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Date : 20180320


Dossier : IMM-3190-17

Référence : 2018 CF 314

[TRADUCTION FRANÇAISE CERTIFIÉE, NON RÉVISÉE]

Ottawa (Ontario), le 20 mars 2018

En présence de madame la juge McDonald

ENTRE :

HANNA SISAY TEKA

NADI TASESSE

NATI TADESSE

demandeurs

et

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

défendeur

JUGEMENT ET MOTIFS

[1]  Les demandeurs qui sont des citoyens éthiopiens sollicitent la révision judiciaire de la décision rendue par la Section d’appel des réfugiés le 26 juin 2017 selon laquelle ils ne sont pas des réfugiés ni des personnes à protéger au sens des articles 96 et 97 de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés (LIPR). La décision de la Section d’appel des réfugiés a infirmé une décision antérieure de la Section de la protection des réfugiés qui avait accordé aux demandeurs le statut de réfugié. Pour la Section d’appel des réfugiés, la question décisive était celle de l’authenticité des actes de naissance.

[2]  Pour les motifs qui suivent, la présente demande de contrôle judiciaire est rejetée.

I.  Résumé des faits

[3]  La demanderesse principale et ses deux enfants sont des citoyens éthiopiens. La demanderesse principale revendiquait le statut de réfugié au motif qu’elle avait été enlevée, emprisonnée et battue, car elle était soupçonnée d’être une partisane du mouvement politique Oromo Liberation Front (OLF). Après sa libération, elle a quitté l’Éthiopie avec ses enfants et a demandé le statut de réfugié au Canada.

[4]  Son père était membre de l’OLF et participait à la politique éthiopienne. Il aurait été emprisonné et torturé. La demanderesse principale allègue également que son mari a été emprisonné en raison de son implication présumée dans l’OLF.

[5]  La demande d’asile des demandeurs a été accueillie par la Section de la protection des réfugiés.

[6]  Le ministre a interjeté appel de la décision de la Section de la protection des réfugiés devant la Section d’appel des réfugiés et la Section d’appel des réfugiés a infirmé la décision de la Section de la protection des réfugiés.

II.  Décision de la Section d’appel des réfugiés

[7]  Le 26 juin 2017, la Section d’appel des réfugiés a accueilli l’appel du ministre et a annulé la décision de la Section de la protection des réfugiés. Pour la Section d’appel des réfugiés, la question déterminante était celle de l’authenticité des actes de naissance.

[8]  La Section d’appel des réfugiés a examiné tous les éléments de preuve sur lesquels les demandeurs se sont appuyés, y compris les actes de naissance, un rapport de psychothérapeute et des lettres d’organisations oromo.

[9]  Sur la question des actes de naissance, la Section d’appel des réfugiés a noté que la Section de la protection des réfugiés a examiné et rejeté le rapport d’analyse documentaire du ministre [rapport d’analyse documentaire] portant sur les actes de naissance. Même si le rapport d’analyse documentaire faisait état de sérieuses préoccupations concernant l’authenticité des actes de naissance et la façon d’obtenir ces actes, la Section de la protection des réfugiés a rejeté le rapport parce qu’il n’était pas basé sur un document type et que les actes de naissance éthiopiens ne comportent pas de caractéristiques de sécurité.

[10]  La Section d’appel des réfugiés a noté que le ministre a demandé à produire en preuve un deuxième rapport d’analyse documentaire [deuxième rapport d’analyse documentaire] lors de l’audience de la Section de la protection des réfugiés, mais la Section de la protection des réfugiés a refusé de recevoir ce document en preuve parce qu’il n’avait pas été divulgué dans les dix jours prévus par la règle en matière de divulgation de la Section de la protection des réfugiés.

[11]  La Section d’appel des réfugiés a examiné les arguments des parties et a conclu que le deuxième rapport d’analyse documentaire était probant et a par conséquent reçu celui-ci en preuve. La Section d’appel des réfugiés a noté que le deuxième rapport d’analyse documentaire contredisait le témoignage des demandeurs selon lequel les actes de naissance avaient été envoyés d’Éthiopie en mars 2016. Ce rapport indiquait que les actes de naissance avaient en fait été imprimés dans un magasin Staples (Bureau en gros) de Toronto en juillet 2016. La Section d’appel des réfugiés a précisé que l’analyse faite a été axée vers une fonction de sécurité intégrée à l’imprimante, laquelle [traduction] « permet à un examinateur de déterminer qu’un document a été imprimé dans une imprimante commerciale accessible au public, comme celle du magasin Staples ».

[12]  Bien que les demandeurs aient soutenu que les imprimantes auraient pu être utilisées par le gouvernement éthiopien, la Section d’appel des réfugiés a relevé le fait que l’argument est spéculatif et qu’il n’explique pas l’incompatibilité quant à la date d’impression. La Section d’appel des réfugiés a conclu que les actes de naissance étaient frauduleux et que l’identité des demandeurs n’avait pas été établie.

[13]  La Section d’appel des réfugiés a également examiné le rapport d’un psychothérapeute indiquant que la demanderesse principale présentait des symptômes compatibles avec le trouble de stress post-traumatique, le trouble anxieux généralisé et le trouble dépressif majeur. Cependant, la Section d’appel des réfugiés a conclu que le rapport n’attribuait pas de façon concluante les symptômes de la demanderesse principale aux circonstances présentées dans sa demande d’asile.

[14]  La Section d’appel des réfugiés a également examiné les lettres d’organisations oromo, en particulier celle de la Oromo Canadian Community Association [OCCA], mais a décidé que ces lettres ne pouvaient établir l’identité des demandeurs et étaient des lettres de soutien de par leur nature.

[15]  La Section d’appel des réfugiés a conclu que les conclusions de la Section de la protection des réfugiés en matière d’identité étaient erronées et a par conséquent accueilli l’appel du ministre.

III.  Questions en litige

[16]  Les questions suivantes découlent du présent contrôle judiciaire :

  1. Les demandeurs ont-ils été traités équitablement par la Section d’appel des réfugiés?
  2. L’appréciation de la preuve par la Section d’appel des réfugiés était-elle raisonnable?
  3. Des dépens devraient-ils être adjugés à l’encontre de l’avocat des demandeurs?
  4. Observations soumises après l’audience

IV.  Norme de contrôle

[17]  Pour contrôler la décision de la Section d’appel des réfugiés de ne pas convoquer une audience en application du paragraphe 110(6) de la LIPR, il faut appliquer la loi aux faits et la norme applicable est par conséquent celle de la décision raisonnable (Ajaj c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2016 CF 674, aux paragraphes 16 et 17).

[18]  La question de l’équité et du « droit d’être entendu » dans le contexte de la common law est une question d’équité procédurale qui est habituellement considérée selon la norme de la décision correcte (Zhang c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2018 CF 203, au paragraphe 12).

[19]  La norme de contrôle applicable à l’appréciation de la preuve par la Section d’appel des réfugiés est celle de la décision raisonnable (Canada (Citoyenneté et Immigration) c Huruglica, 2016 CAF 93, au paragraphe 35).

V.  Discussion

A.  Les demandeurs ont-ils été traités équitablement par la Section d’appel des réfugiés?

[20]  Les demandeurs allèguent qu’ils ont été traités injustement par la Section d’appel des réfugiés, car ils n’ont pas eu la possibilité de répondre au deuxième rapport d’analyse documentaire qui, d’après leurs observations, serait un « nouvel » élément de preuve. Ils soutiennent en outre que la réception de ce nouvel élément de preuve entraîne l’application du paragraphe 110(6) de la LIPR et que la Section d’appel des réfugiés aurait dû avoir tenu une audience.

[21]  Le défendeur s’oppose vigoureusement à ces observations et déclare que les demandeurs ont eu deux occasions de soumettre par écrit à la Section d’appel des réfugiés leurs observations concernant ce document. De plus, le défendeur soutient que la question de l’authenticité des actes de naissance n’était pas une question nouvelle en litige, car elle était déjà une question centrale devant la Section de la protection des réfugiés. Dans cette situation, le défendeur soutient que la Section d’appel des réfugiés n’a pas manqué à l’équité procédurale en ne tenant pas d’audience, puisque les demandeurs étaient au courant de l’existence du document et qu’ils n’ont pas soumis d’« observations complètes et détaillées », alors que les Règles de la Section d’appel des réfugiés [Règles] exigent qu’ils expliquent les motifs pour lesquels la tenue d’une audience est nécessaire.

[22]  Selon le paragraphe 110(3) de la LIPR, le législateur prévoyait que la Section d’appel des réfugiés soit un tribunal sur observations écrites. Cependant, la Section d’appel des réfugiés peut convoquer une audience si certains critères, énoncés au paragraphe 110(6) de la LIPR, sont respectés. Le paragraphe 110(6) dispose comme suit :

Audience

Hearing

(6) La section peut tenir une audience si elle estime qu’il existe des éléments de preuve documentaire visés au paragraphe (3) qui, à la fois :

(6) The Refugee Appeal Division may hold a hearing if, in its opinion, there is documentary evidence referred to in subsection (3)

a) soulèvent une question importante en ce qui concerne la crédibilité de la personne en cause;

(a) that raises a serious issue with respect to the credibility of the person who is the subject of the appeal;

b) sont essentiels pour la prise de la décision relative à la demande d’asile;

(b) that is central to the decision with respect to the refugee protection claim; and

c) à supposer qu’ils soient admis, justifieraient que la demande d’asile soit accordée ou refusée, selon le cas.

(c) that, if accepted, would justify allowing or rejecting the refugee protection claim.

[23]  Les Règles imposent aux demandeurs l’obligation d’informer la Section d’appel des réfugiés de la raison pour laquelle ils demandent la tenue d’une audience et de fournir des « observations complètes et détaillées » à l’appui de cette demande (Règles de la Section d’appel des réfugiés, sous-alinéa 10(3)e)(iii)). Dans l’arrêt Canada (Citoyenneté et Immigration) c Singh, 2016 CAF 96, au paragraphe 55, la Cour a noté que le rôle et les règles de preuve de la Section d’appel des réfugiés « doivent être respectés ».

[24]  Par conséquent, s’il existe de « nouveaux » éléments de preuve crédibles et essentiels à la décision, la Section d’appel des réfugiés a le pouvoir de convoquer une audience (Adera c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2016 CF 871, au paragraphe 57). Même si les critères du paragraphe 110(6) sont respectés, la Section d’appel des réfugiés a toujours le pouvoir discrétionnaire de refuser la tenue d’une audience (Koffi c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2016 CF 4, au paragraphe 35).

[25]  La question déterminante est de savoir si le deuxième rapport d’analyse documentaire soulève une question qui soit nouvelle. Les questions nouvelles et les éléments de preuve associés à ces questions sont juridiquement et factuellement distincts des moyens d’appel formulés par les parties et il n’est pas raisonnable de prétendre qu’ils découlent des questions que les parties ont soulevées : R. c Mian, 2014 CSC 54, au paragraphe 30 [Mian]; Ching c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2015 CF 725, au paragraphe 71. En l’espèce, le deuxième rapport d’analyse documentaire constituait les moyens d’appel soulevés par le défendeur dans son dossier devant la Section d’appel des réfugiés. Le défendeur a soutenu dans son mémoire que la Section de la protection des réfugiés avait commis une erreur en refusant d’admettre ce rapport puisqu’il s’agissait, selon lui, d’éléments de preuve pertinents et probants. Dans les observations soumises à la Section d’appel des réfugiés, le défendeur a décrit le contenu du deuxième rapport d’analyse documentaire et a aussi fourni un addenda au rapport qui corrobore les conclusions du rapport.

[26]  À la lumière de ces éléments, et sachant que ce rapport était une question dont la Section de la protection des réfugiés était saisie, il ne peut être dit que le deuxième rapport d’analyse documentaire constitue une nouvelle question en litige. Le fait que la Section de la protection des réfugiés n’a pas reçu le rapport en preuve ne fait pas de ce rapport une nouvelle question. En fait, c’est l’omission de la Section de la protection des réfugiés de recevoir ce rapport en preuve qui était l’un des moyens d’appel du défendeur devant la Section d’appel des réfugiés.

[27]  En outre, même si l’addenda au deuxième rapport d’analyse documentaire n’a pas été reçu en preuve devant la Section de la protection des réfugiés, il ne constitue pas un nouvel élément de preuve, puisqu’il s’agit simplement d’un addenda au rapport qui ne sert qu’à corroborer les conclusions du rapport. Il n’est ni juridiquement ni factuellement distinct, comme l’arrêt Mian l’enseigne.

[28]  Pour ces motifs, la Section d’appel des réfugiés n’avait pas l’obligation de tenir une audience en application du paragraphe 110(6) parce que la Section d’appel des réfugiés n’était pas saisie d’une nouvelle question. Il ne peut être reproché à la Section d’appel des réfugiés qu’elle procède sur des observations écrites, selon la procédure décrite au paragraphe 110(3), si les demandeurs ne font pas état de circonstances exceptionnelles pour justifier la tenue d’une audience.

[29]  De plus, dans la mesure où les demandeurs soulèvent des questions d’équité procédurale dans le contexte de la common law, je conclus que l’obligation d’équité procédurale en common law n’a pas été violée en l’espèce. Les demandeurs ont eu deux occasions pour présenter leurs arguments en réponse à l’élément de preuve que le défendeur a présenté devant la Section d’appel des réfugiés. Il ne s’agit pas d’une affaire dans laquelle la Section d’appel des réfugiés aurait soulevé de son propre chef de nouvelles questions de crédibilité sans donner aux demandeurs l’occasion de répondre, comme il est décrit aux paragraphes 9 et 10 de la décision Husian c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2015 CF 684. En l’espèce, la Section d’appel des réfugiés s’est penchée sur les arguments en appel en se fondant sur le dossier de la Section de la protection des réfugiés. Il s’agit d’une façon de procéder à la fois raisonnable et non erronée.

B.  L’appréciation de la preuve par la Section d’appel des réfugiés était-elle raisonnable?

[30]  Les demandeurs soutiennent que la Section d’appel des réfugiés a effectué une analyse superficielle du deuxième rapport de l’analyse documentaire sur la question des actes de naissance et qu’elle n’a pas mis en question la méthodologie du rapport.

[31]  Cependant, cet argument n’est pas étayé par les motifs de la Section d’appel des réfugiés. La Section d’appel des réfugiés a expressément examiné la méthodologie du deuxième rapport d’analyse documentaire et de l’addenda. Dans le dossier, le ministre a également donné une description technique du rapport.

[32]  Il est nécessaire que les motifs et le dossier soient lus conjointement (Newfoundland and Labrador Nurses’ Union c Terre-Neuve-et-Labrador (Conseil du Trésor), 2011 CSC 62, au paragraphe 15). En l’espèce, à la lecture globale des motifs et du dossier, il est manifeste que la Section d’appel des réfugiés a examiné la véracité du deuxième rapport d’analyse documentaire et qu’elle a noté les arguments des demandeurs en réponse, mais elle a préféré en dernière analyse les conclusions du rapport. Cela était raisonnable.

[33]  Au sujet des lettres oromo, les demandeurs soutiennent que la Section d’appel des réfugiés a écarté la lettre de l’OCCA parce qu’elle n’offrait pas de détails précis sur le contenu des déclarations et des entrevues. Les demandeurs soutiennent que la Section d’appel des réfugiés n’a pas expliqué pourquoi ce détail devait faire partie de la lettre.

[34]  En l’espèce, toutefois, la Section d’appel des réfugiés a rejeté de la preuve la lettre de l’OCCA parce que cette lettre ne suffisait pas à prouver l’identité des demandeurs, la question importante à trancher. La Section d’appel des réfugiés a apprécié la preuve pour ce qu’elle révélait, mais a simplement conclu que celle-ci n’était pas probante. La Section d’appel des réfugiés est autorisée à le faire.

[35]  Il faut faire preuve de retenue à l’égard de la Section d’appel des réfugiés pour l’appréciation de la preuve et il ne faut pas soupeser à nouveau les éléments de preuve lors d’un contrôle judiciaire (J.M. c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2015 CF 598, au paragraphe 48). Un « degré élevé de retenue » doit être exercé envers les conclusions factuelles de la Section d’appel des réfugiés et l’appréciation de la preuve (Koky c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2017 CF 1035, au paragraphe 11).

[36]  Par conséquent, l’appréciation de la preuve par la Section d’appel des réfugiés est raisonnable.

C.  Des dépens devraient-ils être adjugés à l’encontre de l’avocat des demandeurs?

[37]  Le défendeur demande l’adjudication de dépens à l’encontre de l’avocat des demandeurs parce que les déclarations faites dans l’affidavit de la demanderesse principale seraient trompeuses, selon ses allégations. De plus, le défendeur s’élève contre la conduite de l’avocat des demandeurs, car celui-ci aurait omis d’inclure des documents clés dans la demande d’autorisation et la demande de contrôle judiciaire qu’il a déposées au nom des demandeurs.

[38]  Voici le paragraphe de l’affidavit de la demanderesse principale dont il est question :

[traduction]

Notre demande d’asile a été acceptée, mais, en appel, la Section d’appel des réfugiés a annulé notre statut de réfugié en se fondant sur les documents divulgués par le ministre. Cependant, je n’ai jamais eu l’occasion de répondre aux allégations selon lesquelles mon acte de naissance est frauduleux. J’avais espéré que la Section d’appel des réfugiés ou la Section de la protection des réfugiés me permettrait de répondre aux allégations du ministre, mais elles ont tout simplement rejeté ma demande sans me donner la possibilité de répondre. Je ne crois pas que cette procédure soit équitable et je demande la possibilité d’être entendue.

[39]  Comme il a été noté précédemment, cet énoncé n’est pas exact. Les demandeurs auraient pu répondre à la Section d’appel des réfugiés à deux occasions.

[40]  Selon l’article 22 des Règles des cours fédérales en matière de citoyenneté, d’immigration et de protection des réfugiés, aucuns dépens ne sont accordés dans des instances en immigration, sauf ordonnance contraire rendue par un juge pour des raisons spéciales.

[41]  La Cour d’appel fédérale a décrit ce qui constitue ces raisons spéciales dans l’arrêt Ndungu c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2011 CAF 208 [Ndungu]. Bien que la Cour note dans la décision Ndungu que les circonstances qu’elle décrit ne sont qu’un relevé non exhaustif, l’exception des « raisons spéciales » prévue à l’article 22 des Règles constitue un seuil élevé (Brown c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2011 CF 585, au paragraphe 43). Dans l’arrêt Ndungu, au paragraphe 7, la Cour qui parlait du comportement d’un demandeur a noté ceci :

Des « raisons spéciales » justifiant l’attribution des dépens contre un demandeur ont été constatées lorsque le demandeur s’est déraisonnablement opposé à la motion du ministre d’autoriser la demande de contrôle judiciaire, prolongeant ainsi la procédure [citations omises].

[42]  L’article 22 des Règles impose un seuil élevé pour l’adjudication des dépens et les circonstances de l’espèce diffèrent de celles de la décision Ndungu. En l’espèce, si des affirmations sont inexactes dans un paragraphe de l’affidavit, il semble que ce soit davantage dû à une rédaction peu soignée qu’à l’intention d’induire la Cour en erreur. De même, je ne conclus pas que l’omission de l’avocat du demandeur de déposer un dossier complet sur la demande d’autorisation était intentionnelle.

[43]  Je refuse par conséquent d’adjuger des dépens.

D.  Observations soumises après l’audience

[44]  Après l’audience, les demandeurs ont présenté d’autres observations sur une décision récente en matière d’équité procédurale. Le défendeur s’oppose à ce que la Cour examine ces observations au motif qu’il n’y a aucune disposition dans les Règles des Cours fédérales portant sur le contrôle judiciaire qui autorise le dépôt de telles observations.

[45]  Je suis d’accord avec le défendeur. En tout état de cause, la jurisprudence invoquée par les demandeurs vient simplement réaffirmer le droit à l’équité procédurale et n’aide en rien les demandeurs, car j’ai conclu qu’il n’y avait pas eu de manquement à l’équité procédurale.


JUGEMENT DANS LE DOSSIER IMM-3190-17

LA COUR REND LE JUGEMENT SUIVANT :

  1. La demande de contrôle judiciaire est rejetée.

  2. Aucune question de portée générale n’est certifiée;

  3. Aucuns dépens ne sont adjugés.

« Ann Marie McDonald »

Juge

Traduction certifiée conforme

Ce 8e jour d’octobre 2019

Lionbridge


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


DOSSIER :

IMM-3190-17

INTITULÉ :

HANNA SISAY TEKA, NADI TASESSE, NATI TADESSE c LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

LIEU DE L’AUDIENCE :

TORONTO (ONTARIO)

DATE DE L’AUDIENCE :

LE 30 JANVIER 2018

JUGEMENT ET MOTIFS :

LA JUGE MCDONALD

DATE DES MOTIFS :

LE 20 MARS 2018

COMPARUTIONS :

Max Berger

POUR LES DEMANDEURS

Brad Bechard

POUR LE DÉFENDEUR

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Max Berger Professional Law Corporation

Avocats

Toronto (Ontario)

POUR LES DEMANDEURS

Procureur général du Canada

Toronto (Ontario)

POUR LE DÉFENDEUR

 

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