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Date : 20180725


Dossier : T-975-17

Référence : 2018 CF 778

[TRADUCTION FRANÇAISE]

Ottawa (Ontario), le 25 juillet 2018

En présence de monsieur le juge Manson

ENTRE :

DOLLAR GENERAL CORPORATION

demanderesse

et

2900319 CANADA INC.

défenderesse

JUGEMENT ET MOTIFS

I.  Introduction

[1]  Il s’agit d’un appel formé en application de l’article 56 de la Loi sur les marques de commerce, LRC 1985, c T-13 (la Loi) et de l’alinéa 300d) des Règles des Cours fédérales, DORS/98-106, contre la décision du registraire des marques de commerce (le registraire) de radier la marque de la demanderesse, DOLLAR GENERAL, et son enregistrement LMC785,040 sous le régime de l’article 45 de la Loi.

II.  Contexte

[2]  La demanderesse est titulaire de la marque de commerce DOLLAR GENERAL (la marque), enregistrée sous le numéro LMC785,040 le 15 décembre 2010 en vue de son emploi en liaison avec des « services de magasin de détail populaire » (les services).

[3]  La demanderesse exploite des magasins de détail aux États-Unis ainsi qu’un site Web de commerce électronique, et utilise la marque en liaison avec ces services. Le site Web permet aux consommateurs se trouvant au Canada de connaître la fiche détaillée des produits, leur prix et leur disponibilité, et de faire des achats en ligne qu’ils paient avec leur carte de crédit. Cependant, la demanderesse ne livre pas de produits au Canada. Les consommateurs au Canada doivent faire livrer les produits achetés à une adresse aux États-Unis ou, s’ils souhaitent recevoir leurs achats au Canada, ils doivent payer un agent de transit tiers (le transbordeur).

[4]  Le 21 octobre 2014, à la demande de l’intimée, le registraire a signifié un avis, tel qu’il est prévu à l’article 45 de la Loi, par lequel il demandait à la demanderesse de fournir la preuve de l’emploi de la marque au Canada en liaison avec les services au cours des trois années précédentes, soit entre le 21 octobre 2011 et le 21 octobre 2014 (la période pertinente).

[5]  En réponse à l’avis du registraire, la demanderesse a produit des éléments de preuve et des observations écrites, en plus de prendre part à une audience devant le registraire. L’intimée a aussi soumis des observations écrites, mais elle n’était pas présente à l’audience.

[6]  Le 2 mai 2017, le registraire a rendu une décision de radiation de la marque de la demanderesse parce que, a-t-il estimé, elle n’avait pas fait la démonstration de son emploi au Canada en liaison avec les services durant la période pertinente. Le registraire est parvenu à la conclusion que la demanderesse n’offrait pas de « services de magasin de détail populaire » étant donné que les consommateurs du Canada devaient se rendre aux États-Unis pour récupérer leurs achats ou payer en sus les services d’un transbordeur.

[7]  Malgré l’absence de magasin traditionnel DOLLAR GENERAL au Canada au cours de la période pertinente, la demanderesse exploitait un site Web DOLLAR GENERAL accessible aux consommateurs du Canada, qui s’adressait directement à eux et sur lequel ils achetaient des produits. La demanderesse offrait en outre des services de magasin de détail secondaires ou accessoires par l’intermédiaire de son site Web et de l’application Internet DOLLAR GENERAL, que des consommateurs du Canada ont téléchargée. L’application et le site étaient dotés de fonctions de localisation de magasins et proposaient des renseignements sur les produits, des recettes et des coupons de réduction. Malgré tout, le registraire a tranché que la marque de commerce n’était pas employée au Canada.

[8]  La demanderesse interjette appel de cette décision au motif que les éléments de preuve montrent clairement que la marque a été employée au Canada au cours de la période pertinente, et que le registraire a commis une erreur de fait et de droit en donnant une définition trop restrictive aux services et en faisant abstraction de la jurisprudence à cet égard.

[9]  Pour les motifs exposés ci-après, je suis d’accord avec la demanderesse.

III.  Questions en litige

[10]  Les questions en litige sont les suivantes :

  1. La décision du registraire est-elle manifestement entachée d’erreurs de fait et de droit?
  2. La demanderesse a-t-elle fait la démonstration de l’emploi de la marque en liaison avec les services au cours de la période pertinente?

IV.  Norme de contrôle

[11]  La norme de contrôle applicable est celle de la décision raisonnable, à moins que de nouveaux éléments de preuve aient des répercussions importantes sur les conclusions du registraire (Molson Breweries v. John Labatt Ltd, [2000] 3 FRC 145, au paragraphe 51).

[12]  Comme aucun nouvel élément de preuve n’a été présenté en appel, la norme de contrôle applicable est celle de la décision raisonnable.

V.  Analyse

[13]  Conformément au paragraphe 4(2) de la Loi, « [u]ne marque de commerce est réputée employée en liaison avec des services si elle est employée ou montrée dans l’exécution ou l’annonce de ces services ». Notre Cour a ajouté que ces services doivent être effectivement offerts aux Canadiens ou exécutés au Canada (UNICAST SA c South Asian Broadcasting Corporation Inc., 2014 CF 295 [Unicast], au paragraphe 46).

[14]  Dans la décision Saks & Co v Canada (Registrar of Trade Marks), [1989] FCJ No 2824 (TD) (WL) [Saks & Co], notre Cour a soutenu que des services de magasin au détail pouvaient être exécutés même s’il n’existe pas de magasin traditionnel au Canada. Les facteurs jugés pertinents aux fins de cette conclusion sont décrits comme suit au paragraphe 55 :

  • [traduction] le détaillant a répondu à des commandes postales et téléphoniques depuis le Canada;
  • le détaillant a annoncé des marchandises au Canada en faisant parvenir des catalogues à des clients canadiens;
  • un numéro sans frais a permis aux consommateurs du Canada d’acheter les marchandises par téléphone;
  • les marchandises et services du détaillant ont été annoncés régulièrement par l’intermédiaire de magazines largement distribués au Canada;
  • le détaillant a veillé lui-même à assurer la livraison au Canada des articles commandés.

[15]  Au paragraphe 15 de l’arrêt Boutique Limité Inc. c Canada (Registraire des marques de commerce), [1998] ACF no 419 (CAF) (WL) [Boutique Limité], la Cour d’appel fédérale se prononce ainsi sur l’arrêt Saks & Co :

Ce qui a été établi dans l’arrêt Saks, c’est que, lorsqu’un propriétaire qui n’exploite aucune boutique au Canada désire prouver l’utilisation de sa marque en liaison avec des services de vente au détail dans un grand magasin, il doit porter à l’attention du registraire ou du juge des éléments de preuve suffisamment détaillés pour permettre à celui-ci de décider si des services de vente au détail dans un grand magasin sont offerts. Il n’est pas nécessaire que nous nous prononcions ici sur le bien-fondé de l’arrêt Saks. Comme nous l’expliquerons plus loin, la preuve présentée en l’espèce est tout simplement insuffisante pour nous permettre de faire une comparaison avec la situation factuelle exposée dans l’affaire Saks.

[16]  Après un examen des éléments de preuve, la Cour a tranché qu’il n’y avait pas eu de services de magasin de détail exécutés au Canada. Les éléments de preuve étaient insuffisants pour faire la démonstration que des livraisons avaient été faites au Canada, et il a été décrété en outre que l’offre de remboursement lié à une vente survenue aux États-Unis ou la publicité dans des publications distribuées au Canada ne constituaient pas non plus des preuves de l’exécution de services de magasin de détail au Canada (Boutique Limité, aux paragraphes 16 à 18).

[17]  Dans la décision TSA Stores, Inc. c Registraire des marques de commerce, 2011 CF 273 [TSA Stores], notre Cour s’est penchée à nouveau sur l’emploi d’une marque de commerce en liaison avec des services de magasin de détail par une entreprise qui n’a pas pignon sur rue au Canada. L’entreprise exploitait un site Web, mais il n’a pas été démontré qu’elle vendait des produits à des consommateurs au Canada. La Cour a conclu, aux paragraphes 19 à 21 :

Le service « Help Me Choose Gear » qui est offert sur le site Web propose une quantité appréciable de renseignements et de conseils sur une vaste gamme de produits. Les visiteurs du site Web ont accès à une description détaillée de chaque produit et on leur explique comment trouver l’article qui leur convient d’après leur âge et leur degré d’habileté, comment choisir la bonne taille et comment entretenir le produit. On y trouve aussi un glossaire détaillé de termes spécialisés de vêtements sport. À mon avis, visiter ce service sur le site Web s’apparente à une visite sur place d’un magasin et revient à discuter avec un vendeur bien informé.

Le service « Shoe Finder » [Trouvez chaussure à votre pied] est semblable. Il permet à celui qui visite le site Web de trouver la chaussure de sport la mieux adaptée à ses besoins. Enfin, le service « Store Locator » [Trouvez un magasin] permet à l’internaute d’obtenir l’adresse du magasin le plus proche grâce à son code postal. Cet outil permet aux Canadiens de trouver sur le territoire des États‑Unis un magasin situé près de chez eux.

À mon avis, les Canadiens profitent de ces services. En conséquence, comme les marques semblent se rapporter à des services accessoires de vente au détail sur le site Web, je conclus qu’il existe des éléments de preuve d’un emploi au Canada au cours de la période pertinente.

[18]  La Cour fait reposer cette conclusion sur deux principes généraux (TSA Stores, aux paragraphes 16 et 17). En premier lieu, le terme « services » devrait recevoir une interprétation large (voir Kraft Ltd c Registraire des marques de commerce, [1984] 2 CF 874 (1re inst.) (WL) [Kraft], au paragraphe 8). En second lieu, la Loi ne fait aucune distinction entre les services principaux, accessoires ou secondaires. Dès lors que certains membres du public – consommateurs ou acheteurs – en tirent avantage, l’activité constitue un service (voir Société Nationale des Chemins de fer Français SNCF c Venice Simplon-Orient-Express Inc., [2000] ACF no 1897 (1re inst.) (WL) [Venice Simplon-Orient-Express], aux paragraphes 8 et 9).

[19]  En l’espèce, dans leurs observations écrites au registraire, les deux parties soutiennent, et j’abonde dans leur sens, que le registraire a correctement interprété le droit sur cette question dans la décision Lapointe Rosenstein srl c The West Seal, Inc, 2012 COMC 114, aux paragraphes 27 et 28 :

Dans TSA, comme c’était le cas dans Saks [...], il a été convenu que la combinaison de certains facteurs pourrait être suffisante pour maintenir un enregistrement en ce qui a trait aux services de magasin de détail, même en l’absence de magasins traditionnels au Canada. Ces facteurs doivent mettre en relief un certain degré d’interactivité avec d’éventuels clients canadiens afin de permettre de conclure à l’existence d’un avantage suffisant pour les Canadiens pour maintenir cet enregistrement. Ce degré d’interactivité est sans doute établi lorsqu’une partie inscrivante exploite un site Web de vente au détail et expédie au Canada des marchandises par l’intermédiaire du site Web [...]. L’affichage de prix en dollars canadiens ou d’autres renseignements indiquant que le site Web est destiné aux consommateurs canadiens peut également satisfaire aux exigences des articles 4 et 45 en l’absence d’éléments de preuve établissant l’expédition de marchandises au Canada [...]. En revanche, tel qu’il est mentionné plus haut, le fait d’offrir des remboursements semble être insuffisant en soi [décision Boutique], susmentionnée]. Enfin, dans TSA, le fait d’offrir sur un site Web plusieurs services accessoires équivalant à ceux qui seraient offerts dans un magasin traditionnel a été jugé suffisant, à la lumière de la situation factuelle exposée dans cette affaire.

En d’autres termes, il semble y avoir un critère minimal de services accessoires qui, offerts ensemble, peuvent maintenir l’enregistrement d’une marque en liaison avec des services de magasin de détail. Ce qui semble être nécessaire, c’est un degré d’interactivité avec le client, notamment avec le client canadien hypothétique. Bien que la Partie requérante ait invité le registraire à faire tout simplement abstraction du raisonnement suivi dans TSA, ce raisonnement peut être jugé compatible avec les autres décisions, la Cour fédérale ayant conclu que la prestation de services accessoires établissait un degré suffisant d’interactivité avec les Canadiens qui avaient consulté le site Web pour maintenir les enregistrements en ce qui a trait aux « services de magasin de détail ».

[Renvois aux décisions de la CMOC omis.]

[20]  En l’espèce, le registraire a établi ce qui suit :

[traduction]

[…] le fait que les consommateurs doivent pouvoir se faire livrer à personne ou aller chercher leurs achats est tout à fait compatible avec le sens ordinaire de « services de magasin de détail populaire ». À mon avis, si une entreprise s’annonce comme un fournisseur de services de magasin de détail populaire au Canada, le consommateur moyen s’attendra à pouvoir payer et recevoir les marchandises au Canada. Si le consommateur doit se rendre aux États-Unis ou faire appel à un agent de transit pour prendre possession des marchandises achetées, les services de magasin de détail ne sont pas exécutés au Canada.

[21]  Autrement dit, une entreprise qui n’a pas de magasin traditionnel au Canada doit y livrer ses marchandises pour être réputée comme exécutant des « services de magasin de détail » au Canada.

[22]  Le registraire se fonde sur la décision de la Cour dans Unicast. Cependant, le registraire cite des paragraphes qui portent sur une question beaucoup plus large que celle qui nous occupe, dans lesquels la Cour explique pourquoi elle rejette l’argument comme quoi toute marque de commerce utilisée dans un site Web accessible au Canada, indépendamment de la provenance des renseignements affichés sur le site, constitue un emploi de la marque de commerce au Canada (Unicast, aux paragraphes 46 à 49). Comme la Cour le souligne dans la décision Unicast, au paragraphe 48, « [l]a notion de l’exécution des services est essentielle ».

[23]  Quoi qu’il en soit, la décision Unicast porte sur le domaine très différent de la diffusion en continu d’émissions radiophoniques sur un site Web accessible au Canada, et plus particulièrement sur la question de savoir s’il s’agissait d’un service de « radiodiffusion » exécuté au Canada. La Cour est parvenue à la conclusion que ce n’était pas le cas après une analyse des termes « entreprises de radiodiffusion » et « exploitées même en partie au Canada » au sens de la Loi sur la radiodiffusion, LC 1991, c 11, et de la jurisprudence pertinente (Unicast, aux paragraphes 57 à 68).

[24]  Si le registraire avait plutôt appliqué la décision TSA Stores de notre Cour, ainsi que les principes enseignés dans les décisions Kraft et Venice Simplon-Orient-Express, il aurait pu en venir à la conclusion que la demanderesse offrait un avantage suffisant s’apparentant à des services de magasin de détail au Canada, et qu’il y avait donc lieu de maintenir l’enregistrement en cause.

[25]  La demanderesse a produit des saisies d’écran de son site Web qui selon elle font la démonstration que sa consultation s’apparente à une visite sur place dans un magasin traditionnel. Le consommateur peut parcourir les offres dans différentes gammes de produits de nettoyage, de santé, de beauté, d’alimentation, etc. Quand il clique sur un produit, des renseignements détaillés sont affichés, et notamment la disponibilité, les modalités de livraison et une liste de produits semblables. Le consommateur a également accès à des dépliants, à des coupons de réduction et à des conseils pour économiser. Il peut ajouter et retirer des articles de sa [traduction] « liste d’achats » ou de son « panier », puis payer les articles de son panier en fournissant ses données de facturation et une adresse de livraison. Le site Web propose également une fonction de localisation qui permet au consommateur du Canada de trouver le magasin le plus près aux États-Unis.

[26]  La demanderesse a produit d’autres éléments de preuve indiquant qu’au moins une consommatrice canadienne avait fait livrer ses achats par l’entremise d’un transbordeur. Ce transbordeur propose un choix d’adresses aux États-Unis pour les consommateurs du Canada qui font des achats auprès d’un détaillant américain, et il livre ces marchandises partout dans le monde dans un délai de trois jours environ. Les frais d’assurance et une estimation des droits de douane et des taxes sont affichés dans la monnaie nationale. Ces éléments de preuve illustrent à quel point il est facile pour un consommateur du Canada d’acheter des produits sur le site Web de la demanderesse et de se les faire livrer à son adresse en quelques jours, et contredisent l’affirmation du registraire voulant que la livraison par un détaillant américain constitue une caractéristique déterminante de l’exécution de services de magasin de détail au Canada.

[27]  Qui plus est, même si le site Web n’affiche pas les prix en dollars canadiens ni les modalités de livraison au Canada, les consommateurs ici n’en ont pas moins utilisé les services de la demanderesse. La demanderesse a produit des éléments de preuve montrant que :

  • au cours de la période pertinente, elle a répondu aux questions des consommateurs du Canada concernant des achats au détail sur son site Web;
  • du 1er février 2013 au 20 octobre 2014, la demanderesse a vendu des marchandises d’une valeur totale de 2 685,27 $ à des consommateurs dont l’adresse de facturation se trouvait au Canada;
  • du 21 octobre 2011 au 20 octobre 2014, la demanderesse a vendu des marchandises d’une valeur totale de 3 641,83 $ à des consommateurs dont l’adresse de courriel portait l’extension « .ca »;
  • vu la nature des produits offerts sur le site Web, la valeur en dollars de ces ventes est appréciable;
  • la marque était affichée en liaison avec l’ensemble de ces services;
  • la page de paiement des achats et des données de facturation du site Web de la demanderesse comporte :
  1. une liste déroulante des pays incluant le « Canada »,

  2. une liste déroulante des « États et des provinces » affichant toutes les provinces et tous les territoires du Canada,

  3. un champ de « code zip/code postal » dans lequel les codes postaux canadiens peuvent être inscrits, indiquant que le site Web s’adresse aux consommateurs du Canada.

[28]  Il ne fait aucun doute qu’au cours de la période pertinente, des consommateurs se trouvant au Canada ont consulté le site Web DOLLAR GENERAL, y ont acheté des articles portant la marque DOLLAR GENERAL, et ont donc eu recours aux services de magasin de détail de la demanderesse en liaison avec la marque de commerce DOLLAR GENERAL. Une conclusion selon laquelle le recours aux services de livraison d’un tiers faisant affaire aux États-Unis équivaut en soi à une non-utilisation de services de magasin de détail au Canada ferait complètement abstraction de la réalité du commerce électronique moderne et priverait les titulaires d’une marque de commerce du privilège de leurs droits légitimes au Canada.

[29]  Certes, les éléments de preuve ne sont pas parfaits (une adresse de facturation et l’extension « .ca » ne font pas foi de la présence au Canada au moment de l’achat, et le transbordeur n’a pas de lien avec la demanderesse, dont certaines des prétentions ne sont pas étayées), mais tous les indices pertinents de l’utilisation de services de magasin de détail au Canada sont présents et attestent sans l’ombre d’un doute un certain degré d’interactivité et le profit qu’ont tiré des consommateurs du Canada du site Web DOLLAR GENERAL.

[30]  Du reste, une procédure de radiation engagée sous le régime de l’article 45 de la Loi n’impose pas un fardeau très lourd au déposant. La perfection n’est pas requise : il lui est simplement demandé d’établir une preuve prima facie de l’« emploi » au sens de l’article 4 de la Loi. Il en est ainsi parce que la procédure est destinée à éliminer du registre le « bois mort », et que cela suppose de maintenir un sens de la mesure et d’éviter la surabondance d’éléments de preuve. Il doit découler de la preuve une conclusion logique qu’il y a eu « emploi » au vu des faits et non d’hypothèses, et cette conclusion doit dûment tenir compte de l’ensemble des éléments de preuve.

[31]  Après une analyse globale des éléments de preuve, j’estime qu’ils sont suffisants pour établir que la demanderesse a employé la marque au Canada en liaison avec les services au cours de la période pertinente. La conclusion logique tirée des faits est que des consommateurs du Canada ont tiré profit du site Web de la demanderesse comme substitut à un magasin traditionnel, et qu’ils y ont acheté des produits qu’ils pouvaient aller chercher à une adresse aux États-Unis ou se faire livrer au Canada par l’intermédiaire d’un transbordeur.

[32]  La décision du registraire était nettement erronée et déraisonnable. La demanderesse a fait la démonstration de l’emploi de la marque en liaison avec les services au cours de période pertinente. Par conséquent, l’appel est accueilli et la décision du registraire est annulée.


JUGEMENT dans le dossier T-975-17

LA COUR REND LE JUGEMENT SUIVANT :

  1. L’appel est accueilli, la décision du registraire est annulée et l’enregistrement no LMC785,040 de la marque de commerce DOLLAR GENERAL est maintenu dans le registre.

« Michael D. Manson »

Juge


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


DOSSIER :

T-975-17

 

INTITULÉ :

DOLLAR GENERAL CORPORATION c 2900319 CANADA INC.

 

LIEU DE L’AUDIENCE :

Toronto (Ontario)

 

DATE DE L’AUDIENCE :

Le 19 juillet 2018

 

JUGEMENT ET MOTIFS :

JUGE MANSON

 

DATE DES MOTIFS :

Le 25 juillet 2018

 

COMPARUTIONS :

Kelly Gill

Pour la demanderesse

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

GOWLING WLG (CANADA) LLP

Toronto (Ontario)

Pour la demanderesse

 

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