement s’attendre que le juge des faits peut raisonnablement conclure qu’il est impossible que l’événement en question se soit produit, ou lorsque la preuve documentaire dont dispose le tribunal démontre que les événements n’ont pas pu se produire de la façon dont l’affirme le demandeur (Sun c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2015 CF 387, au paragraphe 26 (Sun), citant Valtchev c Canada (Ministre de la citoyenneté et de l’immigration), 2001 CFPI 776, au paragraphe 7 (Valtchev). Le défendeur fait valoir que la norme plus élevée d’analyse proposée dans la décision Valtchev devrait être atténuée compte tenu de l’arrêt Dunsmuir c Nouveau‑Brunswick, 2008 CSC 9, mais le cadre d’analyse de la décision Valtchev fait toujours autorité et je ne vois aucune raison de m’en écarter. Bien que le défendeur soutienne que cette norme d’analyse plus élevée devrait être atténuée compte tenu de l’arrêt Dunsmuir, lorsqu’un tribunal qualifie à maintes reprises un témoignage d’invraisemblable ou, autrement dit, d’inconcevable ou d’improbable, la Cour doit procéder à un examen approfondi des conclusions tirées à cet égard.

V.  Analyse

A.  Les conclusions concernant la crédibilité tirées par la SPR au sujet des points suivants étaient‑elles raisonnables?

[13]  Le demandeur a déclaré avoir commencé à pratiquer le Falun Gong dans l’espoir de réduire ses troubles gastriques. Il a précisé que, même si le médecin qu’il consultait à l’hôpital, appelé Tieling City Traditional Chinese Hospital [l’hôpital], lui avait dit de cesser de consommer de l’alcool et du tabac, ce n’est que lorsqu’il a commencé à pratiquer le Falun Gong qu’il a été en mesure de cesser de boire et de fumer.

[14]  La SPR n’était pas convaincue que c’était la pratique du Falun Gong qui avait permis au demandeur de cesser de boire et de fumer parce que :

  • a) bien que le demandeur ait dit que l’hôpital était un hôpital de médecine occidentale, son carnet médical indiquait qu’il s’agissait d’un hôpital traditionnel chinois;

  • b) elle a déduit que, si le demandeur avait été motivé à se rendre dans un hôpital traditionnel, il aurait certainement aussi été motivé à se conformer aux recommandations de son médecin de cesser de fumer et de boire.

[15]  Le demandeur fait valoir que c’était uniquement en raison du nom de l’hôpital que la SPR a conclu qu’il s’agissait d’un hôpital traditionnel et qu’au surplus il ressort clairement de son carnet médical que l’hôpital était un hôpital occidental étant donné que des médicaments antibiotiques et des anti‑inflammatoires avaient été prescrits au demandeur.

[16]  Le défendeur soutient que l’inclusion du terme « traditionnel » dans le nom de l’hôpital appuie dans une certaine mesure la conclusion selon laquelle il s’agit d’un hôpital de médecine traditionnelle. En outre, il n’est pas indiqué dans le dossier médical du demandeur qu’il s’est vu remettre une ordonnance pour des médicaments occidentaux, mais plutôt qu’il cherchait à recevoir un traitement de son médecin parce que son état ne s’était pas amélioré après avoir pris des médicaments occidentaux.

[17]  Bien qu’il soit possible que la conclusion de la SPR selon laquelle l’hôpital était un hôpital occidental puisse être raisonnable, je ne vois pas comment cette conclusion offre à la SPR un fondement raisonnable pour rejeter, pour cause d’invraisemblance, le témoignage du demandeur selon lequel la pratique du Falun Gong lui a permis de cesser de boire et de fumer.

[18]  Tel que l’a décidé le juge de Montigny dans la décision Sun, précitée, aux paragraphes 21 et 24 :

[21] Je souscris à l’argument de l’avocate du demandeur, qui soutient que la question de savoir si le « miracle » de la guérison du demandeur s’est réellement produit n’est pas pertinente. La Commission peut ne pas être du même avis que le demandeur quant à savoir que Dieu est à l’origine de sa guérison sur le plan médical, mais cela ne signifie pas que le demandeur n’y croit pas sincèrement et qu’il n’est pas un chrétien pratiquant pouvant être exposé à la persécution. Le demandeur a expliqué qu’il a cessé de prendre ses médicaments en avril 2010 et qu’il s’était mis à prier et que c’est pour cela qu’il croit que Dieu l’a guéri en mai 2010. Humblement, la Cour ne comprend pas comment cette explication est vague ou évasive. L’explication répond clairement à la question de la Commission et elle n’est pas incohérente. L’explication peut ne pas être suffisante pour convaincre le commissaire de se convertir lui-même au christianisme, mais tel n’était pas l’objectif. Évidemment, un demandeur d’asile n’est pas tenu de prouver qu’une intervention divine a eu lieu pour établir sa crainte d’être persécuté pour des raisons religieuses. Le rôle de la Commission ne consiste pas à tirer des conclusions de fait sur des miracles.

[…]

[24] […] la Cour est préoccupée, car l’analyse de la Commission est teintée par son scepticisme relativement à l’allégation du demandeur concernant sa guérison miraculeuse. Au lieu d’évaluer la sincérité des croyances du demandeur et la véracité de son récit concernant la descente dans l’église, la Commission a accordé un poids non mérité à des détails mineurs, a relevé des incohérences dans des apparences de divergences pour lesquelles le demandeur a fourni des explications raisonnables, et a douté de sa foi en raison du comportement d’autres personnes dont le demandeur ne peut être tenu responsable.

[Non souligné dans l’original.]

[19]  De même, en l’espèce, la SPR n’était pas disposée à retenir le témoignage du demandeur selon lequel la pratique du Falun Gong lui a permis de cesser de boire et de fumer et elle a cherché, en vain, des raisons de rejeter ce témoignage. Le fait que le demandeur puisse avoir reçu un traitement dans un hôpital traditionnel et que par la suite il n’avait pas suivi les conseils de son médecin ne constitue pas un motif suffisant pour conclure que le témoignage du demandeur est invraisemblable.

[20]  La majeure partie du reste de l’analyse de la SPR est teintée du même scepticisme, qui l’a amenée à s’attarder à des détails mineurs sur lesquels elle s’est fondée pour rejeter le témoignage du demandeur.

[21]  Le demandeur a aussi déclaré n’avoir jamais, auparavant, quitté le travail avant la fin d’un quart de travail. Toutefois, lorsqu’il a reçu l’appel l’informant de la descente dont son groupe de pratiquants avait fait l’objet le soir du 17 août 2012, il a quitté immédiatement le travail sans en informer personne, alors qu’il était censé travailler jusqu’à 16 h. Le demandeur a indiqué qu’il n’est jamais retourné au travail après cette nuit‑là.

[22]  La SPR a interrogé le demandeur sur la façon dont, en tant que superviseur, il a pu quitter le travail sans éveiller de soupçons. Le demandeur a répondu que, parce qu’il était un superviseur et qu’il travaillait un quart de nuit, il a été en mesure de partir sans éveiller de soupçons.

[23]  La SPR a conclu que les actes du demandeur auraient éveillé « immédiatement l’attention, voire la suspicion ». La SPR a fondé sa conclusion sur les éléments suivants :

  • a) étant donné que le demandeur avait déclaré qu’à titre de superviseur une part de son rôle consistait à régler les problèmes que pouvait rencontrer le personnel, il était peu probable que son absence ait pu passer inaperçue par son personnel;

  • b) le superviseur du quart de travail suivant aurait également constaté l’absence du demandeur;

  • c) le fait que le demandeur ne soit pas retourné au travail pour effectuer les quarts de travail subséquents aurait aussi éveillé des soupçons.

[24]  La SPR a conclu que les actes du demandeur auraient éveillé des soupçons, alors qu’on se serait plutôt attendu à ce qu’il cherche à éviter de tels soupçons s’il était entré dans la clandestinité; elle a donc rejeté le témoignage du demandeur au sujet de ce qu’il a fait après la descente dont son groupe de pratiquants a fait l’objet.

[25]  Je conclus que la SPR s’est fondée sur des conjectures déraisonnables pour rejeter le témoignage du demandeur. La SPR a émis une hypothèse au sujet des conditions qui pourraient exister pendant un quart de nuit dans une usine à Tieling, en Chine, et elle s’est ensuite appuyée sur cette hypothèse, et rien d’autre, pour rejeter le témoignage du demandeur. La conclusion de la SPR selon laquelle le témoignage du demandeur n’est pas vraisemblable est déraisonnable.

[26]  Le demandeur avait également apporté à l’audience deux livres de poche sur le Falun Gong, qu’il, a‑t-il dit, utilisait quotidiennement dans le cadre de sa pratique. Le demandeur a déclaré avoir acheté ces livres plus d’un an auparavant parce qu’un de ses amis avait abîmé ceux qu’il possédait de plus longue date. Lorsque la commissaire lui a demandé pourquoi les livres semblaient être neufs, le demandeur a répondu qu’il se lavait les mains avant de les manipuler parce qu’ils représentent [traduction] « l’ensemble des règles du Maître, chaque caractère représente l’ensemble des règles du Maître, on ne peut les salir ».

[27]  La commissaire a conclu que les livres ne présentaient pas les traces d’usure que présenterait un livre de poche utilisé quotidiennement, et que cela ne concordait pas avec le témoignage du demandeur selon lequel il utilisait les livres tous les jours.

[28]  La commissaire a également conclu que, si le demandeur pratiquait le Falun Gong depuis décembre 2010 comme il le prétendait, il ne serait plus nécessaire qu’il utilise un des livres en sa possession, à savoir un manuel d’exercice de type [traduction] « mode d’emploi ». La commissaire n’a pas demandé au demandeur pourquoi il avait ce livre en sa possession.

[29]  La commissaire a conclu, en fonction de ces deux conclusions, que l’allégation du demandeur selon laquelle il utilise ces livres pour pratiquer le Falun Gong minait sérieusement sa crédibilité.

[30]  Bien que le demandeur ait donné une explication concernant l’état des livres – il se lavait les mains avant de les manipuler – il était raisonnablement loisible à la SPR de conclure que les livres étaient trop neufs pour lui permettre de conclure qu’ils étaient utilisés quotidiennement. Une conclusion de cette nature tirée par le juge des faits commande une grande retenue.

[31]  Toutefois, il était déraisonnable de la part de la SPR de conclure ensuite, sans aucune autre explication, que le demandeur ne devrait pas avoir besoin d’un [traduction] « mode d’emploi » s’il pratiquait le Falun Gong depuis 2010. La commissaire n’a pas demandé au demandeur pourquoi il était en possession de ce manuel et elle ne disposait d’aucun élément de preuve indiquant qu’un pratiquant chevronné ne serait pas en possession d’un tel livre.

[32]  Je conclus qu’il était déraisonnable que la commissaire tire une conclusion défavorable quant à la crédibilité au motif que le demandeur ne devrait pas avoir en sa possession un [traduction] « mode d’emploi ».

[33]  Dans son témoignage, le demandeur a aussi déclaré que des représentants du PSB s’étaient rendus chez lui trois fois. Les deux premières fois, les représentants du PSB se sont présentés chez lui avec une sommation; la troisième fois, le 26 novembre 2012, ils ont montré à son épouse un mandat d’arrestation. Le demandeur n’a pas été en mesure de produire une copie du mandat d’arrestation, mais il a produit une copie de la sommation, dont la véracité n’a pas été remise en question par la commissaire. Le demandeur a également déclaré qu’il avait utilisé son propre passeport pour quitter la Chine le 3 décembre 2012, avec l’aide d’un passeur, et qu’ils n’avaient pas été arrêtés par les agents frontaliers.

[34]  La SPR a écrit qu’« [i]l convient de souligner que le demandeur d’asile a quitté la Chine environ deux semaines après la présumée délivrance du mandat d’arrestation ». Le demandeur a réellement quitté la Chine sept jours après que des représentants du PSB auraient présenté à son épouse un mandat d’arrestation délivré à son nom le 26 novembre 2012. La SPR ne disposait d’aucun élément de preuve indiquant la date à laquelle le mandat a été délivré.

[35]  La SPR a examiné la preuve relative au pays portant sur le Bouclier d’or chinois, un système conçu notamment pour empêcher les citoyens chinois de quitter la Chine s’ils sont recherchés par les autorités. La SPR a précisé que, même s’il existe des cas exceptionnels, il est difficile pour les citoyens chinois de contourner les mesures de contrôle des sorties.


[36]  Après avoir examiné la preuve documentaire concernant la situation en Chine et le témoignage du demandeur, la SPR a conclu ce qui suit :

Le PSB a eu au moins deux semaines pour délivrer le mandat d’arrestation à son nom et pour saisir les données dans le système informatique national. Par conséquent, le tribunal n’est pas convaincu que le demandeur d’asile aurait réussi à quitter la Chine au moyen de son propre passeport authentique, comme il déclare l’avoir fait, s’il était véritablement recherché par le PSB.

[Non souligné dans l’original.]

[37]  Le demandeur conteste la conclusion de la SPR au motif qu’il était déraisonnable, à la lumière de la preuve documentaire dont elle disposait concernant la corruption généralisée qui règne parmi les agents frontaliers, de rejeter le témoignage du demandeur selon lequel il a quitté la Chine muni de son propre passeport. Le défendeur soutient qu’il était raisonnable que la SPR se fonde sur la preuve documentaire démontrant l’efficacité du système du Bouclier d’or.

[38]  La conclusion de la SPR concernant la difficulté de quitter la Chine lorsqu’une personne est recherchée par les autorités est justifiable lorsqu’elle est examinée isolément, puisqu’elle est étayée par la preuve documentaire. De plus, lorsqu’il a été interrogé par la commissaire, le demandeur n’a donné aucune explication valable concernant la façon dont il a pu échapper librement aux contrôles à la frontière; rien ne donnait à penser que les agents frontaliers avaient été soudoyés, ou qu’il existait une autre explication potentielle.

[39]  Cependant, la conclusion de la SPR est fondée à tort sur la conviction que le demandeur a quitté la Chine deux semaines, plutôt que sept jours, après qu’un mandat d’arrestation délivré à son nom a été présenté à son épouse. Même si cette erreur, prise isolément, ne constitue pas une erreur susceptible de contrôle, elle fait pencher la balance en faveur de la conclusion qu’un nouvel examen est nécessaire compte tenu des conclusions d’invraisemblance déraisonnables dont il a été question ci‑dessus.

[40]  Même si les erreurs commises par la SPR ne sont pas toutes susceptibles de contrôle, en l’espèce, les erreurs commises par la SPR dans leur ensemble touchent au cœur même de l’affaire. Comme l’a déclaré la SPR, la question de la crédibilité du demandeur s’est avérée être « la plus déterminante » dans la présente affaire. La SPR a commis une erreur lorsqu’elle a tiré plusieurs conclusions d’invraisemblance non étayées par les éléments de preuve ainsi que lorsqu’elle a mal interprété un fait important. Ces erreurs ont entraîné des conclusions défavorables quant à la crédibilité qui sont inextricablement liées à une grande partie du reste de l’analyse de la SPR. L’analyse de la SPR semble également être teintée de scepticisme concernant les croyances religieuses du demandeur, ce qui a mené la SPR à accorder une importance excessive à des contradictions mineures en vue de rejeter le témoignage du demandeur.

B.  La conclusion de la SPR selon laquelle le demandeur n’avait pas justifié une demande d’asile sur place était‑elle raisonnable?

[41]  La SPR a examiné le témoignage du demandeur ainsi que deux photographies qui montreraient le demandeur pratiquant le Falun Gong à Toronto, et elle a conclu que le demandeur n’avait pas établi qu’il était un véritable pratiquant du Falun Gong depuis son arrivée au Canada. Cette conclusion se fonde dans une large mesure sur les autres conclusions de la SPR à cet égard. Étant donné que j’ai conclu que certaines des autres conclusions de la SPR portant sur la crédibilité étaient déraisonnables, sa conclusion concernant la demande d’asile sur place doit également être renvoyée à un tribunal différemment constitué pour nouvel examen.


JUGEMENT dans IMM‑2934‑18

LA COUR STATUE que :

  1. La demande est accueillie et l’affaire est renvoyée à un tribunal différemment constitué pour nouvel examen.

  2. Il n’y a aucune question à certifier.

« Michael D. Manson »

Juge

Traduction certifiée conforme

Ce 23e jour de janvier 2019

Chantal DesRochers, LL.B., D.E.S.S. en trad.


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


DOSSIER :

IMM‑2934‑18

 

INTITULÉ :

HONGYU ZHANG c LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

 

LIEU DE L’AUDIENCE :

Toronto (Ontario)

 

DATE DE L’AUDIENCE :

LE 28 NOVEMBRE 2018

 

JUGEMENT ET MOTIFS :

LE JUGE MANSON

 

DATE DES MOTIFS :

LE 3 DÉCEMBRE 2018

COMPARUTIONS :

Hart A. Kaminker

POUR LE DEMANDEUR

Christopher Crighton

POUR LE DÉFENDEUR

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Kaminker et Associates

Toronto (Ontario)

POUR LE DEMANDEUR

Procureur général du Canada

Toronto (Ontario)

POUR LE DÉFENDEUR

 

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