Décisions de la Cour fédérale

Informations sur la décision

Contenu de la décision

Date : 20181025


Dossier : T‑741‑18

Référence : 2018 CF 1078

[Traduction française certifiée, non révisée]

ENTRE :

AMGEN INC. ET AMGEN CANADA INC.

demanderesses/défenderesses reconventionnelles

et

PFIZER CANADA INC.

défenderesse/demanderesse reconventionnelle

ORDONNANCE ET MOTIFS

[1]  La Cour est saisie d’une requête déposée par Pfizer Canada Inc. (Pfizer) qui vise l’obtention, au titre de l’article 6.08 du Règlement sur les médicaments brevetés (Avis de conformité) (le Règlement), d’une ordonnance rejetant l’action en l’espèce au motif qu’elle est inutile, scandaleuse, frivole ou vexatoire ou qu’elle constitue par ailleurs un abus de procédure. Pfizer soutient qu’Amgen Canada Inc. (Amgen), la demanderesse, a fait valoir à plusieurs reprises, indûment et sans succès, le brevet canadien no 1 341 537 (le brevet 537), celui en cause dans l’action en l’espèce au titre du Règlement.

[2]  Amgen commercialise et vend les médicaments biologiques NEUPOGEN (filgrastim) et NEULASTA (pelfilgrastim) au Canada. Titulaire présumée du brevet 537, elle a inscrit ce brevet au Registre canadien des brevets à l’égard de ces deux médicaments. Pfizer a déposé une présentation de drogue nouvelle (PDN) auprès du ministre de la Santé, et demandé un avis de conformité (AC) en vue de commercialiser le NIVESTYM, un produit biosimilaire au NEUPOGEN. Comme l’exige le Règlement, Pfizer a signifié à Amgen son avis d’allégation (AA) le ou vers le 7 mars 2018. Le 20 avril suivant, Amgen a intenté l’action en l’espèce en vertu du paragraphe 6(1) du Règlement.

[3]  Pfizer invoque les instances antérieures intentées par Amgen au titre du Règlement à l’appui de la présente requête et soutient que cette dernière n’est plus en droit de faire valoir à nouveau le brevet 537 aux termes du Règlement. Pour les motifs énoncés ci‑après, la requête de Pfizer est rejetée.

Les instances antérieures

Dossier de la Cour T‑2072‑12

[4]  Dans cette demande, Amgen a fait valoir le brevet 537 au titre du Règlement à l’encontre d’Apotex Inc. (Apotex), laquelle sollicitait un AC pour le GRASTOFIL, un produit biosimilaire au NEUPOGEN. Apotex ayant contesté la validité du brevet 537 dans son AA, Amgen a présenté une demande afin d’obtenir une ordonnance interdisant au ministre de la Santé de délivrer un AC à Apotex avant l’expiration du brevet 537. Dans une décision datée du 10 novembre 2015, le juge Hughes a estimé que les allégations d’invalidité du brevet 537 pour cause d’évidence soulevées par Apotex étaient fondées.

Dossier de la Cour T‑1710‑15

[5]  Avant que le juge Hughes ne rende sa décision du 10 novembre 2015 dans le dossier T‑2072‑12, Amgen a fait valoir le brevet 537 au titre du Règlement dans une deuxième demande. Apotex cherchait à obtenir un AC pour le GRASTOFIL à une autre concentration. Amgen a déposé une demande au titre du Règlement le 9 octobre 2015 en vue d’obtenir une ordonnance interdisant au ministre de la Santé de délivrer un AC pour ce produit GRASTOFIL avant l’expiration du brevet 537. Amgen a maintenu sa demande après que le juge Hughes eut rendu sa décision et le 23 août 2016, Apotex a introduit, en vertu de l’alinéa 6(5)b) du Règlement, une requête en rejet de la demande dans le dossier T‑1710‑15.

[6]  À l’audition de cette requête, Amgen a reconnu que la deuxième demande relative au GRASTOFIL devait être traitée comme la première (elle n’entendait pas soumettre d’autres arguments ou éléments de preuve que ceux produits dans le cadre de la première demande concernant GRASTOFIL), mais elle a fait valoir que cette demande ne devait pas être rejetée, car elle cherchait encore à obtenir une autorisation d’appel devant la Cour suprême du Canada relativement à la décision de la Cour d’appel fédérale de rejeter l’appel visant la décision de la Cour fédérale au motif qu’il était devenu théorique.

[7]  Cet argument a été rejeté et la deuxième demande relative au GRASTOFIL a été rejetée le 4 octobre 2016, parce qu’elle constituait un abus de procédure. Apotex a obtenu l’AC relativement à la nouvelle concentration de GRASTOFIL et a commencé à commercialiser le produit au Canada.

[8]  Après la mise en marché par Apotex au Canada des produits GRASTOFIL, Amgen a intenté une action aux termes de la Loi sur les brevets pour contrefaçon du brevet 537. Cette action de même que la demande reconventionnelle d’Apotex en invalidité et l’action en dommages‑intérêts au titre de l’article 8 ont été abandonnées, et le GRASTOFIL est encore sur le marché.

Dossier de la Cour T‑145‑17

[9]  Le 30 janvier 2017, Amgen a intenté une demande en vue d’obtenir une ordonnance interdisant au ministre de la Santé de délivrer un AC à BGP Pharma ULC, faisant affaire sous la dénomination sociale Mylan (Mylan) relativement au FULPHILA, un produit biosimilaire au NEULASTA, avant l’expiration du brevet 537. Le 28 février 2017, Mylan a informé Amgen qu’elle avait l’intention d’introduire une requête en rejet de la demande pour abus de procédure en vertu de l’alinéa 6(5)b) du Règlement. Le 13 mars 2017, Amgen s’est désistée de la demande concernant FULPHILA. Cela dit, ce produit de Mylan n’a pas encore été commercialisé.

La présente instance

Dossier de la Cour T‑741‑18

[10]  Comme je l’ai noté précédemment, Pfizer a signifié l’AA à Amgen le 7 mars 2018. L’AA comprend les mêmes allégations d’évidence auxquelles le juge Hughes a fait droit dans la première demande relative au GRASTOFIL. Le 20 avril 2018, Amgen a intenté la présente instance en vertu du paragraphe 6(1) du Règlement modifié – il s’agit d’une action plutôt que d’une demande.

[11]  Dans sa déclaration (encore postérieure à la délivrance d’un AA), Amgen allègue que la fabrication, la conception, l’utilisation, la vente, la mise en vente, l’importation ou l’exportation de NIVESTYM conformément à la PDN de Pfizer contreviendraient à au moins l’une des revendications 1‑3, 5‑6, 13‑15, 20‑22, 25, 28, 32, 43‑47 du brevet 537. Dans sa défense et demande reconventionnelle, Pfizer allègue entre autres que le brevet 537 est invalide et nul, notamment pour les motifs énoncés par le juge Hughes dans la décision du 10 novembre 2015 relativement à la première demande relative au GRASTOFIL.

[12]  Dans la présente requête, Pfizer demande donc à ce que l’action soit rejetée aux termes de l’article 6.08 du Règlement au motif qu’elle constitue un abus de procédure. Le libellé de cette disposition étant identique à celui de l’ancien alinéa 6(5)b), Pfizer soutient que les principes et la jurisprudence élaborés sous le régime de l’alinéa 6(5)b) devraient déterminer l’issue de sa requête – le juge Hughes ayant conclu que les allégations d’invalidité du brevet 537 pour cause d’évidence étaient fondées, Amgen devrait, selon Pfizer, être empêchée d’invoquer le brevet 537 dans d’autres instances au titre du Règlement, qu’il s’agisse de demandes ou d’actions, afin qu’elle ne puisse pas non plus se prévaloir de la suspension automatique de 24 mois prévue par le Règlement et qui interdit à ses concurrents d’obtenir un AC ou d’entrer sur le marché. Pfizer avance en outre que si Amgen souhaitait préserver son droit de faire valoir le brevet 537, elle aurait dû le retirer du registre, laisser les concurrents obtenir leur AC et entrer sur le marché, et n’intenter une action en contrefaçon au titre de la Loi sur les brevets qu’ultérieurement. Selon Pfizer, laisser Amgen poursuivre la présente action aux termes du Règlement revient à [traduction« remettre en état » le brevet 537, ce qui risque de donner lieu à des décisions incohérentes au titre du Règlement et menacer de ce fait la crédibilité du processus décisionnel de la Cour.

L’instance actuelle constitue‑t‑elle un abus de procédure?

Le Règlement modifié

[13]  Le Règlement actuel (le Règlement modifié) est entré en vigueur le 21 septembre 2017, et remplace les demandes sommaires d’interdiction par des actions à part entière visant à trancher de manière définitive les questions de fond liées à la contrefaçon et à l’invalidité des brevets. Le résumé de l’étude d’impact de la réglementation (REIR) publiée dans la Gazette du Canada, Partie I, volume 151, no 28, le 15 juillet 2017 confirme que les modifications visaient à corriger les lacunes de l’ancien Règlement, dont l’effet était notamment :

  • - d’entraver les procédures liées à l’obtention et à la production de la preuve – les parties ne devaient s’appuyer que sur un « dossier papier » sans pouvoir recourir aux interrogatoires préalables ni aux témoignages de vive voix;

  • - de priver les parties de véritables droits d’appel en raison du problème du « caractère théorique » qui se posait après la délivrance de l’AC;

  • - d’obliger les titulaires/cessionnaires de brevet à intenter des actions subséquentes pour faire valoir leurs droits relativement au brevet – les demandes fondées sur l’ancien Règlement ne permettaient pas de trancher les questions concernant la contrefaçon ou l’invalidité des brevets, mais seulement d’établir si les allégations de ce type formulées dans l’AA étaient « fondées ».

[14]  Le libellé de l’article 6.08 du Règlement modifié est en substance le même que celui de la disposition antérieure, l’alinéa 6(5)b) de l’ancien Règlement :

Toute action intentée en vertu du paragraphe 6(1) peut, sur requête de la seconde personne, être rejetée en tout ou en partie au motif qu’elle est inutile, scandaleuse, frivole ou vexatoire ou qu’elle constitue par ailleurs un abus de procédure à l’égard d’un ou de plusieurs brevets ou certificats de protection supplémentaire.

[15]  Comme le notait récemment la protonotaire Aylen, responsable de la gestion de l’instance, dans la décision Gentech Inc. c Amgen Canada Inc., 2018 CF 303 :

L’article 6.08 n’est pas une nouvelle disposition introduite par l’entrée en vigueur du Règlement modifié en septembre 2017. Plutôt, on retrouve une application antérieure de l’article 6.08 dans l’alinéa 6(5)b) d’une version précédente du Règlement et la formulation de l’alinéa 6(5)b) était presque identique à la formulation actuelle de l’article 6.08. En outre, la formulation de l’article 6.08 suit celle des alinéas 221(1)c) et f) des Règles des Cours fédérales.

[16]  Pfizer s’appuie sur la première instance concernant le produit GRASTOFIL d’Apotex et soutient qu’une fois que la Cour a conclu (comme l’a fait le juge Hughes) qu’une allégation d’invalidité concernant un brevet est fondée, invoquer le Règlement (et obtenir la mesure injonctive d’une durée maximale de 24 mois) à l’égard du même brevet constitue un abus de la procédure de la Cour. Pfizer fait valoir qu’Amgen devrait connaître en l’espèce le même sort que dans la deuxième demande concernant le produit GRASTOFIL d’Apotex, laquelle avait été rejetée aux termes de l’alinéa 6(5)b) du Règlement. Pfizer prétend que la présente instance est la quatrième intentée par Amgen au titre du Règlement et qu’il est bien établi par la jurisprudence pertinente que les premières personnes ne peuvent pas réclamer de [traduction« deuxièmes chances »Sanofi‑Aventis Canada Inc. c. Novopharm, 2007 CAF 163; Pfizer Canada Inc. c Novopharm Ltd., 2008 CAF 263; Gilead Sciences Inc. c Apotex Inc., 2015 CF 610.

[17]  Le problème pour Pfizer en l’espèce tient toutefois à ce que les conclusions du juge Hughes au sujet de la première demande relative au produit GRASTOFIL d’Apotex ne peuvent tout simplement pas être transposées à la présente requête. Il faut tenir compte du fonctionnement de l’ensemble du régime AC dans la version ancienne et dans la version modifiée du Règlement, et se demander quelle était exactement la question que le juge Hughes a examinée et tranchée au titre de l’ancien régime et dans quelle mesure sa décision s’applique, le cas échéant, à l’action en l’espèce.

[18]  Le juge Hughes a décidé, au titre du Règlement alors en vigueur, que les allégations d’invalidité du brevet 537 pour cause d’évidence ayant été mises de l’avant par Apotex étaient justifiées. Sur cette base, la demande d’Amgen visant à obtenir une ordonnance interdisant au ministre de la Santé de délivrer un AC à Apotex pour la concentration de GRASTOFIL indiquée dans sa PDN a été rejetée. Apotex a obtenu l’AC et est entrée sur le marché, il était alors loisible à Amgen d’intenter une action en contrefaçon du brevet 537, et à Apotex de faire valoir l’invalidité du brevet.

[19]  Les demandes au titre de l’ancien Règlement permettaient uniquement de déterminer si les allégations d’une seconde personne étaient « justifiées » et s’il fallait interdire au ministre de la Santé de délivrer un AC. Les questions concernant la validité et/ou la contrefaçon du brevet « n’étaient pas tranchées de façon définitive » (Apotex c Pfizer Canada Inc., 2011 CAF 77, et le REIR).

[20]  Par ailleurs, comme l’a fait observer Amgen, une fois que le ministre de la Santé délivrait l’AC, les considérations intéressant le brevet étaient jugées sans pertinence et tout appel concernant une demande rejetée devenait théorique (Janssen c Teva Canada Limited, 2015 CAF 36; Abbott Laboratories c Apotex, 2007 CAF 368; Eli Lilly c Novopharm, 2007 CAF 359). Dans ces circonstances, les demandeurs déboutés pouvaient être empêchés d’intenter des demandes subséquentes en vue d’obtenir une ordonnance d’interdiction aux termes de l’ancien Règlement – mais leur recours et la question de la validité et de la contrefaçon du brevet pouvaient être renvoyés et tranchés de manière définitive par voie d’action et/ou de demande reconventionnelle. Comme le notait la Cour d’appel fédérale dans l’arrêt Sanofi‑Aventis Canada c Novopharm Ltd., 2007 CAF 163, au paragraphe 36, les décisions se rapportant à des demandes fondées sur (l’ancien) Règlement « n’[avaient] pas force exécutoire pour les actions en contrefaçons de brevet ou pour déclarer qu’un brevet [était] invalide ».

[21]  Comme aucun argument ou aucune action ou demande reconventionnelle visant à faire invalider le brevet 537 n’a donné lieu à une décision définitive, ce brevet n’a pas cessé d’être valide et applicable.

[22]  La question que le juge Hughes n’a pas tranchée, et qu’il ne pouvait pas trancher aux termes de l’ancien Règlement, est celle qui se pose dans l’action en l’espèce fondée sur le nouveau Règlement : à savoir le brevet 537 est‑il valide et, le cas échéant, le produit NIVESTYM de Pfizer contrevient‑il à l’une des revendications invoquées? Si la décision est favorable à Pfizer, celle‑ci obtiendra du ministre de la Santé l’AC concernant le NIVESTYM et elle pourra entrer sur le marché sans s’exposer à d’autres actions de la part d’Amgen, soit parce que le brevet 537 aura été jugé invalide, soit parce qu’il aura été établi que le NIVESTYM ne constitue pas une contrefaçon de ce brevet. Ce seront des décisions définitives, simplement sujettes au plein exercice du droit d’appel.

[23]  Ainsi, non seulement le Règlement modifié institue‑t‑il un processus d’instruction plus complet des actions, processus prévoyant les garanties procédurales de l’interrogatoire et des témoignages de vive voix, mais les questions à trancher diffèrent selon qu’il s’agit de la version ancienne ou modifiée du Règlement – les questions de fond concernant la validité et la contrefaçon, et pas simplement le bien‑fondé des allégations, seront désormais tranchées. Amgen ne cherche pas à obtenir une « deuxième chance ». La présente action est effectivement sa première et unique chance.

[24]  Aux termes du Règlement modifié, il sera interdit à Amgen d’intenter une autre action contre Pfizer en contrefaçon du brevet 537. La première personne/le titulaire de brevet qui a inscrit son brevet sur le registre et qui reçoit l’AA d’une seconde personne, mais choisit de ne pas engager d’instance en vertu du Règlement modifié, ne peut intenter d’actions subséquentes en contrefaçon contre cette seconde personne, sauf si elle n’avait pas « des motifs raisonnables pour intenter une action » (REIR, paragraphe 3322). La présente action est donc l’unique recours d’Amgen.

[25]  Pfizer prétend néanmoins que l’action en l’espèce devrait être sommairement rejetée aux termes de l’article 6.08 du Règlement modifié, compte tenu des décisions rendues dans le dossier T‑2072‑12 au titre du paragraphe 6(1) de l’ancien Règlement ainsi que dans le dossier T‑1710‑15 au titre de l’alinéa 6(5)b) de l’ancien Règlement. Pfizer ajoute que, si sa requête est accueillie, Amgen ne peut pas intenter d’action pour contrefaçon de brevet aux termes de la Loi sur les brevets, étant donné que le brevet 537 est inscrit au registre des brevets. De cette manière, Amgen sera toujours empêchée de faire valoir une contrefaçon sur son brevet valide et applicable.

[26]  Pour éviter ces conséquences, d’après Pfizer, Amgen aurait dû rapidement retirer le brevet 537 du registre avant de se faire signifier (sans savoir quand) tout autre AA par quelque seconde personne. C’est là un résultat absurde, jamais envisagé par le nouveau Règlement. Les droits qu’a acquis Amgen relativement au brevet restent les siens et les revendications de son brevet sont présumées valides en droit jusqu’à preuve du contraire.

[27]  Le Règlement modifié a eu pour effet de changer la procédure ainsi que les questions à trancher au titre du Règlement, supprimant la double voie potentielle consistant à évaluer le bien‑fondé des allégations de non‑contrefaçon et d’invalidité dans le cadre d’une demande visant la délivrance d’un AC, puis à trancher de manière définitive la ou les questions relatives à la contrefaçon et à la validité dans le cadre d’une action. Le Règlement modifié vise à accorder aux parties le droit de mettre en litige les questions liées au brevet afin qu’elles soient tranchées sur la base d’un dossier complet, dans le cadre d’une seule instance ouvrant à un véritable droit d’appel. Le législateur a laissé à la première personne le choix d’inscrire son brevet sur le registre et de mettre en litige les questions afférentes au brevet dans le délai de 24 mois prévu par le Règlement modifié ou de retirer le brevet du registre, autorisant de ce fait les concurrents potentiels à obtenir un AC sans signifier d’AA, et d’intenter ensuite un litige relatif au brevet aux termes de la Loi sur les brevets après l’entrée sur le marché d’un concurrent.

[28]  Par conséquent, je ne suis pas convaincue hors de tout doute qu’il est manifeste et évident que la présente action est scandaleuse, frivole, vexatoire ou qu’elle constitue par ailleurs un abus de procédure de la Cour. Il ne s’agit ni d’une remise en litige ni d’un recours superflu. Les actions intentées aux termes du Règlement modifié ne servent pas à trancher les mêmes questions que celles mises en litige par les demandes fondées sur l’ancien Règlement. Toutefois, cela ne signifie pas que certaines décisions prises en vertu de l’alinéa 6(5)b) de l’ancien Règlement ne pourraient pas s’appliquer, dans une certaine mesure, à des requêtes intentées en vertu de l’article 6.08 du Règlement modifié, mais tel n’est pas le cas en l’espèce. Le fait qu’Amgen i) n’a pas réussi à convaincre le juge Hughes dans le dossier T‑2072‑12 que les allégations d’invalidité pour cause d’évidence ayant été mises de l’avant par Apotex n’étaient pas fondées, et ii) a vu sa demande rejetée dans le dossier T‑1710‑15 aux termes de l’alinéa 6(5)b) de l’ancien Règlement, ne l’empêche pas de faire valoir le brevet 537 contre Pfizer dans la présente action au titre du nouveau Règlement, car ici, les questions de contrefaçon et d’invalidité seront tranchées sur le fond.

[29]  La requête doit être rejetée et, bien qu’il s’agisse de l’une des premières requêtes de ce genre à être intentée aux termes de l’article 6.08 du Règlement modifié, je suis convaincue, pour les motifs qui précèdent, que les dépens devraient être accordés à Amgen, quelle que soit l’issue de la cause.


ORDONNANCE DANS LE DOSSIER T‑741‑18

LA COUR STATUE que :

  1. La requête est par les présentes rejetée; les dépens sont accordés aux demanderesses, quelle que soit l’issue de la cause.

  2. Si les parties ne parviennent pas à s’entendre sur le montant devant être payé à titre de dépens, elles pourront déposer des observations écrites de deux pages tout au plus dans les 15 jours de la date de la présente ordonnance.

« Martha Milczynski »

Juge responsable de la gestion de l’instance

Traduction certifiée conforme

Ce 23e jour de novembre 2018.

Maxime Deslippes, traducteur


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


DOSSIER :

T‑741‑18

INTITUL :

AMGEN INC. ET AMGEN CANADA INC. c PFIZER CANADA INC.

LIEU DE L’AUDIENCE :

toronto (ontario)

date DE L’AUDIENCE :

Le 28 septembre 2018

MOTIFS DU JUGEMENT ET JUGEMENT :

LA PROTONOTAIRE milczynski

DATE DES MOTIFS :

Le 25 octobre 2018

COMPARUTIONS :

DOMINIQUE HUSSEY, ARTHUR B. RENAUD, WILLIAM BORTOLIN

POUR LES DEMANDERESSES/DÉFENDERESSES RECONVENTIONNELLES

ORESTES PASPARAKIS, MARK DAVIS, DANIEL DANIELE

POUR La DÉFENderesse/dEMANdEresse reconventionnelle

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

BENNETT JONES LLP

Avocats

Toronto (Ontario)

POUR LES Demanderesses/défendEresseS reconventionnelleS

NORTON ROSE FULBRIGHT CANADA LLP

Avocats

Toronto (Ontario)

POUR LA défendEresse/DEMANDERESSE reconventionnelle

 

 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.