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Date : 20181130


Dossier : T‑470‑18

Référence : 2018 CF 1208

[TRADUCTION FRANÇAISE CERTIFIÉE, NON RÉVISÉE]

Ottawa (Ontario), le 30 novembre 2018

En présence de monsieur le juge Mosley

ENTRE :

JASON HONG

demandeur

et

LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA

défendeur

JUGEMENT ET MOTIFS

I.  Introduction

[1]  Le demandeur, Jason Hong, est membre de la Gendarmerie royale du Canada (la GRC). Il a présenté une demande d’admission au Programme de formation d’apprentissage en identité judiciaire (le PFAIJ) en 2011, mais il a été éliminé du processus de sélection. Il a déposé un grief contre cette décision. Dans la présente demande de contrôle judiciaire, il sollicite une ordonnance de mandamus visant à contraindre la GRC à exécuter une décision datée du 4 octobre 2017 par laquelle un arbitre a ordonné à la GRC de le réintégrer dans le processus. Pour les motifs qui suivent, la demande est rejetée. La Cour exercera son pouvoir discrétionnaire pour ne pas adjuger de dépens à l’encontre du demandeur.

II.  Le contexte

[2]  Le demandeur est membre de la GRC depuis 2007 et il détient actuellement le grade de gendarme. En 2011, il était affecté au détachement de Surrey (Colombie‑Britannique). Pendant cette affectation, il a présenté une demande d’admission au PFAIJ et a produit la trousse de demande requise. Le PFAIJ est un programme de formation qui permet aux membres de la GRC d’apprendre les méthodes d’identification judiciaire et d’examen des lieux de crime.

[3]  Le demandeur a d’abord été informé qu’il avait été éliminé du processus de demande en raison de lacunes sur le plan du rendement. On a plus tard déterminé que le décideur avait confondu le demandeur avec un autre candidat. Après un nouvel examen de sa demande, on l’a alors été informé, le 22 janvier 2012, qu’il ne pouvait pas être libéré du poste qu’il occupait parce que les membres sont tenus de servir pendant trois ans dans le cadre de leur affectation. À l’époque, le demandeur était en poste depuis 1,2 an.

[4]  Le 28 février 2012, le demandeur a déposé un grief contre la décision de la GRC de ne pas le libérer pour le PFAIJ. À la GRC, la procédure applicable aux griefs comporte deux niveaux : le niveau I, soit la première décision à la suite du grief, et le niveau II, soit le réexamen d’une décision de niveau I. Le grief du demandeur a tout d’abord procédé au niveau I.

[5]  Le 27 juillet 2012, le premier arbitre de niveau I a décrété que le demandeur avait déposé son grief en dehors du délai de 30 jours que prévoit la Loi sur la Gendarmerie royale du Canada, LRC 1985, c R‑10, à l’alinéa 31(2)a). Cette décision ne portait que sur la question du délai. Le premier arbitre a toutefois mentionné, au paragraphe 5, que le demandeur avait [traduction« […] franchi l’étape de la sélection préliminaire ».

[6]  La première décision a été infirmée par un arbitre de niveau II le 18 décembre 2014. Ce dernier a renvoyé l’affaire à un arbitre de niveau I différent pour qu’il détermine si le grief était désormais théorique vu que le demandeur avait été muté à un autre détachement.

[7]  Le 2 décembre 2015, le deuxième arbitre de niveau I a conclu que la question n’était pas théorique, car le demandeur souhaitait toujours s’inscrire au PFAIJ. Comme les parties n’avaient pas encore présenté d’arguments sur le fond, l’arbitre a renvoyé l’affaire à un troisième arbitre de niveau I pour qu’il reçoive leurs observations et se prononce sur le fond de la décision.

[8]  Les parties ont déposé leurs observations avant le 27 juillet 2016. Le 22 août 2017, n’ayant toujours pas reçu une décision sur le fond, le demandeur a présenté une demande de contrôle judiciaire en vue d’obtenir une ordonnance de mandamus enjoignant au troisième arbitre de niveau I de rendre une décision. Le 6 octobre 2017, le troisième arbitre de niveau I a confirmé le grief du demandeur, qui a alors mis fin à sa première demande de mandamus.

[9]  Dans la décision confirmant le grief du demandeur, le troisième arbitre de niveau I a interprété à la fois les politiques divisionnaires et nationales applicables et a conclu que, selon le Manuel de la gestion des carrières de la GRC de 2010 [le MGC de 2010], un membre choisi pour le PFAIJ pouvait « être libéré de son poste actuel ». La décision de la GRC de ne pas libérer le demandeur était donc contraire à la politique.

[10]  L’arbitre a jugé qu’il y avait lieu de réintégrer le demandeur dans le processus du PFAIJ là où il était rendu et de lui offrir un poste semblable et disponible. Il a également conclu que le demandeur serait tenu de répondre à toutes les exigences actuelles du PFAIJ. Enfin, il a ordonné à la GRC de confirmer, dans les 30 jours suivant la décision, que le demandeur était admissible au PFAIJ et qu’il souhaitait toujours y participer, et de réactiver le processus d’admission du demandeur au PFAIJ dans les 90 jours suivant la confirmation. L’arbitre a écrit : [traduction« [i]l faut offrir au [demandeur] un poste approprié au Service de l’identité judiciaire [SIJ] ». Il a également ordonné à la GRC d’antidater la promotion du demandeur de deux ans s’il terminait avec succès le PFAIJ et s’il était promu au grade de caporal.

[11]  Le 26 octobre 2017, le demandeur a confirmé qu’il souhaitait toujours suivre le PFAIJ. Quelques jours plus tard, le conseiller en perfectionnement et renouvellement (CPR) de North Vancouver a écrit pour confirmer qu’il avait avisé le SIJ que le demandeur était encore intéressé et qu’il avait 90 jours pour lui trouver un poste.

[12]  Le CPR de North Vancouver a ensuite informé le demandeur qu’il aurait à présenter un formulaire de demande, un curriculum vitae (CV) à jour et un questionnaire dûment rempli du PFAIJ. Le formulaire exigeait aussi des références. Pendant les semaines suivantes, le demandeur et la GRC ont continué de communiquer entre eux pour régler d’autres détails relatifs à la demande et le demandeur a continué de faire un suivi en vue d’obtenir des mises à jour sur l’exécution de la mesure de réparation faisant suite à son grief.

[13]  Le 9 janvier 2018, le CPR du Programme d’identité judiciaire (PIJ) a pris en main l’exécution de la mesure de réparation faisant suite au grief du demandeur. Il lui a de nouveau demandé de fournir un CV à jour ainsi qu’un questionnaire dûment rempli. Selon le CPR du PIJ, ces exigences étaient attribuables à des changements apportés au processus de sélection du PFAIJ entre 2012 et 2017 et il était nécessaire d’y répondre pour pouvoir procéder à une évaluation de l’admissibilité.

[14]  Le CPR du PIJ a considéré le demandeur comme réintégré dans le processus de sélection du PFAIJ en date du 22 décembre 2017. Il l’a confirmé au demandeur le 10 janvier 2018, lors d’un échange de courriels dans lequel ce dernier a fait valoir qu’il n’avait pas à fournir les renseignements demandés. Il a tout de même produit les documents requis, disant que ceux‑ci ne devraient pas avoir d’incidence sur son admissibilité, car sa réadmission au programme était déjà garantie.

[15]  Selon la preuve du CPR du PIJ, pour comprendre le processus il est nécessaire de consulter trois documents : le MGC de 2010, le Manuel du Service intégré de l’identité judiciaire du 15 août 2014, ainsi que le Manuel du Service intégré de l’identité judiciaire du 20 décembre 2017 (le MSIJ de 2017). Le bulletin intitulé « Évaluations psychologiques de la Criminalité technologique et du Service intégré de l’identité judiciaire » (le bulletin AM‑2259) et daté du 18 juillet 2012 est lui aussi pertinent.

[16]  Selon le MGC de 2010, le processus de sélection du PFAIJ comportait quatre étapes : 1) un formulaire de demande et un CV, 2) un examen du dossier par la GRC, 3) le Test d’aptitude à la comparaison matérielle, et 4) une évaluation de l’admissibilité au Programme d’apprentissage en identité judiciaire. Le MGC de 2010 indique également qu’il est possible que l’on effectue des contrôles de références structurés avant qu’un candidat soit admis au PFAIJ. Selon ce processus de sélection, les candidats retenus étaient placés dans le PFAIJ pour s’inscrire au cours d’identité judiciaire (CIJ), puis, lorsque les besoins opérationnels le permettaient, pour être mutés à un poste d’apprenti.

[17]  Le processus de sélection a été modifié en 2012 et, de nouveau, en 2017. Selon le nouveau processus, une fois que les étapes de la demande et de l’examen du dossier sont terminées, les candidats peuvent être mutés directement à un poste d’apprenti. Les membres qui occupent un poste d’apprenti ont commencé à suivre le PFAIJ.

[18]  Selon le MSIJ de 2017, les apprentis suivent le PFAIJ en trois étapes distinctes : 1) un minimum de trois mois de formation et d’évaluations en vue de déterminer l’admissibilité du candidat, 2) la réussite du CIJ, et 3) un apprentissage d’une durée de 12 mois.

[19]  Selon le bulletin AM‑2259, les candidats à un poste au SIJ sont tenus de subir des évaluations psychologiques initiales, qui déterminent s’ils sont admissibles ou non à une affectation au sein du SIJ. Le demandeur a subi les évaluations psychologiques en mars 2018, après avoir déposé la présente demande de contrôle judiciaire. Il a été informé qu’il avait obtenu un résultat satisfaisant le 5 avril 2018.

[20]  Le 25 avril 2018, le CPR du PIJ a fourni au demandeur un formulaire d’avis de planification de mutation concernant les postes disponibles au SIJ. Le demandeur a confirmé le même jour que l’un des postes disponibles l’intéressait. Selon la preuve du CPR du PIJ, d’après le MSIJ de 2017, les membres doivent faire l’objet d’un examen final avant d’être mutés.

[21]  Il ressort clairement de la preuve que le demandeur et le CPR du PIJ ont une conception différente des exigences précises de la décision faisant suite au grief. Le demandeur croyait que cela lui donnait immédiatement droit à un poste au SIJ. Le CPR du PIJ croyait quant à lui que l’on se conformait à la décision en faisant franchir au demandeur les étapes qu’exigeait le MSIJ de 2017, car le demandeur n’avait pas franchi toutes les étapes du processus de sélection en 2011‑2012.

[22]  Dans son affidavit, daté du 10 avril 2018, le demandeur écrit : [traduction« [à] ce jour, je n’ai toujours pas été réadmis au PFAIJ ». Sa demande de contrôle judiciaire vise à obtenir une ordonnance de mandamus obligeant la GRC à l’intégrer au PFAIJ et à lui offrir un poste au SIJ.

III.  Les questions en litige

[23]  Le demandeur est d’avis que la question en litige consiste à savoir s’il faudrait que la Cour rende une ordonnance de mandamus afin d’obliger la GRC à se conformer aux conditions de l’ordonnance de l’arbitre. Le défendeur soutient que la question en litige consiste à savoir si la GRC s’est déjà conformée à l’ordonnance. Selon moi, la question en litige est celle de savoir si la manière dont la GRC interprète la décision faisant suite au grief, de même que les étapes franchies à ce jour pour s’y conformer, est raisonnable. Dans l’affirmative, il n’y a pas lieu que la Cour intervienne.

IV.  La norme de contrôle applicable

[24]  J’ai conclu que la manière dont la GRC interprète la décision de l’arbitre commande la retenue et doit être tranchée selon la norme de la décision raisonnable. Les exigences relatives aux demandes d’admission au PFAIJ constituent un régime distinct pour lequel seule la GRC a l’expertise requise, et je ne suis pas d’avis que l’interprétation soulève une question de droit qui est d’une importance capitale pour le système juridique, une question de nature constitutionnelle, une véritable question de compétence, ou une question concernant la délimitation des compétences respectives de tribunaux spécialisés : voir l’arrêt Dunsmuir c Nouveau‑Brunswick, 2008 CSC 9, aux paragraphes 55, 56 et 58 à 61, [2008] 1 RCS 190.

[25]  Je signale également qu’il existe un appui indirect en faveur d’une approche empreinte de retenue, d’après l’arrêt dans lequel la Cour d’appel fédérale a admis que la décision que prend un commissaire de la GRC au sujet d’une promotion doit être contrôlée selon la norme de la décision raisonnable : Canada (Procureur général) c Boogaard, 2015 CAF 150, aux paragraphes 32 et 33, 474 NR 121.

V.  Analyse

[26]  Le cadre juridique qu’il convient d’appliquer pour déterminer s’il y a lieu de rendre une ordonnance de mandamus est celui qu’a énoncé la Cour d’appel fédérale dans l’arrêt Apotex Inc c Canada (Procureur général), [1994] 1 CF 742, au paragraphe 45, 162 NR 177 (CAF) [Apotex]. Au nombre des exigences que doit établir la partie qui sollicite l’ordonnance figure l’existence d’une obligation légale d’agir à caractère public envers le demandeur ainsi qu’un droit clair d’obtenir l’exécution de cette obligation.

[27]  Le demandeur soutient que la décision datée du 4 octobre 2017 qui faisait suite à son grief exigeait qu’il soit affecté à un poste du SIJ dans les 90 jours suivant la date à laquelle il confirmait son intérêt. Cette décision liait la GRC, soutient‑il, aux termes des paragraphes 32(1) et (4) de la Loi sur la Gendarmerie royale du Canada, et elle n’était pas discrétionnaire. Il prétend de plus qu’il a un droit clair d’obtenir l’exécution de l’obligation d’appliquer la décision, car il a rempli toutes les conditions préalables, il a fait une demande d’exécution antérieure et il n’a aucune autre recours. Parmi les autres conditions préalables à remplir selon l’arrêt Apotex, l’ordonnance demandée aurait pour lui une incidence sur le plan pratique étant donné qu’il continue de vouloir participer au PFAIJ et que tout autre retard lui serait coûteux sur le plan pécuniaire, car sa promotion antidatée serait encore retardée. Il soutient qu’en vertu de l’équité rien n’empêche d’obtenir réparation dans le cadre de la présente demande et que la prépondérance des inconvénients favorise le prononcé d’une ordonnance de mandamus, car une telle mesure ne causerait aucun inconvénient à la GRC. Le PFAIJ existe toujours et il continue d’accepter des candidats. Par ailleurs, soutient le demandeur, il n’est au courant d’aucun besoin opérationnel qui l’oblige à demeurer à son poste actuel.

[28]  Le défendeur ne conteste pas que la décision de l’arbitre donnait lieu à une obligation d’agir et que cette obligation existait envers le demandeur. Il conteste toutefois les prétentions du demandeur selon lesquelles : 1) la décision faisant suite au grief a empêché la GRC d’obliger le demandeur à répondre aux conditions préalables imposées à l’obtention d’un poste au SIJ, et 2) la GRC était tenue de lui offrir un poste approprié dans un délai précisé.

[29]  Les passages pertinents de la décision du 4 octobre 2017 de l’arbitre sont les suivants :

[traduction]

DÉCISION

[41] Pour les motifs susmentionnés, je conclus que le [demandeur] a établi selon la prépondérance des probabilités que la politique relative aux mutations latérales était appliquée de façon incohérente. En conséquence, le grief est retenu et il faut donner au [demandeur] la possibilité de poursuivre le processus d’admission au PFAIJ.

MESURE CORRECTIVE / RÉPARATION

[…]

[46] Si le [demandeur] s’intéresse toujours au [SIJ], il doit être réintégré dans le PFAIJ à l’étape où il était rendu et un poste semblable et disponible doit lui être offert.

[47] Le [demandeur] serait tenu de répondre à toutes les exigences actuelles du PFAIJ. Si le [demandeur] suit avec succès le PFAIJ et est promu par la suite, cette promotion doit être antidatée de 24 mois.

ORDONNANCE

[…]

[50] L’officier des ressources humaines de la Direction générale, ou son délégué, en consultation avec l’officier des ressources humaines de la Division « E », doit, dans les 30 jours suivant la réception de la présente décision, confirmer l’admissibilité du [demandeur] et son intérêt continu à l’égard du PFAIJ.

[51] Dans les 90 jours suivant la date de réception de la confirmation de l’admissibilité et de l’intérêt continu du [demandeur], l’officier des ressources humaines de la Direction générale doit réactiver le processus du PFAIJ pour le [demandeur]. Il faut offrir au [demandeur] un poste approprié au Service de l’identité judiciaire.

[52] Une fois que le [demandeur] aura suivi avec succès le PFAIJ et obtenu par la suite une promotion en vertu de la section 15 du chapitre 14 du MGC, la date de promotion sera antidatée d’une période supplémentaire de deux ans par l’officier des ressources humaines de la Direction générale.

[Non souligné dans l’original.]

[30]  Les parties se concentrent chacune sur des passages particuliers de la décision faisant suite au grief, des passages qui, d’après elles, confirment leur point de vue particulier sur cette controverse. Le demandeur se fonde sur le passage selon lequel [traduction« [i]l faut offrir au [demandeur] un poste approprié au [SIJ] ». Le défendeur cite le passage selon lequel [traduction« le [demandeur] serait tenu de répondre à toutes les exigences actuelles du PFAIJ ».

[31]  Le demandeur soutient que la seule condition préalable qu’il restait à remplir était de confirmer qu’il était toujours intéressé, comme il est indiqué au paragraphe 46 de la décision. Il fait valoir que la conclusion du premier arbitre, à savoir qu’il avait [traduction« franchi l’étape de la sélection préliminaire », règle la question de savoir s’il avait répondu aux conditions préalables. Dans des courriels échangés avec le CPR du PIJ en janvier 2018, le demandeur a écrit qu’on lui avait dit en 2011 qu’il commencerait à effectuer des rotations au sein de l’équipe du SIJ du détachement de Surrey de la GRC et qu’il suivrait ensuite le CIJ à Ottawa. Il estimait que cela voulait dire qu’il avait répondu à toutes les exigences du processus de sélection du PFAIJ. On l’a toutefois informé, en janvier 2018, que, d’après le processus en vigueur, il restait plusieurs étapes à franchir, dont une évaluation de l’admissibilité. À l’audience, le défendeur a fait part à la Cour du résultat de cette évaluation; la Cour ne considère pas que ce résultat soit pertinent pour ce qui est de trancher la présente demande.

[32]  Le demandeur, cela se comprend, est agacé par les retards et les tergiversations auxquelles il a été confronté en tentant de donner suite à son intérêt à l’égard d’une carrière en tant que spécialiste de l’identité judiciaire de la GRC. Du point de vue de la Cour, les procédures qu’emploie la GRC semblent être un dédale bureaucratique qui ferait en sorte que n’importe quel candidat aurait de la difficulté à réussir. La persistance du demandeur est à porter au crédit de sa détermination.

[33]  Cela dit, je ne suis pas convaincu qu’il convient en l’espèce que la Cour intervienne et exerce sa compétence en equity pour rendre une ordonnance de mandamus. La décision faisant suite au grief exigeait que le demandeur soit réintégré dans le processus de sélection et qu’on lui crédite les étapes déjà franchies. Mais l’arbitre a aussi clairement indiqué qu’il devait répondre aux exigences actuelles du processus de sélection du PFAIJ. Selon moi, le dossier n’étaye pas la conception du demandeur selon laquelle le succès qu’il avait remporté devant l’arbitre voulait dire qu’il n’était pas tenu de se soumettre aux nouvelles exigences.

[34]  À partir du moment où le CPR du PIJ a pris en main le dossier du demandeur et s’est apprêté à lui faire subir le reste des étapes du processus de sélection du PFAIJ, le demandeur a été réintégré dans le processus de sélection du PFAIJ. Comme cela a été fait dans le délai de 90 jours suivant la date à laquelle le demandeur a confirmé qu’il était toujours intéressé, la GRC a rempli les exigences que lui imposait la décision faisant suite au grief. Il n’y a pas eu de défaut de se conformer à la décision. La Cour ne peut ordonner l’exécution d’une obligation d’agir dont on s’est déjà acquitté.

VI.  Les dépens

[35]  Le défendeur avait demandé les dépens. À l’audience, les parties ont informé la Cour qu’elles s’étaient entendues sur le montant qu’elles considéraient comme une adjudication appropriée en faveur de l’une ou l’autre partie, suivant l’issue de l’affaire. Dans les circonstances de l’espèce, lesquelles sont imputables en partie aux retards causés par la défenderesse, la Cour exercera son pouvoir discrétionnaire pour refuser d’adjuger des dépens, même si, en définitive, la défenderesse a eu entièrement gain de cause.


JUGEMENT dans le dossier T‑470‑18

LA COUR ORDONNE :

  1. La demande de contrôle judiciaire et de mandamus est rejetée.

  2. Les parties supporteront leurs propres dépens.

« Richard G. Mosley »

Juge

Traduction certifiée conforme

Ce 20e jour de décembre 2018

Julie Blain McIntosh, traductrice


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


DOSSIER :

T‑470‑18

INTITULÉ :

JASON HONG c LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA

 

LIEU DE L’AUDIENCE :

OTTAWA (ONTARIO)

DATE DE L’AUDIENCE :

LE 5 NOVEMBRE 2018

JUGEMENT ET MOTIFS :

Le juge mosley

DATE DES MOTIFS :

le 30 NOvembre 2018

COMPARUTIONS :

Christopher Rootham

pour le demandeur

Patrick Bendin

pour le défendeur

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Nelligan O’Brien Payne s.r.l.

Ottawa (Ontario)

pour le demandeur

Procureur général du Canada

Ottawa (Ontario)

pour le défendeur

 

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