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Date : 20180725


Dossier : IMM-3-18

Référence : 2018 CF 781

[TRADUCTION FRANÇAISE]

Ottawa (Ontario), le 25 juillet 2018

En présence de madame la juge McVeigh

ENTRE :

GUIYING YAN

demanderesse

et

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

défendeur

JUGEMENT ET MOTIFS

I.  Introduction

[1]  Le 23 juillet 2012, la Section de la protection des réfugiés (SPR) de la Commission de l’immigration et du statut de réfugié a reçu une demande d’asile de Guiying Yan (la demanderesse), une citoyenne chinoise qui a affirmé qu’elle craignait d’être persécutée en raison de ses opinions politiques. La demanderesse affirme que le Bureau de la sécurité publique (BSP) voulait l’arrêter en raison de ce qu’elle décrit comme des propos antigouvernementaux tenus au cours d’une manifestation contre l’expropriation de sa maison dans la ville de Guangzhou.

[2]  Dans une décision rendue de vive voix datée du 21 novembre 2017, la SPR a conclu que la demanderesse n’avait pas établi un lien à un motif prévu à la Convention, et a décidé qu’elle n’était ni une réfugiée au sens de la Convention ni une personne à protéger aux termes des articles 96 et 97 de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, LC 2001, c 27. Par conséquent, la SPR a rejeté sa demande d’asile.

[3]  Le 18 décembre 2017, la demanderesse a présenté une demande de contrôle judiciaire à notre Cour. Elle a largement fait valoir que la décision était contraire à la preuve dont la SPR disposait.

[4]  Je conclus que la décision de la SPR est appuyée par l’ensemble des éléments de preuve, et pour les motifs ci-dessous, je vais rejeter la présente demande.

II.  Contexte

[5]  La demanderesse est une citoyenne de la Chine, où elle était propriétaire d’une maison dans la ville de Guangzhou, dans la province du Guangdong, en Chine. En mars 2012, elle a reçu une lettre expliquant que le gouvernement allait l’exproprier de sa maison dans le cadre d’une reconstruction du quartier. En retour, chaque ménage exproprié recevrait une indemnisation qui, selon la demanderesse, était bien en deçà de la valeur de la propriété.

[6]  Cinq résidents ont été désignés pour négocier une meilleure indemnisation, mais sans succès. Lorsque la démolition a commencé le 10 avril 2012, la demanderesse et les autres résidents ont protesté. Ils se sont confrontés aux travailleurs, ont formé une barrière humaine autour de leurs maisons et ont crié des slogans tels que [traduction] « le gouvernement est corrompu », « l’indemnisation est injuste », « arrêtez de prendre nos maisons » et « respectez les droits de la personne »

[7]  Beaucoup de gens se sont attroupés pour venir regarder. Les agents de police assistant à la scène sont descendus de leurs voitures de patrouille et se sont frayé un chemin à travers la foule jusqu’aux manifestants. La demanderesse a vu des agents attaquer d’autres résidents et elle s’est enfuie pour se cacher avec un autre résident.

[8]  Au cours de l’audience de la SPR, la demanderesse a déclaré qu’un voisin l’a plus tard informée que le BSP était allé chez elle pour l’arrêter. Quoiqu’elle ne puisse prouver qu’ils venaient l’arrêter, elle affirme que les allégations la visant comprenaient : « rassemblement illégal de personnes visant à perturber l’ordre social, atteinte à l’autorité du gouvernement, et obstruction à la démolition »

[9]  Son témoignage souligne que le BSP a continué de chercher à savoir où elle se trouvait en questionnant sa famille. La demanderesse a embauché un passeur qui l’a aidée à obtenir un visa américain en utilisant des renseignements frauduleux et elle a réussi à quitter la Chine en utilisant son propre passeport. Elle est ensuite entrée illégalement au Canada en provenance des États-Unis et a présenté une demande d’asile reçue par la SPR le 23 juillet 2012. L’audience de la SPR a eu lieu le 21 novembre 2017. Par une décision rendue de vive voix, la SPR a rejeté sa demande d’asile.

III.  Questions en litige

[10]  Les questions en litige sont les suivantes :

  1. La SPR a-t-elle commis une erreur en concluant à l’absence d’un lien avec l’un des motifs prévus par la Convention?
  2. La SPR a-t-elle commis une erreur en concluant que la demanderesse n’était pas recherchée par le BSP?

IV.  Norme de contrôle

[11]  La décision de la SPR doit être examinée selon la norme de la décision raisonnable. Cela comprend la décision de la SPR quant à savoir s’il existe un lien avec un motif prévu par la Convention, une question mixte de fait et de droit (Flores Jacobo c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2012 CF 345, au paragraphe 50). Les conclusions d’invraisemblance sont également assujetties à la norme de la décision raisonnable, mais la Cour a le droit de les examiner soigneusement (Jiang c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2015 CF 486, aux paragraphes 8 et 9 [Jiang]).

V.  Analyse

A.  La SPR a-t-elle commis une erreur en concluant à l’absence d’un lien avec l’un des motifs prévus par la Convention?

[12]  La demanderesse fait valoir que la jurisprudence de notre Cour indique qu’elle a bien établi un lien avec un motif prévu par la Convention. En l’occurrence, la demanderesse invoque la situation observée dans l’affaire Zhou c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2013 CF 619, au paragraphe 34 [Zhou], où le juge O’Keefe a conclu que le fait qu’au cours d’une expropriation un demandeur crie le slogan [traduction] « le gouvernement est injuste ». Pour moi, un tel comportement ressemble à une protestation contre le gouvernement.

[13]  La demanderesse a reconnu que d’autres cas, comme la décision du juge Phelan en fait foi dans l’affaire Jiang, aux paragraphes 14 à 16, il a été déclaré que les manifestations concernant les indemnités d’expropriation de propriétés n’établissent pas de lien avec un motif prévu par la Convention. Plus précisément, dans l’affaire Jiang, au paragraphe 14, le juge Phelan a expliqué : « [i]l ne fait aucun doute que le problème des demandeurs avec les autorités chinoises portait sur la somme de l’indemnité à laquelle ils avaient droit pour leur expropriation. Sans autres considérations, cette question pourrait difficilement cadrer dans celles qui font l’objet de la Convention ».

[14]  La demanderesse soutient cependant que ses propos antigouvernementaux pendant la manifestation représentent une différence majeure qui distingue son cas de l’affaire Jiang. En particulier, la demanderesse affirme avoir crié [traduction] « le gouvernement est corrompu », « l’indemnisation est injuste », « arrêtez de prendre nos maisons », et « respectez les droits de la personne ».

[15]  La demanderesse invoque les éléments de preuve au dossier à l’appui de ses arguments. Le dossier comprenait son formulaire de renseignements personnels indiquant que les infractions pour lesquelles elle est recherchée comprennent l’infraction [traduction] « d’atteinte à l’autorité du gouvernement ». La demanderesse soutient que, contrairement à la décision de la SPR, cela prouve qu’elle est recherchée en raison de ses opinions politiques, ce qui représente un lien avec un motif prévu par la Convention.

[16]  La transcription révèle clairement que la SPR a questionné la demanderesse à propos des slogans qu’elle a criés :

[traduction]

COMMISSAIRE : De quelle manière avez-vous violé la loi?

DEMANDERESSE : En manifestant, pour protester avec les résidents et crier des slogans, la corruption du gouvernement, en manifestant avec les résidents pour dire que le gouvernement est corrompu, que l’indemnisation est injuste.

[17]  Interrogée par son avocat, elle a donné le même témoignage :

[traduction]

AVOCAT : …Oui, je voulais revenir sur l’incident qui a eu lieu le 10 avril 2012 et vous nous aviez indiqué que vous aviez crié des slogans; pouvez-vous nous dire les slogans que vous avez criés?

DEMANDERESSE : Le gouvernement est corrompu, l’indemnisation est injuste, on détruit nos maisons, respectez les droits de la personne et aussi j’ai crié fort que la police agressait les gens ».

[18]  Lorsqu’on lui a demandé plus tard au cours de l’interrogatoire ce qu’elle avait fait d’illégal, elle a dit qu’elle avait rassemblé les résidents :

[traduction]

AVOCAT : …mais avez-vous vraiment rassemblé des résidents ou est-ce que vous avez été accusée de l’avoir fait?

DEMANDERESSE : J’ai été impliquée dans le rassemblement, oui. Ma maison est la seule chose qu’il me reste, la maison pour moi est très importante.

[19]  La SPR a déduit du témoignage de la demanderesse que le litige portait sur le montant de l’indemnisation. La SPR a expliqué que le gouvernement peut légalement indemniser les propriétaires en cas d’expropriation et il s’ensuit que les slogans criés au cours de la manifestation visaient l’indemnisation des maisons expropriées :

[traduction]

À cet égard, la manifestation ne visait pas la politique d’expropriation du gouvernement, mais le montant de l’indemnisation que les propriétaires recevraient. Le tribunal constate en outre que les slogans apparemment scandés ne constituent pas une preuve suffisante pour étayer l’allégation d’opposition ou d’opinion politique.

[20]  De plus, la demanderesse a affirmé qu’elle était recherchée pour [traduction« rassemblement illégal de personnes visant à perturber l’ordre social, atteinte à l’autorité du gouvernement et obstruction à la démolition » et a soutenu que l’accusation [traduction] « d’atteinte à l’autorité du gouvernement » démontre que le BSP la recherche en raison de ses opinions politiques.

[21]  Elle n’a cependant produit aucun élément de preuve à la SPR reliant cette accusation à ses opinions politiques. La SPR a déclaré plus tard dans ses motifs que si la demanderesse était recherchée, elle avait enfreint une loi, mais pas en faisant obstacle au droit du gouvernement de l’exproprier. La conclusion de la SPR d’absence d’un lien avec un motif prévu par la Convention n’est pas, comme la demanderesse allègue, en contradiction avec les éléments de preuve. Dans sa décision, la SPR a retenu les propos de la demanderesse au cours de la manifestation, mais n’a trouvé aucun élément de preuve convaincant permettant d’établir un lien avec un motif prévu par la Convention.

[22]  En ce qui concerne les arguments de la demanderesse au sujet de la jurisprudence contraire, chaque affaire dépend des faits qui lui sont propres. La décision rendue dans l’affaire Zhou n’appuie pas la proposition qu’un lien est toujours établi lorsque certains propos sont tenus au cours d’une manifestation. Dans le cas présent, d’autres faits mentionnés par la SPR dans sa décision sont pertinents, notamment le fait que la demanderesse n’a pas joué un rôle de leadership, et qu’elle a quitté la scène sans aucune confrontation avec la police.

[23]  Il convient de rappeler que dans le cadre d’un contrôle judiciaire, la norme de la décision raisonnable ne permet pas à la Cour de réexaminer les éléments de preuve, de les soupeser, et de tirer des conclusions de fait. Autrement dit, la Cour ne peut substituer la solution qu’elle juge appropriée à celle qui a été retenue, et ne peut apprécier de nouveau les éléments de preuve (Canada (Citoyenneté et Immigration) c Khosa, 2009 CSC 12, aux paragraphes 59 et 61). D’après les faits de l’espèce et les éléments de preuve présentés à la SPR, la décision est justifiée, transparente et intelligible.

B.  La SPR a-t-elle commis une erreur en concluant que la demanderesse n’était pas recherchée par le BSP?

[29]  La demanderesse soutient que la décision de la SPR à propos de la sommation et du projet Bouclier d’or est en contradiction avec les éléments de preuve au dossier. Par exemple, bien que la SPR ait conclu qu’une sommation eut été délivrée, des éléments de preuve du cartable national de documentation (CND) publié en octobre 2012 indiquent que : « [p]armi les sources qu’elle a consultées, la Direction des recherches n’a trouvé aucune loi sur les mandats d’arrestations et les sommations propre au Guangdong, au Fujian et au Liaoning ».

[30]  La demanderesse a fait valoir que le document examiné par la SPR sur le projet Bouclier d’or ne fait aucunement référence à Hong Kong. La demanderesse fait valoir que la SPR formule des hypothèses en présumant que le projet Bouclier d’or était en vigueur à Hong Kong alors que les éléments de preuve ne contiennent pas d’information sur sa mise en œuvre. De plus, la demanderesse affirme que les éléments de preuve recueillis à l’époque où elle a quitté la Chine sont issus d’un système décentralisé et que les bureaux du BSP éprouvaient des problèmes de partage de l’information. Elle prétend qu’aucun élément de preuve n’étayait la conclusion de la SPR selon laquelle elle n’aurait pas pu quitter la Chine en 2012 munie de son propre passeport si elle avait été recherchée par le BSP.

[31]  La demanderesse invoque à l’appui de sa thèse la décision du juge Russell dans l’affaire Huang c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2017 CF 762 [Huang], où la décision de la SAR était déraisonnable parce qu’elle n’avait pas expliqué pourquoi la corruption n’aurait pas été possible dans ce cas. La demanderesse fait également valoir que les éléments de preuve documentaire démontrent que la corruption existe et corrobore le récit de sa sortie de Chine.

[32]  Mais contrairement à l’affaire Huang, la demanderesse n’a jamais prétendu que les fonctionnaires avaient été soudoyés pour contourner le système. Elle n’a jamais avancé cet argument lorsqu’elle a été interrogée à l’audience. Le témoignage qu’elle a rendu indique que bien qu’elle ait utilisé des documents frauduleux, elle a été en mesure d’obtenir un visa américain, qui a ensuite été apposé sur son propre passeport. L’autre élément de preuve qu’elle a invoqué est qu’elle est passée par des points de contrôle dans son voyage à Hong Kong, puis à nouveau lorsqu’elle s’est rendue à San Francisco à partir de Hong Kong. Elle n’a pas affirmé que son passeport n’avait pas été numérisé ou qu’elle avait soudoyé des agents. Elle n’a pas donné de détails même lorsqu’elle a été interrogée. Cela diffère du fondement factuel de la jurisprudence invoquée par la demanderesse.

[33]  La demanderesse a fourni à la Cour une réponse à la demande d’information (RDI) en date du 2 juillet 2009, issue du CND pour étayer l’argument selon lequel le projet Bouclier d’or n’était pas en vigueur à Hong Kong. Mais, bien que la RDI ne mentionne pas Hong Kong, elle soutient certainement la conclusion de la SPR voulant que le projet Bouclier d’or soit un réseau informatique national :

À l’heure actuelle, tous les services de police des comtés et des échelons supérieurs (soit les services de police provinciaux, municipaux et de comté), ainsi que la plupart des postes de police et des autres services locaux (soit les services de police de niveau inférieur aux comtés) peuvent accéder au système. Certains petits postes de police et services locaux se trouvant dans des régions éloignées ne le peuvent pas.

[34]  Les éléments de preuve documentaire indiquent en outre que ce même système est utilisé par le BSP à Beijing et qu’en 2006, le système a fait l’objet d’un examen de la qualité qui a démontré que les postes et brigades de police locaux ont un taux de connexion au réseau principal de 90 %. Cet article mentionne ensuite que le projet Bouclier d’or comprend des caméras de surveillance ainsi que la technologie de reconnaissance faciale et des systèmes de surveillance de l’Internet.

[35]  Le défendeur a invoqué une RDI plus récente concernant le projet Bouclier d’or qui est également consignée dans le CND. Cet élément de preuve est daté du 7 mars 2014. Et même si l’année 2014 est de deux ans postérieure au départ de la demanderesse de la Chine, cet élément de preuve couvre les années 2010, 2011 et 2013, ce qui se situe autour de sa date de départ. Cette mise à jour indique qu’en 2011, la couverture était presque complète : « [l]e taux de couverture du réseau dans les postes de police locaux s’élève à 99 p. 100 ».

[36]  Tout cela démontre que la SPR a retenu le fait que la documentation sur le pays est disparate, mais qu’elle disposait bien d’éléments de preuve étayant sa conclusion selon laquelle le récit de la demanderesse sur sa sortie du pays n’était pas crédible. J’estime qu’une mention propre à Hong Kong dans les éléments de preuve documentaire n’était pas nécessaire. Puisque la SPR a rendu une décision de vive voix, ses motifs sont courts et concis, et ne citent pas de larges extraits du CND. Cela ne peut pas être considéré comme une erreur.

[37]  Enfin, je ne suis pas d’accord avec l’argument de la demanderesse qui soutient que la conclusion à propos de la sommation n’était soutenue par aucun élément de preuve. Bien que les éléments de preuve documentaire indiquent qu’une sommation n’est pas délivrée dans tous les cas, la demanderesse a affirmé dans son témoignage que le BSP la recherchait sans relâche.

[38]  D’après les éléments de preuve produits par la demanderesse quant au nombre de fois où le BSP s’est rendu à son domicile et chez ses proches, la décision de la SPR selon laquelle une sommation aurait été délivrée, ou qu’à tout le moins la recherche aurait été documentée, est fondée sur les éléments de preuve et constitue une décision raisonnable. La décision de la SPR est justifiée, transparente et intelligible.

[39]  Après avoir traité les questions déterminantes, je ne vais pas traiter les autres questions présentées à la Cour.

[40]  Aucune question à certifier n’a été présentée et l’affaire n’en a soulevé aucune.


JUGEMENT DANS LE DOSSIER IMM-3-18

LA COUR REND LE JUGEMENT SUIVANT :

  1. La demande est rejetée.

  2. Aucune question n’est certifiée.

« Glennys L. McVeigh »

Juge


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


DOSSIER :

IMM-3-18

 

INTITULÉ :

GUIYING YAN c LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

 

LIEU DE L’AUDIENCE :

Toronto (Ontario)

 

DATE DE L’AUDIENCE :

Le 4 juillet 2018

 

JUGEMENT ET MOTIFS :

LA JUGE MCVEIGH

 

DATE DES MOTIFS :

LE 25 juillet 2018

 

COMPARUTIONS :

Phillip J.L. Trotter

Pour la demanderesse

Rachel Hepburn Craig

Pour le défendeur

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Lewis & Associates

Avocats

Toronto (Ontario)

Pour la demanderesse

Procureur général du Canada

Toronto (Ontario)

Pour le défendeur

 

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