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Date : 20180712


Dossier : T-1991-17

Référence : 2018 CF 727

[TRADUCTION FRANÇAISE]

Ottawa (Ontario), le 12 juillet 2018

En présence de monsieur le juge Brown

ENTRE :

CAROL ANN HISCOCK

demanderesse

et

LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA

défendeur

JUGEMENT ET MOTIFS

I.  Nature de l’affaire

[1]  Il s’agit d’une demande de contrôle judiciaire de la décision du comité de réexamen de l’admissibilité [le comité de réexamen] du Tribunal des anciens combattants (révision et appel), rendue le 18 octobre 2017; dans cette décision, le comité de réexamen a rejeté la demande de révision d’une décision rendue par le comité d’appel de l’admissibilité du Tribunal des anciens combattants (révision et appel) [le comité d’appel]. La demande de réexamen a été présentée conformément à l’alinéa 50g) du Règlement sur le Tribunal des anciens combattants (révision et appel), DORS/2006-50 [le Règlement]. Le 7 novembre 2013, un autre comité d’appel a entendu un précédent appel relatif à la présente affaire, mais il a rejeté la demande de prestations d’invalidité concernant l’époux décédé de la demanderesse. La demande de l’ancien combattant a été présentée en vertu de l’article 45 et du paragraphe 50(3) de la Loi sur les mesures de réinsertion et d’indemnisation des militaires et vétérans des Forces canadiennes, LC 2005, c 21 [la Loi]. En 2018, cette loi a été renommée la Loi sur le bien-être des vétérans, LC 2005, c 21.

[2]  La demande de contrôle judiciaire est accueillie pour les motifs qui suivent.

II.  Faits

[3]  La demanderesse est la conjointe survivante du défunt adjudant-maître Hiscock [M. Hiscock], qui a servi dans les Forces armées canadiennes comme technicien en réfrigération et technicien de systèmes mécaniques. Il a été membre des Forces canadiennes de 1963 à 1984. Au cours de ses vingt et un ans de service, il a été exposé à différents produits toxiques, y compris le mercure, à des fluides frigorigènes et à des hydrocarbures divers, notamment le tétrachlorure de carbone, un solvant organique reconnu aujourd’hui comme étant toxique.

[4]  Il n’est pas contesté que le mari décédé de la demanderesse n’a pas reçu de vêtements de protection, comme des masques, des bottes ou des gants, lorsqu’il exerçait ses fonctions de service.

[5]  En octobre 2010, M. Hiscock a reçu un diagnostic de démence du type de la paralysie supranucléaire progressive [PSP], une maladie incurable avec un pronostic sur l’évolution de sept à dix ans. Il est en fait décédé moins de trois ans plus tard, à l’âge de 68 ans.

[6]  En juin 2012, M. Hiscock a présenté une demande de prestations d’invalidité en vertu de l’article 45 de la Loi, en soutenant que le diagnostic de PSP découlait de ses années de service dans un milieu de travail dangereux, qui comportait une exposition aux produits reconnus aujourd’hui comme étant toxiques.

[7]  En septembre 2012, Anciens Combattants Canada (ACC) a rejeté la demande de M. Hiscock relative à son diagnostic de PSP.

[8]  M. Hiscock a interjeté appel de la décision d’ACC auprès du comité d’examen de l’admissibilité [le comité d’examen] du Tribunal des anciens combattants (révision et appel), qui a entendu l’affaire en janvier 2013. Le comité d’examen a confirmé la décision d’ACC concernant le diagnostic de PSP. Le comité d’examen a conclu à l’absence de consensus médical quant au lien entre l’exposition de M. Hiscock aux substances toxiques et nocives dans son milieu de travail, au cours de son service, et l’apparition de la PSP.

[9]  M. Hiscock est décédé en juin 2013. Il n’avait que 68 ans.

[10]  Les décisions du comité d’examen peuvent être portées en appel devant le comité d’appel. En novembre 2013, la demanderesse, en tant que veuve de l’ancien combattant, a porté en appel le rejet du comité d’examen auprès du comité d’appel, conformément au paragraphe 50(3) de la Loi. Le comité d’appel a confirmé la décision du comité d’examen.

[11]  À quelques rares exceptions, les décisions du comité d’appel sont définitives. Une exception existe lorsque de nouveaux éléments de preuve démontrent un fondement factuel de droit aux prestations d’invalidité. Lorsqu’un demandeur répond au critère à quatre volets relatif à l’acceptation de nouveaux éléments de preuve, que la juge Heneghan a énoncé dans la décision Canada (Bureau de services juridiques des pensions) c Canada (Procureur général), 2006 CF 1317, au paragraphe 6, conf. par 2007 CAF 298 [Avocat-Conseil en chef], le comité d’appel peut rouvrir et réexaminer sa décision, conformément au paragraphe 32(1) de la Loi sur le Tribunal des anciens combattants (révision et appel). LC 1995, c 18. Le comité de réexamen peut ordonner la tenue d’une nouvelle audition.

[12]  La demanderesse a trouvé d’autres éléments de preuve à l’appui de sa demande selon laquelle la PSP dont a souffert son mari décédé découlait de son travail au sein des Forces armées canadiennes en tant que technicien en réfrigération, et des produits dangereux et toxiques pour l’environnement auxquels il a été exposé. Compte tenu de ces nouveaux éléments de preuve, elle a demandé qu’un comité de réexamen révise la décision du comité d’appel. Cet appel a été entendu en novembre 2017, quatre ans après l’audition devant le comité d’appel, en novembre 2013. Toutefois, en dépit des nouveaux éléments de preuve, le comité de réexamen a rejeté la demande de réexamen de la demanderesse [la décision]. Le contrôle judiciaire de la décision est demandé.

III.  Décision du comité de réexamen

[13]  La demanderesse a demandé le réexamen en invoquant de nouveaux éléments de preuve. La demande a été présentée aux termes de l’alinéa 50g) du Règlement sur le Tribunal des anciens combattants (révision et appel), DORS/2006-50 [le Règlement], qui prescrit ce qui suit :

50 Pour l’application du paragraphe 45(1) de la Loi, le militaire ou le vétéran est présumé démontrer, en l’absence de preuve contraire, qu’il souffre d’une invalidité causée soit par une blessure ou une maladie liée au service, soit par une blessure ou maladie non liée au service dont l’aggravation est due au service, s’il est établi que la blessure ou la maladie, ou leur aggravation, est survenue au cours: […]

50 For the purpose of subsection 45(1) of the Act, a member or veteran is presumed, in the absence of evidence to the contrary, to have established that an injury or disease is a service-related injury or disease, or a non-service-related injury or disease that was aggravated by service, if it is demonstrated that the injury or disease or its aggravation was incurred in the course of [...]

g) de l’exercice, par le militaire ou le vétéran, de fonctions qui l’ont exposé à des risques liés à l’environnement qui auraient raisonnablement pu causer la blessure ou la maladie, ou leur aggravation.

(g) the performance by the member or veteran of any duties that exposed the member or veteran to an environmental hazard that might reasonably have caused the injury or disease or its aggravation

[Non souligné dans l’original]

[Emphasis added]

[14]  Les « nouveaux éléments de preuve » présentés par la demanderesse étaient axés sur un avis médical formulé par une neurologue hautement spécialisée, la Dre Heather Rigby, qui a aussi trouvé deux nouvelles études relatives à la PSP, sur lesquelles elle s’est fondée pour formuler son avis.

[15]  La Dre Rigby est spécialisée en neurologie des troubles du mouvement. Encore plus important en l’espèce, la Dre Rigby possède une expertise de sous-spécialité dans les maladies de Parkinson, notamment la PSP. Son expertise n’a pas été remise en question; le défendeur a admis ses compétences ainsi que les éléments de preuve qu’elle a présentés; c’est l’incidence de ces éléments de preuve en l’espèce qui a été contestée.

[16]  Les nouvelles études et les nouveaux éléments de preuve présentés par la Dre Rigby sont mentionnés dans un avis daté du 6 janvier 2017. L’avis conclut, concernant M. Hiscock, que son [traduction] « état de santé pourrait raisonnablement être attribué à son exposition » à des risques environnementaux :

[traduction]

[...] M. Hiscock a été exposé à des fluides frigorigènes et à de la radiation au cours de sa longue carrière au sein des Forces canadiennes. Selon une lettre figurant dans son dossier et rédigée par M. Russell Power, il aurait été exposé à « tous les types de gaz et de liquides frigorigènes », ainsi qu’à des « agents corrosifs et à des solvants, dont le tétrachlorure de carbone ». […]

La PSP est une maladie neurodégénérative caractérisée par une accumulation anormale de la protéine tau dans certaines régions du cerveau. La cause est inconnue, mais des données récentes révèlent que l’exposition à des produits toxiques pour l’environnement peut constituer un facteur de risque important. En mai 2016, la Dre Litvan et ses collègues ont publié une étude cas-témoins composée de 284 cas de PSP (voir les pièces jointes). Ils ont émis l’hypothèse que l’exposition à des produits chimiques tels que les solvants organiques (qui se trouvent dans les fluides frigorigènes, selon ce que je comprends) peut être associée à la PSP, puisque l’on sait 1) qu’ils inhibent l’enzyme mitochondriale (on trouve un trouble de l’activité mitochondriale dans les muscles et les cellules sanguines des patients atteints de la PSP) ou 2) qu’ils altèrent l’état d’oxydation (on observe des lésions oxydatives dans les cerveaux des patients atteints de la PSP). Leur étude a révélé une corrélation significative entre la consommation d’eau de puits pendant des années et l’apparition de la PSP.

Bien qu’ils n’aient pas conclu à un lien avec les expositions professionnelles, ils reconnaissent qu’il est possible que des différences statistiquement significatives n’aient pas été révélées, étant donné que peu de participants à l’étude avaient occupé ce type d’emplois. Fait plus important, cette étude appuie l’existence d’un lien entre la PSP et des facteurs environnementaux, mais son efficacité statistique est trop limitée pour permettre de faire des liens avec des expositions à des produits chimiques rares.

Le lien entre la PSP et les expositions dans l’environnement est également soutenu par un rapport, publié récemment par D. Caparros-Lefebvre et al., concernant un groupe de patients atteints de la PSP dans une région géographique de la France présentant une pollution environnante grave liée à des métaux industriels (voir les pièces jointes).

Chez M. Hiscock, les symptômes de la maladie sont apparus des années après l’exposition. Pour les troubles neurodégénératifs liés à la maladie de Parkinson, des études pathologiques révèlent que la dégénération commence habituellement de nombreuses années avant l’apparition de signes et de symptômes.

En conclusion, la littérature médicale appuie un lien entre l’exposition dans l’environnement et l’apparition de la PSP. Il existe des données scientifiques à l’appui de la vraisemblance d’un lien avec les solvants organiques. Par conséquent, je pense que le problème de santé de M. Hiscock est raisonnablement attribuable à son exposition.

[Non souligné dans l’original]

[17]  Le comité de réexamen a appliqué le critère à quatre volets de la décision Avocat-Conseil en chef et a conclu que, même si les nouveaux éléments de preuve répondaient au premier et au deuxième volet, ils ne satisfaisaient pas au troisième et au quatrième volet. Pour ces motifs, le comité de réexamen a conclu que les [traduction] « nouveaux éléments de preuve » de la Dre Rigby ne répondaient pas aux conditions autorisant un réexamen. La demande de la demanderesse a été rejetée.

[18]  Le comité de réexamen s’est fondé sur des éléments de preuve recueillis sur le Web et sur d’autres éléments de preuve extrinsèques pour décider de rejeter la demande de réexamen; cette recherche extrinsèque ressort de sa décision :

[traduction]

Le présent comité a aussi consulté d’autres documents, ainsi que d’autres recherches médicales et consensus médicaux connus, comme le site Web de la clinique Mayo, le Merck Manual of Diagnosis and Capital Therapy, 19e édition et le site Web de l’Institut national des maladies neurologiques et de l’AVC (États-Unis). Toutes ces ressources indiquent que la cause de la PSP est inconnue.

[19]  Il est toutefois pertinent, pour ce qui est du présent contrôle judiciaire, de noter que l’on ne sait pas si ces travaux de recherche ont été menés avant ou après l’audition. On ignore également si les documents invoqués ont été produits avant ou après l’audition. Quoi qu’il en soit, le comité de réexamen n’a pas communiqué ces travaux de recherche à la demanderesse, pas même les adresses des pages Web. Il est reconnu que la demanderesse n’a pas eu l’occasion de formuler une réponse.

[20]  Il est également reconnu que le comité de réexamen n’a pas mentionné l’alinéa 50g) du Règlement, lequel constitue le fondement de la demande de réexamen.

[21]  Le comité de réexamen a aussi omis d’examiner les éléments de preuve de la demanderesse liés à l’exposition aux risques environnementaux. Il a affirmé ce qui suit : [traduction] « le Comité ignore à quels produits chimiques il a été exposé, pendant combien de temps, à quelle quantité et si l’exposition aux produits chimiques utilisés en milieu de travail, en elle-même, a raisonnablement contribué à la maladie alléguée ».

[22]  Il est reconnu que cette affirmation n’était pas entièrement exacte; j’ai conclu qu’elle était inexacte. En fait, il existe des éléments de preuve non contestés, à l’égard de ces questions litigieuses, dans un rapport écrit déposé par l’adjudant-chef Russell Power [M. Power], un ancien collègue de M. Hiscock; ces éléments de preuve semblent être fondés sur une expérience directe. En outre, M. Power a corroboré certains des éléments de preuve fournis par M. Hiscock lui-même à ce sujet.

IV.  Questions en litige

[23]  La demanderesse soulève plusieurs questions aux fins de réexamen, y compris les suivantes :

  1. Le comité de réexamen a-t-il manqué à l’équité procédurale et aux principes de justice naturelle en omettant de signaler à la demanderesse les éléments de preuve extrinsèques qu’il a obtenus, de lui offrir l’occasion de présenter des observations supplémentaires ou de compléter les éléments de preuve médicale qu’elle avait déjà présentés?

  2. Le comité de réexamen a-t-il commis une erreur en fondant sa décision sur un exposé des faits erroné?

  3. Le comité de réexamen a-t-il commis une erreur en omettant d’appliquer correctement la présomption contenue à l’alinéa 50g) du Règlement, selon laquelle il est présumé démontré, en l’absence de preuve contraire, qu’une maladie est liée au service, s’il est établi qu’elle est survenue au cours de l’exercice, par le vétéran, de fonctions qui l’ont exposé à des risques dans l’environnement qui auraient raisonnablement pu causer la maladie?

[24]  À mon avis, ces questions litigieuses devraient être tranchées en se demandant si la décision du comité de réexamen est raisonnable, et si le comité de réexamen a contrevenu au droit de la demanderesse à l’équité procédurale.

V.  Normes de contrôle

[25]  Dans l’arrêt Dunsmuir c Nouveau-Brunswick, 2008 CSC 9, aux paragraphes 57 et 62, [Dunsmuir], la Cour suprême du Canada a établi qu’il n’est pas nécessaire de se livrer à une analyse de la norme de contrôle si « la jurisprudence établit déjà de manière satisfaisante le degré de déférence correspondant à une catégorie de questions en particulier ». La Cour a jugé que la norme de la décision raisonnable est la norme de contrôle applicable aux décisions du comité de réexamen, y compris à la question de savoir si ce dernier a correctement appliqué l’article 39 de la Loi : McAllister c Canada (Procureur général), 2014 CF 991, aux paragraphes 38 à 40, par le juge de Montigny (tel était alors son titre). L’article 39, comme on le verra, oblige ces tribunaux à examiner une demande présentée par un vétéran « sous le jour lui étant le plus favorable possible », selon la Cour d’appel fédérale, dans l’arrêt Canada (Procureur général) c Wannamaker, 2007 CAF 126, au paragraphe 5.

[26]  Dans l’arrêt Canada (Commission canadienne des droits de la personne) c Canada (Procureur général), 2018 CSC 31, au paragraphe 55, la Cour suprême du Canada explique ce que doit faire une cour lorsqu’elle examine une décision selon la norme de la décision raisonnable :

[55]  Lorsqu’une cour de révision examine une décision selon la norme de la décision raisonnable, elle doit principalement s’intéresser à « la justification de la décision, à la transparence et à l’intelligibilité du processus décisionnel », de même qu’à « l’appartenance de la décision aux issues possibles acceptables pouvant se justifier au regard des faits et du droit » (Dunsmuir, par. 47; Newfoundland and Labrador Nurses’ Union c. Terre-Neuve-et-Labrador (Conseil du Trésor), 2011 CSC 62, [2011] 3 R.C.S. 708, par. 14). Lorsqu’elle est appliquée à l’interprétation législative, la norme de la décision raisonnable reconnaît que le décideur, titulaire de pouvoirs délégués, est le mieux placé pour comprendre les considérations de politique générale et le contexte qu’il faut connaître pour résoudre toute ambiguïté dans le texte de loi (McLean, par. 33). Les cours de révision doivent par ailleurs éviter de soupeser et d’apprécier à nouveau la preuve prise en compte par le décideur (Khosa, par. 64). Fondamentalement, la norme de la raisonnabilité reconnaît qu’il peut légitimement y avoir de multiples issues possibles, même lorsque celles‑ci ne correspondent pas à la solution optimale que la cour de révision aurait elle‑même retenue.

[27]  La Cour suprême du Canada prescrit aussi que le contrôle judiciaire ne constitue pas une chasse au trésor, phrase par phrase, à la recherche d’une erreur; la décision doit être considérée comme un tout : Syndicat canadien des communications, de l’énergie et du papier, section locale 30 c Pâtes & Papier Irving, Ltée, 2013 CSC 34. De plus, une cour de révision doit déterminer si la décision, examinée dans son ensemble et son contexte au vu du dossier, est raisonnable : Construction Labour Relations c Driver Iron Inc., 2012 CSC 65; voir aussi l’arrêt Newfoundland and Labrador Nurses’ Union c Terre-Neuve-et-Labrador (Conseil du Trésor), 2011 CSC 62.

[28]  Les questions d’équité procédurale sont sujettes à un contrôle selon la norme de la décision correcte : Canada (Citoyenneté et Immigration) c Khosa, 2009 CSC 12, au paragraphe 43. La norme de la décision correcte est la norme de contrôle applicable à la deuxième question en litige, selon l’arrêt Canadian Pacific Railway c Canada (Procureur général), 2018 CAF 69. Cela dit, je note que dans l’arrêt Bergeron c Canada (Procureur général), 2015 CAF 160, au paragraphe 69, la Cour d’appel fédérale a déclaré qu’un examen réalisé selon la norme de la décision correcte doit être fait « en se montrant respectueux [des] choix [du décideur] » et en faisant preuve d’un « degré de retenue » : Ré: Sonne c Conseil du secteur du conditionnement physique du Canada, 2014 CAF 48, 455 N.R. 87, au paragraphe 42.

[29]  Au paragraphe 50 de l’arrêt Dunsmuir, la Cour suprême du Canada explique ce que doit faire une cour lorsqu’elle effectue une révision selon la norme de la décision correcte :

La cour de révision qui applique la norme de la décision correcte n’acquiesce pas au raisonnement du décideur; elle entreprend plutôt sa propre analyse au terme de laquelle elle décide si elle est d’accord ou non avec la conclusion du décideur. En cas de désaccord, elle substitue sa propre conclusion et rend la décision qui s’impose. La cour de révision doit se demander dès le départ si la décision du tribunal administratif était la bonne.

[30]  La demanderesse mentionne que la Cour d’appel fédérale, dans l’arrêt Canada (Procureur général) c Ladouceur, 2011 CAF 247, aux paragraphes 21 et 22, a affirmé ce qui suit concernant l’équité procédurale à l’occasion de décisions de réexamen :

[21]  Enfin, je fais remarquer que le degré d’équité procédurale qui doit être accordé à des affaires comme celle de l’espèce devrait être assez élevé étant donné l’importance de la question pour le demandeur : Baker c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), [1999] 2 R.C.S. 817, paragraphe 25.

[22]  En recevant l’opinion du conseiller médical sans en informer M. Ladouceur et sans lui donner l’occasion de la vérifier, de la contester ou de la réfuter, le Tribunal a été fondamentalement inéquitable envers M. Ladouceur. Si M. Ladouceur avait eu cette possibilité, il aurait pu être en mesure de convaincre le Tribunal que son invalidité relevait du tableau 17.9 et non du tableau 17.12, ou, subsidiairement, il aurait pu être en mesure de convaincre la Cour que la décision du Tribunal d’opter pour le tableau 17.12 était déraisonnable compte tenu de l’ensemble de la preuve. À cet égard, je ne retiens pas l’argument du procureur général portant que s’il y a eu une erreur de nature procédurale en l’espèce, elle était mineure et devrait être écartée.

[Non souligné dans l’original]

VI.  Analyse

[31]  À mon humble avis, le contrôle judiciaire doit être accordé en l’espèce. Je suis parvenu à cette conclusion pour trois motifs. En limitant la présente décision à ces aspects, la Cour ne doit pas être réputée avoir rejeté les autres observations formulées par la demanderesse, plus précisément celles liées aux nombreuses considérations concernant les nouveaux éléments de preuve exposées par le comité de réexamen; ces questions en litige seront tranchées par le nouveau réexamen qui sera réalisé par une formation différente.

[32]  Voici les trois motifs. Premièrement, le comité de réexamen a violé l’équité procédurale en omettant de communiquer à la demanderesse les résultats de la recherche extrinsèque qu’il a réalisée, et en la privant de l’occasion d’y répondre. Deuxièmement, les conclusions déterminantes tirées par le comité de réexamen concernant la nature des possibles risques environnementaux auxquels M. Hiscock a été exposé ne peuvent se justifier au regard du dossier. Troisièmement, le défaut du comité de réexamen d’examiner le lien entre les nouveaux éléments de preuve et l’alinéa 50g) du Règlement ne peut se justifier au regard du droit; bien que sous-jacent, et donc essentiel à la demande de la demanderesse, ce lien n’a pas été pris en compte.

A.  Le comité de réexamen a-t-il manqué à son obligation d’équité procédurale?

(1)  Résultats de la recherche extrinsèque non communiqués à la demanderesse

[33]  La demanderesse prétend que le comité de réexamen a manqué à son obligation d’équité procédurale en omettant de lui communiquer les sources secondaires qu’il a consultées et en la privant de l’occasion de répondre à ces renseignements extrinsèques qu’il a examinés et sur lesquels il s’est fondé.

[34]  Il est acquis en matière jurisprudentielle que les personnes comme la demanderesse ont généralement le droit de connaître les éléments de preuve qui pèsent contre elles et d’y répondre. Cela est particulièrement vrai si les éléments de preuve extrinsèques invoqués par le décideur sont postérieurs à l’audition. Bien que l’on puisse raisonnablement s’attendre à ce qu’un demandeur connaisse le contenu des renseignements sur un sujet précis qui sont affichés sur Internet depuis un certain temps raisonnable avant l’audition, Mme Hiscock n’avait aucun moyen de connaître l’existence des renseignements affichés après l’audition; dans un tel cas, l’équité procédurale commande que les renseignements extrinsèques invoqués soient fournis à la demanderesse.

[35]  Le défendeur prétend que la demanderesse avait été informée que des recherches sur Internet seraient réalisées et, de façon extrêmement générale, cette prétention n’est pas contestée. Toutefois, cela n’aide pas le défendeur en ce qui a trait au contenu affiché sur Internet après l’audition, si le comité de réexamen a examiné ledit contenu; la demanderesse n’avait aucun moyen de connaître ces renseignements ou d’y répondre.

[36]  Le défendeur affirme que les renseignements contenus sur Internet ont été invoqués aux premiers stades du présent litige. Ce fut effectivement le cas concernant l’audition du comité d’examen tenue en janvier 2013. Toutefois, je ne vois pas comment cela justifie la décision du comité de réexamen de réaliser des recherches après l’audition, puis de possiblement invoquer des renseignements pouvant avoir été affichés sur Internet après l’audition. En outre, j’estime que je peux prendre acte d’office du fait que la science médicale progresse au fil du temps. Par conséquent, si les mêmes renseignements examinés en 2013 sont invoqués de nouveau en 2017 sans avoir actualisé la recherche sur Internet, des questions d’équité procédurale peuvent être soulevées, puisque les renseignements dateraient de plus de quatre ans et seraient fort probablement désuets. Je note qu’il serait déraisonnable, de la part du comité de réexamen, de privilégier des éléments de preuve médicale vieux de quatre ans par rapport à des études plus récentes, comme celles invoquées par la Dre Rigby, sans expliquer pourquoi il préférerait des renseignements désuets au détriment de renseignements récents.

[37]  Le problème sous-jacent du défendeur réside dans le fait que ni la Cour ni la demanderesse ne connaissent les éléments de preuve extrinsèques que le comité de réexamen a examinés. Nous ignorons quand ils ont été rédigés ou publiés, et s’ils ont été publiés avant ou après l’audition. Nous ignorons ce que les articles ou les études énoncent. Nous ignorons le degré de certitude avec lequel les conclusions ont été tirées. Ni la Cour ni la demanderesse ne savent quelles études ou quels rapports secondaires ont été inclus dans les éléments de preuve examinés.

[38]  La demanderesse n’a pas été informée de manière appropriée et elle n’a pas eu l’occasion de formuler une réponse, laquelle aurait pu influencer l’issue. À mon humble avis, il est imprudent de se fier à l’évaluation, réalisée par le comité de réexamen, des éléments de preuve extrinsèques qui n’ont pas été vérifiés comme il se doit. Les éléments de preuve extrinsèques invoqués peuvent être parfaitement déterminants, mais il se peut que ce ne soit pas le cas. Il peut être tout à fait correct de s’attendre à ce que la demanderesse connaisse les articles publiés depuis une période raisonnable avant l’audition. Toutefois, aucune garantie de la sorte n’est fournie à la demanderesse. On ne peut pas demander à la demanderesse ni à la Cour de spéculer sur de telles questions.

[39]  En ce qui concerne les particularités, et à titre de rappel, le comité de réexamen a exprimé ce qui suit :

[traduction]

Le présent comité a aussi consulté d’autres documents, ainsi que d’autres recherches médicales et consensus médicaux connus, comme le site Web de la clinique Mayo, le Merck Manual of Diagnosis and Therapy, 19e édition, et le site Web de l’Institut national des maladies neurologiques et de l’AVC (États-Unis). Toutes ces ressources indiquent que la cause de la PSP est inconnue.

[40]  Un avis a été formulé selon lequel le site Web de la clinique Mayo pourrait être examiné, mais encore une fois, il est tout à fait possible que ce site change constamment, compte tenu des avancées de la médecine au fil du temps. La demanderesse ignore les éléments invoqués précisément et ne sait pas si les renseignements provenant de la clinique Mayo ont été produits dans un délai raisonnable avant l’audition, auquel cas ils pourraient être admissibles, ou s’ils ont été rédigés ou publiés seulement après l’audition, auquel cas ils ne seraient vraisemblablement pas admissibles. Concernant le site Web de l’Institut national des maladies neurologiques et de l’AVC (États-Unis), l’avocat du défendeur a indiqué que la demanderesse avait présenté ce contenu au comité d’examen. Cela dit, il reste que la demanderesse ignore si les éléments de preuve présentés au comité d’examen, qui a siégé au début de 2013, sont les mêmes que ceux que le comité de réexamen a trouvés après l’audition. Si c’est le cas, alors ces éléments de preuve risquent d’être très désuets quatre ans plus tard, comme il a été mentionné concernant le contenu du site Web de la clinique Mayo. Quant au Merck Manual, la Cour en est réduite à se demander s’il s’agit d’un livre ou d’un site Web. S’il s’agit d’un site Web, son contenu présente les mêmes inconvénients que celui des sites Web de la clinique Mayo et de l’Institut national des maladies neurologiques et de l’AVC (États-Unis), en ce qui concerne le moment où il a été rédigé ou affiché et les éléments précis qui ont été examinés. S’il s’agit d’un livre, puisque l’on renvoie à la 19e édition, les renseignements invoqués risquent d’être très désuets, étant donné que le comité d’examen s’est fondé sur la même édition (la 19e) il y a quatre ans, c’est-à-dire en 2013.

[41]  Je suis d’avis qu’il s’agit d’une situation inacceptable, et plus important encore, elle est inéquitable sur le plan procédural pour la demanderesse.

[42]   En plus d’avoir violé les règles de l’équité procédurale en ne permettant pas à la demanderesse de consulter les éléments de preuve extrinsèques invoqués pour statuer sur la demande ni d’y répondre, le processus adopté par le comité de réexamen a enfreint les règles de présentation « sous le meilleur jour possible », édictées par le législateur fédéral dans l’article 39 de la Loi et soulignées par la Cour d’appel fédérale dans l’arrêt Wannamaker. L’article 39 est rédigé ainsi :

Règles régissant la preuve

Rules of evidence

39 Le Tribunal applique, à l’égard du demandeur ou de l’appelant, les règles suivantes en matière de preuve :

39 In all proceedings under this Act, the Board shall

a) il tire des circonstances et des éléments de preuve qui lui sont présentés les conclusions les plus favorables possible à celui-ci;

(a) draw from all the circumstances of the case and all the evidence presented to it every reasonable inference in favour of the applicant or appellant;

b) il accepte tout élément de preuve non contredit que lui présente celui-ci et qui lui semble vraisemblable en l’occurrence;

(b) accept any uncontradicted evidence presented to it by the applicant or appellant that it considers to be credible in the circumstances; and

c) il tranche en sa faveur toute incertitude quant au bien-fondé de la demande.

(c) resolve in favour of the applicant or appellant any doubt, in the weighing of evidence, as to whether the applicant or appellant has established a case.

[Non souligné dans l’original]

[Emphasis added]

[43]  L’article 39 énonce clairement qu’un ancien combattant a droit à ce que les conclusions qui lui sont les plus favorables possible soient tirées des éléments de preuve présentés au comité de réexamen. Bien sûr, cet avantage s’applique aux nouveaux éléments de preuve présentés dans le rapport de la Dre Rigby et dans les études connexes. Toutefois, il s’applique aussi aux éléments de preuve extrinsèques que le comité de réexamen a examinés et invoqués, mais qu’il a omis de communiquer à la demanderesse.

[44]  Je ne vois pas comment la demanderesse pourrait présenter des observations fondées sur l’article 39 en fonction « des éléments de preuve qui lui sont présentés », c’est-à-dire présentés au comité de réexamen, sans savoir quels éléments de preuve extrinsèques ce dernier a examinés. Non seulement le comité de réexamen ne peut décider seul des éléments de preuve extrinsèques postérieurs à l’audition qu’il peut examiner, mais il ne peut pas non plus décider seul de la manière dont les présomptions créées par l’article 39 s’appliquent et de la mesure dans laquelle elles s’appliquent, sans que le membre ou l’ancien combattant lui présente ses observations. Je ne peux accepter que de telles considérations et décisions unilatérales, se produisant après le processus d’audition et en dehors de celui-ci, soient conformes à la substance de l’avantage lié à la valeur probante accordé aux anciens combattants par le législateur fédéral dans l’article 39. Je suis d’avis que de tirer une conclusion différente vide l’article 39 d’un contenu important destiné à conférer un avantage aux membres et aux anciens combattants des Forces armées canadiennes.

[45]  Il n’y a pas lieu d’adopter des pratiques nouvelles ou différentes pour résoudre ces violations de la procédure et de la loi; il convient plutôt de simplement respecter la règle générale du droit administratif, c’est-à-dire que les personnes dans la position de la demanderesse ont le droit de connaître les éléments de preuve qui pèsent contre elles et d’y répondre. En l’espèce, cela signifie qu’elles ont droit de consulter les résultats des recherches extrinsèques réalisées par le comité de réexamen. Ce dernier aurait dû communiquer les éléments de preuve extrinsèques invoqués à la demanderesse et lui donner l’occasion d’y répondre. L’absence de communication de ces éléments de preuve à la demanderesse l’a privée de la possibilité d’y répondre. En toute déférence, compte tenu de toutes les circonstances, cette manière de faire n’était pas équitable et violait l’équité procédurale.

[46]  Concrètement, à mon avis, le comité de réexamen aurait dû, à tout le moins, donner à la demanderesse les adresses des pages Web liées aux éléments de preuve invoqués et lui permettre d’y répondre. Il aurait pu aussi lui fournir des copies des pages elles-mêmes. Toutefois, en l’espèce, le comité de réexamen n’a fait ni l’un ni l’autre.

[47]  Ce manquement à l’équité procédurale donne ouverture à un contrôle judiciaire pour la demanderesse. Dans la mesure où l’article 39 de la Loi n’a pas été respecté dans le cadre du processus, cet aspect de la décision est déraisonnable, puisqu’il n’appartient pas aux issues possibles acceptables pouvant se justifier au regard du droit.

(2)  Défaut de tenir compte de l’alinéa 50g) du Règlement

[48]  Il est reconnu que le comité de réexamen n’a pas mentionné l’alinéa 50g) du Règlement. L’alinéa 50g) énonce une présomption selon laquelle, en l’absence de preuve contraire (il n’y en avait aucune), une maladie est liée au service, s’il est établi qu’elle est survenue au cours de l’exercice, par le vétéran, de fonctions qui l’ont exposé à des risques liés à l’environnement qui auraient raisonnablement pu causer la maladie [accent mis par la Cour].

[49]  En l’espèce, il est constant que le dossier de la demanderesse était centré sur l’alinéa 50g). L’argument de l’ancien combattant voulait qu’il ait été exposé, au cours de sa carrière dans les Forces armées, à des risques environnementaux qui auraient raisonnablement pu causer la PSP dont il était atteint. Les nouveaux éléments de preuve médicale que le comité de réexamen devait évaluer abordaient directement cet aspect précis, puisque la conclusion de la Dre Rigby était la suivante :

[traduction]

« [E]n conclusion, la littérature médicale appuie un lien entre l’exposition dans l’environnement et l’apparition de la PSP. Il existe des données scientifiques à l’appui de la vraisemblance d’un lien avec les solvants organiques. Par conséquent, je pense que le problème de santé de M. Hiscock est raisonnablement attribuable à son exposition. »

[50]  À mon humble avis, compte tenu des circonstances de l’espèce, que le comité de réexamen était tenu d’évaluer les nouveaux éléments de preuve dans le contexte de l’alinéa 50g) du Règlement : cet alinéa énonce le contexte dans lequel l’avis de la Dre Rigby devait être évalué. Les nouveaux éléments de preuve n’ont pas été produits dans l’abstrait ou sans but : ils ont été soumis pour appuyer la demande présentée en vertu de l’alinéa 50g). Honnêtement, je ne vois pas comment le comité de réexamen pouvait rendre une décision en réexamen sans tenir compte du fondement législatif sous-jacent à la demande dont il était saisi.

[51]  Le défendeur a prétendu qu’il était raisonnable que le comité de réexamen rejette les nouveaux éléments de preuve, puisqu’il n’existait pas de lien de causalité entre la carrière au sein des Forces armées et l’apparition de la PSP chez l’ancien combattant. Toutefois, à mon avis, le lien de causalité dans une affaire comme l’espèce est établi à l’alinéa 50g) du Règlement lui-même, lequel amène à se poser la question suivante : M. Hiscock a-t-il été exposé à des risques liés à l’environnement qui auraient raisonnablement pu causer la PSP?

[52]  Je suis d’avis que la décision du comité de réexamen ne peut se justifier au regard du droit, puisqu’elle ne tient pas compte du fondement réglementaire de la demande de réexamen, c’est-à-dire l’alinéa 50g) du Règlement.

(3)  Preuve de M. Power

[53]  Comme indiqué ci-dessus, le comité de réexamen a omis d’examiner les éléments de preuve de la demanderesse liés à l’exposition aux risques environnementaux. Il a affirmé ce qui suit : [traduction] « le comité ignore à quels produits chimiques il a été exposé, pendant combien de temps, à quelle quantité et si l’exposition aux produits chimiques utilisés en milieu de travail, en elle-même, a raisonnablement contribué à la maladie alléguée ».

[54]  J’affirme respectueusement que la conclusion du comité de réexamen à ce sujet est tout simplement inexacte. En fait, il existe de bons éléments de preuve non contestés, à l’égard de ces questions litigieuses, dans un rapport écrit déposé par l’adjudant-chef Power (retraité), un ancien collègue de M. Hiscock. En outre, les éléments de preuve corroborés à ce sujet ont été présentés par l’ancien combattant lui-même.

[55]  Je dois donc conclure que le comité de réexamen n’a pas pris en compte les éléments de preuve présentés par M. Power. La difficulté, ce faisant, est que le comité de réexamen a fait fi d’éléments de preuve déterminants concernant une question essentielle soulevée par les nouveaux éléments de preuve présentés par la Dre Rigby, notamment l’exposition de M. Hiscock à de possibles risques environnementaux, comme des degrés élevés de radiation, des agents corrosifs et des solvants organiques toxiques, y compris le tétrachlorure de carbone. Le fait de ne pas retenir des éléments de preuve déterminants est aussi contraire aux avantages liés à la valeur probante destinés à aider les anciens combattants (avantages adoptés à l’article 39).

[56]  Selon les motifs de l’arrêt Dunsmuir, la conclusion du comité de réexamen sur cet aspect ne peut se justifier au regard des faits et du droit. Par conséquent, cet aspect de la décision est déraisonnable, conformément à l’arrêt Dunsmuir.

VII.  Résumé

[57]  En l’espèce, le droit de la demanderesse à l’équité procédurale a été enfreint puisque le comité de réexamen n’a pas communiqué ses éléments de preuve extrinsèques, donnant lieu à la négation du droit de la demanderesse d’y répondre. Je ne suis pas convaincu que cette iniquité procédurale puisse être réparée, même en faisant preuve de retenue à l’égard de la décision rendue par le comité de réexamen. En outre, la qualification erronée, par le comité de réexamen, des éléments de preuve présentés par M. Power ne peut se justifier au regard des faits. En premier lieu, le comité de réexamen n’a pas tenu compte du fondement réglementaire de la demande de réexamen, à savoir la demande de l’ancien combattant en application de l’alinéa 50g) du Règlement. Le comité de réexamen a aussi omis de respecter la règle de « présentation sous le meilleur jour possible », établie à l’article 39 de la Loi.

[58]  Bien que je comprenne que le contrôle judiciaire ne doit pas servir de chasse au trésor à la recherche d’erreurs, je conclus, compte tenu de l’affaire dans son ensemble, que le contrôle judiciaire est justifié non seulement en raison du manquement à l’équité procédurale, mais aussi parce que la décision n’appartient pas aux issues possibles acceptables pouvant se justifier au regard des faits et du droit. L’espèce devrait faire l’objet d’un réexamen selon la procédure accélérée.

VIII.  Dépens

[59]  Il a été entendu que si la demanderesse obtenait gain de cause, elle aurait droit à une adjudication des dépens globale de 4 000 $. Le défendeur ne demande pas d’obtenir les dépens. Il y aura par conséquent une adjudication des dépens globale de 4 000 $, payables par le défendeur à la demanderesse.


JUGEMENT DANS LE DOSSIER T-1991-17

LA COUR accueille la présente demande de contrôle judiciaire; la décision du comité de réexamen est annulée, l’affaire est renvoyée à un comité de réexamen différemment constitué aux fins de réexamen accéléré, et le défendeur doit payer à la demanderesse l’adjudication des dépens globale de 4 000 $.

« Henry S. Brown »

Juge


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


DOSSIER :

T-1991-17

 

INTITULÉ :

CAROL ANN HISCOCK c LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA

 

LIEU DE L’AUDIENCE :

OTTAWA (Ontario)

 

DATE DE L’AUDIENCE :

Le 4 juillet 2018

 

JUGEMENT ET MOTIFS :

Le juge BROWN

 

DATE DES MOTIFS :

Le 12 juillet 2018

 

COMPARUTIONS :

M. Jason Rabin

 

Pour la demanderesse

 

M. Kevin Palframan

 

Pour le défendeur

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Borden Ladner Gervais S.E.N.C.R.L., S.R.L.

Ottawa (Ontario)

Pour la demanderesse

 

Procureur général du Canada

Ottawa (Ontario)

Pour le défendeur

 

 

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