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Date : 20180306


Dossier : IMM-3299-17

Référence : 2018 CF 254

[TRADUCTION FRANÇAISE]

Toronto (Ontario), le 6 mars 2018

En présence de monsieur le juge Diner

ENTRE :

HASSAN SAFAJOU

demandeur

et

LE MINISTRE DE L’IMMIGRATION, DES RÉFUGIÉS ET DE LA CITOYENNETÉ

défendeur

JUGEMENT ET MOTIFS

[1]  Hassan Safajou demande le contrôle judiciaire d’une décision de la Section d’appel de l’immigration (SAI), par laquelle elle a rejeté son appel à l’encontre d’une conclusion de non-respect de ses obligations de résidence tirée par un agent des visas.

[2]  La demande de M. Safajou est rejetée pour les motifs qui suivent.

I.  RÉSUMÉ DES FAITS

[3]  M. Safajou est devenu résident permanent du Canada en 2003 à titre de membre de la catégorie des travailleurs qualifiés. À ce moment, il était célibataire et était âgé de 40 ans. Il avait précédemment subi des blessures lors de la guerre Iran-Iraq et a notamment perdu l’usage d’un œil et d’une oreille. Après une chirurgie en 2004 à Toronto, en Ontario, M. Safajou a décidé de retourner se rétablir en Iran, où il affirme avoir eu un soutien physique et émotionnel. Il a également reçu d’autres traitements médicaux en Iran. Il s’est marié en Iran en 2008, mais sa demande de parrainage par l’époux a été rejetée en 2010.

[4]  En 2011, la fille de M. Safajou est née. Il affirme qu’on lui a dit qu’il faudrait deux ans avant qu’il puisse parrainer sa femme et sa fille et qu’il devait être au Canada durant cette période pour présenter sa demande. En 2014, M. Safajou a présenté une demande de renouvellement de sa carte de résidence permanente, qui a été approuvée au début de 2015. Cependant, le bureau des visas d’Ankara a ensuite rendu une décision défavorable relativement à son statut de résident permanent quand il a présenté une demande pour obtenir un titre de voyage.

[5]  M. Safajou a interjeté appel de cette décision défavorable devant la SAI, admettant qu’il avait manqué à son obligation de résidence de deux ans, ayant passé seulement 68 jours au Canada durant la période pertinente de cinq ans. M. Safajou a plutôt fait porter son appel sur des motifs d’ordre humanitaire. Il se représentait lui-même, par conférence téléphonique, avec l’aide d’un interprète. Dans sa décision, la SAI a suivi le précédent établi dans la décision Arce, Dorothy Chicay Bufee v. Minister of Citizenship and Immigration, 2003 CarswellNat 4878 (WL Can) (Commission de l’immigration et du statut de réfugié – Section d’appel) et a examiné plusieurs critères d’ordre humanitaire : degré d’établissement initial et actuel de M. Safajou au Canada; ses raisons pour quitter le Canada; ses raisons justifiant son séjour prolongé et continu à l’étranger; ses liens avec le Canada du point de vue familial; les tentatives raisonnables faites pour revenir au Canada à la première occasion; importance du non-respect de ses obligations de résidence; importance des difficultés et bouleversements qui surviendraient s’il devait perdre son statut de résident permanent au Canada. La SAI a également pris en considération l’intérêt supérieur de la fille de M. Safajou. La SAI a conclu qu’aucun de ces critères ne penchait en faveur d’une exception pour motifs d’ordre humanitaire et a donc rejeté l’appel de M. Safajou.

II.  QUESTIONS EN LITIGE ET NORME DE CONTRÔLE

[6]  M. Safajou soulève deux questions d’équité procédurale en l’espèce : (i) la SAI avait l’obligation de l’informer qu’il pouvait appeler un témoin au téléphone, (ii) la SAI a omis de lui fournir des services d’interprétation adéquats. Les parties conviennent, tout comme moi, que les questions sont sujettes à un contrôle selon la norme de la décision correcte (Canada (Citoyenneté et Immigration) c. Khosa, 2009 CSC 12, au paragraphe 43).

[7]  M. Safajou soulève également une question qui doit être examinée selon la norme de la décision raisonnable : l’analyse qu’a faite la SAI de l’intérêt supérieur de sa fille dans le cadre de son analyse des considérations d’ordre humanitaire était-elle déraisonnable? Sur ce point, je dois être convaincu que la décision de la SAI est justifiée, transparente et intelligible, et appartient aux issues possibles acceptables pouvant se justifier au regard des faits et du droit (Dunsmuir c. Nouveau-Brunswick, 2008 CSC 9, au paragraphe 47).

III.  ANALYSE

[8]  J’analyserai chacune des trois questions soulevées par M. Safajou dans l’ordre où elles ont été présentées à la Cour.

A.  Possibilité de la participation d’un témoin au téléphone

[9]  Avant l’audience, M. Safajou a remis à la SAI une liste contenant les noms de quatre personnes. Trois étaient désignées comme des références et une comme un témoin – M. Ezat Mossallanejad, conseiller en établissement et analyste des politiques au Centre canadien pour victimes de torture. Les documents communiqués par M. Safajou comportaient également une lettre de M. Mossallanejad, rédigée en 2008, qui parlait des raisons médicales invoquées par M. Safajou pour retourner en Iran et de ses intentions de parrainer son épouse.

[10]  Durant l’audience de l’appel, la SAI et M. Safajou ont eu l’échange suivant concernant la participation de M. Mossallanejad en tant que témoin :

[traduction] PRÉSIDENT D’AUDIENCE : Ma dernière question concerne le fait que vous avez fait référence à un témoin dans un document que vous nous avez fait parvenir. Parlez-vous de vous-même ou d’une autre personne?

APPELANT : Il s’agit d’une autre personne et j’ai envoyé son nom et son adresse.

PRÉSIDENT D’AUDIENCE : L’avez-vous avec vous, maître?

AVOCAT DU MINISTRE : Je ne l’ai pas.

PRÉSIDENT D’AUDIENCE : Non, je n’ai pas le nom ou l’adresse de cette personne. Ce n’était pas inclus dans les renseignements que vous nous avez envoyés. Donc, qui attendez-vous comme témoin ici aujourd’hui?

INTERPRÈTE : Désolé, vous ne parlez pas assez fort, et je n’entends pas. C’est comme, ce n’est pas très clair. J’explique seulement que je ne comprends pas —

PRÉSIDENT D’AUDIENCE : Oui. J’ai besoin, avant tout, du nom du témoin s’il vous plaît.

APPELANT : Je l’ai indiqué sur la page six et son nom est le docteur Izat Mozhan Monayjot (phonétique).

PRÉSIDENT D’AUDIENCE : Je suis désolé, page six de votre divulgation? Donc vous l’avez envoyé. Je reconnais mon erreur.

APPELANT : Oui, oui.

PRÉSIDENT D’AUDIENCE : Je reconnais mon erreur. Donc, cette personne est-elle supposée être ici aujourd’hui?

APPELANT : Non. Il a dit que si c’était nécessaire, il était prêt à témoigner.

PRÉSIDENT D’AUDIENCE : Donc, vous n’avez pas pris les arrangements nécessaires pour qu’il soit présent aujourd’hui. Est-ce exact?

APPELANT : Non, je n’ai pas fait les arrangements.

PRÉSIDENT D’AUDIENCE : Donc, je n’entendrai pas ce témoin. Tout ce que j’entendrai aujourd’hui viendra de vous.

APPELANT : Oui.

[11]  Plus tard durant l’audience, M. Safajou a également affirmé ce qui suit :

[traduction] APPELANT : J’ai essayé de le faire, tout ce que j’ai subi, j’ai tenté de l’expliquer avec des documents et oralement, et ma famille et moi sommes très motivés et très impatients de revenir au Canada en raison de mes antécédents et aussi de mes liens avec le Canada.

Et peu importe ce que j’ai dit, M. Izat Mozhan Monayjot (inaudible) —

INTERPRÈTE : Son témoin.

APPELANT : — du Centre canadien des victimes de torture. Il peut témoigner qu’il m’a aidé beaucoup en raison des blessures que j’ai reçues durant la guerre, et j’aimerais avoir une autre chance pour des motifs d’ordre humanitaire, de manière à pouvoir venir avec ma famille au Canada et commencer une nouvelle vie au Canada.

[12]  Pour les besoins du présent contrôle judiciaire, M. Safajou affirme que (i) il ne savait pas qu’il pouvait communiquer avec son témoin durant l’audience devant la SAI, et (ii) que M. Mossallanejad était disponible pour témoigner à l’audience et que M. Safajou [traduction« attendait » que la SAI communique avec son témoin.

[13]  M. Safajou soutient que les plaideurs non représentés ont droit à une norme d’équité procédurale plus élevée, s’appuyant sur la décision Singh Dhaliwal c. Canada (Citoyenneté et Immigration), 2011 CF 1097 (au paragraphe 27). Il affirme que, même si la SAI a le contrôle quant au choix de ses procédures, celles-ci doivent permettre aux appelants de « faire valoir leur point de vue » (Law c. Canada (Citoyenneté et Immigration), 2007 CF 1006, au paragraphe 15 [Law]).

[14]  M. Safajou soutient que pour satisfaire à l’obligation d’équité procédurale qu’elle avait envers lui, la SAI devait l’informer que M. Mossallanejad pouvait participer par téléphone. Il affirme de plus que la SAI a commis une erreur de droit en affirmant que M. Mossallanejad ne pouvait pas témoigner s’il n’était pas présent à l’audience. M. Safajou s’appuie sur les décisions Kamtasingh c. Canada (Citoyenneté et Immigration), 2010 CF 45 [Kamtasingh], et Kotelenets c. Canada (Citoyenneté et Immigration), 2015 CF 209, au paragraphe 32 [Kotelenets].

[15]  Au vu des circonstances de l’espèce, je ne suis pas d’avis que la SAI a manqué à son obligation d’équité envers M. Safajou en ce qui concerne son témoin potentiel. Il est clair d’après la transcription (extrait ci-dessus) que la SAI a donné à M. Safajou la possibilité d’appeler son témoin : on lui a demandé s’il avait pris des arrangements pour que M. Mossallanejad présente son témoignage à l’audience, et il a répondu par la négative. Peu importe la position qu’adopte maintenant M. Safajou concernant la présente demande, il a indiqué à la SAI qu’il n’avait pas pris d’arrangements pour que M. Mossallanejad soit disponible à l’audience. En fait, M. Safajou a uniquement affirmé que M. Mossallanejad pourrait être un témoin [traduction] « si nécessaire ».

[16]  Les décisions Kamtasingh et Kotelenets sont toutes deux différentes parce qu’elles parlaient de témoins qui étaient présents et disponibles pour témoigner. Dans ces deux affaires, on a conclu que la SAI avait manqué à son obligation d’équité procédurale en décourageant et en écartant des témoins, respectivement. Le cas de M. Safajou est plutôt similaire aux faits de la décision Yari v. Canada (Citizenship and Immigration), 2016 FC 652 [Yari]; dans cette affaire, l’appelant a affirmé en contrôle judiciaire que la SAI aurait dû ajourner l’audience en partie parce qu’il n’avait pas compris qu’il pouvait appeler un témoin. Notre Cour a conclu que la SAI n’était pas obligée d’offrir un ajournement, alors que le demandeur avait simplement [traduction] « nommé un témoin possible durant l’audience, sans indiquer ce que pourrait offrir le témoin, qui n’était pas présent » (Yari, au paragraphe 43).

[17]  La Cour a aussi estimé dans la décision Yari que le demandeur avait eu suffisamment de renseignements et de temps pour s’informer de la procédure d’appel de la SAI (au paragraphe 44). De la même façon, en l’espèce, M. Safajou a reçu un avis de convocation avant l’audience, dans lequel on l’invitait à consulter les Règles de la section d’appel de l’immigration, DORS/2002-230 (les Règles). En particulier, l’article 37 des Règles indique ce qu’un appelant doit fournir s’il souhaite faire comparaître un témoin.

[18]  Je ne suis pas d’accord avec l’argument présenté par M. Safajou, selon lequel la SAI a commis une erreur de droit quand elle a affirmé qu’elle [traduction] « n’entendrait pas » M. Mossallanejad parce que M. Safajou n’avait pas [traduction] « pris d’arrangements pour qu’il soit présent », ou que cela équivalait à exclure le témoignage d’un témoin. Ce n’est pas parce que M. Safajou se représentait lui-même et affirme aujourd’hui qu’il n’a pas compris toutes les procédures de la SAI que la SAI avait l’obligation de précisément l’informer que les témoins pouvaient donner leur témoignage au téléphone, surtout que M. Safajou n’a pas indiqué la possible disponibilité du témoin au moment de l’audience.

[19]  En outre, la SAI a clairement indiqué qu’il incombait à M. Safajou de défendre sa cause :

[traduction] PRÉSIDENT D’AUDIENCE : Finalement, il vous incombe aujourd’hui de me convaincre qu’il y a en fait suffisamment de considérations d’ordre humanitaire en jeu pour justifier la décision que vous souhaitez obtenir. Autrement dit —

APPELANT : Oui.

PRÉSIDENT D’AUDIENCE : Autrement dit, c’est à vous de défendre votre cause. Vous comprenez ce fardeau?

APPELANT : Oui.

[20]  Même si la SAI est tenue à une norme élevée d’équité procédurale à l’égard des appelants qui se représentent eux-mêmes, elle n’a pas l’obligation d’agir comme un avocat (Singh c. Canada (Citoyenneté et Immigration), 2015 CF 1055, au paragraphe 19 [Singh]), et M. Safajou doit accepter les conséquences de son choix de se représenter lui-même (Singh, au paragraphe 19; Tong c. Canada (Citoyenneté et Immigration), 2018 CF 6, au paragraphe 21 [Tong]). Autrement dit, le fait de se représenter soi-même ne transfère pas le fardeau de la preuve de l’appelant à la SAI.

[21]  En somme, je suis convaincu que M. Safajou a eu suffisamment de possibilités de présenter son histoire (Law, au paragraphe 15; Tong, au paragraphe 21). C’était sa responsabilité de prendre les arrangements nécessaires pour assurer la participation de M. Mossallanejad, et il ne l’a pas fait.

B.  Traduction durant l’audience devant la SAI

[22]  M. Safajou affirme ensuite que la SAI a injustement empêché l’interprète de traduire les observations de l’avocat du défendeur durant l’audience. Il soutient qu’il avait le droit de savoir tout ce qui s’est dit à l’audience, de manière à pouvoir pleinement comprendre les faits qui lui étaient défavorables et y répondre, et qu’il avait droit à [traduction] « une traduction continue, fidèle, compétente, impartiale et concomitante », s’appuyant sur l’arrêt Mohammadian c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2001 CAF 191 [Mohammadian], et la décision Nekoie c. Canada (Citoyenneté et Immigration), 2012 CF 363.

[23]  Toutefois, M. Safajou n’a fourni aucun affidavit aux fins de la présente demande expliquant ce qui s’était passé de son point de vue ou indiquant quelles parties de l’audience il n’avait pas comprises. Je suis d’accord avec le défendeur qu’il n’est pas clair d’après la transcription que des parties de l’audience n’ont en fait pas été traduites, comme l’affirme M. Safajou.

[24]  Toutefois, ce qui est clair d’après la transcription, qui est tout ce dont dispose la Cour (il n’y a pas d’enregistrement de l’audience au dossier), c’est que M. Safajou n’a pas parlé durant les observations de l’avocat du défendeur, ni indiqué de quelque façon que ce soit qu’une partie de l’audience ne lui était pas traduite. Bien que M. Safajou ait entièrement raison sur le fait qu’un appelant a droit à une interprétation adéquate, ce droit peut être annulé si l’appelant ne s’oppose pas à une interprétation inadéquate à la première occasion possible (Tong, au paragraphe 18; Singh c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2010 CF 1161, au paragraphe 3, résumant l’arrêt Mohammadian). La Cour a récemment revisité ce principe dans la décision Noori c. Canada (Citoyenneté et Immigration), 2017 CF 1095 [Noori]:

[26]  [...] le demandeur principal a confirmé expressément à l’agente au début de l’entrevue qu’il comprenait l’interprète. Après que l’agente a donné des directives quant à la façon dont l’entrevue allait être menée, il a encore confirmé qu’il comprenait ces directives et comprenait entièrement l’interprète. Le demandeur principal soutient maintenant qu’il existait des problèmes quant à la qualité de l’interprétation et soulève une préoccupation supplémentaire qui met en doute l’objectivité de l’interprète. Toutefois, le demandeur principal n’a soulevé aucune de ces préoccupations pendant l’audience. Dans ses observations écrites, il soutient qu’il ne pouvait pas les soulever en raison des obstacles linguistiques et du fait qu’il se sentait dépassé par le changement de langage corporel de l’interprète lorsqu’il a fait référence au traitement qu’ont subi les hazaras et les chiites par les talibans. Je suis d’avis que si le demandeur principal avait de telles préoccupations pendant l’entrevue, il était raisonnable qu’il les soulève à ce moment-là. Tel que cela est expliqué dans Mohammadian, l’intéressé est toujours celui qui est le mieux placé pour savoir si l’interprétation est exacte et pour faire savoir, au cours de l’audience, que la question de l’exactitude le préoccupe, à moins que des circonstances exceptionnelles ne l’empêchent de le faire. Les arguments des demandeurs n’étayent pas la conclusion selon laquelle il existait des circonstances exceptionnelles liées à l’entrevue, qui justifieraient une dérogation à ce principe.

[25]  En l’espèce, comme dans la décision Noori, M. Safajou a confirmé durant l’audience devant la SAI qu’il comprenait l’interprète et il n’a fourni aucune [traduction] « circonstance exceptionnelle » expliquant pourquoi il n’avait pas fait mention de ses préoccupations quant à la traduction au moment où elles sont supposément apparues, ce qui aurait été raisonnable dans les circonstances. En fait, même si la situation en l’espèce diffère légèrement de la décision Noori, en ce sens que M. Safajou affirme qu’une partie de l’audience n’a pas été traduite du tout – plutôt que mal traduite ou de façon inexacte – son devoir de faire objection en de telles circonstances serait naturellement élevé : il aurait dû être évident pour M. Safajou que bien qu’une traduction ait été offerte auparavant jusqu’à ce point de l’audience, l’interprète était soudain silencieux et ne traduisait plus. Par conséquent, je ne suis pas d’accord avec M. Safajou qu’il y a eu manquement à l’équité procédurale par suite de problèmes de traduction, s’ils se sont vraiment produits.

C.  Intérêt supérieur de l’enfant

[26]  M. Safajou soutient que la SAI n’a pas été réceptive, attentive et sensible à l’intérêt supérieur de sa fille, et qu’elle n’a pas effectué une évaluation sérieuse et nuancée des conséquences pour sa fille liées à la perte du statut de résident permanent de M. Safajou. Il affirme que la SAI a fait une erreur quant à l’âge de sa fille, n’a pas posé de questions concernant la situation de sa fille en Iran, a omis de mentionner les efforts de parrainage de M. Safajou, et n’a pas répondu aux observations de M. Safajou concernant la question de savoir pourquoi il serait dans l’intérêt supérieur de sa fille de grandir au Canada. Pour appuyer son point de vue, M. Safajou cite l’arrêt Baker c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), [1999] 2 RCS 817 (CSC), et la décision Ferrer c. Canada (Citoyenneté et Immigration), 2009 CF 356.

[27]  Compte tenu des principes pertinents établis dans l’arrêt Kanthasamy c. Canada (Citoyenneté et Immigration), 2015 CSC 61 [Kanthasamy], je rejette les arguments de M. Safajou. Même si la SAI a mal indiqué l’âge de la fille de M. Safajou, cette erreur était mineure – on a indiqué qu’elle [traduction] « approchait sept ans », alors qu’en réalité elle approchait six ans. En outre, la SAI a précisément pris en considération l’argument de M. Safajou, selon lequel il parrainerait son épouse et son enfant si son appel était accueilli. Toutefois, la SAI a estimé qu’il n’existait pas d’éléments de preuve montrant qu’il avait les moyens ou qu’il disposait de mécanismes de soutien en place pour reprendre une résidence permanente au Canada loin de son épouse et de son enfant, et a souligné que ces questions avaient forcé le retour de M. Safajou en Iran dans le passé. La SAI a pris en considération le fait que la fille de M. Safajou allait à l’école en Iran, et a conclu qu’il serait dans son intérêt supérieur de demeurer là avec sa famille, où M. Safajou avait choisi de poursuivre sa vie. À mon avis, cette analyse a suffisamment identifié, défini et examiné l’intérêt supérieur de la fille de M. Safajou compte tenu de la preuve (Kanthasamy, paragraphe 39).

[28]  Il incombait à M. Safajou de présenter des éléments de preuve significatifs à l’appui de l’analyse de l’intérêt supérieur de sa fille (Fouda c. Canada (Immigration, Refugiés et Citoyenneté), 2017 CF 1176, aux paragraphes 35 et 42). En l’espèce, l’analyse faite par la SAI de l’intérêt supérieur de sa fille était raisonnable compte tenu de la preuve présentée (voir Tong, au paragraphe 32), y compris concernant la vie de la famille en Iran et les perspectives incertaines pour M. Safajou au Canada. Je ne trouve pas que cette conclusion, ni les autres conclusions de la SAI concernant les considérations d’ordre humanitaire, étaient déraisonnables.

IV.  CONCLUSION

[29]  Je félicite l’avocate de M. Safajou pour son argumentation très habile; toutefois, en bout de ligne, je n’ai pas été convaincu que la SAI a violé le droit de M. Safajou à une équité procédurale, ni qu’elle a effectué une analyse déraisonnable de l’intérêt supérieur de l’enfant.

[30]  Par conséquent, la présente demande est rejetée.

[31]  Aucune des parties n’a proposé de question à certifier; je conviens qu’aucune question n’a été soulevée.


JUGEMENT dans le dossier IMM-3299-17

LA COUR rejette la présente demande. Aucune question n’a été proposée pour certification et l’affaire n’en soulève aucune.

« Alan S. Diner »

Juge


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


DOSSIER :

IMM-3299-17

 

INTITULÉ :

HASSAN SAFAJOU c. LE MINISTRE DE L’IMMIGRATION, DES RÉFUGIÉS ET DE LA CITOYENNETÉ

 

LIEU DE L’AUDIENCE :

Toronto (Ontario)

 

DATE DE L’AUDIENCE :

Le 15 février 2018

 

JUGEMENT ET MOTIFS :

LE JUGE DINER

 

DATE DES MOTIFS :

Le 6 mars 2018

 

COMPARUTIONS :

Zeynab Ziaie Moayyed

 

Pour le demandeur

 

Michael Butterfield

 

POUR LE DÉFENDEUR

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Ziaie PC

Avocats

Toronto (Ontario)

 

Pour le demandeur

 

Procureur général du Canada

Toronto (Ontario)

 

POUR LE DÉFENDEUR

 

 

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