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Date : 20180713


Dossier : T-186-13

Référence : 2018 CF 735

[TRADUCTION FRANÇAISE]

Ottawa (Ontario), le 13 juillet 2018

En présence de monsieur le juge Brown

ENTRE :

MAOZ BETSER-ZILEVITCH

demandeur

et

NEXEN INC. ET CNOOC CANADA INC.

CHACUNE INDIVIDUELLEMENT ET EXPLOITANT

LEUR ENTREPRISE SOUS LA DÉNOMINATION SOCIALE DE

THE LONG LAKE OIL SANDS PROJECT

défenderesses

JUGEMENT ET MOTIFS

I.  Aperçu

[1]  Les défenderesses, Nexen Inc. et CNOOC Canada Inc. (collectivement, Nexen ou les défenderesses) présentent une requête pour obtenir une ordonnance déclarant qu’un règlement a été conclu entre le demandeur, Maoz Betser-Zilevitch (Betser-Zilevitch), et les défenderesses, et déterminant les modalités de ce règlement. Elles demandent également une ordonnance déclarant que la présente action soit abandonnée conformément à l’entente de règlement présumée, ainsi que l’adjudication de dépens payables immédiatement.

[2]  Pour les motifs qui suivent, j’ai déterminé qu’un règlement a été conclu; j’ai également déterminé les modalités du règlement, j’ai conclu que la présente action est réputée abandonnée et que les défenderesses ont droit aux dépens de la présente requête.

II.  Contexte

[3]  M. Betser-Zilevitch est ingénieur et propriétaire du brevet canadien no 2 584 627 (le brevet canadien) et du brevet américain no 7 647 976 (le brevet américain). Les brevets canadien et américain s’appliquent à la même invention.

[4]  Les deux brevets concernent certains équipements utilisés pour injecter de la vapeur et extraire du pétrole lourd des sables bitumineux.

[5]  Nexen et CNOOC Canada ont exploité leur entreprise sous la dénomination sociale The Long Lake Oil Sands Project, qui porte sur l’extraction de pétrole lourd des sables bitumineux.

[6]  Le 28 janvier 2013, M. Betser-Zilevitch a intenté une action en contrefaçon contre les défenderesses relativement au brevet canadien. Les défenderesses ont déposé une défense et une demande reconventionnelle; elles ont déposé une défense et une demande reconventionnelle modifiées le 4 juin 2014.

[7]  Les parties ont ensuite entamé des discussions de règlement sur une période de onze mois. Les négociations sont attestées par des lettres échangées entre les parties. La première offre de règlement a été faite le 22 février 2016 par les défenderesses. Par la suite, quatre contre-offres ont été faites, y compris la contre-offre des défenderesses du 2 décembre 2016.

[8]  La sixième proposition de règlement revêt une grande importance pour le présent litige. Elle a été rédigée par M. Betser-Zilevitch dans une lettre datée du 25 janvier 2017 (l’offre de Betser-Zilevitch). Nexen a accepté en principe cette offre de règlement dans une lettre datée du 23 février 2017, dans laquelle elle a déclaré qu’elle fournirait un projet de documents officiels de règlement. M. Betser-Zilevitch a ensuite envoyé une lettre à notre Cour datée du 10 mars 2017, l’informant qu’un [traduction] « règlement avait été conclu, sous réserve de l’officialisation, la révision et l’exécution par les parties d’une entente de règlement officielle ».

[9]  Par la suite, les parties ont échangé davantage de correspondance et trois projets d’ententes de règlement. Il est plus efficace de discuter de ces documents dans l’analyse de la Cour ci-dessous. Cependant, en voici un bref aperçu. Le 14 mars 2017, Nexen a envoyé son projet de règlement à M. Betser-Zilevitch. Dans une lettre datée du 7 avril 2017, M. Betser-Zilevitch a contesté certains aspects du projet d’entente de règlement de Nexen. Dans une lettre datée du 5 mai 2017, Nexen était en désaccord avec certaines positions de M. Betser-Zilevitch, mais pas la totalité d’entre elles, ajoutant qu’elle était [traduction] « disposée en ce moment à régler les problèmes entre les parties pour éviter les coûts liés à la poursuite des litiges » et qu’[TRADUCTION] « il serait regrettable qu’un [...] règlement ne soit plus possible et que les parties soient tenues de poursuivre l’action ».

[10]  À ce moment-là, M. Betser-Zilevitch a retenu les services d’un nouvel avocat. Nexen s’est opposée à ce nouvel avocat parce qu’un associé principal de celui-ci avait représenté Nexen lorsqu’il travaillait pour un autre cabinet. Toutefois, Nexen a ajouté que [traduction] « les parties ont conclu une entente concernant les principales modalités de règlement et sont en train de finaliser certaines conditions accessoires mineures aux fins d’une entente de règlement officielle ». Par conséquent, [traduction] « pour mettre fin à ce processus de façon expéditive, Nexen est disposée à consentir » à ce que le nouveau cabinet agisse uniquement dans ce but, à la condition que ce dernier n’exige pas la divulgation de renseignements confidentiels.

[11]  Dans une lettre datée du 15 juin 2017, le nouvel avocat de M. Betser-Zilevitch a indiqué qu’il n’y avait pas d’entente concernant le règlement, que toutes les offres de règlement antérieures avaient été retirées et que toutes les offres des défenderesses avaient été refusées.

[12]  Le juge chargé de la gestion de l’instance a offert une séance de médiation présidée par la Cour, ce que M. Betser-Zilevitch a refusé par lettre datée du 15 août 2017; par conséquent, aucune médiation présidée par la Cour n’a eu lieu.

[13]  Le 12 janvier 2018, les défenderesses ont déposé la présente requête en vue d’obtenir une ordonnance déclarant qu’un règlement avait été conclu et désignant les modalités du règlement.

III.  Questions en litige

[14]  Les questions en litige sont les suivantes :

  • A) Y avait-il une intention de créer des rapports juridiques?

  • B) Y a-t-il eu un accord sur toutes les conditions essentielles?

  • C) Quelles conditions devraient être jugées implicites dans un règlement, le cas échéant?

IV.  Droit

[15]  Les parties et la Cour conviennent que les considérations relatives à la conclusion d’une entente de règlement exécutoire sont énoncées dans Apotex Inc. c Allergan, Inc., 2016 CAF 155 [Allergan]. Il doit y avoir une intention commune objective de créer des rapports juridiques : Allergan, au paragraphe 21. Il doit y avoir une contrepartie découlant d’une promesse : Allergan, au paragraphe 25. Les conditions de l’accord doivent, sur le plan objectif, être suffisamment certaines : Allergan, au paragraphe 26. Les tribunaux hésiteront à annuler les accords en raison de l’incertitude et s’efforceront plutôt de donner effet aux attentes raisonnables des parties, objectivement déterminées : Allergan, au paragraphe 28, et voir McCabe c Verge, [1999] NJ no 272 (NLCA), aux paragraphes 17 et 18 [McCabe], décision citée dans Allergan, aux paragraphes 22, 24 et 33. Il doit y avoir une offre et une acceptation correspondante de toutes les conditions qui lui sont essentielles : Allergan, au paragraphe 30.

[16]  Il faut se demander si un homme ou une femme d’affaires honnête et raisonnable, en examinant objectivement le comportement des parties, pourrait raisonnablement conclure que les parties avaient l’intention d’être liées ou non : Allergan, au paragraphe 32. Le fait qu’un autre document était nécessaire pour officialiser l’entente entre ces parties n’empêche pas de conclure qu’un échange oral ou écrit constitue un contrat obligatoire si les conditions de l’échange comportent une entente sur toutes les conditions essentielles : Allergan, au paragraphe 35. Les cours se sont penchées sur la conduite ultérieure des parties pour établir si une entente a été conclue au sujet des conditions essentielles : Allergan, au paragraphe 39.

[17]  Dans Allergan, le juge Stratas énonce ce qui suit aux paragraphes 52 et 53 :

c)  Mise en garde

[52] Ce qui précède montre que l’entente de règlement peut être conclue rapidement et sans formalité et, d’un point de vue subjectif, parfois de façon inattendue : les ententes de règlement comprennent presque toujours un examen; les discussions de règlement ont généralement lieu dans un contexte où l’intention d’établir des rapports juridiques peut être présumée; les discussions officieuses peuvent compter; un rapprochement des idées est évalué objectivement, une entente sur toutes les conditions essentielles est obligatoire même si les parties négocient encore au sujet d’autres conditions et, à moins qu’elles soient essentielles, des conditions comme la présentation de renonciations peuvent être facilement jugées implicites dans une entente pour la conclure. La récente décision de la Cour suprême du Royaume-Uni dans la décision RTS Flexible Systems, précitée, souligne ces points.

[53] Cela a des conséquences pratiques. Si une partie ne veut pas être liée jusqu’à ce qu’elle ait accepté toutes les conditions qu’elle juge subjectivement essentielles à l’entente, dans chaque offre qu’elle propose, elle doit clairement exprimer ce souhait de manière objective.

[18]  Des conditions non essentielles peuvent être dégagées, par implication, de l’entente : Allergan, au paragraphe 33. D’autres aspects du droit sur les conditions dégagées d’une entente par implication ont été établis par la Cour d’appel fédérale dans Allergan.

[33] Lorsque le juge conclut qu’il y a eu entente sur les conditions essentielles, il dégage, souvent par implication, des conditions non essentielles de l’entente : McCabe, précité, au paragraphe 20; Fieguth, précité; Hughes, précité, au paragraphe 6. L’absence d’entente sur les conditions non essentielles n’entravera pas la conclusion d’une entente. Autrement dit, [traduction] « il n’est pas nécessaire que le contrat initial comprenne toutes les conditions connexes qui sont déjà implicites dans son contenu » : arrêt Ward, précité, au paragraphe 54. [traduction] « Même si certaines conditions d’importance économique ou autre des parties n’ont pas été parachevées, une évaluation objective de leurs paroles et de leur conduite peut mener à la conclusion qu’elles n’avaient pas l’intention de considérer une entente sur ces conditions soit une condition préalable à une entente conclue et juridiquement contraignante » : arrêt RTS Flexible Systems, précité, au paragraphe 45. Par exemple, en admettant qu’une entente sur les conditions essentielles soit par ailleurs établie, les cours peuvent conclure à des conditions concernant l’octroi d’une renonciation, le mode de paiement et le moment du paiement : arrêt Fleguth, précité, au paragraphe 21; arrêt Hodaie c RBC Dominion Securities, 2012 ONCA 796, au paragraphe 3; décision Imperial Oil Ltd. c 416169 Alberta Inc., 2002 ABQB 386, 310 A.R. 338. Il s’agira souvent de [traduction] « simples formalités ou d’une formulation de routine » : arrêt Bawitko, précité, à la page 106.

[19]  Je trouve également instructive la décision de la Cour d’appel de l’Ontario dans Energy Fundamentals Group Inc. c Veresen Inc., 2015 ONCA 514, qui décrit le droit établi de longue date sur la question de savoir à quel moment un tribunal peut dégager, par implication, une condition d’une entente commerciale :

[TRADUCTION]

[30] Comme l’a fait observer le juge de première instance, il peut y avoir introduction d’une clause contractuelle implicite « fondée sur l’existence d’une intention présumée des parties lorsque l’introduction de la condition implicite est nécessaire pour donner à un contrat l’efficacité commerciale ou pour permettre de quelque autre manière de satisfaire le ‘critère de l’observateur objectif’ ». (M.J.B. Enterprises Ltd. c Construction de défense (1951) Ltd., [1999] 1 R.C.S. 619).

[31] La formulation la plus mémorable du critère de l’observateur objectif se trouve dans l’arrêt Shirlaw c Southern Foundries (1926) Ltd., [1939] 2 K.B. 206, au paragraphe 227, [1939] 2 All E.R. 113, au paragraphe 124 (C.A.) :

[traduction] À première vue, ce qui dans un contrat est implicite et n’a pas besoin d’être exprimé est quelque chose de si évident que cela va de soi. Ainsi, si, pendant que les parties concluent leur marché, un observateur objectif devait proposer certaines dispositions expresses à cet effet dans leur accord, elles lui opposeraient un refus sur un ton légèrement irrité avec un simple : « Oh, bien entendu ».

[32] Le critère de l’efficacité commerciale de l’entreprise dans sa forme moderne a été établi dans l’arrêt The Moorcock (1889) 14 P.D. 64, [1886-90] All E.R. Rep. 530 (C.A.), au paragraphe 68 :

[TRADUCTION]

Dans les opérations commerciales comme celle-ci, ce que la loi désire réaliser par implication est de donner à l’opération l’efficacité commerciale que les deux parties doivent avoir quoi qu’il en soit souhaitée [...]

[33] L’arrêt The Moorcock concernait un contrat entre un exploitant de quai et un armateur; la cour a reconnu une garantie implicite que le navire pouvait être amarré en toute sécurité au quai « dans le but de donner à l’opération l’efficacité que les deux parties devaient avoir souhaitée » (p. 68 et 70).

[34] Le critère de l’efficacité commerciale a été examiné plus récemment par le Conseil privé dans l’affaire Attorney General of Belize v. Belize Telecom Ltd., [2009] UKPC 10, [2009] 2 All E.R. 1127, au paragraphe 22 :

[TRADUCTION]

Prenons, par exemple, la question de savoir si la condition implicite est « nécessaire pour conférer une efficacité commerciale » au contrat. Cette formulation sert à souligner deux points importants. Le premier, illustré par le mot « commerciale », est qu’en considérant ce que l’acte aurait signifié pour une personne raisonnable qui connaissait le contexte pertinent, on suppose que le lecteur fictif tiendra compte des conséquences pratiques découlant de la décision de donner au mot l’une ou l’autre des significations. Dans le cas d’un acte tel qu’un contrat commercial, il examinera si une interprétation différente pourrait contrecarrer l’objectif commercial apparent des parties. [...]

[35] L’introduction par implication d’une clause contractuelle ne nécessite pas de conclure qu’une partie a réellement réfléchi à l’emploi d’une condition ou y a expressément consenti. Souvent, des conditions sont introduites pour combler des lacunes auxquelles les parties n’ont pas prêté attention (Belize Telecom, au paragraphe 31).

[20]  Par contre, un tribunal n’introduira pas une condition implicite qui contredit le libellé exprès du contrat ou qui est déraisonnable : G. Ford Homes Ltd. v Draft Masonry (York) Co. Ltd. (1984), 1983 CanLII 1719 (C.A. ONT.), 43 OR (2d) 401 (CA).

V.  Analyse

A.  Y avait-il une intention de créer des rapports juridiques?

[21]  À cet égard, la correspondance écrite suivante est particulièrement pertinente.

[22]  Par une lettre datée du 25 janvier 2017, M. Betser-Zilevitch a proposé de régler l’action et la demande reconventionnelle. L’offre de Betser-Zilevitch stipulait ce qui suit :

[TRADUCTION]

En réponse à l’offre de règlement de Nexen datée du 2 décembre 2016, M. Betser propose la contre-offre suivante.

1.  M. Betser acceptera de fournir à Nexen une licence initiale entièrement acquittée en vue de la fabrication, de la construction et de l’utilisation de l’invention du brevet canadien no 2 584 627 et du brevet américain no 7 647 976 pour la durée des brevets.

2.  M. Betser fournira aux défendeurs une décharge de responsabilité à l’égard de toutes les revendications telles qu’invoquées dans la déclaration relative aux brevets mentionnés ci-dessus;

3.  Les deux parties conviennent de se désister de l’action principale et de la demande reconventionnelle, sans frais.

4.  ||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||

5.  Nexen acceptera de conclure un accord de confidentialité sous une forme que M. Betser jugera acceptable, afin de conserver la confidentialité des modalités de son entente de règlement.

[23]  L’offre de Betser-Zilevitch indiquait qu’elle demeurerait ouverte jusqu’à 16 h le 10 février 2017. À la demande des défenderesses, cette période a par la suite été prorogée jusqu’au 24 février 2017.

[24]  Le 23 février 2017, Nexen, par l’entremise d’un avocat (toute la correspondance a été transmise par son intermédiaire), a répondu qu’elle était disposée à [traduction] « s’entendre en principe » sur les modalités de règlement énoncées dans l’offre de Betser-Zilevitch :

[TRADUCTION]

Nexen est prête à accepter en principe les modalités de règlement énoncées dans votre lettre du 25 janvier 2017. Dans les circonstances, nous préparerons un projet d’entente de règlement qui incorpore ces modalités, ainsi que d’autres modalités de règlement standard, aux fins de votre examen.

[25]  La correspondance et les discussions portant sur le règlement ont également mis en cause les efforts du juge Tabib, chargé de la gestion de l’instance, concernant un règlement ou la présentation ordonnée de l’action en contrefaçon de brevet et de la demande reconventionnelle au procès. À ce titre, les parties étaient tenues de fournir à la Cour des rapports de situation périodiques.

[26]  Par conséquent, le 10 mars 2017, l’avocat de M. Betser-Zilevitch a écrit à la Cour, avec le consentement de Nexen, pour l’informer qu’un règlement avait été conclu sous réserve d’une officialisation, d’une révision et d’une exécution :

[TRADUCTION]

Nous sommes les avocats du demandeur, Maoz Betser-Zilevitch, dans l’affaire susmentionnée. Par suite de l’instruction de la Cour du 15 février 2017, qui ordonnait aux parties de fournir une mise à jour de situation et une proposition de calendrier avant le 10 mars 2017, nous vous informons qu’un règlement a été conclu, sous réserve de l’officialisation, la révision et l’exécution par les parties d’une entente de règlement officielle. Nous écrivons donc pour demander une nouvelle prorogation du délai pour fournir une nouvelle mise à jour de la situation et une proposition de calendrier [...]

[Non souligné dans l’original]

[27]  Nexen soutient que ces trois documents confirment l’intention mutuelle de créer des rapports juridiques et la conclusion d’une entente de règlement : l’offre de Betser-Zilevitch, la réponse des défenderesses à l’offre de Betser-Zilevitch et la lettre de M. Betser-Zilevitch à la Cour indiquant qu’un règlement avait été conclu sous réserve d’une officialisation.

[28]  Inversement, M. Betser-Zilevitch soutient que la correspondance montre qu’aucun règlement n’a été conclu. M. Betser-Zilevitch s’appuie sur la réponse de Nexen datée du 23 février 2017, selon laquelle les défenderesses étaient disposées à accepter l’entente, mais seulement [traduction] « en principe ». M. Betser-Zilevitch affirme que la réponse de Nexen indiquait que son acceptation était conditionnelle à la préparation et à l’examen d’un projet d’entente de règlement, qui inclurait des modalités supplémentaires. Enfin, M. Betser-Zilevitch souligne la correspondance de Nexen le 5 mai 2017, dans laquelle Nexen a déclaré qu’elle était disposée à régler [traduction] « en ce moment », indiquant ainsi que l’affaire n’avait pas encore été réglée. M. Betser-Zilevitch mentionne également la correspondance sur le règlement envoyée avant l’offre de Betser-Zilevitch à l’appui de son affirmation selon laquelle aucune entente de règlement n’était intervenue.

[29]  Je ne souscris pas à ces arguments.

[30]  Selon la prépondérance des probabilités, j’accepte la position de Nexen. À mon humble avis, un homme d’affaires honnête et raisonnable comprendrait qu’il y avait une intention de créer des rapports et un contrat sous la forme d’une entente de règlement exécutoire, soit l’offre de Betser-Zilevitch du 25 janvier 2017. Selon moi, l’offre de Betser-Zilevitch constituait une offre susceptible d’acceptation. À mon avis également, la réponse de Nexen du 23 février 2017 constituait l’acceptation de l’offre de Betser-Zilevitch. Il n’y a aucun doute qu’il y a eu une contrepartie : le règlement a mis fin au litige. Tout ce qui restait était la documentation officielle, ou, comme l’a dit Nexen, la préparation d’[traduction] « un projet d’entente de règlement qui incorpore ces modalités, ainsi que d’autres modalités de règlement standard ».

[31]  M. Betser-Zilevitch soutient qu’une entente de règlement « en principe » n’est pas une entente de règlement en l’espèce. Je ne suis pas de cet avis. Il s’agit d’un examen lié aux faits et axé sur les faits. Compte tenu des faits de la présente affaire et des négociations qui ont duré près d’un an et où chaque partie a cherché à trouver appui sur l’autre, et compte tenu du rapprochement des idées attesté par l’offre Betser-Zilevitch et l’acceptation par Nexen du 23 février 2017, je conclus, selon la prépondérance des probabilités, qu’un homme ou une femme d’affaires honnête et raisonnable, en examinant objectivement le comportement des parties, pourrait raisonnablement conclure que les parties avaient l’intention d’être liées, c’est-à-dire que les parties s’étaient finalement entendues d’un commun accord pour créer des rapports juridiques, et qu’elles avaient conclu une entente de règlement contraignante qu’elles ont mis par écrit.

[32]  Comme l’a noté Allergan, au paragraphe 35, exiger que des documents supplémentaires soient nécessaires pour officialiser une entente de règlement n’est pas incompatible avec le constat qu’un échange écrit constitue un contrat obligatoire. C’est le cas dans la présente cause; rien de plus n’était requis pour constituer une entente de règlement exécutoire.

[33]  Si cela ne ressort pas clairement de l’historique, notamment l’offre et l’acceptation échangées par les parties, la lettre de situation statut de M. Betser-Zilevitch à la Cour affirmant qu’[traduction] « un règlement avait été conclu, sous réserve de l’officialisation, la révision et l’exécution par les parties d’une entente de règlement officielle », confirme, en des termes choisis par M. Betser-Zilevitch, qu’un règlement a été conclu, sous réserve d’une officialisation.

[34]  M. Betser-Zilevitch n’a pas usé de faux fuyant avec la Cour, et à mon avis, n’aurait pas pu le faire. Il n’a pas déclaré qu’un règlement était en cours de négociation, qu’un règlement était presque conclu, ou qu’un règlement serait probablement conclu avec un certain degré de confiance. M. Betser-Zilevitch n’a pas non plus déclaré qu’il y avait des discussions de règlement en cours, ou que les parties étaient parvenues à une entente sous réserve d’un contrat non encore.

[35]  La lettre de M. Betser-Zilevitch était une lettre adressée à la Cour, une cour compétente pour entendre le litige en matière de brevets qu’il avait entamé, et une cour qui a fait tout ce qu’elle pouvait pour aider les deux parties à résoudre leurs différends ou à aller en procès. Rien n’indique que la déclaration de M. Betser-Zilevitch devant la Cour était tout sauf véridique. Cette déclaration ne souffre aucune équivoque; elle indique qu’un règlement ayant force obligatoire a été conclu. Notre Cour avait le droit de se fier à la déclaration de M. Betser-Zilevitch le 10 mars 2017 et, à mon humble avis, elle a le droit de s’en prévaloir maintenant. La lettre adressée à la Cour est une preuve convaincante de l’intention des deux parties de créer des rapports juridiques sous la forme d’une entente de règlement que M. Betser-Zilevitch a lui-même proposée le 25 janvier 2017.

[36]  La lettre de M. Betser-Zilevitch à la Cour est l’exemple classique d’une conduite post-règlement confirmant le fait qu’une entente ayant force obligatoire a été conclue par ces parties : la lettre a été envoyée sur consentement.

[37]  L’avocat de M. Betser-Zilevitch me demande instamment de conclure autrement, soulignant les cinq offres précédentes et les contre-offres faites avant l’offre Bester-Zilevitch du 25 janvier 2017. Cependant, vu objectivement, je ne suis pas en mesure de conclure que l’échange des cinq offres et contre-offres précédentes constitue autre chose qu’une preuve supplémentaire que les deux parties ont conclu une entente de règlement ayant force obligatoire. Elles avaient retenu les services d’un avocat. Il y a eu de nombreux allers-retours entre les parties sur un certain nombre de questions, y compris le montant que Nexen devait payer à M. Betser-Zilevitch pour le règlement. Elles cherchaient à obtenir un règlement et un rapprochement des idées. Elles marchandaient et négociaient avec sérieux. Je ne peux que conclure que leur intention commune était de parvenir à un règlement pour créer des droits juridiques contraignants, ce qui est exactement ce qu’elles ont finalement fait.

[38]  Il n’y a rien d’inhabituel à ce que les parties effectuent des allers-retours sur diverses questions au fil du temps, cherchant un terrain d’entente possible dans le cadre des négociations sur le règlement. Il n’y a rien d’inhabituel non plus à ce que chaque partie tente d’obtenir un avantage supplémentaire au cours des discussions sur le règlement. C’est ce qui s’est passé durant les cinq échanges précédents.

[39]  Il est vrai qu’aucune des cinq offres et contre-offres précédentes n’a abouti à un règlement. Cependant, l’absence d’un règlement dans les cinq premiers allers-retours ne permet aucunement de douter que les parties, avec une intention mutuelle, ont finalement créé des rapports juridiques tels qu’ils sont énoncés dans leur entente de règlement ayant force obligatoire. S’il en était autrement, de nombreux règlements, sinon la plupart, seraient fondés sur des motifs juridiques précaires. L’argument de M. Betser-Zilevitch, selon lequel, parce que les parties négociaient, elles n’auraient pas pu parvenir à un règlement, est non fondé.

[40]  Lorsque les parties ont trouvé un terrain d’entente, comme elles l’ont fait les 25 janvier et 23 février 2017, leur correspondance a documenté leur intention commune de créer des rapports juridiques et a établi leur entente de règlement ayant force obligatoire.

[41]  Résumé : Les deux parties avaient l’intention de créer et ont créé des rapports juridiques dans une offre de règlement sous la forme de l’offre de Betser-Zilevitch.

B.  Y a-t-il eu un accord sur toutes les conditions essentielles?

[42]  À mon avis, en bref la réponse est oui. Il est préférable d’examiner cette question dans le contexte de l’offre de Betser-Zilevitch, de la réponse de Nexen et de la réponse de M. Betser-Zilevitch.

[43]  Après avoir conclu une entente de règlement ayant force obligatoire, Nexen et M. Betser-Zilevitch ont tous deux tenté d’obtenir des avantages supplémentaires au-delà des modalités de l’entente de règlement elle-même. Ces changements de position sont avancés par Betser-Zilevitch comme étant la preuve d’une absence d’entente sur des conditions essentielles. Je ne suis pas d’accord avec cette interprétation.

[44]  Les positions importantes adoptées par les parties après l’entente de règlement des 25 janvier et 23 février 2017 font l’objet de trois lettres.

[45]  La première a été envoyée par Nexen avec son projet de règlement daté du 25 janvier 2017 :

[TRADUCTION]

En réponse à l’offre de règlement de Nexen datée du 2 décembre 2016, M. Betser propose la contre-offre suivante.

1.  M. Betser acceptera de fournir à Nexen une licence initiale entièrement acquittée en vue de la fabrication, de la construction et de l’utilisation de l’invention du brevet canadien no 2 584 627 et du brevet américain no 7 647 976 pour la durée des brevets.

2.  M. Betser fournira aux défendeurs une décharge de responsabilité à l’égard de toutes les revendications telles qu’invoquées dans la déclaration relative aux brevets mentionnés ci-dessus;

3.  Les deux parties conviennent de se désister de l’action principale et de la demande reconventionnelle, sans frais.

4.  |||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||| ||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||

5.  Nexen acceptera de conclure un accord de confidentialité sous une forme que M. Betser jugera acceptable, afin de conserver la confidentialité des modalités de son entente de règlement.

[46]  La deuxième lettre a été envoyée par M. Betser-Zilevitch, en date du 7 avril 2017, avec le projet d’entente de règlement de M. Betser-Zilevitch. En ce qui concerne la renonciation, M. Betser-Zilevitch a formulé l’observation suivante :

[TRADUCTION]

M. Betser n’a pas accepté de fournir une renonciation aux ayants droit, aux coentrepreneurs ou aux clients de Nexen (Nexen, de la manière définie dans l’entente). À ce titre, nous les avons retirés de l’entente. M. Betser n’acceptera pas non plus de libérer Nexen des revendications qui pourraient être invoquées en application de l’un ou l’autre brevet, puisque M. Betser pourrait continuer d’avoir une telle réclamation si Nexen dépassait les limites de la licence.

[47]  En ce qui concerne la licence, M. Betser-Zilevitch a indiqué ce qui suit :

[TRADUCTION]

En ce qui concerne notre entente de règlement, M. Betser n’accorde pas de licence aux administrateurs, dirigeants, employés, ayants droit, coentrepreneurs ou clients de Nexen. À ce titre, nous les avons retirés de l’entente. M. Betser n’a pas non plus accepté de fournir une licence pour autre chose que le droit de fabriquer, de construire et d’utiliser, de sorte que nous avons supprimé les termes « offre de vente », « vente » et « importation et exportation ».

[48]  En ce qui concerne l’avis de vente ou de cession de Nexen, M. Betser-Zilevitch a déclaré ce qui suit :

[TRADUCTION]

M. Betser n’acceptera de fournir à Nexen un avis de vente ou de cession que dans les 30 jours suivant la conclusion de cette vente ou cession. M. Betser n’accepte pas de fournir une telle clause, mais acceptera que Nexen enregistre sa licence auprès du Bureau des brevets. Nous proposons que l’entente soit divisée en deux parties, a) l’entente de règlement qui annexera b) l’accord de licence. Cela permettra à Nexen de divulguer le contrat de licence tel que requis, sans avoir à divulguer les modalités confidentielles de l’entente de règlement.

[49]  En ce qui concerne la confidentialité, M. Betser-Zilevitch a modifié son offre initiale en ajoutant le libellé suivant à la clause de confidentialité : [traduction]

|||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||| ------------------------------------ -||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||| ||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||

[50]  La troisième lettre a été envoyée par Nexen, datée du 5 mai 2017, avec un autre projet :

[TRADUCTION]

Nous écrivons en réponse à votre lettre du 7 avril 2017 et à vos propositions de modification du projet d’entente de règlement entre les parties. Tel que nous en avons discuté en détail ci-dessous, et comme en témoigne l’entente de règlement révisée ci-jointe, la majorité des modifications proposées sont inacceptables pour Nexen et cherchent à déroger aux modalités de règlement convenues en principe par les parties. De plus, pour les raisons susmentionnées, Nexen nie avoir enfreint le brevet de M. Betser et estime que le brevet est invalide pour plusieurs raisons. Néanmoins, Nexen est disposée à ce moment-là à régler les problèmes entre les parties pour éviter les coûts liés à la poursuite des litiges. Toutefois, Nexen a besoin de certitude quant à sa liberté de fonctionner en ce qui a trait aux conduites futures; sinon, il y a peu d’avantages à parvenir à un règlement.

[51]  En ce qui concerne les commentaires de M. Betser-Zilevitch concernant la clause de renonciation, Nexen a formulé l’observation suivante :

[TRADUCTION]

En ce qui concerne la renonciation, Nexen n’acceptera pas votre proposition de modification de la portée de la renonciation, y compris la suppression du brevet américain. De plus, Nexen n’acceptera pas la suppression des [traduction] « ayants droit, coentrepreneurs et clients ». Autrement, Nexen se trouverait dans une situation où M. Betser pourrait poursuivre en justice n’importe quel ayant droit, coentrepreneur ou client de Nexen, nonobstant le règlement et la licence intervenus entre M. Betser et Nexen.

[52]  En ce qui concerne les commentaires de M. Betser-Zilevitch concernant la licence, Nexen a indiqué ce qui suit :

[TRADUCTION]

Comme vous le noterez dans l’entente de règlement révisée ci-jointe, conformément à votre suggestion, nous avons séparé la licence du règlement et inclus un contrat de licence de brevet à l’annexe « B » de l’entente de règlement. En ce qui concerne la suppression des [traduction] « ayants droit, coentrepreneurs et clients » de la licence, nous formulons les mêmes commentaires que ceux énoncés ci-dessus à l’égard de la renonciation. Nexen n’acceptera pas non plus la suppression des [traduction] « administrateurs, dirigeants, employés » puisque ces personnes doivent également être couvertes par la licence. Enfin, Nexen n’acceptera pas la suppression des termes [traduction] « offre de vente », « vente » et « importation et exportation ». La licence doit couvrir toutes les activités liées aux brevets canadien et américain qui pourraient être considérées comme une violation des droits de M. Betser dans les brevets.

[53]  En ce qui concerne toute vente future des brevets, Nexen a noté ce qui suit :

[TRADUCTION]

Nexen n’acceptera pas la majorité de vos suppressions proposées pour ce paragraphe. Là encore, Nexen exige la certitude que ses droits en application du règlement et de la licence conclus avec M. Betser continueront d’être en vigueur après le transfert, la cession ou la vente des brevets canadien ou américain par M. Betser.

En ce qui concerne vos préoccupations concernant l’obligation pour M. Betser de prévenir Nexen avant la vente, la cession ou le transfert des brevets canadien et américain, Nexen acceptera de ne pas prendre de mesures déraisonnables à l’égard de cette vente, de cette cession ou de ce transfert par M. Betser, sous réserve des modalités de l’entente. Nexen acceptera également d’enregistrer ses droits de licence dans le brevet canadien auprès du Bureau des brevets.

[54]  En ce qui concerne la confidentialité de |||||||||||||||||||||||||||||||||| l’entente de règlement, Nexen a indiqué ce qui suit :

[TRADUCTION]

Nexen n’acceptera pas les modifications proposées par M. Betser [...] M. Betser est libre de divulguer le fait que l’action devant la Cour fédérale a fait l’objet d’un règlement entre les parties, mais les modalités du règlement, |||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||| ||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||, doivent demeurer confidentielles.

[55]  L’échange des projets traite des points suivants.

1)  La clause de renonciation : la tentative de M. Betser-Zilevitch d’exclure le brevet américain

[56]  M. Betser-Zilevitch a inclus les brevets canadien et américain dans son offre de règlement du 25 janvier 2017. Fidèle à cette pratique, Nexen a inclus les brevets canadien et américain dans son premier projet de renonciation. Cependant, M. Betser-Zilevitch a tenté de retirer le brevet américain de la renonciation dans sa réponse du 7 avril 2017. Toutefois, M. Betser-Zilevitch n’a pas contesté l’inclusion du brevet américain dans la licence. Dans sa réponse du 5 mai 2017, Nexen était en désaccord avec la suppression du brevet américain de la clause de renonciation et l’a réintégrée dans son projet. Il semble que M. Betser-Zilevitch maintienne que la renonciation devrait exclure le brevet américain; cependant, les plaidoiries de M.Betser-Zilevitch ne disent pas si le brevet américain devrait être inclus dans la renonciation.

[57]  À mon humble avis, la position de M. Betser-Zilevitch selon laquelle le brevet américain devrait être exclu de la renonciation n’est pas fondée. M. Betser-Zilevitch lui-même, dans son offre du 25 janvier 2017, a précisé que la portée de la renonciation devait inclure à la fois les brevets canadien et américain. L’offre de Betser-Zilevitch fait référence aux brevets au pluriel : « Brevets » : « 2. M. Betser fournira aux défendeurs une décharge de responsabilité à l’égard de toutes les revendications telles qu’alléguées dans la déclaration relative aux brevets mentionnés ci-dessus. » Les « brevets mentionnés ci-dessus » renvoient à la clause 1 de l’offre de règlement du 25 janvier 2017 où deux brevets sont mentionnés – les brevets canadien et américain.

[58]  À mon avis, exclure le brevet américain était une tentative, par M. Betser-Zilevitch, d’obtenir plus (en donnant moins) que ce qui était offert le 25 janvier 2017. Le fait que M. Betser-Zilevitch cherche à exclure le brevet américain ne démontre pas qu’il y a absence d’entente sur une condition essentielle. Comme l’a offert M. Betser-Zilevitch le 25 janvier 2017, la condition essentielle qui avait été acceptée était que les deux brevets seraient couverts par la renonciation. À mon avis, aucun homme ni aucune femme d’affaires honnête et raisonnable, en examinant objectivement le comportement des parties, ne pourrait raisonnablement conclure que les parties avaient l’intention d’être liées par un règlement qui excluait le brevet américain.

[59]  Sommaire : la clause de renonciation inclut tant le brevet canadien que le brevet américain

La licence : le droit de vendre

[60]  Nexen a proposé un projet de licence, mais M. Betser-Zilevitch s’y est opposé, parce qu’il élargissait la portée des droits de licence afin d’inclure le droit [traduction] « d’offrir de vendre, de vendre, d’importer et d’exporter l’objet de la licence » (le droit de vendre).

[61]  Le droit de vendre est le quatrième des quatre droits accordés par le législateur aux titulaires de brevets comme M. Betser-Zilevitch en application de l’article 42 de la Loi sur les brevets, LRC (1985), c P-4 « de fabriquer, de construire et d’utiliser l’invention et de la vendre à autrui » :

Octroi des brevets

Grant of Patents

Contenu du brevet

Contents of patent

42 Tout brevet accordé en vertu de la présente loi contient le titre ou le nom de l’invention avec renvoi au mémoire descriptif et accorde, sous réserve des autres dispositions de la présente loi, au breveté et à ses représentants légaux, pour la durée du brevet à compter de la date où il a été accordé, le droit, la faculté et le privilège exclusif de fabriquer, construire, exploiter et vendre à d’autres, pour qu’ils l’exploitent, l’objet de l’invention, sauf jugement en l’espèce par un tribunal compétent.

42 Every patent granted under this Act shall contain the title or name of the invention, with a reference to the specification, and shall, subject to this Act, grant to the patentee and the patentee’s legal representatives for the term of the patent, from the granting of the patent, the exclusive right, privilege and liberty of making, constructing and using the invention and selling it to others to be used, subject to adjudication in respect thereof before any court of competent jurisdiction.

[Non souligné dans l’original]

[Emphasis added]

[62]  Personne ne conteste que le droit de vendre n’a pas été inclus dans l’offre de Betser-Zilevitch : il ne l’a tout simplement pas été. Dans sa réponse du 5 mai 2017, Nexen a déclaré que le droit de vendre devrait continuer de faire l’objet de la licence. Cependant, dans les documents qu’elle a déposés auprès de la Cour, Nexen ne demande plus de se voir accorder le droit de vendre.

[63]  Je suis d’avis que le droit de vendre n’est pas une condition essentielle en l’espèce. Le droit de vendre ne figure pas dans l’offre de Betser-Zilevitch. Je ne vois aucune raison pour laquelle le droit de vendre devrait être, d’un point de vue objectif ou de façon raisonnable, jugé implicite dans les circonstances. Les parties étaient représentées par un avocat. Ils auraient su ou auraient dû savoir que l’article 42 de la Loi sur les brevets énonce quatre droits clés accordés aux titulaires de brevets comme M. Betser-Zilevitch. Les quatre droits accordés par l’article 42 peuvent être accordés ou retenus à la demande du titulaire du brevet; ils sont la propriété du titulaire de brevet. Nexen a accepté une entente de règlement qui ne contenait pas le droit de vendre.

[64]  Chercher à obtenir le droit de vendre dans la documentation officielle était, à mon avis, une tentative, cette fois de la part de Nexen, d’obtenir davantage de la part de M. Betser-Zilevitch que ce qu’il a offert le 25 janvier 2017, et surtout, davantage que ce que Nexen a accepté par sa lettre du 23 février 2017. La tentative de Nexen d’obtenir davantage que ce qui avait été convenu précédemment ne constitue pas, selon moi, une preuve qu’il n’y avait pas d’entente ou même de désaccord au moment où l’entente de règlement a été conclue le 25 janvier 2017 (offre) et le 23 février 2017 (acceptation). Je suis d’avis qu’aucun homme ni aucune femme d’affaires honnête et raisonnable, en examinant objectivement le comportement des parties, ne pourrait raisonnablement conclure que les parties avaient l’intention d’être liées par une entente de règlement qui contenait le droit de vendre.

[65]  Sommaire : l’entente de règlement du 25 janvier 2017 ne contient pas le droit de vendre.

La licence : les parties couvertes

[66]  Le projet de règlement de Nexen du 14 mars 2017 visait, outre les parties à qui une licence serait accordée, les parties suivantes : [traduction] « Nexen et ses filiales, sociétés mères, sociétés affiliées, administrateurs, dirigeants, employés, successeurs, ayants droit, coentrepreneurs et clients respectifs ». L’aspect relatif à la licence de l’offre de Betser-Zilevitch ne visait que Nexen. Cependant, dans une lettre datée du 7 avril 2017, le projet d’entente de règlement de Betser-Zilevitch limitait la licence aux filiales, aux sociétés mères, aux sociétés affiliées et aux successeurs. M. Betser-Zilevitch n’était pas disposé à élargir l’application de la licence aux administrateurs, dirigeants, employés, ayants droit, coentrepreneurs ou clients respectifs de Nexen.

[67]  Il est important de noter que les parties n’ont pas discuté d’une licence en termes généraux. Elles ne traitaient pas non plus d’une licence dans l’abstrait ou de manière hypothétique. La question en litige portait sur le règlement du litige en matière de brevet, soit la demande et la demande reconventionnelle. Les parties ont convenu qu’il y aurait à la fois une licence et une renonciation. Elles auraient pu simplement se contenter d’une renonciation, mais elles ne l’ont pas fait. Elles ont expressément convenu d’une licence et d’une renonciation. La Cour devrait s’efforcer de donner effet à cet aspect de leur entente de règlement conformément à Allergan, au paragraphe 28.

[68]  Dans le contexte de ce règlement contenant à la fois une renonciation et une licence, je suis d’avis que les parties titulaires de licences sont les mêmes parties dont la responsabilité peut être mise en cause dans la poursuite qui doit être réglée, c.-à-d. les parties qui font l’objet d’une renonciation. J’arrive à cette conclusion parce que j’estime qu’un homme ou une femme d’affaires honnête et raisonnable conclurait raisonnablement que les parties n’avaient pas l’intention d’être liées par une condition qui se limite à l’octroi d’une licence uniquement aux filiales, aux sociétés mères et aux successeurs respectifs de Nexen, comme le laisse entendre M. Betser-Zilevitch.

[69]  Je fais une pause pour noter que M. Betser-Zilevitch a changé sa position en incluant les [traduction] « sociétés affiliées » qui est un terme défini dans la clause relative à la licence. Le projet d’entente de M. Betser-Zilevitch daté du 7 avril 2017 ne contestait pas l’inclusion par Nexen de l’expression [traduction] « sociétés affiliées » dans les clauses relatives à la licence et à la renonciation, malgré l’ajout des termes [traduction] « administrateurs », [traduction] « dirigeants », [traduction] « employés », [traduction] « ayants droit », [traduction] « coentrepreneurs », ou [traduction] « clients », traités plus loin.

[70]  Toutefois, dans ses observations devant la Cour, M. Betser-Zilevitch s’est opposé à l’application de la licence aux [traduction] « sociétés affiliées ». M. Betser-Zilevitch a soutenu que, selon les définitions de [traduction] « société affiliée » et de [traduction] « contrôle » dans le projet de Nexen du 14 mars 2017, il y avait au moins huit sociétés affiliées de Nexen qui appartenaient en dernier ressort à la Commission de la supervision et de l’administration des actifs appartenant au gouvernement chinois :

  1. CNOOC Limited, le plus grand producteur de pétrole brut et de gaz naturel extracôtier de Chine et l’une des plus importantes sociétés indépendantes d’exploration et de production pétrolière et gazière au monde;

  2. La China National Offshore Oil Corporation (CNOOC), une [traduction] « grande entreprise appartenant au gouvernement et exerçant ses activités directement sous la supervision de la Commission de la supervision et de l’administration des actifs appartenant à la République populaire de Chine »;

  3. China National Petroleum Corp. (CNPC), une grande entreprise d’État gérée par la Commission de la supervision et de l’administration des actifs appartenant au gouvernement chinois;

  4. PetroChina Company Limited, l’une des plus grandes sociétés pétrolières au monde;

  5. PetroChina Canada, qui est directement active dans l’industrie des sables bitumineux de l’Alberta grâce à ses activités dans le cadre du projet commercial MacKay River;

  6. China Petrochemical Corporation (Groupe Sinopec), une importante société chinoise d’énergie et de produits chimiques appartenant à l’État, qui s’est classée au troisième rang des sociétés figurant sur la liste Fortune Global en 2017;

  7. Sinopec International Petroleum Exploration and Production Corporation (SIPC), société mère de Sinopec Canada;

  8. Sinopec Canada, une société pétrolière et gazière exerçant ses activités dans l’industrie canadienne des sables bitumineux et du pétrole lourd.

[71]  L’offre de règlement de M. Betser-Zilevitch datée du 25 janvier 2017 ne mentionnait pas les sociétés affiliées, encore moins celles qui figuraient dans le projet de Nexen comme nous venons de le mentionner. Je ne suis pas d’avis que si l’observateur objectif le leur demandait, les parties auraient, à l’unisson, accepté la liste des sociétés affiliées telle qu’elle a été décrite par M. Betser-Zilevitch au paragraphe précédent; M. Betser-Zilevitch aurait répondu « non » et avec raison. Par conséquent, je ne suis pas en mesure de dégager par implication de l’entente de règlement une condition à cet effet. Les sociétés affiliées connues à l’époque sont les deux défenderesses; je ne vois pas la nécessité de les ajouter sous la définition de « sociétés affiliées », étant donné qu’elles sont déjà des parties désignées à l’entente de règlement. L’ajout de l’expression « sociétés affiliées » était une condition non essentielle.

[72]  Je suis d’avis bien respectueusement, qu’en utilisant le critère de l’observateur objectif, les parties auraient convenu d’ajouter à la clause relative à la licence les termes [traduction] [traduction] « administrateurs », [traduction] « dirigeants », [traduction] « employés » [traduction] et « ayants droit ». J’en arrive à cette conclusion parce que les entreprises agissent par l’intermédiaire de personnes physiques. À mon avis, les parties conviennent qu’il est illogique de régler une action en contrefaçon de brevet avec une renonciation ou des licences offertes qui se limitent aux personnes morales où l’activité qui doit faire l’objet d’une licence ou d’une renonciation serait ou aurait été effectivement exercée par des particuliers; eux aussi auraient besoin de la protection que leur confèrent tant une renonciation qu’une licence ou ils seraient exposés à d’autres poursuites. Autrement, ce qui est donné d’une main peut être repris par l’autre, ce qui aboutit à une renonciation et à une licence qui pourraient être substantiellement dénuées de tout sens.

[73]  J’ajouterais aussi le terme [traduction] « ayants droit » à la clause relative à la licence parce que, à mon avis, l’homme ou la femme d’affaires honnête et raisonnable conclurait raisonnablement que les ayants droit devraient avoir droit au même traitement que les [traduction] « successeurs » et M. Betser-Zilevitch a accepté d’accorder une licence aux successeurs. Sur le plan grammatical, aussi, les deux mots, « successeurs et ayants droit », modifient « filiales, sociétés mères, sociétés affiliées, administrateurs, dirigeants et employés ». En utilisant le critère de l’observateur objectif, les parties auraient, selon moi, convenu d’ajouter le terme « successeurs ».

[74]  En ce qui concerne les coentrepreneur, le seul coentrepreneur mentionné dans les documents soumis à la Cour dans le cadre de la présente requête est celui constitué par Nexen et par CNOOC Canada, exploitant leur entreprise sous la dénomination sociale de The Long Lake Oil Sands Project (le projet de sables bitumineux de Long Lake). Je suis d’avis qu’un homme ou une femme d’affaires raisonnable et honnête conclurait raisonnablement que les parties avaient l’intention que le projet de sables bitumineux de Long Lake soit protégé par la renonciation et la licence. Cette coentreprise est exposée à un risque dans la présente poursuite. Je suis d’avis bien respectueusement, qu’en utilisant le critère de l’observateur objectif, les parties auraient convenu d’ajouter le projet de sables bitumineux de Long Lake à titre de coentrepreneur.

[75]  Selon la preuve non contestée déposée par M. Betser-Zilevitch, Nexen exerce ses activités avec au moins dix autres coentrepreneurs :

Suncor Energy Inc.;

Devon Energy Corporation;

Harris Corporation;

Imperial Oil Resources Limited;

Mocal Energy Limited;

Sinopec Oil Sands Partnership;

Canadian Oil Sands Partnership #1;

Suncor Energy Ventures Partnership;

Syncrude; et

Japan Canada Oil Sands Limited (JACOS).

[76]  À mon avis, l’application de la licence ou de la renonciation à une coentreprise autre que le projet de sables bitumineux de Long Lake créerait le droit de vendre et équivaudrait effectivement à l’octroi de ce droit qui, comme nous l’avons mentionné plus haut, a été intentionnellement exclu de l’offre de Betser-Zilevitch du 25 janvier 2017. Par conséquent, aucun autre coentrepreneur n’est inclus dans les clauses relatives à la licence et à la renonciation.

[77]  J’ai également conclu que les « clients » non désignés devraient être exclus de la licence et de la renonciation. Aucun autre client n’est désigné dans le dossier. Les efforts déployés par Nexen pour obtenir une licence pour des « clients » non précisés ne peuvent être considérés comme une condition essentielle de l’entente de règlement étant donné que le règlement a retiré à Nexen le droit de vendre; une telle application équivaudrait à créer un droit de vendre là où un tel droit n’a pas été accordé. Par conséquent, une licence pour des « clients » n’est pas incluse dans l’entente de règlement.

[78]  L’inclusion des « clients » non désignés par Nexen dans son projet de proposition est, à mon avis, une autre illustration de la volonté de Nexen d’aller au-delà de ce qu’on lui a offert. Cependant, cela ne démontre pas une absence d’entente sur des conditions essentielles, mais on a plutôt affaire à une partie qui insiste pour qu’une condition non essentielle soit ajoutée, en sa faveur, à l’entente de règlement.

[79]  Sommaire : la clause relative à la licence comprend ce qui suit : une licence accordée à Nexen et à ses « filiales », « sociétés mères », « administrateurs », « dirigeants », « employés », « successeurs », « ayants droit » et le projet de sables bitumineux de Long Lake à titre de coentrepreneur. Les « clients » et les « sociétés affiliées » ne sont pas inclus.

La renonciation : les parties couvertes

[80]  L’aspect relatif à la renonciation de l’offre de Betser-Zilevitch ne visait que les « défenderesses ». M. Betser-Zilevitch s’est opposé au projet de renonciation de Nexen parce qu’elle se serait appliquée pratiquement aux mêmes parties que celles visées par la licence proposée par Nexen, dont il a été question plus haut (aucune référence n’est faite aux dirigeants de Nexen par l’une ou l’autre partie). Le projet de Nexen du 14 mars 2017 prévoyait une renonciation visant les personnes suivantes : [traduction] « Nexen et ses filiales, sociétés mères, sociétés affiliées, administrateurs, dirigeants, employés, successeurs, ayants droit, coentrepreneurs et clients respectifs ». Dans sa correspondance et projet du 7 avril 2017, M. Betser-Zilevitch a accepté de libérer Nexen et ses « filiales, sociétés mères, sociétés affiliées, administrateurs, employés et successeurs respectifs ». De plus, M. Betser-Zilevitch Nexen n’a pas accepté que la renonciation vise les « ayants droit », les « coentrepreneurs » et les « clients ». Nexen, dans sa réponse du 5 mai 2017, a insisté pour que ceux-ci demeurent visés par la renonciation.

[81]  La question est de savoir si la renonciation devrait s’appliquer aux « ayants droit », aux « coentrepreneurs », et aux « clients ». Étant donné qu’ils ne sont pas inclus dans l’entente de règlement, l’inclusion de ceux-ci nécessiterait l’introduction d’une condition non essentielle dans l’entente de règlement attestée par l’offre de Betser-Zilevitch et l’acceptation de Nexen.

[82]  À mon humble avis, l’homme ou la femme d’affaires honnête et raisonnable, en examinant objectivement l’affaire, pourrait raisonnablement conclure que les parties avaient convenu que les « ayants droit » soient visés par la renonciation conjointement avec la « coentreprise » que constitue le projet de sables bitumineux de Long Lake; mais qu’elles n’avaient pas convenu que les « clients » ou les « sociétés affiliées » non précisées soient visés par cette renonciation. J’en arrive à cette conclusion en ayant recours également au critère de l’observateur objectif. Les sociétés affiliées connues à l’époque sont les deux défenderesses; là encore, je ne vois pas la nécessité d’ajouter la définition de « sociétés affiliées » à la renonciation, étant donné qu’elles sont déjà des parties désignées à l’entente de règlement. L’ajout de l’expression « sociétés affiliées » était une condition non essentielle.

[83]  Ici encore, aucune communication objectivement raisonnable ou professionnelle rédigée dans le cadre du règlement du litige ne continuerait à exposer les parties au risque de poursuite judiciaire; pour constituer une libération dans le présent contexte, celle-ci doit mettre fin à la poursuite l’encontre de ceux qui y sont exposés. Si l’observateur objectif le leur demandait, pour ce qui est d’accorder à l’entente de règlement une efficacité commerciale, je n’ai aucune difficulté à conclure que les deux parties auraient accepté une renonciation telle qu’elle vient d’être décrite.

[84]  Sommaire : la clause relative à la renonciation comprend une renonciation visant Nexen et ses filiales, sociétés mères, administrateurs, employés, successeurs et ayants droit et le projet de sables bitumineux de Long Lake à titre de coentrepreneur. La renonciation n’inclut pas les sociétés affiliées non précisées ainsi que les clients non précisés.

La renonciation : les revendications invoquées ou « pouvant être invoquées »

[85]  M. Betser-Zilevitch s’est opposé au projet de renonciation de Nexen parce qu’il élargissait l’application de la renonciation à toutes les revendications [traduction] « invoquées ou pouvant être invoquées » [non souligné dans l’original] en application des deux brevets, alors que l’offre de Betser-Zilevitch du 25 janvier 2017 ne visait que les revendications [traduction] « invoquées ». Dans sa réponse datée du 5 mai 2017, Nexen a rejeté l’objection de M. Betser-Zilevitch et, a de nouveau renvoyé dans sa version finale, aux revendications [traduction] « invoquées ou pouvant être invoquées ». Cependant, les documents de la Cour déposés par Nexen ne demandent plus que la divulgation s’applique aux revendications « pouvant être invoquées », mais plutôt uniquement à celles qui sont « invoquées ».

[86]  À mon avis, la condition essentielle de l’entente de règlement à cet égard est que les défenderesses devaient être libérées de toutes les revendications « invoquées » dans le litige. L’argument désormais abandonné de Nexen, selon lequel la renonciation devrait également s’appliquer aux revendications « pouvant être invoquées », une application potentiellement beaucoup plus large que si elle vise simplement les revendications « invoquées », est dénué de tout fondement.

[87]  De plus, l’offre de Betser-Zilevitch en ce qui a trait à la renonciation ne visait que les « revendications invoquées »; elle ne visait pas les « revendications pouvant être invoquées » seules ou conjointement. Nexen a accepté l’offre sur ce fondement et a conclu un règlement exécutoire. Nexen n’a aucunement fait référence aux revendications « pouvant être invoquées » dans sa lettre du 23 février 2017. En cherchant à élargir l’application de l’offre afin d’y ajouter les « revendications pouvant être invoquées », Nexen tentait – encore une fois – d’obtenir plus que ce à quoi elle avait consenti.

[88]  Je ne vois aucune preuve de confusion ou de manque de certitude quant au fait que Nexen a continué de faire pression après le 25 janvier 2017, tout comme elle l’avait fait pour d’autres aspects des projets de règlement détaillés, et évidemment, tout comme l’a fait M. Betser-Zilevitch. Je conclus que les « revendications pouvant être invoquées » sont des conditions non essentielles de l’entente de règlement. Je suis d’avis qu’aucun homme ni aucune femme d’affaires honnête et raisonnable, en examinant objectivement l’affaire, ne conclurait raisonnablement que les parties avaient l’intention d’inclure dans la renonciation non seulement les revendications invoquées, mais également les « revendications pouvant être invoquées ». En réponse à l’observateur objectif, je conclus que si les parties, se voyant poser la question de savoir si le règlement incluait non seulement les « revendications invoquées », mais des « revendications pouvant être invoquées » ayant une portée beaucoup plus large, les parties auraient répondu, à l’unisson, « bien sûr que non ».

[89]  Sommaire : la clause de renonciation se limite aux « revendications invoquées » et n’inclut pas les « revendications pouvant être invoquées ».

La clause de confidentialité : |||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||| ||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||

[90]  |||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||| |||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||| Dans sa réponse du 5 mai 2017, Nexen s’est opposée à cette modification. Il se peut que M. Betser-Zilevitch veuille toujours cette modification, bien qu’il ne la demande pas dans les documents qu’il a déposés. Aux fins de cette analyse, sa position actuelle n’a pas d’importance.

[91]  À cet égard, l’entente de règlement proposée par M. Betser-Zilevitch le 25 janvier 2017, telle qu’elle a été acceptée par Nexen le 23 février 2017, parlait simplement d’une [traduction] « entente de confidentialité » [traduction] « pour maintenir la confidentialité des modalités du règlement ».

[92]  Comme dans le cas de la tentative d’exclusion du brevet américain, cela semble être une autre tentative de la part de M. Betser-Zilevitch de tirer davantage profit de la documentation relative au règlement officiel que ce qu’il a proposé en premier lieu. |||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||| ||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||C’était non essentiel. Je suis d’avis qu’aucun homme ni aucune femme d’affaires honnête et raisonnable, en examinant objectivement l’affaire, ne conclurait raisonnablement que les parties avaient convenu de prévoir cette exclusion dans la renonciation. En réponse à l’observateur objectif, et pour des raisons d’efficacité commerciale, les deux parties, se voyant poser la question de savoir si le règlement incluait une telle disposition, là encore et à l’unisson, auraient répondu « bien sûr que non ». Il n’y a aucun motif pour lequel je pourrais juger cette condition non essentielle implicite dans l’entente de règlement.

[93]  |||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||| |||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||| ||||||||||||||||||||||||||||||||||||

[94]  Je dois ajouter que M. Betser-Zilevitch a soulevé d’autres points à l’égard de certains aspects de la vente, de la cession et du transfert des deux brevets sous-jacents (canadien et américain), qui ne semblent plus être contestés. J’ajouterais également que le projet d’entente de règlement proposé par Nexen contenait également de nombreuses autres dispositions non contestées par M. Betser-Zilevitch.

VI.  Conclusion

[95]  À mon avis, les parties ont conclu une entente de règlement ayant force obligatoire dans leur échange de lettres daté du 25 janvier 2017 et du 23 février 2017. Le caractère obligatoire de cette entente a été confirmé dans la lettre de M. Betser-Zilevitch à la Cour, envoyée avec l’accord des deux parties, datée du 10 mars 2017, qui indiquait qu’un règlement avait été conclu sous réserve d’une officialisation. Les défenderesses ont droit à une déclaration à cet effet.

[96]  Dans ces motifs, j’ai décrit les modalités qui devraient être introduites par implication pour donner à l’entente de règlement du 25 janvier 2017 une efficacité commerciale.

[97]  Les défendeurs ont demandé que les modalités implicites soient énoncées dans une ordonnance provisoire. Cependant, la Cour d’appel fédérale a exprimé des inquiétudes quant à l’ajout de modalités implicites dans une ordonnance provisoire en élevant ainsi ce qui serait normalement des clauses contractuelles au statut de dispositions d’une ordonnance de la Cour avec la possibilité afférente de poursuite pour outrage au tribunal : Allergan, aux paragraphes 93 à 97. Par conséquent, comme l’a fait la Cour dans McCabe, j’ai abordé ce qui devrait être jugé implicite dans mes motifs ci-dessus.

VII.  Dépens

[98]  Les parties conviennent que des dépens, soit une somme forfaitaire totale de 5 000 $, devraient être adjugés à la partie qui a gain de cause dans la présente requête, montant que j’estime raisonnable. Par conséquent, M. Betser-Zilevitch sera condamné à payer les dépens des défenderesses, soit la somme forfaitaire globale de 5 000 $.

VIII.  Motifs confidentiels

[99]  Les présents motifs, communiqués aux parties et datés du 19 juin 2018, contenaient de l’information assujettie à une ordonnance conservatoire et de confidentialité modifiée datée du 21 décembre 2017 et étaient donc confidentiels. Les parties disposeront de 20 jours pour se consulter et pour informer la Cour des parties qu’elles souhaitent caviarder, à défaut de quoi ces motifs seront versés au dossier public. Dans une lettre datée du 9 juillet 2018, les parties ont convenu des passages qui ont été caviardés dans les présents motifs.


JUGEMENT dans le dossier T-186-13

LA COUR ORDONNE ce qui suit :

  1. La requête en exécution d’une entente de règlement des défenderesses est accueillie.

  2. Il est déclaré par les présentes que les parties ont conclu une entente de règlement ayant force obligatoire, dont les modalités sont énoncées dans l’offre écrite de règlement de M. Betser-Zilevitch datée du 25 janvier 2017 qui se trouve en annexe A de l’affidavit de Michael S. Duchesneau.

  3. La présente action est réputée abandonnée.

  4. Il est ordonné à M. Betser-Zilevitch de payer aux défenderesses la somme forfaitaire globale de 5 000 $.

  5. Les parties disposeront de 20 jours pour se consulter et pour informer la Cour des parties de la présente ordonnance confidentielle et des présents motifs qu’elles souhaitent censurer, à défaut de quoi les présents motifs seront versés au dossier public.

« Henry S. Brown »

Juge


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


DOSSIER :

T-186-13

 

INTITULÉ :

MAOZ BETSER-ZILEVITCH c NEXEN INC. ET CNOOC CANADA INC., CHACUNE INDIVIDUELLEMENT ET EXPLOITANT LEUR ENTREPRISE SOUS LA DÉNOMINATION SOCIALE DE THE LONG LAKE OIL SANDS PROJECT

 

LIEU DE L’AUDIENCE :

Toronto (Ontario)

 

DATE DE L’AUDIENCE :

Le 7 mai 2018

 

JUGEMENT ET MOTIFS :

Le juge BROWN

 

DATE DES MOTIFS :

Le 13 juillet 2018

 

COMPARUTIONS :

Andrew Moeser

Matthew Frontini

 

POUR LE DEMANDEUR

 

Steven Garland

Daniel S. Davies

POUR LES DÉFENDERESSES

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

Gilbert’s LLP

Toronto (Ontario)

POUR LE DEMANDEUR

 

Smart & Biggar

Avocats

Ottawa (Ontario)

POUR LES DÉFENDERESSES

 

 

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