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Date : 20180426


Dossier : IMM-3020-17

Référence : 2018 CF 455

[TRADUCTION FRANÇAISE]

Ottawa (Ontario), le 26 avril 2018

En présence de monsieur le juge LeBlanc

ENTRE :

SARBJEET SINGH

demandeur

et

LE MINISTRE DE LA SÉCURITÉ PUBLIQUE ET DE LA PROTECTION CIVILE

défendeur

JUGEMENT ET MOTIFS

I.  Introduction

[1]  Il s’agit d’une demande de contrôle judiciaire d’une décision datée du 13 juin 2017, par laquelle la Section d’appel de l’immigration (« SAI ») de la Commission de l’immigration et du statut de réfugié du Canada (« CISR ») a rejeté l’appel du demandeur formé à l’encontre de la mesure d’expulsion prononcée par la Section de l’immigration (« SI ») de la CISR au motif que l’appel est irrecevable en raison de l’article 64 de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, L.C. 2001, ch. 27 (« LIPR »), tel que modifié par la Loi accélérant le renvoi de criminels étrangers (« LARCE ») qui est entrée en vigueur le 19 juin 2013. L’article 64 prévoit que l’appel de telles demandes d’ordonnance incombe à la SAI lorsque l’appelant a été déclaré interdit de territoire pour raison de grande criminalité. Le terme « grande criminalité » est défini à l’article 64 comme se rapportant à un crime qui a été puni par un emprisonnement de plus de six mois. Avant l’entrée en vigueur de la LARCE, la période minimale d’emprisonnement, écartant la compétence de la SAI, était de deux ans.

[2]  Le demandeur est un citoyen de l’Inde. Il a obtenu le statut de résident permanent le 15 mars 2009 après avoir été parrainé par son épouse. Le 11 mai 2011, il a été reconnu coupable en Ontario de deux chefs de « leurre d’enfant de moins de seize ans », contrevenant à l’article 172.1 du Code criminel, L.R.C. 1985, ch. C-46. Il a été condamné à 15 mois de prison et à trois ans de probation.

[3]  Le 29 février 2016, le demandeur a fait l’objet d’un rapport d’interdiction de territoire fondé sur cette déclaration de culpabilité en application de l’article 44 de la Loi. Le demandeur a eu l’occasion de présenter des arguments expliquant pourquoi ce rapport ne devrait pas être déféré à la SI pour enquête, ce qu’il a fait le 27 avril 2016. Le 27 septembre 2016, le rapport établi en application de l’article 44 a été déféré à la SI, et une enquête sur l’interdiction de territoire a été menée le 21 décembre 2016. La SI a conclu que le demandeur serait interdit de territoire pour grande criminalité, en application de l’alinéa 36(1)a) de la Loi, en ce qu’il existe des motifs raisonnables de croire qu’il a été déclaré coupable d’une infraction à une loi fédérale punissable d’un emprisonnement maximal d’au moins dix ans ou d’une infraction à une loi fédérale pour laquelle un emprisonnement de plus de six mois est infligé. Le demandeur a par conséquent fait l’objet d’une mesure d’expulsion.

[4]  La SI a informé le demandeur qu’il avait le droit de demander le contrôle judiciaire de sa décision, mais qu’il n’était pas autorisé à interjeter appel de la décision devant la SAI, conformément à l’article 64 de la Loi, aux motifs qu’il avait été déclaré coupable d’une infraction pour laquelle un emprisonnement de plus de six mois est infligé.

[5]  Le 4 janvier 2017, le demandeur a déposé un avis de demande d’autorisation et de contrôle judiciaire de la décision, et a interjeté appel devant la SAI. L’avis de demande visait à la fois l’Agence des services frontaliers du Canada (« ASFC »), renvoyant le rapport établi en application de l’article 44 à la SI, et la conclusion d’interdiction de territoire de la SI pour grande criminalité. Cette procédure visait principalement la décision de l’ASFC de déférer l’affaire à la SI, qui, conformément à l’avis de demande, [TRADUCTION« n’a pas pris en compte tous les facteurs soumis dans les observations du demandeur en application de l’article 44 », y compris les motifs d’ordre humanitaire soumis par le demandeur. En ce qui concerne la décision de la SI, le demandeur a soutenu qu’elle était erronée, puisqu’elle était fondée sur la décision de l’ASFC. Cet avis de demande a été retiré le 1er février 2017.

[6]  Le 8 mars 2017, la SAI a demandé au demandeur de lui soumettre une argumentation afin de déterminer si elle avait compétence pour entendre son appel. Le 6 avril 2017, le demandeur a déposé l’argumentation demandée, alléguant que l’interdiction d’interjeter appel du paragraphe 64(2) ne s’appliquait pas à des situations dans lesquelles des personnes dont l’interdiction de territoire découlait de condamnations criminelles qui ont eu lieu avant le 19 juin 2013. Quelques jours plus tard, le demandeur a demandé à la SAI de reporter sa décision relative à la compétence jusqu’à ce que la Cour suprême du Canada rende sa décision dans Tran c. Canada (Sécurité publique et Protection civile), CSC dossier de la Cour no 36784 (depuis la révision : Tran c. Canada (Sécurité publique et Protection civile), 2017 CSC 50 [Tran]).

[7]  Ainsi, le 26 avril 2017, le demandeur a déposé une autre demande devant la SAI, cette fois en vue d’obtenir des ordonnances, pour divulgation de renseignements, auprès de l’ASFC et du service de police de London, en lien avec son arrestation, les accusations et les condamnations. Plus particulièrement, le demandeur recherchait des renseignements que l’ASFC ne voulait pas divulguer, enregistrés par le biais d’une demande officielle, en application de la Loi sur l’accès à l’information, L.R.C., 1985, ch. A-1. Les renseignements demandés font renvoi au moment où l’ASFC a initialement appris l’arrestation du demandeur, les accusations criminelles qui pesaient contre lui et la condamnation. À l’appui de sa demande de divulgation, le demandeur a affirmé que le service de police de London lui avait dit lors de son arrestation que l’ASFC serait informée des accusations contre lui.

[8]  Le demandeur a allégué que ces renseignements lui étaient nécessaires pour déterminer si l’ASFC avait agi d’une façon qui constituait un abus de procédure en retardant de manière délibérée ou incompétente ses mesures d’exécution contre lui après l’entrée en vigueur de la LARCE afin de réfuter le droit d’interjeter appel qui lui aurait autrement été accessible aux termes de l’ancienne version du paragraphe 64(2) de la Loi.

[9]  Le 13 juin 2017, la SAI a conclu qu’elle n’avait pas la compétence pour entendre l’appel du demandeur au motif que le paragraphe 64(2) de la Loi interdit un résident permanent d’interjeter appel d’une décision de la SI devant la SAI si le résident permanent a été jugé interdit de territoire pour raison de grande criminalité lorsque le crime a été puni par un emprisonnement de plus de six mois.

[10]  La SAI a déclaré que même si la Loi a été modifiée le 19 juin 2013, réduisant l’emprisonnement minimal pour le crime associé à une conclusion de grande criminalité de deux ans à six mois, la LARCE a prévu des dispositions transitoires selon lesquelles les personnes visées par un rapport établi au titre de l’article 44 qui avaient un droit d’interjeter appel en application de la Loi telle qu’elle était avant le 19 juin 2013, et dont l’affaire déférée à la SI a été signée avant cette date, conservait ce droit d’appel. Comme l’affaire du demandeur déférée à la SI avait été signée le 27 septembre 2016, la SAI a conclu qu’il n’était pas concerné par les dispositions transitoires et qu’il n’avait, par conséquent, aucun droit d’appel aux termes de l’article 64 de la Loi.

[11]  La SAI a refusé la demande du demandeur visant à suspendre sa détermination dans l’attente de la décision de la Cour suprême du Canada dans Tran. Elle a maintenu qu’elle était obligée par la Loi de répondre à l’appel du demandeur de façon aussi informelle et rapide que les circonstances, l’équité et la justice naturelle le permettent. La SAI n’a constaté aucun manquement à la justice naturelle ou à l’équité procédurale dans la décision de sa compétence, sans attendre la décision de la Cour suprême du Canada dans Tran, car il y avait des garanties qui permettaient de rouvrir l’appel du demandeur et d’y donner suite dans l’éventualité où la Cour suprême du Canada rendait une décision qui soutient ses arguments.

[12]  Devant notre Cour, le demandeur a soumis une demande similaire en demandant une ordonnance prolongeant la période pendant laquelle il peut mettre en état la demande d’autorisation, en application de l’article 10 des Règles des cours fédérales en matière de citoyenneté, d’immigration et de protection des réfugiés, DORS/93-22, jusqu’à 30 jours après que la Cour suprême du Canada eut rendu sa décision dans Tran. Cette requête a été rejetée par la Cour (juge Manson) le 31 août 2017 (Singh c. Canada (Sécurité publique et Protection civile), 2017 CF 795 [Singh]). Le juge Manson a maintenu qu’il n’est pas dans l’intérêt de la justice de soutenir le report souhaité par le demandeur, car le moment de la délivrance de Tran était strictement conjectural et il n’y avait aucune certitude que le résultat de cette décision serait déterminant des droits du demandeur en l’espèce. Il est également d’accord avec le défendeur, c’est-à-dire que « la disposition transitoire applicable concernant la sous-section 64(2), qui est actuellement déterminante de l’état du droit que doit appliquer la Cour dans ses décisions » (Singh, aux paragraphes 21 et 22).

[13]  Quant au bien-fondé de la demande de contrôle judiciaire, le demandeur allègue essentiellement qu’en ne discutant d’aucun élément lié à sa demande de divulgation ou en ne faisant aucun renvoi à celui-ci, la SAI a refusé d’exercer sa compétence et a commis, en conséquence, une erreur susceptible de révision. Plus particulièrement, il prétend que le refus de la SAI de traiter cette demande, ce qui soulève la question consistant à savoir s’il y a eu abus de procédure en l’espèce, le [demandeur] privant de sa capacité d’évaluer la nature des procédures à son encontre et de connaître pleinement la preuve qui pèse contre lui en faisant valoir qu’un recours abusif, si établi, devrait constituer une exception à l’interdiction d’interjeter appel de l’article 64. Cela, dit-il, constitue une violation de l’obligation d’équité procédurale que les commissaires ont envers lui.

[14]  Dans ses observations écrites soumises à la Cour, le demandeur allègue que l’application rétroactive du paragraphe 64(2) de la Loi consisterait, dans les circonstances en l’espèce, à une violation de ses droits aux termes de la Charte canadienne des droits et libertés (« Charte »). En particulier, il a soutenu qu’en permettant à l’ASFC de prendre des mesures incompétentes, négligentes ou délibérées qui porteraient préjudice à ses droits, tels qu’ils existaient avant l’entrée en vigueur de la LARCE, cela constituerait une violation de ses droits aux termes de l’article 7 de la Charte. Il a par ailleurs soutenu qu’il est bien du pouvoir de la SAI d’examiner les questions de loi, y compris les arguments fondés sur la Charte, particulièrement où, comme c’est le cas en l’espèce, la question en litige ne consiste pas à savoir si la législation est conforme à la Charte, mais bien si les mesures gouvernementales sont conformes.

[15]  Cependant, à l’audience relative à la présente demande de contrôle judiciaire, le demandeur a admis que tout argument de la Charte en l’espèce dépendait des renseignements à divulguer par l’ASFC et le service de police de London et que cela était, en conséquence, prématuré.

II.  Questions préliminaires

[16]  Le défendeur allègue que les présentes procédures devraient être rejetées, car le demandeur n’a pas déposé d’affidavit à l’appui de sa demande, contrairement à l’alinéa 10(2)d) des Règles des cours fédérales en matière de citoyenneté, d’immigration et de protection des réfugiés (« Règles en matière d’immigration »), DORS/93-22. Je ne suis pas d’accord.

[17]  Selon l’alinéa 10(2)d) des Règles en matière d’immigration, le demandeur signifie au défendeur un dossier de demande contenant, entre autres documents, « un ou plusieurs affidavits établissant les faits invoqués à l’appui de sa demande ». Le dossier du demandeur ne contient aucun affidavit signé par lui.

[18]  Il est vrai que notre Cour a déjà jugé que les irrégularités d’un affidavit, comme l’affidavit d’un ancien avocat ou l’affidavit d’un enfant du demandeur, ou le fait de ne pas déposer d’affidavit, peuvent amener la Cour à rejeter sommairement une demande d’autorisation (Fatima c. Canada (Citoyenneté et Immigration), 2017 CF 1086, au paragraphe 5; Dhillon c. Canada (Citoyenneté et Immigration), 2009 CF 614, aux paragraphes 5, 6 et 9; Metodieva c. Canada (Emploi et Immigration), [1991] A.C.F. no 629, 132 N.R. 38 (CAF), 1991, CarswellNat 843, au paragraphe 7). Toutefois, ce n’est pas toujours le cas. Notre Cour a, à de nombreuses occasions, examiné le mérite de cette affaire lorsque la demande d’autorisation a été accordée malgré l’absence d’affidavit (Bakenge c. Canada (Citoyenneté et Immigration), 2017 CF 517, aux paragraphes 3 et 4), ou a refusé de rejeter la demande de contrôle judiciaire pour avoir omis de soumettre un affidavit au moment où le dossier certifié du tribunal (DCT) peut être invoqué pour examiner les faits allégués par le demandeur (Ali c. Canada (Citoyenneté et Immigration), 2011 CF 1247, au paragraphe 58).

[19]  En l’espèce, la demande d’autorisation a été accordée malgré l’absence d’affidavit du demandeur, et je suis convaincu que le CDT peut être invoqué pour examiner le fondement factuel sous-jacent dans lequel, à toutes fins pratiques, un objet soulève une question de droit.

[20]  Le défendeur allègue également que le ministre concerné devant être nommé en tant que partie intégrante d’une demande d’autorisation et d’une demande de contrôle judiciaire, dans les situations où le tribunal est la SAI, est le ministre de l’Immigration, des Réfugiés et de la Citoyenneté et l’intitulé de la cause doit être modifié en conséquence. Le demandeur n’a pas répondu à cette observation. Toutefois, je ne suis pas convaincu qu’il soit incorrect de nommer le ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile en tant que partie aux présentes procédures. Ce ministre et ses représentants sont les personnes qui prennent part au processus menant à l’établissement du rapport établi en application de l’article 44 et au renvoi effectué à la SI (Tran, au paragraphe 6). C’était certainement le cas en l’espèce, c’est-à-dire, conformément au CDT, c’est ce ministre et ses représentants qui ont renvoyé le rapport établi en application de l’article 44 à la SI, ont intervenu devant la SI dans le but d’arriver à une conclusion d’interdiction de territoire et à une mesure de renvoi à l’encontre du demandeur et ont envoyé des observations écrites sur la question préliminaire soulevée par la SAI le 8 mars 2017 afin de déterminer si le paragraphe 64(2) de la Loi interdisait au demandeur d’interjeter appel.

[21]  Par conséquent, je ne vois aucune raison de modifier l’intitulé de la cause.

III.  Question en litige et norme de contrôle

[22]  À mon avis, la seule question à trancher dans la présente affaire consiste à savoir si la SAI, avant de rejeter l’appel du demandeur pour absence de compétence, avait l’obligation de prendre en compte la demande de divulgation du demandeur de façon à placer le demandeur dans une position pour évaluer s’il avait perdu son droit d’appel devant la SAI à la suite d’un abus de procédure de la part de l’ASFC et, selon le cas, présenter son argument à la SAI. Autrement dit, la compétence de la SAI était-elle épuisée au moment où elle soutenait que l’appel du demandeur était rejeté aux termes du paragraphe 64(2) de la Loi et ne pouvait être justifié aux termes des dispositions transitoires de la LARCE?

[23]  En général, la question en litige consistant à déterminer si le décideur administratif a commis une erreur en prenant en compte sa propre compétence est susceptible de révision selon la norme de la raisonnabilité (Flore c. Canada (Citoyenneté et Immigration), 2016 CF 1098, au paragraphe 20). Comme dans les questions d’équité procédurale, il est bien établi que la norme de contrôle applicable est celle de la décision correcte (Canada (Citoyenneté et Immigration) c. Khosa, [2009] 1 RCS 339, 2009 CSC 12, au paragraphe 43).

[24]  En l’espèce, je suis d’accord avec le défendeur, c’est-à-dire que la question de la norme de contrôle applicable a peu d’importance, car je suis convaincu que la décision de la SAI était à la fois raisonnable et correcte.

IV.  Analyse

A.  Le cadre légal

[25]  Aux termes du paragraphe 63(3) de la Loi, un résident permanent peut interjeter appel de la mesure de renvoi prise à l’enquête auprès de la SAI. Cependant, l’article 64 limite ce droit en stipulant qu’un tel appel ne peut être interjeté dans les cas où le résident permanent a été déclaré interdit de territoire, notamment, pour grande criminalité. Le terme « grande criminalité » est défini au paragraphe 64(2) comme se rapportant à un crime qui a été puni au Canada par un emprisonnement de plus de six mois.

[26]  Actuellement, voici ce qu’indiquent les paragraphes 64(1) et (2) de la Loi :

Restriction du droit d’appel

No appeal for inadmissibility

64 (1) L’appel ne peut être interjeté par le résident permanent ou l’étranger qui est interdit de territoire pour raison de sécurité ou pour atteinte aux droits humains ou internationaux, grande criminalité ou criminalité organisée, ni par dans le cas de l’étranger, son répondant.

64 (1) No appeal may be made to the Immigration Appeal Division by a foreign national or their sponsor or by a permanent resident if the foreign national or permanent resident has been found to be inadmissible on grounds of security, violating human or international rights, serious criminality or organized criminality.

Grande criminalité

Serious criminality

(2) L’interdiction de territoire pour grande criminalité vise, d’une part, l’infraction punie au Canada par un emprisonnement d’au moins six mois et, d’autre part, les faits visés aux alinéas 36(1)b) et c).

(2) For the purpose of subsection (1), serious criminality must be with respect to a crime that was punished in Canada by a term of imprisonment of at least six months or that is described in paragraph 36(1)(b) or (c).

[27]  Le paragraphe 64(2) a été modifié par l’article 24 de la LARCE. Avant la modification, qui est entrée en vigueur le 19 juin 2013, le terme grande criminalité était défini comme se rapportant à un crime qui a été puni au Canada par un emprisonnement d’au moins deux ans. Conformément aux dispositions transitoires de la LARCE, les individus, dont les renvois à la SI pour enquête, en application du paragraphe 44(2) de la Loi, ont été signés avant le 19 juin 2013 continueraient de bénéficier d’un droit d’appel devant la SAI, conformément à l’état du droit avant cette date. Autrement dit, ces individus continueraient d’être régis par la définition la plus généreuse de « grande criminalité » du paragraphe 64(2) telle qu’elle existait avant l’entrée en vigueur de la LARCE.

[28]  Les dispositions transitoires pertinentes sont exprimées de la façon suivante :

Appel

Appeal

32. Le paragraphe 64(2) de la Loi, dans sa version antérieure à l’entrée en vigueur de l’article 24, continue de s’appliquer à l’égard de quiconque avait un droit d’appel au titre du paragraphe 63(1) de cette loi avant l’entrée en vigueur de l’article 24.

32. Subsection 64(2) of the Act, as it read immediately before the day on which section 24 comes into force, continues to apply in respect of a person who had a right of appeal under subsection 63(1) of the Act before the day on which section 24 comes into force.

Appel

Appeal

33. Le paragraphe 64(2) de la Loi, dans sa version antérieure à l’entrée en vigueur de l’article 24, continue de s’appliquer à l’égard de toute personne visée par une affaire déférée à la Section de l’immigration au titre du paragraphe 44(2) de cette loi avant l’entrée en vigueur de l’article 24.

33. Subsection 64(2) of the Act, as it read immediately before the day on which section 24 comes into force, continues to apply in respect of a person who is the subject of a report that is referred to the Immigration Division under subsection 44(2) of the Act before the day on which section 24 comes into force.

[29]  La LARCE n’a pas modifié l’alinéa 36(1)a) de la Loi qui établit les motifs d’interdiction de territoire pour grande criminalité au Canada. Par conséquent, au moment de l’entrée en vigueur de la LARCE, un résident permanent était interdit de territoire pour grande criminalité s’il a été « déclaré coupable au Canada d’une infraction à une loi fédérale punissable d’un emprisonnement maximal d’au moins dix ans ou d’une infraction à une loi fédérale pour laquelle un emprisonnement de plus de six mois est infligé ». La LARCE n’a pas changé ces dispositions. Par conséquent, le demandeur aurait été déclaré interdit de territoire si le rapport établi en application de l’article 44 avait été déféré à la SI avant le 19 juin 2013. Cette affirmation n’est pas contestée.

[30]  Le processus menant à un rapport établi en application de l’article 44 déposé et déféré à la SI, et un appel éventuellement interjeté à la SAI, a été décrit dans les termes suivants dans Tran :

[6]  Si un agent de l’Agence des services frontaliers du Canada (« ASFC ») estime qu’un résident permanent est interdit de territoire, il peut établir un rapport circonstancié qu’il transmet au ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile (« ministre ») : LIPR, par. 44(1). Si le ministre estime le rapport bien fondé, il peut déférer l’affaire à la Section de l’immigration de la Commission de l’immigration et du statut de réfugié (« Section de l’immigration ») pour enquête : par. 44(2). Toutefois, même s’il estime le rapport bien‑fondé, le ministre conserve un certain pouvoir discrétionnaire de ne pas déférer l’affaire à la Section de l’immigration.

[7]  Si le ministre défère l’affaire à la Section de l’immigration, celle-ci tient une enquête et elle doit soit reconnaître le droit d’entrer de la personne au Canada (LIPR, al. 45a)), soit autoriser la personne à entrer au Canada pour contrôle complémentaire (al. 45c)), soit prendre une mesure de renvoi à son égard (al. 45d)). La prise d’une mesure de renvoi emporte perte du statut de résident permanent de cette personne : LIPR, al. 46(1)c). S’il est vrai qu’il est possible d’interjeter appel devant la Section d’appel de l’immigration d’une mesure de renvoi prononcée contre un résident permanent [LIPR, par. 63(3)], un tel résident ne peut faire appel d’une décision qui l’a déclaré interdit de territoire pour grande criminalité si sa déclaration de culpabilité « vise [. . .] l’infraction punie au Canada par un emprisonnement d’au moins six mois » : LIPR, par. 64(2)

[31]  La SPR est une des quatre sections de la Commission de l’immigration et du statut de réfugié du Canada établies en application de l’article 151 de la Loi. Conformément à l’article 162 de la Loi, la SAI, comme dans le cas des trois autres sections de la Commission, a compétence exclusive pour connaître des questions de droit et de fait dans le cadre des affaires dont elle est saisie en application de la Loi. Cela comprend des questions de compétence. Conformément à l’article 162, la SAI, comme dans le cas des trois autres sections, « fonctionne, dans la mesure où les circonstances et les considérations d’équité et de justice naturelle le permettent, sans formalisme et avec célérité. »

[32]  Conformément à l’article 165 de la Loi, la SAI et ses commissaires, contrairement aux trois autres sections et leurs commissaires, ne sont pas investis des pouvoirs d’un commissaire nommé aux termes de la partie I de la Loi sur les enquêtes, LRC 1985, ch. I-11 « et peuvent prendre les mesures que ceux-ci jugent utiles à la procédure. » Toutefois, l’article 174 de la Loi investit les pouvoirs à la SAI.

[...] les attributions d’une juridiction supérieure sur toute question relevant de sa compétence  et notamment pour la comparution et l’interrogatoire des témoins, la prestation de serment, la production et l’examen des pièces, ainsi que l’exécution de ses décisions

[...] all the powers, rights and privileges vested in a superior court of record necessary to the exercise of its jurisdiction, including the searing and examination of witnesses, the production and inspection of documents and the enforcement of its orders

[33]  Enfin, l’une des caractéristiques d’un appel interjeté devant la SAI consiste en la compétence d’envisager des mesures spéciales de la SAI, que la SI ne possède pas, car elle n’a d’autre choix que d’ordonner une mesure d’expulsion lorsqu’elle est convaincue de l’existence de motifs raisonnables de croire que la personne concernée est interdite de territoire pour grande criminalité (Bisla c. Canada (Citoyenneté et Immigration), 2016 CF 1059, au paragraphe 16). Enfin, conformément à l’alinéa 67(1)c) de la Loi, sauf dans le cas de l’appel du ministre, la SAI peut permettre un appel si elle est convaincue que, « compte tenu de l’intérêt supérieur de l’enfant directement touché [par la décision], des motifs d’ordre humanitaire justifiant, vu les autres circonstances de l’affaire, la prise de mesures spéciales. » Je présumerais qu’il s’agit de l’une des raisons pour laquelle un appel devant la SAI paraît aussi alléchant pour le demandeur, compte tenu des motifs d’ordre humanitaire qu’il a soumis en vain à la SI.

B.  La SAI n’a pas commis d’erreur en soutenant que l’appel du demandeur est irrecevable aux termes du paragraphe 64(2) de la Loi et, par conséquent, elle n’a pas compétence pour être saisie de l’affaire.

[34]  Le demandeur allègue que, en ne faisant aucun renvoi à sa demande de divulgation ou en ne discutant d’aucun élément lié à sa demande, la SAI a refusé d’exercer sa compétence et a manqué à son obligation d’équité procédurale qui lui était due, car il demande les renseignements demandés pour évaluer si y a eu abus de procédure de la part de l’ASFC qui, si établi, devrait constituer une exception à l’interdiction d’interjeter appel de l’article 64.

[35]  Le défendeur allègue que la détermination de la compétence est une étape préliminaire du processus d’appel et qu’une fois que la SAI a conclu qu’elle ne possède pas le pouvoir de statuer sur un appel, elle perd son pouvoir d’examiner d’autres questions en lien avec cet appel. À titre subsidiaire, le défendeur prétend que l’argument concernant l’abus de procédure dont le demandeur souhaite présenter devant la SAI est voué à l’échec, soit parce qu’il n’a aucune emprise sur la jurisprudence ou parce que le demandeur est exclu par le principe de renonciation implicite pour le faire progresser à cette étape, car il ne l’a pas soulevé à la première occasion, c’est-à-dire lorsque le rapport établi en application de l’article 44 a été déposé, quand ledit rapport a été déféré à la SI, ou lors du contrôle judiciaire à l’égard de l’une ou de l’autre décision.

[36]  Je suis d’avis que le point de vue du défendeur reflète bien l’état actuel de la loi dans les deux cas.

[37]  En l’espèce, il est indubitable que le demandeur est interdit de territoire au Canada, conformément à l’alinéa 36(1)a) de la Loi, parce qu’il n’est pas un citoyen canadien et qu’il a commis une infraction à une loi fédérale punissable d’un emprisonnement de plus de six mois. Il est également indubitable que le paragraphe 64(2) de la Loi interdit au demandeur d’interjeter appel devant la SAI du demandeur, et que cette interdiction n’est pas remplacée par les dispositions transitoires de la LARCE, notamment l’article 33.

[38]  Bien que cette question ait été tranchée avant les changements apportés au paragraphe 64(2) de la Loi, Kroon c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2004 CF 697 [Kroon], a établi certains principes importants concernant cette disposition. En l’espèce, la Cour maintient que la SAI n’a pas compétence pour statuer sur la constitutionnalité de l’article 64. Tel était le cas, conformément au juge Rouleau, parce que lorsque la décision factuelle a été rendue, selon laquelle le demandeur était interdit de territoire pour grande criminalité, la SAI a perdu « tout mandat d’entendre un appel », y compris le pouvoir de trancher des questions légales, constitutionnelles ou autres, soulevées aux termes de cette disposition. Le juge Rouleau a ajouté que « le législateur n’aurait pas pu être plus clair quant à son intention de limiter la compétence de la SAI relativement aux personnes visées par l’alinéa 36(1)a) de la Loi. » (Kroon, au paragraphe 32). Il a réitéré qu’en interprétant l’article 64, il était important de garder à l’esprit les objectifs poursuivis par la loi.

[40]  Lorsque l’on interprète les dispositions de la LIPR, notamment les droits d’interjeter appel en application de la Loi, il est important de garder à l’esprit les objectifs poursuivis par la loi de « protéger la santé des Canadiens et de garantir leur sécurité » et de « promouvoir, à l’échelle internationale, la justice et la sécurité par le respect des droits de la personne et l’interdiction de territoire aux personnes qui sont des criminels ou constituent un danger pour la sécurité  » (les alinéas 3(1)h) et i)). L’article 64 de la LIPR, qui refuse clairement à la personne interdite de territoire d’interjeter appel à la SAI pour raison de grande criminalité, tente de favoriser ces objectifs en matière de sécurité.

[39]  Une autre question en litige dans Kroon consiste à déterminer si les droits du demandeur en application de la Charte entraient en jeu en raison du fait que le défendeur avait omis, sans raison valable, de tenir, avant le 28 juin 2002, date à laquelle la LIPR est entrée en vigueur, une enquête relativement à son statut au Canada en application de l’ancienne Loi sur l’immigration. Selon les éléments de preuve en l’espèce, les autorités de l’immigration étaient au courant des circonstances du demandeur avant la fin de 2001. Le demandeur a allégué que si le défendeur avait jugé de son interdiction de territoire avant l’entrée en vigueur de la Loi, il aurait été en mesure d’interjeter appel de toute mesure de renvoi immédiatement et, ainsi, n’aurait pas perdu son droit d’appel en raison du nouvel article 64 à ce moment-là.

[40]  Bien que le juge Rouleau ait reconnu que le retard occasionné par le contexte de l’immigration pourrait, dans des circonstances appropriées, constituer une infraction à l’article 7 de la Charte, il a conclu que l’argument du demandeur était indéfendable, car « [l]es agents d’immigration, en l’absence de disposition législative, ne sont pas tenus d’agir dans les délais souhaités par un demandeur. » Il maintient que cet argument « [revient] à dire que lui-même aurait dû admettre, des années auparavant, sa culpabilité quant à la déclaration de culpabilité d’agression sexuelle, auquel cas le processus d’immigration se serait terminé plus tôt, ou que le demandeur aurait pu prévenir les agents d’immigration aussitôt qu’il a été déclaré coupable et demander la tenue d’une audition à une date plus rapprochée. » (Kroon, au paragraphe 39).

[41]  Dans Ferri c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2005 CF 1580 [Ferri], qui traite de la compétence de la SAI dans le contexte du paragraphe 68(4) de la Loi, la juge Mactavish a conclu que le raisonnement du juge Rouleau dans Kroon « est également applicable en l’espèce. » Le paragraphe 68(4) prévoit que « [l]e sursis de la mesure de renvoi pour interdiction de territoire pour grande criminalité ou criminalité est révoqué de plein droit si le résident permanent ou l’étranger est reconnu coupable d’une autre infraction mentionnée au paragraphe 36(1), l’appel étant dès lors classé. » La question en litige dans Ferri consistait à déterminer si l’effet de cette disposition allait priver la SAI de sa compétence pour trancher des questions de droit, notamment pour se prononcer sur la validité constitutionnelle. Avant la tenue de son audience devant la SAI, M. Ferri a fait signifier un avis portant sur une question constitutionnelle, car il prétend que le paragraphe 68(4) violait les articles 7 et 15 de la Charte.

[42]  La juge Mactavish maintient que le paragraphe 68(4) avait cet effet. Elle a déclaré que, dès que la SAI a été convaincue que (i) la personne en question était une étrangère ou une résidente permanente; (ii) la personne avait déjà été interdite de territoire pour grande criminalité ou criminalité; (iii) elle avait déjà sursis à une mesure de renvoi en rapport avec cette personne; (iv) la personne avait été reconnue coupable d’une autre infraction mentionnée au paragraphe 36(1) de la Loi, la compétence de la SAI en l’instance était épuisée dans ce sens que « la SAI perd compétence à l’égard de la personne et le sursis est annulé et l’appel est classé. » (Ferri, aux paragraphes 40 et 41). Elle maintient par ailleurs que cette interprétation du paragraphe 68(4) était « compatible avec le fait que, en adoptant la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés en 2002, le législateur a rééquilibré la sécurité du public et les droits individuels en élargissant les catégories de personnes qui peuvent être renvoyées sans droit d’appel à la SAI » (Ferri, au paragraphe 43).

[43]  Enfin, la juge Mactavish a rejeté la notion que la décision Kroon devait être différenciée de l’instance qui nous occupe, car l’article 64 a pour effet d’empêcher la SAI d’exercer sa compétence sur une personne, alors que le paragraphe 68(4) vise les situations où la SAI a déjà exercé sa compétence sur une personne :

[44]  Comme il a déjà été souligné, le juge Rouleau est arrivé à une conclusion semblable dans la décision Kroon, précitée. Bien que la décision Kroon traite également de l’article 64 de la LIPR, plutôt que du paragraphe 68(4), je crois que le raisonnement du juge Rouleau s’applique également en l’espèce. Le fait que l’article 64 ait pour effet d’empêcher la SAI d’exercer sa compétence sur une personne, alors que le paragraphe 68(1) de la Loi vise les situations où la SAI a déjà exercé sa compétence sur une personne, ne justifie pas, selon moi, que l’on fasse fi du libellé formel de la disposition et que l’on conclue à la compétence constitutionnelle dans les cas où elle n’existerait par ailleurs pas.

[44]  Il y a deux ans, dans Sharma c. Canada (Sécurité publique et Protection civile), 2016 CAF 319 [Sharma], en discutant du choix du législateur de modifier le paragraphe 64(2) de façon à « tracer la ligne de démarcation à six mois plutôt qu’à deux ans », la Cour d’appel fédérale a souligné le fait qu’« [i]l n’appartient pas aux tribunaux de modifier l’intention explicite du législateur et de remédier à l’injustice alléguée de son choix en étirant les exigences de l’équité procédurale au‑delà du contenu et du sens qu’on lui reconnaît. » (Sharma, au paragraphe 38). L’arrêt Sharma portait sur l’obligation de justice envers le demandeur dans le contexte des décisions de rédiger le rapport établi en application de l’article 44 et de le déférer subséquemment à la SI pour enquête. Le demandeur alléguait qu’il avait le droit d’obtenir une copie du rapport établi en application de l’article 44 avant que son dossier ne soit déféré à la SI.

[45]  Comme en l’espèce, dans Sharma, le demandeur a été condamné à une peine d’emprisonnement de deux ans moins un jour avant l’entrée en vigueur de la LARCE, mais le rapport établi en application de l’article 44 n’a été émis qu’en mars 2014, soit presque un an après l’entrée en vigueur de cette loi. Le renvoi à la SI a suivi et la SI a conclu que le demandeur était interdit de territoire pour grande criminalité. Le demandeur a allégué qu’un facteur devait être pris en compte au moment de déterminer le contenu de l’obligation d’équité procédurale à l’égard duquel étaient tenus les agents qui ont émis le rapport établi en application de l’article 44 et qui l’ont déféré à la SI. D’après ce facteur, en reportant la délivrance du rapport, les autorités de l’immigration avaient privé le demandeur d’une occasion d’éviter le renvoi, car son droit d’appel, auquel il avait accès en raison de la démarcation de deux ans de l’ancien article 64 de la Loi, avait maintenant été retiré par la LARCE.

[46]  La Cour d’appel fédérale maintient que la décision du législateur de modifier le seuil minimum de l’interdiction d’interjeter appel de l’article 64 de deux ans à six mois n’avait [TRADUCTION] « aucune importance pour déterminer les droits de participation des personnes concernées. » La Cour maintient que le législateur s’était « penché sur la question de l’application temporelle de sa modification et en a adouci l’effet en déterminant que les personnes dont le renvoi du dossier à la SI avait été signé par le ministre ou son délégué avant le 19 juin 2013, indépendamment de la date de l’envoi du renvoi à la SI, ne tomberaient pas sous le coup de la nouvelle limite de six mois et seraient en droit d’interjeter appel si leur période d’emprisonnement était inférieure à deux ans (voir l’article 33 de la LARCE), » ajoutant, comme il est indiqué précédemment, qu’il n’appartient pas aux tribunaux de varier la claire intention du législateur et de remédier à la présumée injustice de ces choix (Sharma, au paragraphe 38).

[47]  Récemment, dans Martinez c. Canada (Citoyenneté et Immigration), 2017 CF 982 [Martinez], la Cour (la juge Elliott) a traité d’un argument sur l’abus de procédure similaire à la présente affaire, quoique dans un contexte de demande de contrôle judiciaire d’une décision de la SI. Dans cette affaire, le demandeur a également été jugé interdit de territoire en application de l’alinéa 36(1)a) de la Loi à la suite d’une condamnation pénale prononcée en septembre 2010 pour laquelle le demandeur a reçu une peine avec sursis en plus des 210 jours passés sous garde entre son arrestation et son plaidoyer de culpabilité. Sa peine prévoyait également une période de probation de deux ans. Le rapport établi en application de l’article 44 a été émis en mai 2015 et a été déféré à la SI le 9 septembre 2015.

[48]  Avant la SI, M. Martinez a demandé un ajournement en attendant l’achèvement d’une demande d’accès à l’information qui avait été déposée auprès de l’ASFC dans le but de tenter d’utiliser les renseignements demandés pour faire valoir, comme le fait le demandeur en l’espèce, que l’ASFC avait commis un abus de procédure en retardant l’élaboration et le renvoi du rapport établi en application de l’article 44 concernant la condamnation de 2010 jusqu’après l’entrée en vigueur de la LARCE. La SI a refusé d’accorder l’ajournement pour le motif qu’elle n’avait pas la capacité d’accorder un arrêt des procédures sur la base d’un motif établi par le demandeur.

[49]  La juge Elliott a d’abord examiné si la SI avait commis une erreur de droit en refusant la demande d’ajournement. Elle a conclu qu’elle n’avait pas commis d’erreur. Se fondant sur cette décision de la Cour dans Torre c. Canada (Citoyenneté et Immigration), 2015 CF 591 [Torre], qu’elle a noté, « laquelle a été suivie et appliquée à maintes reprises par cette Cour », la juge Elliott maintient qu’il y avait « contenait des motifs appuyant amplement le refus d’accorder un ajournement » (Martinez, au paragraphe 42). Elle fait également remarquer que l’affaire Torre expose clairement que, en se fondant sur une analyse de la décision Blencoe c. Colombie-Britannique (Human Rights Commission), 2000 CSC 44, [2000] 2 RCS 307 de la Cour suprême du Canada, le seul délai que la SI était autorisée à examiner pour déterminer s’il y avait abus de procédure était celui entre la décision rendue par le ministre pour préparer un rapport établi en application de l’article 44 et la décision de la SI suivant son enquête, et que toute autre période utilisée pour calculer un délai déraisonnable résultant prétendument d’un abus de procédure n’était pas pertinent (Martinez, au paragraphe 40).

[50]  La juge Elliott a ensuite examiné si le renvoi du rapport en application de l’article 44 était, en soi, un abus de procédure. Le demandeur ne se plaignait pas du long délai qu’il fallait pour effectuer le renvoi, mais il se plaignait plutôt que l’ASFC ait « remontée à l’époque de l’ancienne condamnation » alors qu’une nouvelle loi était en vigueur » (Martinez, au paragraphe 46). Autrement dit, il se plaignait que la loi était incorrectement appliquée rétrospectivement, soit dans le but exprès de le priver de ses droits d’appel en tardant délibérément le renvoi après l’entrée en vigueur de la LARCE, soit au moyen du processus de délai et d’établissement des priorités au sein de l’ASFC, faisant en sorte que l’Agence n’a pas renvoyé le rapport établi en application de l’article 44 avant 2015 même s’il lui avait été possible de le faire plus tôt (Martinez, au paragraphe 48).

[51]  La juge Elliott maintient que les deux arguments ont trouvé réponse dans Sharma. Elle a déclaré notamment que certaines des observations de la Cour d’appel fédérale en l’espèce étaient « importantes en l’espèce » et « s’appliquent également en l’espèce » (Martinez, aux paragraphes 49 et 50). Elle les résume de la façon suivante :

(1)  Le législateur s’est penché sur la question de l’application temporelle de sa modification de la LARCE la fixant à six mois et il n’appartient pas aux tribunaux de modifier l’intention explicite du législateur;

(2)  Avant que soit prise une mesure de renvoi du Canada, il existe d’autres procédures pour empêcher l’expulsion de sorte que l’enquête n’est pas l’élément déterminant de la décision d’expulser quelqu’un;

(3)  Le législateur a laissé au ministère le soin d’établir la procédure à suivre. Il convient de respecter les choix de procédure que fait le ministère.

(Martinez, au paragraphe 49, citant Sharma, aux paragraphes 38, 37 et 28)

[52]  Se fondant sur ces observations, elle a conclu qu’en examinant le processus entrepris par l’ASFC dans une affaire donnée, la Cour ne devait pas interférer avec le choix de politique du législateur lorsqu’il a adopté les dispositions transitoires de la LARCE :

[50]  Les principes énoncés dans Sharma s’appliquent également en l’espèce. Il n’appartient pas à cette Cour ni à la SI, de prolonger ou de modifier les dispositions de transition contenues à l’article 33 de la LARCE, lesquelles ont été précisément établies par le législateur. Le législateur aurait pu préciser que l’ancienne disposition du paragraphe 64(2) s’appliquait si une peine était prononcée avant l’adoption de la LARCE, mais il a choisi de ne pas le faire. Le législateur a choisi la date de la signature du renvoi d’une affaire par le ministre ou son délégué. La Cour n’a pas à intervenir dans ce choix de principe de la part du législateur lors de son contrôle judiciaire de la procédure suivie par l’ASFC.

[53]  La juge Elliott a également rejeté la notion que le ministre a illégalement appliqué la loi rétrospectivement lorsque l’ASFC est « ”remontée à l’époque de l’ancienne condamnation” alors qu’une nouvelle loi était en vigueur » soutenant que cet argument a été contrecarré par les dispositions transitoires de la LARCE qui ont exprimé clairement que « seuls les renvois déjà existants au moment où la LARCE a été adoptée peuvent faire l’objet d’un appel devant la SAI » (Martinez, au paragraphe 51). Elle a réitéré que la capacité du législateur de révoquer la présomption de non-rétrospectivité en signalant clairement qu’il s’était penché sur cette question a été reconnue depuis longtemps et a été réaffirmée dans Tran, et soutient que le langage explicite utilisé à l’article 33 de la LARCE était suffisant pour révoquer la présomption de non-rétrospectivité de la loi et d’interdire le droit d’appel à la SAI lorsque le renvoi à la SI en raison d’une déclaration de culpabilité prononcée avant l’entrée en vigueur de la LARCE le 19 juin 2013 est effectué après cette date :

[53]  Le législateur a clairement indiqué à l’article 33 de la LARCE que seules les affaires déférées au titre du paragraphe 44(2) avant l’entrée en vigueur de la LARCE peuvent tirer profit des anciennes dispositions du paragraphe 64(2) de la LIPR. Il s’agit d’un énoncé sans équivoque de l’intention du législateur, formulée explicitement comme l’a mentionné la Cour suprême dans Tran, voulant que le renvoi ne s’applique pas rétrospectivement s’il n’a pas été fait avant le 19 juin 2013.

[54]  Le renvoi du demandeur a eu lieu en 2015 et la LARCE a été adoptée en 2013. L’article 33 de la LARCE nécessite que les dispositions plus récentes du paragraphe 64(2) s’appliquent. Considérant le libellé explicite de l’article 33, l’application de la présomption du caractère non rétrospectif de la loi a été réfutée, le renvoi en vertu du paragraphe 44(2) était conforme à la loi et il n’y avait aucun droit d’interjeter appel après de la SAI.

[54]  Voici ce qui ressort, selon moi, de ces affaires aux fins de la présente espèce, en gardant à l’esprit que le demandeur ne soulève plus de questions de nature constitutionnelle au motif qu’il n’a, du moins pas dans le moment, aucun élément probant sous-jacent pour faire une telle demande :

  1. L’intention du législateur de limiter la compétence de la SAI en ce qui concerne les individus visés par l’alinéa 36(1)a) de la Loi ne pouvait être plus claire, comme c’est le cas de l’intention du législateur de modifier le seuil minimum de la restriction d’appel de l’article 64 de deux ans à six mois et de limiter l’incidence de ce changement aux individus dont le renvoi à la SI a été signé par le ministre ou son délégué avant l’entrée en vigueur de la LARCE, quelle que soit la date à laquelle le renvoi a été envoyé à la SI, de sorte que ces personnes – et seulement ces personnes – continuent de tirer bénéfice d’un appel devant la SAI;

  2. Cette interprétation est compatible avec l’intention du législateur, au moment de l’adoption de la Loi en 2002, afin de faire de la sécurité une priorité de première importance et de rééquilibrer les intérêts en matière de sécurité publique et de droits individuels en élargissant les catégories de personnes qui peuvent être renvoyées sans droit d’appel à la SAI;

  3. Le législateur s’est penché sur l’application temporelle des modifications apportées à l’article 64 de la Loi par le biais de la LARCE. Le législateur aurait pu préciser que les anciennes dispositions du paragraphe 64(2), établissant la ligne de démarcation à deux ans, continueraient de s’appliquer si la peine avait été prononcée avant l’entrée en vigueur de la LARCE, mais il a choisi de ne pas le faire. Le législateur a plutôt choisi la date de la signature du renvoi d’une affaire par le ministre. Il n’appartient pas aux tribunaux de modifier les choix clairs du législateur à cet égard et de remédier à l’injustice alléguée de ces choix;

  4. Le langage utilisé à l’article 33 de la LARCE était suffisamment clair pour révoquer la présomption de non-rétrospectivité de la loi et d’interdire en conséquence le droit d’appel à la SAI lorsqu’une décision de renvoyer une question à la SI a été signée après l’entrée en vigueur de la LARCE, même si c’est pour une déclaration de culpabilité prononcée avant cette date;

  5. Malgré les termes généraux de l’article 162 de la Loi, lorsque la détermination factuelle est établie aux termes de l’article 64 selon laquelle un demandeur est interdit de territoire pour grande criminalité pour un crime qui a été puni par une peine d’emprisonnement de plus de six mois et que la décision de déférer le rapport établi en application de l’article 44 à la SI a été signée après l’entrée en vigueur de la LARCE, la SAI perd « tout mandat d’entendre un appel » (Kroon, au paragraphe 33), y compris le pouvoir de trancher des questions légales, constitutionnelles ou autres, soulevées aux termes de cette disposition. Autrement dit, elle « perd compétence à l’égard de la personne » (Ferri, au paragraphe 41);

  6. Il en est de même de l’interdiction d’interjeter appel exposée au paragraphe 68(4) de la Loi même si, à la différence que lorsque l’article 64 s’applique, la SAI a déjà exercé sa compétence sur une personne;

  7. Aux termes du régime législatif actuel, les agents d’immigration n’ont pas l’obligation d’agir dans les délais souhaités par un demandeur concernant l’élaboration ou le renvoi à la SI du rapport établi en application de l’article 44.

  8. Le seul délai à prendre en compte, qui est pertinent pour déterminer s’il y a eu un abus de procédure dans un contexte comme celui-ci, est le délai entre la décision rendue par le ministre pour préparer un rapport en application de l’article 44 et la décision rendue par la SI suivant son enquête. Toute autre période ne devrait pas servir à calculer un délai excessif menant prétendument à un abus de procédure.

[55]  Par conséquent, selon mon interprétation de l’état actuel du droit, lorsqu’un avis d’appel est déposé en application du paragraphe 63(3) de la Loi, la compétence de la SAI se limite à répondre aux questions suivantes :

  1. La personne concernée est‑elle une étrangère ou une résidente permanente?

  2. La personne a‑t‑elle déjà été interdite de territoire pour raison de sécurité, d’atteinte aux droits humains ou internationaux, de grande criminalité ou de criminalité organisée?

  3. La grande criminalité vise-t-elle un crime puni au Canada par une peine d’emprisonnement de plus de six mois ou qui est décrite aux alinéas 36(1)b) ou c)?

[56]  Si la réponse à chacune de ces questions est affirmative, la SAI perd compétence à l’égard de la personne. Autrement dit, lorsque les faits en l’espèce font relever la situation de l’appelant du libellé de l’article 64, la SAI n’est pas admise à se déclarer d’entrée de jeu compétente quant à une personne, même si le paragraphe 162(1) de la Loi accorde à la SAI, comme elle le fait pour la SI, le pouvoir général d’examiner toutes les questions de droit, y compris les questions de compétence.

[57]  Cela ne signifie pas uniquement que la SAI ne peut pas statuer sur le bien-fondé de l’affaire; cela signifie également qu’elle ne peut pas statuer sur les requêtes en lien avec l’appel, y compris les requêtes relatives à la production de documents. Ce point de vue est, je crois, appuyé par le libellé du paragraphe 174(2), lequel confère à la SAI tous les pouvoirs, les droits et les privilèges d’une cour supérieure d’archives nécessaires à l’exercice de sa compétence, y compris la production et l’examen des documents. Dans la version française de cette disposition, ces pouvoirs sont conférés en lien avec « toute question relevant de sa compétence » (Non souligné dans l’original). Ce langage, quand les versions française et anglaise de la disposition sont lues simultanées, comme cela devrait être fait, présuppose que pour mener à l’exercice de ces pouvoirs, la SAI a compétence sur une question en premier lieu. Si elle ne l’a pas, alors elles ne peuvent pas être utilisées.

[58]  Dans ce cas, il n’est pas contesté que le demandeur est un résident permanent qui a été jugé interdit de territoire pour grande criminalité en raison d’un crime qui a été puni au Canada par un emprisonnement de plus de six mois. Par conséquent, j’ai la certitude que la SAI n’a pas commis d’erreur de droit en déclinant la compétence à l’égard de l’appel du demandeur et en ne traitant pas sa demande de production de documents.

[59]  Il est clair que la SAI n’avait pas compétence pour entendre l’appel du demandeur. En conséquence, la SAI n’était même pas autorisée à trancher des questions de droit en lien avec l’appel, y compris la constitutionnalité de la disposition même – article 64 – qui limite le droit d’appel du demandeur (Kroon, aux paragraphes 32 et 33). Dans ce contexte, la SAI n’était, à plus forte raison, pas autorisée à entreprendre une enquête visant à déterminer s’il pouvait y avoir eu abus de procédure de la part de l’ASFC qui pourrait mener à la modification de l’article 64, de façon à le lire, constitutionnellement ou autrement, comme une exception à l’interdiction d’interjeter appel prévue aux présentes.

[60]  Bref, la SAI ne peut être blâmée pour ne pas exercer un pouvoir qu’elle ne possédait pas en premier lieu, l’appel du demandeur étant interdit en application de l’article 64 de la Loi. Je ne vois aucune erreur de la part de la SAI à cet égard, quelle que soit la norme d’examen applicable.

[61]  La demande de contrôle judiciaire du demandeur sera donc rejetée.

[62]  Le demandeur exhorte la Cour de certifier une question aux fins d’appel. Il allègue que la Cour d’appel fédérale n’a jamais eu l’occasion d’examiner si la SAI a la compétence de déterminer la conformité constitutionnelle, contrairement à la validité, d’une disposition transitoire qui détermine le droit substantif d’un demandeur d’avoir un droit d’appel. Il propose donc de demander à la Cour d’appel fédérale de déterminer si le paragraphe 64(2) de la Loi empêche la SAI de déterminer l’applicabilité constitutionnelle de l’article 33 de la LARCE, si un appelant ne remet pas en question la validité constitutionnelle du paragraphe 64(2).

[63]  Il est possible que l’ASFC n’ait pas pris de mesure constitutionnelle non conforme en l’espèce, dit-il, mais il insiste sur le fait qu’il ne dispose d’aucun autre moyen de trancher cette question, outre que la SAI exerce son pouvoir consistant à ordonner à l’ASFC de divulguer les renseignements demandés.

[64]  Afin de satisfaire au critère de certification, une question proposée doit soulever une question qui vise à (i) transcender les intérêts des parties au litige; (ii) porter sur des questions ayant des conséquences importantes ou qui sont de portée générale; (iii) être déterminante quant à l’issue de l’appel (Zhang c. Canada (Citoyenneté et Immigration), 2013 CAF 168, au paragraphe 9).

[65]  Le défendeur s’oppose à la certification. Il allègue que la question proposée ne serait pas déterminante quant à l’issue de l’appel, car elle repose sur une question constitutionnelle qui ne peut faire partie de la décision de la Cour sur le contrôle judiciaire, car le demandeur n’a pas déposé l’avis de question constitutionnelle requis. Cela est irrémédiable, dit-il, que la question soulevée en soit une de validité constitutionnelle d’une disposition législative ou de son applicabilité, en raison de la conduite non conforme à la Charte du gouvernement. Toutefois, cet appel, tel qu’élaboré, concernerait la compétence de la SAI d’examiner l’applicabilité constitutionnelle de l’article 33 de la LARCE, et non d’examiner l’applicabilité constitutionnelle de cette disposition. Je ne vois aucune dimension constitutionnelle à la question proposée.

[66]  Le défendeur soutient également que la loi est établie dans ce domaine, c’est-à-dire qu’il n’y a aucune divergence dans la jurisprudence, et qu’il est, par conséquent, inutile de clarifier la loi. Le défendeur soulève un point important, mais je ne crois pas qu’il soit, en soi, suffisant pour refuser la certification.

[67]  Ma principale préoccupation concernant la question proposée du demandeur est ce qui sous-tend toute cette affaire – l’abus présumé de procédure – pourrait et devrait avoir été soulevé beaucoup plus tôt dans le processus, qui a ultimement mené à la conclusion d’interdiction de territoire de la SI. Le demandeur affirme qu’il n’a aucun moyen de déterminer s’il y a eu abus de procédure, sauf si la SAI exerce son pouvoir qui lui permet d’ordonner à l’ASFC de divulguer les renseignements demandés. Cependant, même en présumant que c’est le cas à cette étape de la procédure d’interdiction de territoire, le demandeur, comme le souligne le défendeur, aurait pu (mais il ne l’a pas fait) soulever la question présumée d’abus de procédure à la première occasion, c’est-à-dire quand le rapport établi en application de l’article 44 a été émis, le demandeur ayant été invité à soumettre ses observations sur les raisons pour lesquelles le rapport ne devrait pas être émis, ou, comme le prévoit Tran, quand ledit rapport a été déféré à la SI. Il n’a pas cherché à effectuer un contrôle judiciaire du rapport établi en application de l’article 44 ou de la décision pour qu’elle soit déférée à la SI. Il est vrai que le demandeur a soulevé la question devant la SI, mais il a retiré la demande d’autorisation et le contrôle judiciaire qu’il avait déposés en lien avec la décision de la SI.

[68]  Par conséquent, il existe un argument solide selon lequel, en omettant de soulever cette question à la première occasion, ce qu’il décrit ultimement comme une question d’équité procédurale, le demandeur a renoncé à son droit.

[69]  Lorsque nous examinons cet élément avec le fait que l’argument d’abus de procédure du demandeur semble voué à l’échec, à la lumière de la jurisprudence existante sur cette question, à savoir que le seul délai pertinent à prendre en compte pour déterminer s’il y a eu abus de procédure dans un contexte comme celui-ci, est celui entre la décision rendue par le ministre de préparer un rapport établi en application de l’article 44 et l’enquête de la SI, je suis convaincu que cette affaire ne se prête pas à la certification. À mon avis, les irritants sont trop nombreux pour me convaincre que la question soulevée dans la question proposée transcende les intérêts des parties immédiates, porte sur des questions ayant des conséquences importantes ou qui sont de portée générale et seront déterminantes quant à l’issue de l’appel.

[70]  Je crois qu’il convient de réaffirmer à cette étape que, comme il a été mentionné dans la décision de la SAI, un rapport établi en application de l’article 44, son renvoi à la SI et même la mesure de renvoi de la SI ne déterminent pas nécessairement si le demandeur sera renvoyé du Canada, vu la possibilité d’obtenir une mesure corrective en recourant à d’autres dispositions de la Loi (Sharma, au paragraphe 25).

[71]  En conséquence, aucune question ne sera certifiée.


JUGEMENT DANS LE DOSSIER IMM-3020-17

LA COUR REND LE JUGEMENT SUIVANT :

  1. La demande de contrôle judiciaire est rejetée;

  2. Aucune question n’est certifiée.

« René LeBlanc »

Juge


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


DOSSIER :

IMM-3020-17

 

INTITULÉ :

SARBJEET SINGH c. MINISTRE DE LA SÉCURITÉ PUBLIQUE ET DE LA PROTECTION CIVILE

 

LIEU DE L’AUDIENCE :

Vancouver (Colombie-Britannique)

 

DATE DE L’AUDIENCE :

Le 12 février 2018

 

JUGEMENT ET MOTIFS :

LE JUGE LEBLANC

 

DATE DES MOTIFS :

Le 26 avril 2018

 

COMPARUTIONS :

William J. Macintosh

 

Pour le demandeur

 

Marjan Double

 

Pour le défendeur

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Macintosh Law

Avocats

Vancouver (Colombie-Britannique)

 

Pour le demandeur

 

Procureur général du Canada

Vancouver (Colombie-Britannique)

 

Pour le défendeur

 

 

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