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Date : 20180307


Dossier : T-686-17

Référence : 2018 CF 264

[TRADUCTION FRANÇAISE CERTIFIÉE, NON RÉVISÉE]

Ottawa (Ontario), le 7 mars 2018

En présence de monsieur le juge O’Reilly

ENTRE :

BRYAN BISSESSAR

demandeur

et

LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA

défendeur

JUGEMENT ET MOTIFS

I.  Aperçu

[1]  M. Bryan Bissessar souffre de dépression, de douleurs chroniques et a un taux élevé de cholestérol. Il a demandé à deux reprises que des prestations d’invalidité du Régime de pensions du Canada lui soient versées. Ses deux demandes ont été refusées. La dernière décision, datée de 2016, a été rendue par la division générale du Tribunal de la sécurité sociale du Canada, qui a conclu que M. Bissessar n’était pas atteint d’une invalidité grave et prolongée à la date de sa période minimale d’admissibilité (PMA) le 31 décembre 2009 ou avant.

[2]  M. Bissessar a interjeté appel de la décision de la division générale devant la division d’appel du Tribunal de la sécurité sociale. Toutefois, il n’a mis en état son appel qu’après le délai normal de 90 jours. Devant la division d’appel, la question était de savoir si une prorogation du délai de dépôt de l’appel devrait être accordée à M. Bissessar conformément au paragraphe 57(2) de la Loi sur le ministère de l’Emploi et du Développement social, LC 2005, c 34 (voir l’annexe pour les dispositions citées).

[3]  La division d’appel a conclu qu’une prorogation de délai ne devrait pas être accordée à M. Bissessar, parce qu’il n’avait pas démontré que son appel était suffisamment bien fondé.

[4]  M. Bissessar soutient que la décision de la division d’appel était déraisonnable, parce qu’elle n’a pas tenu compte des éléments de preuve importants concernant son état de santé. Plus précisément, la division d’appel a conclu que la division générale avait pleinement examiné tous les éléments de preuve dont elle disposait, et qu’elle était parvenue à une conclusion susceptible de se justifier. Toutefois, M. Bissessar soutient que la division générale n’avait pas mentionné un avis médical selon lequel il était inapte à quelque travail que ce soit avant la date de sa période minimale d’admissibilité. Il me demande d’annuler la décision de la division d’appel et d’ordonner qu’un tribunal différemment constitué réexamine sa demande de prorogation.

[5]  Je conviens avec M. Bissessar que le refus de la division d’appel de faire droit à sa demande de prorogation de délai était déraisonnable au vu des éléments de preuve. Le tribunal a omis de tenir compte d’un élément de preuve important. J’accueillerai donc la demande de contrôle judiciaire de M. Bissessar.

[6]  La seule question en litige est de savoir si le refus de la division d’appel d’accorder la prorogation de délai était déraisonnable.

II.  La division d’appel a-t-elle refusé la demande de prorogation de M. Bissessar sans motif raisonnable?

[7]  La division d’appel a appliqué le critère énoncé dans la décision Canada (Ministre du Développement des Ressources humaines) c Gattellaro, 2005 CF 883, qui comporte quatre conditions. La personne qui demande une prorogation doit satisfaire aux conditions suivantes :

  1. il y a intention persistante de poursuivre la demande ou l’appel;

  2. la cause est défendable;

  3. le retard a été raisonnablement expliqué;

  4. la prorogation du délai ne cause pas de préjudice à l’autre partie.

[8]  La division d’appel a conclu que M. Bissessar avait rempli toutes les conditions du critère, à l’exception du point 2 – la cause est défendable. Elle a conclu que la division générale avait raisonnablement conclu qu’il n’y avait pas suffisamment d’éléments de preuve quant à l’incapacité de M. Bissessar à la date de la période minimale d’admissibilité.

[9]  Le procureur général du Canada soutient que la conclusion tirée par la division d’appel était raisonnable du fait que M. Bissessar n’avait fait que réitérer les arguments qu’il avait présentés devant la division générale. En outre, bien que M. Bissessar fasse maintenant état d’un avis médical qui lui est favorable, il n’a pas attiré l’attention de la division d’appel sur cet avis.

[10]  Je ne suis pas d’accord avec les observations du procureur général.

[11]  Les éléments de preuve médicale dont la division générale était saisie comprenaient un avis médical du Dr Silverberg, daté du 24 juin 2009, seulement quelques mois avant la date de la période minimale d’admissibilité, indiquant que M. Bissessar était inapte à quelque travail que ce soit. Pourtant, la division générale a déclaré qu’elle ne disposait d’aucun rapport médical se rapprochant de la date de la période minimale d’admissibilité. À eux seuls, ces éléments de preuve démontrent que M. Bissessar avait à tout le moins une cause défendable à présenter devant la division d’appel, justifiant une prorogation de délai

[12]  En outre, je conclus que M. Bissessar a donné à la division d’appel un avis suffisant l’informant du fondement de sa demande d’autorisation. Dans sa demande, il a affirmé que : [traduction] « [L]es médecins indiquent clairement que j’étais inapte à effectuer quelque travail que ce soit ». Bien qu’il n’ait pas précisément mentionné l’avis du Dr Silverberg, je ne crois pas qu’il lui était nécessaire de le faire dans le cadre d’une demande d’autorisation.

[13]  Par conséquent, je conclus que le refus de la division d’appel d’accorder la demande de prorogation était déraisonnable dans les circonstances.

III.  Conclusion et décision

[14]  La division d’appel a conclu de manière déraisonnable que M. Bissessar n’avait pas satisfait à l’exigence voulant qu’il présente un cas défendable à l’appui de sa demande de prorogation de délai. J’accueillerai la demande de contrôle judiciaire de M. Bissessar, le tout avec dépens, et j’ordonne que sa demande soit réexaminée par un tribunal de la division d’appel différemment constitué.


JUGEMENT DANS LE DOSSIER T-686-17

LA COUR REND LE JUGEMENT SUIVANT :

  1. La demande de contrôle judiciaire est accueillie, le tout avec dépens.

  2. Le défendeur, le TRIBUNAL DE LA SÉCURITÉ SOCIALE DU CANADA, est par les présentes retiré en tant que partie à la demande et l’intitulé de la cause est modifié en conséquence.

« James W. O’Reilly »

Juge

Traduction certifiée conforme

Ce 7e jour d’août 2019

Lionbridge


Annexe

Loi sur le ministère de l’Emploi et du Développement social, LC 2005, c 34

Department of Employment and Social Development Act, SC 2005, c 34

Délai supplémentaire

Extension

57(2) La division d’appel peut proroger d’au plus un an le délai pour présenter la demande de permission d’en appeler.

57(2) The Appeal Division may allow further time within which an application for leave to appeal is to be made, but in no case may an application be made more than one year after the day on which the decision is communicated to the appellant.

 


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


DOSSIER :

T-686-17

 

INTITULÉ :

BRYAN BISSESSAR c LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA

 

LIEU DE L’AUDIENCE :

Toronto (Ontario)

 

DATE DE L’AUDIENCE :

Le 12 décembre 2017

 

JUGEMENT ET MOTIFS :

LE JUGE O’REILLY

 

DATE DES MOTIFS :

Le 7 mars 2018

 

COMPARUTIONS :

Lorne Gershuny

 

Pour le demandeur

 

Marcus Dimberger

 

POUR LE DÉFENDEUR

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Lorne Gershuny

Avocat

Toronto (Ontario)

 

Pour le demandeur

 

Sous-procureur général du Canada

Toronto (Ontario)

 

Pour le DÉFENDEUR

 

 

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