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Date : 20180202


Dossier : IMM-2824-17

Référence : 2018 CF 122

Ottawa (Ontario), le 2 février 2018

En présence de monsieur le juge Martineau

ENTRE :

FANTA KONÉ

demanderesse

et

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION

défendeur

JUGEMENT ET MOTIFS

[1]  La demanderesse recherche la révision judiciaire d’une décision de la Section d’appel des réfugiés [SAR] de la Commission de l’immigration et du statut du réfugié du Canada, datée du 31 mai 2017, laquelle confirme une décision de la Section de la protection des réfugiés [SPR].

[2]  En bref, la demande d’asile de la demanderesse a été rejetée par la SPR au motif que celle-ci n’a pas établi son identité. La décision de la SAR rejetant son appel est raisonnable et doit être maintenue en l’espèce.

Problèmes à prouver l’identité devant la SPR

[3]  La demanderesse serait citoyenne du Mali et originaire de la ville de Gao. Elle est arrivée au Canada le 15 février 2015, munie d’un faux passeport malien au nom d’Agaichatou Maïga. Elle a demandé l’asile le 31 juillet 2015 sous le nom de Fanta Koné, au motif qu’elle est persécutée par le groupe djihadiste Hamza Deen. Des djihadistes auraient vandalisé sa maison et enlevé et assassiné son conjoint car ils vivaient en couple sans être mariés – ce qui est contraire à la sharia. Au moment de présenter sa demande, la demanderesse a été détenue car elle était dans l’impossibilité de prouver son identité. Entretemps, une amie au Mali lui aurait fait parvenir des documents d’identité.

[4]  Devant la SPR, la demanderesse a soumis cinq documents :

  1. Carte nationale d’identité malienne émise le 17 décembre 2013 à Baroueli (pp 156-157 du dossier certifié);

  2. Extrait d’acte de naissance no 26 émis le 24 avril 2015 (p 158 du dossier certifié);

  3. Acte de naissance no 347 émis le 17 ou le 20 décembre 2013 à Bamako (p 159 du dossier certifié);

  4. Acte de naissance no 26 émis le 27 octobre 2014 à Bamako (p 160 du dossier certifié); et

  5. Certificat de nationalité malienne daté du 17 avril 2015 (p 161 du dossier certifié).

[5]  La SPR minutieusement a examiné les documents d’identité et a noté plusieurs problèmes :

  • Aucun passeport n’a été déposé;

  • Le seul document avec photo est une carte d’identité nationale qui comporte plusieurs irrégularités. D’abord, les empreintes digitales ne sont pas celles de la demanderesse. Celle-ci prétend lors de l’audition qu’il pourrait s’agir des empreintes de son conjoint qui auraient été prises au moment d’aller chercher la carte. La demanderesse ne se souvient pas des documents soumis pour obtenir cette carte. Elle a cependant affirmé avoir obtenu la carte car il y avait beaucoup de barrages policiers à l’époque et qu’elle avait besoin d’un document d’identité. La SPR trouve cependant incohérent que la carte ait été émise à Baroueli, une ville située à plus de quinze heures de route de Gao où demeurait la demanderesse, et où celle-ci n’avait aucune famille, et n’avait jamais résidé. De plus, l’adresse sur la carte ne concorde pas avec l’adresse de la demanderesse à l’époque. La SPR n’a ainsi accordé aucune force probante au document;

  • La demanderesse a affirmé que le document 26 aurait été émis au moment où elle a obtenu sa carte d’identité nationale en décembre 2013 puisque son acte de naissance original était déchiré et jugé en trop mauvais état. Or, le document 26 a été émis 10 mois plus tard, en octobre 2014, ce que la SPR juge incohérent;

  • Pour ce qui est de l’extrait de l’acte de naissance, bien qu’il lui ait été envoyé par une amie, la demanderesse affirme ne pas avoir été au courant de son existence. Cet extrait serait conforme à un original daté de 2014. La SPR trouve incohérent qu’un nouveau certificat de naissance ait été émis en 2014, alors que la demanderesse prétend détenir un autre certificat de naissance daté de 2013 (le document no 347). La demanderesse dit ne pas savoir pourquoi ni comment ces documents ont été obtenus. La SPR note que l’analphabétisme et l’absence d’éducation de la demanderesse ne sauraient justifier son absence de réponses à ces questions;

  • La SPR note également que le certificat de nationalité et l’extrait ont été émis au Mali en 2015 alors que la demanderesse était déjà au Canada. La SPR conclut que ces documents ont dû être obtenu frauduleusement et ne leur accorde aucune force probante; et

  • Le certificat de nationalité aurait été émis en 2015 sur la base de l’acte de naissance original daté de 1990, document qui aurait été jugé trop usé pour émettre la carte d’identité nationale en décembre 2013. La SPR trouve incongru qu’un document insuffisant pour obtenir une carte d’identité serait suffisant pour obtenir un certificat de nationalité.

[6]  Pour ces motifs, la SPR rejette la demande d’asile et juge qu’il n’est pas nécessaire d’examiner la demande au fond.

Appel devant la SAR

[7]  Devant la SAR, la demanderesse soumet essentiellement que son manque d’éducation justifie les réponses insuffisantes et invraisemblables fournies lors de l’audience devant la SPR. Elle dit avoir témoigné avec franchise, et rappelle à la SAR la présomption de Maldonado c Canada (Ministre de l'emploi et de l'immigration) (1979), [1980] 2 CF 302, 1 ACWS (2e) 167 (CAF) [Maldonado], selon laquelle ce qui est allégué dans le narratif est présumé vrai. Elle ne soumet aucune nouvelle preuve. L’appel est décidé sans audience.

[8]  S’appuyant sur Canada (Citoyenneté et Immigration) c Huruglica, 2016 CAF 93 [Huruglica], la SAR examine la décision de la SPR selon la norme de la décision correcte puisque ce n’est pas le témoignage de la demanderesse devant la SPR qui est en cause, mais plutôt le pourquoi de ses explications incohérentes. Après un examen approfondi de la preuve et de l’enregistrement de l’audience, la SAR confirme la décision de la SPR, estimant que la demanderesse n’avait pas établi son identité. La SAR conclut que le constat de la SPR face à la crédibilité du témoignage est correct. Le manque d’éducation et l’analphabétisme de la demanderesse ne constituent pas une explication suffisante pour justifier les nombreuses invraisemblances, contradictions et incohérences, ni pour justifier un témoignage flou et évasif. La présomption de Maldonado est renversée. La SAR note que la commissaire de la SPR a mené l’audience calmement et donné à la demanderesse le temps suffisant pour répondre. Malgré cela, celle-ci n’a pas su donner d’explications raisonnables au sujet des irrégularités majeures dans ses divers documents d’identité.

[9]  Sans passer en revue toutes les irrégularités ni toutes les explications offertes par la demanderesse à l’audience devant la SPR, la SAR appuie essentiellement sa conclusion sur les constats suivants :

  • La demanderesse n’a pas su expliquer comment ses documents d’identité ont été obtenus, et dit n’être au courant de rien. La SAR conclut que le fait d’être analphabète n’est pas une explication suffisante. Elle a été capable de se débrouiller dans sa vie quotidienne, d’obtenir un emploi de coiffeuse et de venir au Canada. Elle devrait minimalement être au courant de la procédure à suivre et de la façon dont ses documents d’identité ont été obtenus;
  • Deux documents ont été émis au Mali en 2015, alors que la demanderesse était déjà au Canada et n’avait fait aucune démarche pour les obtenir. Elle affirme à l’audition ne pas savoir pourquoi son amie les a demandés;
  • Le seul document avec photo, la carte d’identité nationale, contient des irrégularités importantes. L’absence d’explications de la demanderesse entache grandement sa crédibilité, et ne saurait être expliquée par son manque d’éducation :
  • o Les empreintes digitales sur le document ne sont pas celles de la demanderesse, et il n’est pas plausible qu’il s’agisse de celles de son amoureux. En effet, le cartable d’information du Mali explique que les empreintes sont prises au moment de la demande, alors que la demanderesse était présente. Cette dernière n’a pas d’explications à offrir. La SAR juge également invraisemblable que les autorités émettent des documents officiels dont le but est l’identification avec les empreintes de n’importe qui;

  • o La demanderesse est incapable d’expliquer la provenance des documents soumis pour obtenir cette carte. Elle a affirmé à l’audience que le document 26 avait été soumis, mais celui-ci a été émis en 2014, soit après l’obtention de la carte. La demanderesse a ensuite modifié son témoignage et a raconté qu’elle avait soumis un vieil acte de naissance abimé et qu’un nouveau avait dû être demandé. Le document 26 aurait alors été obtenu quelques jours plus tard par son amoureux, ce qui n’est pas crédible, puisque le document 26 a été émis le 27 octobre 2014, soit 10 mois après la demande de carte d’identité en décembre 2013. La SAR conclut que ces incohérences ne sauraient être expliquées par le manque d’éducation ou l’analphabétisme de la demanderesse, et sont plutôt signe d’un manque de crédibilité;

  • o La demanderesse aurait dit à un agent d’immigration en 2015 que ce document avait émis à Bamako, alors qu’il indiquait avoir été émis à Baroueli. Confrontée à cette erreur, sa seule explication était qu’elle était embrouillée par la fatigue. Elle a répété cette explication devant la SPR. La SAR considère que la demanderesse aurait dû se souvenir du lieu où un document aussi important avait été émis;

  • o L’adresse sur le document n’est pas celle fournie par la demanderesse dans son formulaire. Encore une fois, elle n’a pas d’explications;

  • o Comme la SPR, la SAR juge curieux que la carte d’identité nationale ait été émise à Baroueli alors que la demanderesse réside à Gao, à plus de 1 000 km de là. Elle explique s’être arrêtée à Baroueli en route pour Bamako pour fêter Noël, ce qui selon la SAR, manque de sérieux. La SAR considère également qu’il n’est plausible qu’elle ait fait toute la route sans documents d’identité, alors que la raison même d’obtention d’une carte d’identité nationale était d’avoir un document d’identité en cas de barrages routiers. La demanderesse n’avait pas d’explications à ce sujet; et

  • L’extrait de l’acte de naissance émis en 2015 fait référence à un « jugement supplétif ». La demanderesse semble ignorer de quoi il s’agit. La SAR note qu’un jugement supplétif est normalement rendu lorsqu’il n’y a pas d’actes de naissance. Pourtant, la demanderesse prétend qu’il y avait un original déchiré de 1990, ainsi que le document de décembre 2013 soumis. La SAR trouve donc incohérent qu’il y ait eu un jugement supplétif.

[10]  La SAR confirme la décision de la SPR et rejette l’appel.

La présente demande de contrôle judiciaire

[11]  La seule question en litige est de déterminer si la décision de la SAR est raisonnable (voir Huruglica au para 35).

[12]  La demanderesse avance trois motifs d’annulation. Premièrement, la SAR n’a pas tenu compte de son argument selon lequel son manque d’éducation explique pourquoi elle s’est fiée avec confiance à des tiers pour l’obtention de ses documents d’identité et n’est pas au courant des procédures suivies. La SAR s’est plutôt limitée à la question de l’analphabétisme. Deuxièmement, elle soumet que la SAR a adopté une démarche trop occidentale en concluant qu’il était illogique d’obtenir sa carte d’identité à Baroueli, alors qu’elle a donné des explications valides sur la question. Troisièmement, la SAR a omis de considérer un document pertinent, soit l’acte de naissance no 347 daté de décembre 2013.

[13]  Le défendeur rétorque que la décision est claire, détaillée et motivée. La SAR a étudié attentivement l’ensemble du dossier, examiné les motifs d’appel et écouté l’enregistrement de l’audience, pour en arriver à la même conclusion que la SPR. Il incombait à la demanderesse de soumettre suffisamment de preuve pour établir son identité, à défaut de quoi sa demande d’asile ne pouvait être considérée sur le fond (voir notamment l’article 106 et le paragraphe 100(4) de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, LC 2001, c 27 [LIPR]; l’article 11 des Règles de la Section de la protection des réfugiés, DORS/2012-256 [Règles]; voir aussi Najam c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), 2004 CF 425). La SAR s’est montrée sensible au fait que la demanderesse est analphabète et a une éducation limitée, mais cela ne peut justifier son ignorance totale de la façon dont les documents ont été émis et obtenus, les irrégularités flagrantes relevées dans les documents et le caractère changeant et évasif de son témoignage. La SAR pouvait donc tirer des inférences négatives de ces incohérences. Contrairement à ce qu’affirme la demanderesse, la décision de la SAR démontre d’ailleurs explicitement la considération du manque d’éducation (voir paras 11, 12, 17, et 24 de la décision). Enfin, le défendeur soumet que l’argument de la demanderesse quant à l’omission d’examiner l’acte de naissance no 347 est non fondé. À l’audience, la procureure du défendeur a rappelé d’entrée de jeu, s’appuyant sur Rahal c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2012 CF 319 aux paras 48, 50 et 53 [Rahal], que l’omission de traiter explicitement d’un document d’identité n’est pas en soi suffisante pour rendre une décision déraisonnable. Il convient plutôt d’examiner les motifs dans leur ensemble pour comprendre la conclusion de la SAR quant à l’identité (voir Barry c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2014 CF 8 aux paras 14 et 25). La question de l’identité est en effet au cœur de l’expertise de la SAR, ce qui appelle à une grande déférence de la part de cette Cour. En outre, la demanderesse n’avait pas invoqué ce document spécifiquement comme motif d’appel, et ne peut donc reprocher à la SAR de ne pas voir examiné cet élément en détail au stade du contrôle judiciaire. Ensuite, les paragraphes 15 et 23 de la décision montrent que le tribunal a effectivement tenu compte de ce document : la SAR a jugé problématique l’incapacité de la demanderesse d’expliquer la provenance de ses documents, incluant l’acte no 347. De plus, le paragraphe 23 montre que la SAR n’a pas attribué de valeur probante à ce document en raison des incohérences liées à l’inexpliqué jugement supplétif. En effet, elle a noté qu’il était incohérent qu’un jugement supplétif doive être émis en 2014 s’il existait déjà un autre acte de naissance, soit l’acte no 347 ou l’autre acte de 1990, ce qui constitue une considération explicite de ce document. Enfin, quoi qu’il en soit, l’acte de naissance no 347 ne serait pas suffisant en lui-même pour établir l’identité de la demanderesse vu qu’il ne contient aucun élément biométrique.

[14]  La décision de la SAR est raisonnable et doit être maintenue. Les arguments de rejet soumis par le défendeur sont déterminants.

[15]  L’article 11 des Règles stipule que « le demandeur d’asile transmet des documents acceptables qui permettent d’établir son identité ». Le demandeur a donc le lourd fardeau de fournir des documents adéquats (voir par ex Su c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2012 CF 743 au para 4). L’article 106 de la LIPR précise que si un demandeur d’asile qui n’a pas fourni de tels documents ne peut raisonnablement en justifier la raison et n’a pas pris les mesures voulues pour s’en procurer, la SPR pourra en tenir compte dans son analyse de la crédibilité. Pour ce faire, la SPR doit examiner et soupeser l’ensemble de la preuve, c’est-à-dire les documents d’identité soumis, le témoignage de la demanderesse, et le reste de la preuve documentaire (voir par ex Lin c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2012 CF 157 au para 55). Il incombe ensuite à la SAR de réexaminer ces conclusions en appel. Il s’agit d’un exercice au cœur de son expertise et auquel cette Cour doit grande déférence (voir Rahal au para 48).

[16]  En l’espèce, la SAR a effectué un examen détaillé du dossier de la demanderesse, des documents d’identité soumis, ainsi que de l’enregistrement de l’audition devant la SPR. Elle a rendu une décision détaillée, motivée, et intelligible permettant largement à la demanderesse de comprendre pourquoi sa demande a été rejetée. En effet, la SAR a pris la peine de reprendre de manière détaillée les nombreuses irrégularités, incohérences et contradictions entre les différents documents d’identité soumis. Elle était en droit de tirer ces inférences de la preuve et du témoignage, et ensuite déterminer si le manque d’éducation et l’analphabétisme de la demanderesse étaient suffisants pour les justifier.

[17]  Contrairement à ce que prétend la demanderesse, la décision atteste clairement d’une considération de son manque d’éducation, comme l’illustrent les références explicites aux paragraphes 11, 12, 17, 22 et 24 de la décision. On ne saurait conclure que la SAR s’est limitée à la question de l’analphabétisme. Elle a plutôt examiné l’analphabétisme et le manque d’éducation ensembles – comme deux notions allant de pair. Tout compte fait, elle a cependant conclu que cette explication était insuffisante pour justifier l’ignorance totale de la demanderesse quant à l’origine de ces documents d’identité et des procédures suivies pour les obtenir. Cette conclusion est raisonnable et se fonde sur la preuve au dossier. La SAR a en effet considéré minutieusement le témoignage de la demanderesse à l’audition devant la SPR, en notant ses absences d’explications et ses non-réponses aux questions.

[18]  La demanderesse soumet également que la SAR aurait adopté une approche trop occidentale en déterminant qu’il était invraisemblable d’avoir obtenu sa carte d’identité à Baroueli. Je suis d’accord avec la demanderesse que la SAR et la SPR devaient se montrer sensibles au contexte culturel malien. Toutefois, la SPR peut faire des constats d’invraisemblance minant la crédibilité de la demanderesse – du moment que ceux-ci sont fondés sur la preuve et exprimés en termes clairs et explicites (voir Lubana c Canada (Ministre de la citoyenneté et de l'immigration), 2003 CFPI 116 au para 9). La SAR était donc en droit d’examiner de tels constats et de les confirmer. En l’espèce, la SAR a expliqué en détails pourquoi elle trouvait invraisemblable que la demanderesse obtienne sa carte à Baroueli, compte tenu de l’importante distance par rapport à sa ville natale de Gao et compte tenu de la raison même de l’obtention de la carte, soit la présence de nombreux barrages policiers à travers le pays, sans compter son absence d’explications lorsque cette incohérence lui a été soumise. La conclusion de la SAR est donc raisonnable.

[19]  Enfin, la SAR a considéré le document « acte de naissance no 347 ». Certes, on ne peut reprocher à la SAR de ne pas avoir traité d’un argument qui ne lui a pas été présenté. Toutefois, elle se doit de rendre une décision fondée sur l’ensemble de la preuve présentée à la SPR (voir alinéa 110(3) de la LIPR). En l’espèce, la demanderesse ne soulève pas un argument nouveau, mais avance plutôt qu’un élément de preuve pertinent n’a pas été considéré. Quoi qu’il en soit, il reste que la SAR a attribué suffisamment de poids à ce document. En effet, il ressort de ses motifs qu’elle a examiné les différents actes de naissance, mais qu’elle a jugé qu’ils étaient problématiques à maints égards. Elle note, par exemple, au paragraphe 23 de sa décision qu’il est incohérent qu’un jugement supplétif ait été rendu alors que l’acte de naissance no 347 de 2013 existait – puisqu’un tel jugement est généralement rendu en l’absence d’un acte de naissance. Cette conclusion démontre non seulement que la SAR a considéré ce document, mais également que son existence contribue à la conclusion générale quant à l’incohérence des documents d’identité soumis. Ainsi, même si la SAR n’avait pas de réserves par rapport à l’acte no 347 en particulier, c’est en regardant l’ensemble des documents qu’elle a pu conclure aux incohérences dans la preuve. À cela s’ajoute le fait que la demanderesse n’avait aucune explication quant à ces incohérences, ni quant à la provenance d’aucun document, comme l’a constaté la SAR. Cela atteste encore une fois d’une considération de l’acte no 347. Enfin, le défendeur souligne avec raison que l’acte de naissance no 347 n’aurait pas été suffisant en lui-même pour prouver l’identité de la demanderesse, même si la SAR l’avait jugé authentique. En effet, le rapport d’analyse de l’Agence des services frontaliers, aux pages 248-249 du dossier certifié, recommandait qu’il ne soit pas accepté comme seule preuve d’identité, en l’absence de données biométriques.

[20]  Ainsi, force est de conclure que la demanderesse n’a pas soulevé de moyens de révision valides justifiant l’annulation de la décision de la SAR, laquelle est raisonnable dans son ensemble.

Conclusion

[21]  Pour ces motifs, la demande de contrôle judiciaire est rejetée. Aucune question d’importance générale n’a été soulevée et ne se soulève en l’espèce.


JUGEMENT au dossier IMM-2824-17

LA COUR STATUE que la demande de contrôle judiciaire soit rejetée. Aucune question n’est certifiée.

« Luc Martineau »

Juge


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


DOSSIER :

IMM-2824-17

 

INTITULÉ :

FANTA KONÉ c LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION

 

LIEU DE L’AUDIENCE :

Montréal (Québec)

 

DATE DE L’AUDIENCE :

LE 11 janvier 2018

 

JUGEMENT ET MOTIFS :

LE JUGE MARTINEAU

 

DATE DES MOTIFS :

LE 2 février 2018

 

COMPARUTIONS :

Me Jeanne LaRochelle

 

Pour la demanderesse

Me Yaël Levy

Pour le défendeur

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Handfield et associés, avocats

Montréal (Québec)

 

Pour la demanderesse

Procureur général du Canada

 

Pour le défendeur

 

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