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Date : 20160330


Dossier : T-2051-10

Référence : 2016 CF 361

[TRADUCTION FRANÇAISE]

Ottawa (Ontario), le 30 mars 2016

En présence de monsieur le juge Hughes

ENTRE :

LA DOW CHEMICAL COMPANY, DOW GLOBAL TECHNOLOGIES INC., et DOW CHEMICAL CANADA ULC

demanderesses

et

NOVA CHEMICALS CORPORATION

défenderesse

ORDONNANCE ET MOTIFS

[1]  Les demanderesses, Dow et coll., ont présenté la présente requête sollicitant une réparation sous le format suivant :

1. Une ordonnance :

a)  déclarant que : « La phrase « polymères destinés à la fabrication de pellicules sous le nom de SURPASS », telle qu’au paragraphe 1 du jugement du juge O’Keefe rendu le 17 mai 2017, comprenne dans sa portée et signification les polymères destinés à la fabrication de pellicules SURPASS FPs016-A, EX-FPs016-A01, EX-FPs225-A01 et FPs417-A »;

b)  obligeant Nova à divulguer et à produire tous les documents pertinents se rapportant à ces polymères destinés à la fabrication de pellicule SURPASS.  

[2]  On sollicite aussi une réparation subsidiaire par l’entremise de l’avis de requête, mais l’avocat des demanderesses a déclaré à l’audience qu’elles ne sollicitaient pas une telle réparation subsidiaire.

[3]  Le procès de cette action a pris fin il y a environ deux ans. Le jugement a été rendu par le juge O’Keefe de cette cour le 7 mai 2014, dans lequel il a statué que le brevet canadien no 2,160,705 [le brevet 705] que possèdent les demanderesses, Dow et coll., était valide et que la défenderesse, Nova, l’avait contrefait. Les motifs du jugement, cités sous la référence 2014 CF 844, ont par la suite été rendus par le juge O’Keefe le 5 septembre 2014. Le juge O’Keefe a pris sa retraite de cette cour. J’entends par conséquent la présente requête. Le brevet 705 a expiré en avril 2014.

[4]  Un appel de la décision du juge O’Keefe a été entendu par un tribunal de la Cour d’appel fédérale en janvier 2016, mais compte tenu de la date de la présente ordonnance, aucune décision n’a été rendue par cette Cour. Nonobstant l’absence d’une telle décision, les parties ont insisté pour que j’entende la présente requête et en dispose.

[5]  Le procès de l’action a été court-circuité de telle sorte que les questions relatives à la quantification des profits ou dommages-intérêts n’ont pas été abordées par le juge O’Keefe. On m’informe que ces questions doivent être entendues en décembre de l’année en cours.

I.  HISTORIQUE DE LA POURSUITE

[6]  Une analyse de l’histoire de cette poursuite est essentielle à la disposition de la présente requête.

[7]  La poursuite a été intentée en décembre 2010. Comme le juge O’Keefe l’a indiqué au paragraphe 12 de ses motifs, ci-dessus, il y avait un contentieux aux États-Unis concernant un brevet étatsunien correspondant. Un premier procès avait eu lieu dans cette poursuite aux États-Unis en mai et juin 2010. Un deuxième procès a été entendu au début de 2013.

[8]  Au cours de la poursuite devant cette Cour, la déclaration des demanderesses, comme modifiée le 22 février 2012, désignait comme suit les produits de la défenderesse qui contrefont certaines revendications du brevet 705 selon les affirmations de la demanderesse :

[traduction]

1. […]

b)  une injonction permanente interdisant à la défenderesse, de même qu’à tous ses dirigeants et administrateurs et à tous les représentants, employés, préposés et personnes agissant sous le contrôle de la défenderesse ou de concert avec elle :

(i)  de contrefaire le brevet 705 et, en particulier, les revendications 10, 11, 15, 29, 30, 33, 35, 36, 41 et 42 du brevet 705;

(ii)  de fabriquer, de distribuer, d’offrir en vente, de vendre, d’octroyer des licences ou de procéder à d’autres formes de mise à disposition, ou d’utiliser au Canada des compositions de copolymères d’éthylène (polyéthylène) pour pellicule contrefaites, vendues sous le nom SURPASS, ou sous n’importe quel autre nom, tel qu’il est décrit ci-dessous;

[Non souligné dans l’original]

[9]  L’identification des produits « telle que décrite ci-dessous » se trouve pour la première fois aux paragraphes 10 et 11 de la demande introductive modifiée :

[TRADUCTION]

Activités de la défenderesse

10.  Depuis 2014 au moins, la défenderesse a fabriqué et vendu des copolymères de polyéthylène destinés à la fabrication de pellicule sous le nom SURPASS au Canada. En particulier, la défenderesse a fabriqué et vendu, et continue de fabriquer et de vendre, les copolymères de polyéthylène destinés à la fabrication de pellicule désignés à l’annexe A ci-jointe. Trois catégories de produits, FPs016, FPs117 et FPs317, comme les décrit l’annexe A, ont été jugées comme contrefaisant les brevets américains 5,847,053 et 6,111,023, que possède la défenderesse, la Dow Chemical Company, par la Cour de district du district de Delaware des États-Unis, dans les dossiers no 05-737 (JJF)

11.  Les copolymères de polyéthylène destinés à la fabrication de pellicules que fabrique et vend la défenderesse sous le nom de SURPASS, y compris ceux indiqués à l’annexe A ci‑jointe, constituent des mélanges de polymères d’éthylène comprenant un interpolymère linéaire d’éthylène/α‑oléfine ramifié de manière homogène et un polymère d’éthylène/α‑oléfine ramifié de manière hétérogène comme le brevet 705 le décrit et le revendique.  

[10]  Les paragraphes 12 à 21 de la demande introductive modifiée renvoient à la pellicule de la défenderesse comme [traduction] « étant sous le nom SURPASS, y compris ceux désignés à l’annexe A ». Les paragraphes 23 et 24 citent le produit de la défenderesse tout simplement comme [traduction] « copolymères de polyéthylène destinés à la fabrication de pellicule SURPASS ».

[11]  L’annexe A de la demande introductive modifiée énumère quelque 59 appellations de pellicule réparties en quatre catégories, soit FPs016, FPs117, FPs317 et FPs225.

[12]  Les preuves de M. Speed déposées dans cette requête comprennent la fiche des produits de la défenderesse où, par exemple dans la pièce E, la fiche de produit de la défenderesse renvoie à la résine SURPASS® FPs417-A. La pièce D de l’affidavit de M. Speed présente quelques pages des documents de la défenderesse expliquant le protocole de nomenclature de ses produits, laquelle est apparemment assujettie à plusieurs exceptions.

[13]  Le 11 mars 2011, la protonotaire Milczynski a rendu une ordonnance sur une requête de la défenderesse, entre autres, pour les particularités des produits qui contrefont le brevet selon les affirmations des demanderesses. Dans son ordonnance, la protonotaire a écrit, en partie :

[TRADUCTION]

ET VU le rejet de la requête à la conclusion de l’audience de la requête le 10 mars 2011;

La demanderesse a, par l’entremise de sa réponse à la demande de particularités de la défenderesse, et ses observations de cette requête, confirmé que (i) la licence désignée au paragraphe 5 de la requête n’était pas sous forme écrite, et (2) la liste des produits que connaît actuellement la défenderesse, qui contrefont le brevet en cause selon les affirmations de cette dernière, sont les produits qui figurent à l’annexe A de la déclaration. La défenderesse accepte ces réponses et reconnaît que dans la mesure où d’autres produits sont apparemment contrefaits, la déclaration peut être modifiée.

[14]  Il semble que les demanderesses étaient bien au courant de cette ordonnance puisque la demande introductive modifiée du 22 février 2012 intégrait à l’annexe A une quatrième catégorie de pellicule SURPASS, qu’on désigne sous le nom de FPs225-A.

[15]  L’attitude des parties tout au long de ce contentieux semble hostile, surtout du côté de la défenderesse. Le juge O’Keefe a abordé la question dans son ordonnance relative aux dépens. Une transcription d’une partie de l’interrogatoire préalable que les défenderesses ont réalisé auprès de la défenderesse le 31 octobre 2011 a été déposée dans le dossier de requête devant moi en tant que pièce F de l’affidavit de Deborba. Elle indique que l’avocat de la défenderesse était réfractaire à l’idée de donner des réponses concernant tout produit de pellicule qui n’apparaissait pas à l’annexe A de la déclaration, et qu’il a donné des réponses très prudentes au sujet des produits qui y figuraient, telles qu’indiquer qu’elle n’avait pas fabriqué de produit appelé FPs317, mais admettre qu’elle avait bien fabriqué un produit appelé FPs317-A.

[16]  Pendant ce temps, le contentieux s’est poursuivi aux États-Unis dans la deuxième étape d’une poursuite. Puisque des ordonnances de confidentialité ou conservatoires ont été délivrées à la cour des États-Unis ainsi qu’à cette cour, il s’agit d’un terrain d’entente entre les parties que les parties de la procédure devant cette Cour avaient accès aux renseignements pertinents présentés au cours de la poursuite aux États-Unis, et vice et versa. Le ou vers le 16 août 2012, Nova a révélé à Dow au cours de la poursuite aux États-Unis qu’elle avait fabriqué d’autres types de pellicule que l’avocat a reconnus devant moi comme les catégories FPs417-A, FRs416-A et EX-FPs016-A01 désignées. Ces types supplémentaires ont été ajoutés dans le cadre d’une entente conclue entre les parties quant à une étape de dommages-intérêts supplémentaire de la procédure aux États-Unis le ou vers le 12 avril 2013.

[17]  Avant le procès de cette poursuite, il semble que la protonotaire Milczynski avait rendu une ordonnance de disjonction le 27 avril 2011, mais ne l’avait pas signée. Par conséquent, le 7 mai 2014, la même date que son jugement définitif, le juge O’Keefe a rendu une ordonnance, rétroactive au 27 avril 2011, déclarant :

[TRADUCTION]

LA COUR STATUE que :

1.  Les paragraphes suivants sont par la présente ajoutés à l’ordonnance concernant le calendrier du 27 avril 2011 de la protonotaire Milczynski, nunc pro tunc, et sont en vigueur rétroactivement à compter de la date de la délivrance de l’ordonnance.

2.  Dans cette ordonnance :

a)  « brevet » signifie lettres patentes canadiennes no 2,160,705.

b)  « questions de responsabilité » signifie toutes les questions de cette poursuite à l’exception des questions relatives à la quantité. Pour une certitude accrue, les questions de responsabilités comprennent :

(i)  la question à savoir si la défenderesse a contrefait le brevet et quels produits;

(ii)  la question à savoir si le brevet est valide;

(iii)  la question concernant le droit des demanderesses, le cas échéant, à une mesure de redressement déclaratoire, à une injonction et à une restitution;

(iv)  la question concernant le droit des demanderesses de choisir de demander la restitution des bénéfices ou des dommages-intérêts. 

c)  « étape de la responsabilité » signifie l’interrogatoire préalable et toutes les autres étapes menant à un procès, y compris celui-ci, ou autres décisions concernant toutes les questions de responsabilité, à l’exception de tout appel.

d)  « questions relatives à la quantité » signifie :

(i)  la quantité des produits qui contrefont ou qui ont contrefait le brevet;

(ii)  le montant des dommages-intérêts découlant de toute contrefaçon du brevet de la part de la défenderesse;

(iii)  le montant de l’indemnisation, le cas échéant, découlant de toute contrefaçon du brevet par la défenderesse;

(iv)  le montant de tous les bénéfices découlant de toute contrefaçon du brevet par la défenderesse.

3.  Les questions relatives à la quantité dans cette poursuite doivent être établies indépendamment de l’étape de la responsabilité, et seulement après celle-ci, au besoin, selon son issue. Pour une certitude accrue, au cours de l’étape de la responsabilité, il n’y aura aucun document ni autre communication concernant des affaires se rapportant uniquement aux questions relatives à la quantité.

4.  En fonction de l’issue de l’étape de la responsabilité, s’il est nécessaire de décider des questions relatives à la quantité, la poursuite doit être suivie des questions relatives à la quantité, y compris si une telle décision doit être rendue au moyen d’un autre procès ou référence, doit être dirigée par le juge saisi du procès au cours de l’étape de la responsabilité, et chaque partie peut présenter une requête concernant de telles directives à la suite du jugement suivant le procès de l’étape de la responsabilité. Une telle requête de directive peut être présentée peu importe si le jugement est porté en appel.  

5.  Il n’y aura aucune adjudication des dépens.

[18]  Le procès de cette action devant la Cour s’est déroulé entre septembre et novembre 2013. Aucun des numéros FPs417-A, FRs416-A ou EX-FPs016-A01 n’avait été énuméré à l’annexe A de la demande introductive modifiée, ni autrement remise en question à ce procès. Il semble que bien que quelque 59 pellicules différentes ont été soulevées dans l’annexe A de la déclaration modifiée, les demanderesses ont présenté la preuve de quelque 14 mélanges différents de composantes des pellicules seulement, que le juge saisi du procès a apparemment admis comme composantes types des 59 mélanges de pellicule.

[19]  L’avocat des demanderesses Dow a présenté un exposé des faits, du droit et des arguments au procès. Le paragraphe 1 de cet exposé indiquait :

[TRADUCTION]

LES RÉSINES SURPASS PRÉSUMÉES

1.  Nova fabrique et vend des produits sous le nom commercial Surpass. On compte cinquante-neuf (59) produits Surpass en cause dans la présente action, qu’on a répartis en quatre catégories de produits : FPs016, FPs117, FPs317, et FPs225, en fonction de leur indice de fusion.

[20]  L’avocat de Dow a présenté un projet de jugement dans le cadre de sa déclaration liminaire au procès. Le projet indiquait, entre autres :

[TRADUCTION]

Projet de jugement

LA COUR STATUE que :

1.  La défenderesse, NOVA Chemicals Corporation, a violé au moins les revendications 11, 29, 30, 33, 35, 36, 41 et 42 du brevet canadien no 2,160,705 (le brevet « 705 [sic]) en fabriquant au Canada et en distribuant, en mettant en vente, en vendant ou en mettant d’une façon ou d’une autre à la disposition du public des mélanges de copolymères d’éthylène (polyéthylènes) destinés à la fabrication de pellicule vendus sous le nom de SURPASS, ou sous tout autre nom;

2.  Les demanderesses ont droit de choisir entre une comptabilisation des profits de la défenderesse et des dommages-intérêts les indemnisant en totalité du préjudice subi à la suite de la contrefaçon des brevets mentionnés ci‑dessus [sic] par la défenderesse. Ces dommages-intérêts ou les profits en question seront calculés dans le cadre d’un renvoi précédé par une communication préalable au besoin :

[21]  Dans son jugement du 7 mai 2014, le juge O’Keefe a désigné le produit en cause en tant que « SURPASS » seulement. Le jugement indiquait, entre autres :

LA COUR STATUE que :

1.  Il sera prononcé un jugement déclaratoire portant que les revendications nos 11, 15, 29, 30, 33, 35, 36, 41 et 42 du brevet canadien no 2160705 sont valides et que Nova Chemicals Corporation a contrefait ces revendications en fabriquant au Canada et en distribuant, en mettant en vente, en vendant ou en mettant d’une façon ou d’une autre à la disposition du public des polymères destinés à la fabrication de pellicules sous le nom de SURPASS.

2.  Les demanderesses ont le choix, après enquête et communication intégrale, entre une comptabilisation des profits de la défenderesse et des dommages-intérêts les indemnisant en totalité du préjudice subi par suite du manque à gagner qui découle directement pour elles de la contrefaçon par la défenderesse du brevet susmentionné. Ces dommages-intérêts ou les profits en question seront calculés dans le cadre d’un renvoi précédé par une communication préalable au besoin.

[…]

[22]  Les motifs du juge O’Keefe ne donnent pas de détails sur ce qu’il voulait dire par polymères destinés à la fabrication de pellicule « SURPASS ». Au paragraphe 8, il répète la demande de réparation des demanderesses comme formulée dans la demande introductive modifiée (répétée précédemment en l’espèce) qui, à l’alinéa 1b)(ii), renvoie à des [traduction« composés vendus sous le nom SURPASS, ou tout autre nom désigné ci‑dessous ».

[23]  Au paragraphe 283 de ses motifs, le juge O’Keefe rend sa décision de la poursuite, dont un rappel des paragraphes 1 et 2 de son jugement, déjà exposés en l’espèce.

[24]  Après que le juge O’Keefe a rendu son jugement concernant la responsabilité, les parties ont entamé l’interrogatoire préalable à l’étape relative à la quantité. Au cours de l’interrogatoire préalable d’une défenderesse le 11 septembre 2015, l’avocat des demanderesses a indiqué que certains types de pellicule SURPASS ne figuraient pas à l’annexe A de la demande introductive modifiée, mais qui étaient, selon l’avocat, en cause au cours du renvoi (pièce I de l’affidavit de Grembowicz). On les a désignés comme EX-FPs 016-A01, FRs016-A, FPs417-A, XJs-X38B et XJs-X38U. L’avocat de la défenderesse a refusé de répondre aux questions concernant ces pellicules. La même position a été adoptée dans une communication du 14 septembre 2015 (pièce J de Grembowicz). L’avocat a maintenu sa position dans une correspondance subséquente.

[25]  Au bout du compte, l’avocat des demanderesses a déposé un avis de requête le 20 janvier 2016, soit la requête devant moi, dans le but de faire ajouter à la portée du jugement du juge O’Keefe, les pellicules SURPASS désignées comme FPs016-A, EX-FPs016-A01, EX‑FPs225-A01 et FPs417-A.

II.  POSITION DES PARTIES

[26]  La position des demanderesses Dow est résumée dans leur exposé des arguments, aux paragraphes 7 et 8, comme suit :

[TRADUCTION]

7.  Dans tous les cas, et comme indiqué plus bas :

a)  chacun des autres types est un polymère destiné à la fabrication de pellicules SURPASS;

b)  chacun des autres types relève de l’une des quatre catégories de produits établies à l’annexe de la réclamation de Dow (c.-à-d., FPs016, FPs117, FRs225 et FPs317);

c)  le type de pellicule supplémentaire FPs016-A est tout simplement le type de pellicule contrefaisant FRs016, comme établit dans la réclamation Dow, comprenant un « ajout » non polymère;

d)  le type de pellicule supplémentaire FPs41-A est, comme le reconnaît Nova, une [traduction] « légère variation » et, dans toutes les sphères possibles, ne se distingue pas du type de pellicule contrefait FRs317-A, comme l’indique la réclamation de Dow;

e)  les types de pellicule supplémentaires EX‑FPs016‑A01 et EX-FPs225-A01 ne sont que des versions précommerciales de FPs016-A (décrit ci‑dessus) et de FPs225-A (comme désigné dans la revendication de Dow), et ils sont très semblables à ces derniers.

8.  Par conséquent, aucun des types supplémentaires ne diffère sur le plan physique des types contrefaits désignés. Il s’agit des « polymères destinés à la fabrication de pellicule sous le nom de SURPASS » comme indiqué lors du jugement de première instance.

[27]  La position de la défenderesse est essentiellement présentée aux paragraphes 15 à 19 de son exposé :

[TRADUCTION]

15.  La question à savoir si FPs417-A constitue une contrefaçon relève d’une instance, pas d’une décision sommaire pour la présente requête. Pour les besoins de cette affaire, NOVA ne conteste pas la similarité des produits autres que FPs417-A. Dow cherche maintenant à en ajouter d’autres pour lesquels on a trouvé des produits contrefaits, en e qu’ils ne sont que différents sur le plan des appellations expérimentales ou des emballages d’additifs. NOVA défendrait aussi les revendications de Dow sur tous les produits supplémentaires comme un abus procédural. Dow connaissait ces produits depuis le début. Elle aurait pu, et aurait dû, évoquer chacun d’entre eux au cours du procès sur la responsabilité. Les revendications fondées sur les produits supplémentaires sont désormais interdites.

16.  Comme autre mesure de défense, NOVA a aussi droit aux profits de la période limite de six ans en vertu de l’article 55.01 de la Loi sur les brevets.

17.  La requête de Dow ne peut pas léser NOVA ni la brimer de son droit à la défense.

18.  L’alinéa 399(2)a) ne s’applique à aucun fait imprévu ni nouvellement révélé pour modifier ou rouvrir le jugement. Il s’agit d’une décision finale que Dow n’a pas portée en appel, et qui fait désormais l’objet d’une décision en attente de l’appel de NOVA. Dow cherche seulement à accroître son cas de contrefaçon en fonction des preuves qu’elle aurait pu présenter au procès.

19.  Dow s’appuie par conséquent sur une interprétation littérale du jugement pour soutenir que les « polymères destinés à la fabrication de pellicules fabriqués et vendus par NOVA sous le nom SURPASS » en tant que catégorie générale sont contrefaits. Cette interprétation littérale passe outre la façon dont l’affaire a été conçue et les preuves présentées au procès. Le juge saisi de l’instance renvoyait aux produits contestés qui se trouvaient devant lui en employant un langage fondé sur le plaidoyer, et comme l’avocat y renvoyait. Il n’a entendu aucun témoignage concernant la contrefaçon d’autres polymères destinés à la fabrication de pellicules commercialisés sous le nom SURPASS, et l’ordonnance de disjonction prescrivait que toutes les questions au sujet de ce que les produits contrefont fassent l’objet d’une décision en tant que question en matière de responsabilité.

[28]  Autrement dit, les défenderesses affirment que les pellicules particulières dont l’intégration avait été demandée dans le renvoi se trouvent implicitement dans la décision du juge O’Keefe et ne constituent que de simples variantes. La défenderesse soutient, au moins en ce qui a trait à l’une de ces pellicules, FPs417-A, qu’il existe des arguments techniques considérables quant à savoir si une contrefaçon existe bien et, en ce qui a trait aux autres, qu’il y a des questions concernant une préclusion, un abus de procédure, des délais et une prescription qu’elle doit pouvoir soulever.

III.  DISCUSSION

[29]  La requête des demanderesses repose essentiellement sur trois motifs :

  1. Les pellicules particulières qu’on cherche à ajouter au renvoi étaient implicitement en cause depuis le début, et ne sont que de simples variantes plus particulièrement établies à l’annexe A de la demande introductive modifiée;

  2. La défenderesse, Nova, a été intransigeante tout au long du processus et s’est gardée d’être franche et ouverte au moment de nommer toutes les pellicules en cause. Elle a l’obligation de révéler toutes les appellations pertinentes d’une pellicule SURPASS en cause durant le processus d’interrogatoire préalable;

  3. L’alinéa 399(2)a) de la Cour l’autorise à annuler ou à modifier une ordonnance au motif d’une affaire découverte à la suite de la rédaction de cette ordonnance.

[30]  Essentiellement, la défenderesse soutient :

  1. qu’elle a bien révélé les trois pellicules supplémentaires dans le contexte de la poursuite aux États-Unis en février 2012. Dow était au courant de cette divulgation et y avait accès dans le contexte de la procédure canadienne, mais n’a rien fait. L’ordonnance de la protonotaire Milczynski du 11 mars 2011 précisait très bien que l’annexe A de la déclaration devait énumérer les produits particulièrement en cause, le cas échéant, et que si d’autres produits devaient faire surface, la déclaration pouvait être modifiée comme l’ont fait les demanderesses le 22 février 2012;

  2. que l’article 399 ne s’applique pas puisque les demanderesses étaient bien au courant des appellations des autres pellicules avant le procès. Aucune affaire découverte par la suite n’était inconnue, ou aurait dû être, connue des demanderesses au préalable;

  3. que le fait d’ajouter d’autres pellicules pour le moment priverait en fait la défenderesse de défenses, au moins quant à un cas sur les caractéristiques techniques de sa pellicule FPs417-A, et en ce qui a trait au reste, au moins aux défenses sur le principe res judicata, l’abus de procès ainsi que le délai et la prescription.

[31]  En audience, j’ai demandé à l’avocat de la défenderesse s’il était interdit aux demanderesses de lancer une nouvelle action pour demander que les quatre pellicules désignées dont l’intégration avait été demandée dans le renvoi fassent l’objet d’un examen dans une nouvelle action. Vraisemblablement, le principe de res judicata s’appliquerait aux conclusions du juge O’Keefe sur l’articulation de la demande et sa validité, et au moins certaines questions de violation de brevet. Nova pourrait faire valoir une défense de non-violation de brevet au moins pour la pellicule FPs417-A, et évoquer le principe de res judicata, l’abus de procédure, les délais et la prescription dans sa défense.

[32]  Une nouvelle action constituerait une perte des ressources de la Cour. Tout en me ralliant à la défenderesse pour ce qui est de ses arguments énoncés aux paragraphes 1 et 2 précités, je n’estime pas qu’une décision juste, plus rapide et moins coûteuse sur les questions litigieuses entre les parties ne justifie d’empêcher indéfiniment les demanderesses de présenter à la Cour les quatre autres pellicules telles qu’elles ont été désignées. Cela ne devrait pas non plus empêcher la défenderesse de faire valoir la défense qu’elle estime la plus opportune.

[33]  Les parties ont répondu à de longues communications préalables en procès. De nombreux faits ont été présentés, et de nombreuses conclusions ont été proposées au juge de première instance. Ces actes procéduraux ne devraient pas être perdus.

[34]  J’accorderai aux demanderesses l’autorisation, prenant effet par la présente requête le 20 janvier 2016, de modifier de nouveau leur demande introductive afin d’y inclure à l’annexe A, les pellicules désignées FPs016, FPs117, FPs225, et FPs317. La défenderesse pourra modifier sa défense en réponse aux présentes. Toutes les communications préalables et la preuve antérieurement déposée en procès pourront continuer d’être utilisées par les parties comme si elles avaient émané des communications préalables. En plus, les parties pourront faire d’autres communications préalables selon ce qui sera raisonnablement nécessaire.

[35]  Les dépens de la requête et d’autres communications en découlant et autres procédures seront laissés aux soins du juge ou de l’autre personne étendant le renvoi.


ORDONNANCE

LA COUR STATUE que :

  1. Les demanderesses sont autorisées à modifier l’annexe A de leur déclaration afin d’ajouter les pellicules appelées FPs016, FPs117, FPs225, et FPs317, prenant effet le 20 janvier 2016;

  2. La défenderesse est autorisée à modifier sa défense en conséquence des modifications autorisées au paragraphe 1;

  3. Les parties peuvent utiliser les preuves produites dans cette requête en tant qu’interrogatoires préalables et peuvent mener d’autres interrogatoires préalables découlant raisonnablement des modifications mentionnées ci‑dessus;

  4. Les parties doivent obtenir une gestion de cas quant à la décision de toute question soulevée par de telles modifications en ce qui a trait au renvoi et au moment correspondants;

  5. Les dépens de la présente requête ainsi que des modifications et de l’interrogatoire préalable sont laissés à la décision du renvoi.

« Roger T. Hughes »

Juge


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


DOSSIER :

T-2051-10

 

INTITULÉ :

THE DOW CHEMICAL COMPANY, DOW GLOBAL TECHNOLOGIES INC., et DOW CHEMICAL CANADA ULC c NOVA CHEMICALS CORPORATION

 

LIEU DE L’AUDIENCE :

Toronto (Ontario)

 

DATE DE L’AUDIENCE :

le 24 mars 2016

 

MOTIFS DE L’ORDONNANCE ET ORDONNANCE :

le juge HUGHES

 

DATE DES MOTIFS :

Le 30 mars 2016

 

COMPARUTIONS :

Me Steven B. Garland

Me Ryan T. Evans

Me Daniel S. Davies

 

POUR LES DEMANDERESSES

 

Me Michael E. Charles

Me Michael D. Burgess

 

POUR LA DEMANDERESSE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Smart & Biggar

Avocats

Toronto, Ontario

-et-

Dimock Stratton, s.r.l.

Avocats

Toronto, Ontario

 

POUR LES DEMANDERESSES

 

Bereskin & Parr, s.r.l.

Avocats

Toronto, Ontario

POUR LA DEMANDERESSE

 

 

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