Décisions de la Cour fédérale

Informations sur la décision

Contenu de la décision

Date : 20171205


Dossier : T-1977-13

Référence : 2017 CF 1099

[TRADUCTION FRANÇAISE]

Ottawa (Ontario), le 5 décembre 2017

En présence de monsieur le juge Phelan

ENTRE :

TASEKO MINES LIMITED

demanderesse

et

LE MINISTRE DE L’ENVIRONNEMENT ET LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA ET LE GOUVERNEMENT NATIONAL TSILHQOT’IN ET JOEY ALPHONSE, en son nom et au nom de tous les autres membres de la nation Tsilhqot’in

défendeurs

et

L’ASSOCIATION MINIÈRE DU CANADA, LA MINING ASSOCIATION OF BRITISH COLUMBIA, LA MINING SUPPLIERS ASSOCIATION OF BRITISH COLUMBIA, LA ASSOCIATION FOR MINERAL EXPLORATION, BRITISH COLUMBIA, et MINES ALERTE CANADA

intervenants

JUGEMENT ET MOTIFS

I.  INTRODUCTION

[1]  Il s’agit d’une demande de contrôle judiciaire d’un rapport de la Commission (respectivement Commission et rapport) concernant la mine d’or et de cuivre New Prosperity qui a été créée conformément à la Loi canadienne sur l’évaluation environnementale, 2012, LC 2012, c 19, article 52 (la LCEE 2012). En l’espèce, le contrôle judiciaire est axé sur les conclusions du rapport concernant les fuites d’eau et l’incidence sur la qualité de l’eau dans le lac Fish (Teztan Biny) et la région environnante.

[2]  Le dossier connexe (T-744-14) porte sur une demande de contrôle judiciaire des décisions subséquentes par le ministre de l’Environnement (le ministre) et le gouverneur en conseil (le GC). Le contrôle judiciaire de ces décisions fait l’objet de la décision Taseko Mines Limited c Canada (Environnement), 2017 CF 1100.

[3]  Le différend principal porte sur la conclusion de la Commission selon laquelle les fuites d’eau toxiques seront plus importantes que ce qu’avait estimé Taseko Mines Limited (Taseko). Cette conclusion a fini par mener à des décisions de ne pas approuver la mine proposée.

[4]  Taseko cherche à obtenir les réparations suivantes à l’égard de la Commission et de son rapport :

[traduction] [92]  Taseko sollicite une déclaration selon laquelle les conclusions suivantes de la Commission ne sont pas valides et sont annulées :

i)  La décision de la Commission selon laquelle Taseko a sous-estimé le volume des fuites des eaux interstitielles à la sortie du parc à résidus miniers (PRM)

ii)  La décision de la Commission d’accepter l’estimation supérieure de Ressources naturelles Canada comme le taux de fuite attendu du PRM;

iii)  La conclusion de la Commission selon laquelle la concentration des variables de qualité de l’eau dans les lacs Fish et Wasp constituerait probablement un effet environnemental négatif important

(les conclusions contestées).

[93]  Taseko sollicite également une déclaration selon laquelle la Commission n’a pas observé les principes d’équité procédurale dans sa tenue de l’audience publique concernant l’évaluation environnementale du projet.

[94]  Si les déclarations sollicitées par Taseko sont accordées en tout ou en partie, il en découle que l’affaire doit être renvoyée à la Commission afin qu’elle réexamine les conclusions contestées et remédie aux manquements du processus suivi par la Commission (le cas échéant), puis rende de nouvelles décisions conformément aux directives données par la Cour.

[Renvois omis.]

[5]  Pour établir le contexte, il convient de citer les dispositions législatives pertinentes ci-après.

Loi canadienne sur l’évaluation environnementale (2012), LC 2012, c 19, article 52.

43 (1) La commission, conformément à son mandat :

43 (1) A review panel must, in accordance with its terms of reference,

a) procède à l’évaluation environnementale du projet désigné;

(a) conduct an environmental assessment of the designated project;

b) veille à ce que le public ait accès aux renseignements qu’elle utilise dans le cadre de cette évaluation;

(b) ensure that the information that it uses when conducting the environmental assessment is made available to the public;

c) tient des audiences de façon à donner aux parties intéressées la possibilité de participer à l’évaluation;

(c) hold hearings in a manner that offers any interested party an opportunity to participate in the environmental assessment;

d) établit un rapport assorti de sa justification et de ses conclusions et recommandations relativement à l’évaluation, notamment aux mesures d’atténuation et au programme de suivi, et énonçant, sous la forme d’un résumé, les observations reçues du public, notamment des parties intéressées;

(d) prepare a report with respect to the environmental assessment that sets out

(i) the review panel’s rationale, conclusions and recommendations, including any mitigation measures and follow-up program, and

(ii) a summary of any comments received from the public, including interested parties;

e) présente son rapport d’évaluation environnementale au ministre;

(e) submit the report with respect to the environmental assessment to the Minister; and

f) sur demande de celui-ci, précise l’une ou l’autre des conclusions et recommandations dont son rapport est assorti.

(f) on the Minister’s request, clarify any of the conclusions and recommendations set out in its report with respect to the environmental assessment.

[…]

126 (1) Malgré le paragraphe 38(6) et sous réserve des paragraphes (2) à (6), tout examen par une commission d’un projet commencé sous le régime de l’ancienne loi avant la date d’entrée en vigueur de la présente loi se poursuit sous le régime de la présente loi comme si le ministre avait renvoyé, au titre de l’article 38, l’évaluation environnementale du projet pour examen par une commission; le projet est réputé être un projet désigné pour l’application de la présente loi et de la partie 3 de la Loi sur l’emploi, la croissance et la prospérité durable et :

126 (1) Despite subsection 38(6) and subject to subsections (2) to (6), any assessment by a review panel, in respect of a project, commenced under the process established under the former Act before the day on which this Act comes into force is continued under the process established under this Act as if the environmental assessment had been referred by the Minister to a review panel under section 38. The project is considered to be a designated project for the purposes of this Act and Part 3 of the Jobs, Growth and Long-term Prosperity Act, and

a) si, avant cette date d’entrée en vigueur, une commission avait été constituée aux termes de l’article 33 de l’ancienne loi relativement au projet, elle est réputée avoir été constituée — et ses membres sont réputés avoir été nommés — aux termes du paragraphe 42(1) de la présente loi;

(a) if, before that day, a review panel was established under section 33 of the former Act, in respect of the project, that review panel is considered to have been established — and its members are considered to have been appointed — under subsection 42(1) of this Act;

b) si, avant cette date, un accord avait été conclu aux termes du paragraphe 40(2) de l’ancienne loi relativement au projet, il est réputé avoir été conclu en vertu de l’article 40 de la présente loi;

(b) if, before that day, an agreement or arrangement was entered into under subsection 40(2) of the former Act, in respect of the project, that agreement or arrangement is considered to have been entered into under section 40 of this Act; and

c) si, avant cette date, une commission avait été constituée en vertu d’un accord conclu aux termes du paragraphe 40(2) de l’ancienne loi ou du document visé au paragraphe 40(2.1) de l’ancienne loi relativement au projet, elle est réputée avoir été constituée — et ses membres sont réputés avoir été nommés — en vertu d’un accord conclu aux termes de l’article 40 de la présente loi ou du document visé au paragraphe 41(2) de la présente loi.

(c) if, before that day, a review panel was established by an agreement or arrangement entered into under subsection 40(2) of the former Act or by document referred to in subsection 40(2.1) of the former Act, in respect of the project, it is considered to have been established by — and its members are considered to have been appointed under — an agreement or arrangement entered into under section 40 of this Act or by document referred to in subsection 41(2) of this Act.

II.  EXPOSÉ DES FAITS

[6]  La mine d’or et de cuivre New Prosperity (le projet) est une mine proposée d’or et de cuivre à ciel ouvert en Colombie-Britannique, à 125 kilomètres au sud-ouest de Williams Lake (dans les territoires traditionnels du peuple Tsilhqot’in). Le projet de 1,5 M$ est censé créer un certain nombre d’emplois et fournir (prétendument) une contribution de 340 M$ au produit intérieur brut de la Colombie-Britannique.

[7]  Le projet est le successeur d’une autre mine proposée, Prosperity, qui avait été rejetée par le gouverneur en conseil en 2010 par suite d’une évaluation environnementale fédérale. La conception originale de la mine aurait nécessité le drainage du lac Teztan Biny.

[8]  Dans ce deuxième projet, le lac Teztan Biny n’aurait pas été asséché parce que la proposition reloge le parc à résidus miniers (PRM) et introduit un plan de recyclage pour la gestion de l’eau du lac.

[9]  Le 7 novembre 2011, le ministre a déclaré que le projet ferait l’objet d’une évaluation environnementale fédérale conformément à la Loi canadienne sur l’évaluation environnementale, LC 1992, c 37 (LCEE) (continuée par la suite conformément aux dispositions transitoires de la LCEE 2012)

[10]  Le 3 août 2012, la Commission a reçu un mandat modifié conforme à la nouvelle LCEE 2012. Le mandat modifié précisait que la Commission devait tenir compte d’un certain nombre de facteurs dans son évaluation des effets environnementaux du projet proposé :

a.  les effets environnementaux du projet, y compris les effets environnementaux des défauts de fonctionnement ou des accidents qui peuvent survenir en rapport avec le projet et tout effet environnemental cumulatif qui peut découler du projet conjointement avec d’autres projets ou activités qui ont été ou qui seront mis en œuvre;

b.  l’importance des effets environnementaux susmentionnés au paragraphe précédent;

c.  les commentaires du public et des groupes autochtones qui sont reçus pendant l’examen;

d.  des mesures réalisables d’un point de vue technique et économique et qui atténueraient tout effet environnemental négatif important du projet;

e.  la nécessité de mettre en œuvre le projet et les solutions de rechange au projet;

f.  l’objet du projet;

g.  les autres moyens de réaliser le projet qui sont réalisables d’un point de vue technique et économique, et les effets sur l’environnement de ces autres moyens;

h.  la nécessité de mettre sur pied un programme de suivi concernant le projet et les exigences de celui-ci;

i.  la capacité des ressources renouvelables qui sont susceptibles d’être fortement touchées par le projet de répondre aux besoins présents et futurs.

[11]  La Commission a publié des lignes directrices pour l’étude d’impact environnemental (EIE) le 16 mars 2012.

[12]  Taseko a présenté une EIE le 27 septembre 2012, qui était censé se pencher sur les lacunes que contenait la proposition initiale du projet Prosperity.

[13]  La Commission a ensuite engagé des discussions concernant les valeurs techniques et la pertinence de l’EIE avec [traduction] « les ministères fédéraux, le ministère de l’Énergie et des Mines de la C.-B. (‘‘MEM C.-B.’’), les groupes autochtones, y compris le gouvernement national Tsilhqot’in (‘‘GNT’’), et Taseko ».

[14]  L’EIE de Taseko décrivait les caractéristiques du parc à résidus miniers proposé et prédisait des fuites en utilisant deux modèles informatiques : un modèle en trois dimensions (3D) représentant le PRM sur un plan horizontal, et un modèle en deux dimensions représentant le PRM sur un plan vertical.

[15]  Ressources naturelles Canada (RNCan) a soulevé des préoccupations importantes concernant l’EIE, y compris [traduction] « des lacunes dans les deux modèles de Taseko, les données sur lesquelles elle s’appuyait, la proposition de Taseko de s’appuyer sur l’ajout des estimations des deux modèles, et les mesures d’atténuation proposées par Taseko ».

[16]  Par suite de ces préoccupations, RNCan a recommandé que la Commission demande à Taseko de fournir un modèle plus exhaustif de l’écoulement de l’eau souterraine numérique en 3D, qui comblerait les lacunes dans les modèles présentés dans l’EIE.

[17]  En outre, d’autres participants ont soulevé diverses autres préoccupations concernant les [traduction] « mesures d’atténuation proposées, le manque de données hydrogéologiques et l’incertitude concernant l’étendue des conductivités hydrauliques des tills, et la sous-estimation importante des fuites dans les estimations effectuées par Taseko ».

[18]  Le 20 février 2013, la Commission a publié ses règles de procédure concernant les audiences publiques, qui énonçaient les exigences pour la tenue des audiences publiques et des audiences portant sur un sujet particulier.

[19]  Dans une lettre datée du 24 mai 2013, Taseko a demandé de reporter le traitement des lacunes. Elle a signalé que les différends concernant les problèmes techniques pouvaient être traités après que le projet eut été approuvé : [traduction] « toute différence d’interprétation des données techniques qui existe entre RNCan et Taseko peut être réglée par un programme axé précisément sur le pompage d’essai, que Taseko va entreprendre pour raffiner le système d’évacuation de l’eau des puits avant la mise sur pied ».

[20]  Par conséquent, Taseko a refusé d’élaborer le modèle de l’écoulement de l’eau souterraine numérique en 3D demandé par la Commission.

[21]  Le 14 juin 2013, RNCan a signalé qu’elle était [traduction] « en train d’élaborer un modèle numérique de l’écoulement de l’eau souterraine afin d’évaluer les fuites à partir du parc à résidus miniers, semblable à celui demandé par la Commission dans le RRS 12/14(A-a) » et a proposé de mettre les conclusions de cette étude à la disposition de la Commission.

[22]  La Commission a accepté cette offre dans une lettre datée du 21 juin 2013. À ce moment-là, la Commission a également signalé que ces renseignements seraient mis à la disposition du public (en ligne) au moyen du registre du projet.

[23]  Au 20 juin 2013, le Comité avait conclu que l’évaluation environnementale pouvait être soumise à des audiences publiques. Ces audiences ont commencé le 22 juillet 2013 et se sont terminées le 23 août 2013, lorsque les derniers arguments oraux ont eu lieu. Les audiences techniques portant sur un sujet particulier ont eu lieu entre le 25 juillet 2013 et le 1er août 2013.

[24]  Le 4 juillet 2013, RNCan a présenté son modèle numérique en 3D à la Commission. Le 19 juillet 2013, RNCan a présenté des arguments écrits à la Commission. Dans ses arguments de juillet 2013, RNCan déclare que [traduction] « [l]es fuites du PRM étaient estimées à 8 650 m3/j (100 L/s), ce qui est plus d’un ordre de grandeur supérieur à la prévision du modèle en 3D du promoteur du projet [de 9 L/s] ».

[25]  Taseko conteste l’exactitude de cette caractérisation de l’estimation des fuites.

[26]  Le 21 août 2013, RNCan a présenté un document technique qui donnait [traduction] « davantage de clarifications concernant les approches de modèles par Taseko et RNCan ».

[27]  La Commission a publié son rapport le 31 octobre 2013. C’est le document technique de RNCan sur les fuites et le fait que la Commission s’appuie sur ces présentations en concluant que les fuites d’eau toxiques des PRM seraient plus élevées que celles estimées par Taseko qui sont au cœur du présent contrôle judiciaire.

[28]  Outre la demanderesse, Taseko, et le défendeur, le procureur général du Canada (PG), la Cour a reçu les observations en tant que défendeurs du gouvernement national Tsilhqot’in (GNT) et de Joey Alphonse pour son propre compte et pour le compte de tous les membres de la Nation Tsilhqot’in. L’Association minière du Canada et Mines Alerte Canada ont comparu également, mais à titre d’intervenants.

[29]  Le rapport de la Commission est long; toutefois, les conclusions contestées concernant les fuites se trouvent dans une partie assez restreinte du rapport. La majorité des « conclusions » et déclarations contestées se trouvent dans un paragraphe du rapport intitulé « 5.3.1.2. Points de vue des participants ». Dans ce paragraphe, la Commission a résumé les conclusions et les recommandations de RNCan, aussi bien que les conclusions de l’expert indépendant, M. Leslie Smith.

[30]  Pour mettre l’affaire en contexte, le tableau 5 du rapport montre une [traduction] « [c]omparaison des estimations des fuites tirées du document technique de RNCan à la Commission en date du 21 août 2013 ». Étant donné que ce tableau fait l’objet d’un nombre important de discussions, il est reproduit ici dans sa totalité :

[EN BLANC]

Estimations de Taseko (s’appuyant sur deux modèles différents)

Scénario de référence de Ressources naturelles Canada, s’appuyant sur son modèle en 3D

Fuite par le fond du parc à résidus miniers après la fermeture

9 L/s (760 m3/j)

D’après le modèle en 3D

100 L/s (8 650 m3/j)

Fuite du talus principal (vers le lac Fish)

28 L/s (2 420 m3/j)

D’après le modèle en 2D

58 L/s (5 087 m3/j)

Fuites des talus sud et ouest

27 L/s (2 333 m3/j)

D’après le modèle en 2D

29 L/s (2 552 m3/j)

Fuites du bassin profond (supérieur à 200 mbgs)

0 L/s

(Ressources naturelles Canada prétend que le modèle en 2D de Taseko écarte la possibilité de cette composante du flux)

20 L/s (1 699 m3/j)

[31]  À la suite de son résumé des conclusions et des recommandations de RNCan, la Commission a déclaré ce qui suit :

[traduction] Comme il est indiqué dans le tableau ci-dessus, les fuites d’eau interstitielle du bassin du parc à résidus miniers étaient de 100 L/s (8 650 m3/j) selon les estimations de Ressources naturelles Canada, ce qui était plus d’un ordre de grandeur supérieur à ce qu’il a considéré comme la prévision de Taseko de 9 L/s. Le modèle de Ressources naturelles Canada indiquait qu’il était prévu que 20 L/s (1 699 m3/j) supplémentaires de fuites s’écoulent vers la zone des eaux souterraines profondes en dessous des coulées de basalte qui reposent sous le parc à résidus miniers. Ressources naturelles Canada a fait valoir que ce dernier flux n’était pas rendu dans le modèle en 2D de Taseko parce qu’une limite imperméable était présumée être à la base des coulées de basalte.

[32]  Ce paragraphe du rapport s’est poursuivi avec le résumé des observations de M. Smith, qui déclare que le cadre utilisé par Taseko était élaboré selon les pratiques reconnues; toutefois, [traduction] « le modèle de Ressources naturelles Canada a une flexibilité supérieure si le parc à résidus miniers était explicitement inclus dans le tableau du modèle ».

[33]  M. Smith a expliqué que les différences dans les estimations des fuites entre Taseko et RNCan ont probablement découlé des différences des conducteurs hydrauliques utilisés (c’est-à-dire les résidus, le till et les roches peu profondes), aussi bien que les différences entre les couches de till.

[34]  En conclusion, M. Smith a estimé que les fuites du PRM se situaient entre 20 L/s et 100 L/s, et selon lui [traduction] « la valeur serait probablement vers l’échelon supérieur de cette fourchette ».

[35]  Dans le paragraphe intitulé « 5.3.1.3 Conclusions et recommandations de la Commission », la Commission a désigné trois voies potentielles d’écoulement du PRM, et a conclu que les fuites des eaux interstitielles des résidus du PRM étaient potentiellement la source la plus importante des chargements de contaminants qui auraient une incidence sur la qualité de l’eau dans la région.

[36]  La Commission a également désigné le « basalte fracturé intercalé avec le till glaciaire au fond de la vallée » comme une voie d’écoulement très importante.

[37]  De plus, la Commission a conclu qu’il y avait peu de données : il y avait un « manque d’études géotechniques détaillées nécessaires pour caractériser de manière plus fiable la base du parc de résidus miniers, notamment l’épaisseur du till, la variabilité dans les unités de morts-terrains, l’existence probable de voies d’écoulement préférentielles dans les unités lithostratigraphiques supérieures fracturées, ainsi que la nature et l’étendue des suintements et des sources au pied de la crête ouest du parc à résidus miniers. »

[38]  La Commission a ensuite résumé les estimations de Taseko de la migration du soluté en l’absence d’atténuateurs, aussi bien que ses prévisions de fuites irrécupérables après l’atténuation. Il a conclu que malgré l’hétérogénéité importante du terrain de couverture et des roches peu profondes, Taseko avait représenté tous les dépôts de couverture [traduction] « comme une seule unité et a attribué une valeur globale de conductivité hydraulique ». En outre, Taseko n’a pas rendu compte de la variation spatiale de la taille des particules des résidus.

[39]  Il est particulièrement pertinent de signaler que la Commission a accepté l’estimation supérieure présentée par RNCan et a conclu que Taseko avait sous-estimé le taux d’écoulement du PRM. La Commission a présenté les conclusions ci-dessous.

[traduction] La Commission a décidé que Taseko a sous-estimé le volume des fuites des résidus dans les eaux interstitielles à la sortie du parc à résidus miniers et le taux auquel le panache d’eau atteindrait les différents lacs et ruisseaux en bas de la pente du parc à résidus miniers, même avec les atténuations proposées.

La Commission accepte l’estimation supérieure de Ressources naturelles Canada comme étant le taux de fuite attendu du parc à résidus miniers (voir le tableau 5 ci-dessus).

La Commission conclut également qu’il y a des éléments de preuve solides que les fuites du parc à résidus miniers seraient sensiblement plus élevées que ne l’avait estimé Taseko, entraînant un chargement potentiellement plus élevé de contaminants dans l’environnement récepteur.

[40]  La Commission a poursuivi avec un certain nombre de recommandations concernant la nécessité d’accroître la surveillance, d’effectuer plus d’essais et de recueillir davantage de données, au cas où le projet se poursuivrait.

III.  QUESTIONS EN LITIGE

[41]  Chacune des parties a formulé ses questions un peu différemment, mais, à la fin, les questions que la Cour considère comme devant être tranchées sont les suivantes :

  1. La Commission a-t-elle fait défaut d’observer les principes d’équité procédurale en acceptant le document technique, et en s’appuyant sur celui-ci sans donner à Taseko une possibilité équitable d’y répondre?

  2. La décision de la Commission selon laquelle Taseko a sous-estimé le volume de fuites des résidus d’eau interstitielle à la sortie du PRM était-elle déraisonnable?

  3. La décision de la Commission d’accepter l’estimation supérieure de RNCan comme le taux de fuite attendu du PRM était-elle déraisonnable?

  4. La conclusion de la Commission selon laquelle la concentration des variables de la qualité de l’eau dans le lac Fish (Teztan Biny) et le lac Wasp constitueraient probablement un effet environnemental négatif important était-elle déraisonnable?

IV.  NORME DE CONTRÔLE

[42]  L’équité procédurale est susceptible de révision selon la norme de la décision correcte : Canada (Citoyenneté et Immigration) c Khosa, 2009 CSC 12, au paragraphe 43, [2009] 1 RCS 339 [Khosa].

[43]  Les conclusions de la Commission concernant les fuites et la qualité de l’eau sont susceptibles de révision selon la norme de la décision raisonnable. Dans une décision concernant l’ancienne LCEE, Greenpeace Canada c Canada (Procureur général), 2014 CF 1124, au paragraphe 37, 468 FTR 299, conf. par 2016 CAF 114, la Cour d’appel fédérale (CAF) a affirmé ce qui suit : [traduction] « les questions soulevées par les demandeurs dans lesquelles ils contestent l’exercice d’un pouvoir discrétionnaire ou l’évaluation d’une preuve doivent faire l’objet d’un contrôle selon la norme de la décision raisonnable ».

[44]  Dans l’arrêt Dunsmuir c Nouveau-Brunswick, 2008CSC 9, au paragraphe 47, [2008] 1 RCS 190, la CSC a signalé qu’une décision raisonnable est une décision intelligible, transparente et justifiable, qui appartient « aux issues possibles acceptables pouvant se justifier au regard des faits et du droit ». La norme de la décision raisonnable commande la déférence, et « si le processus et l’issue en cause cadrent bien avec les principes de justification, de transparence et d’intelligibilité, la cour de révision ne peut y substituer l’issue qui serait à son avis préférable » (Khosa, au paragraphe 59).

V.  DISCUSSION

A.  Première question : La Commission a-t-elle fait défaut d’observer les principes d’équité procédurale en acceptant le document technique et en s’appuyant sur celui-ci?

[45]  Les arguments de Taseko sont les suivants :

  • l’acceptation du document technique de RNCan était tardive, ce qui a privé les experts de Taseko de la possibilité d’interroger l’auteur ou de présenter des observations techniques;

  • Le document technique contenait des erreurs, en particulier concernant les fuites, et ces erreurs ont été incluses dans le rapport;

  • Le document technique est allé au-delà du résumé du point de vue de RNCan et a introduit de nouveaux éléments de preuve qui n’étaient pas envisagés par les règles de procédure concernant les audiences publiques;

  • Taseko avait droit à un degré d’équité procédurale conforme aux facteurs énoncés dans l’arrêt Baker c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), [1999] 2 RCS 817, aux paragraphes 22 à 27, 174 DLR (4th) 193 [Baker].

  • Taseko affirme qu’étant donné la nature de la décision, la Commission a essentiellement effectué un travail judiciaire où les intérêts de l’équité procédurale sont élevés, étant donné surtout que le rapport faisait partie du processus de prise de décision du ministre et du gouverneur en conseil aux termes de l’article 52 de la LCEE 2012; et

  • l’acceptation du document technique a violé le devoir d’équité dont il fallait faire preuve en raison de l’introduction de nouveaux éléments de preuve favorables à une partie et auxquels l’autre partie n’a pas eu la possibilité de répondre davantage. (L’arrêt CEP Union of Canada v Power Engineers et al, 2001 BCCA 743, 209 DLR (4th) 208 [CEP Union] (parfois publié sous CEP, Local 76 v British Columbia (Power Engineers &t Boiler &t Pressure Vessel Safety Appeal Board)), sur lequel la Cour d’appel de Colombie britannique [BCCA] s’est appuyée, a conclu que le simple fait de reprendre des éléments de preuve précédemment soumis peut constituer une violation de ce principe).

[46]  Pour les motifs ci-dessous, Taseko avait droit à un degré élevé d’équité procédurale lors du processus du contrôle, et on le lui a effectivement accordé.

1)  Degré élevé d’équité procédurale auquel Taseko avait droit

[47]  Malgré les arguments des défendeurs qu’on ne promet pas la perfection procédurale à une partie dans un processus de prise de décision, il semble qu’en l’espèce les parties conviennent que Taseko avait droit à un degré élevé d’équité procédurale. Le principal désaccord entre les parties porte sur la question de savoir si le degré d’équité procédurale requis a effectivement été satisfait.

[48]  Un examen des facteurs énoncés dans l’arrêt Baker indique également que Taseko avait droit en effet à un degré élevé d’équité procédurale durant le processus de la Commission :

  • a) Nature de la décision : le processus de la Commission visait à tirer des conclusions de fait, et était conçu de façon à ce que toutes les parties puissent avancer leurs éléments de preuve et vérifier les éléments de preuve produits d’une manière quasi judiciaire (y compris, par exemple, le contre-interrogatoire des experts). Tandis que les règles de procédure concernant l’audience publique soulignent que la Commission ne serait pas [traduction] « lié par les règles strictes de procédure et de preuve applicables aux procédures judiciaires », cela ne diminue pas en soi le degré d’équité procédurale.

  • b) Nature du régime législatif : il n’y a aucun mécanisme d’appel officiel pour contester le rapport (toutefois, le contrôle judiciaire demeure possible).

  • c) Importance de la décision : Bien que ce ne soit pas la décision finale dans le processus (le ministre et le gouverneur en conseil ont rendu des décisions subséquentes), il est indéniable qu’elle est essentielle pour fournir les faits et les renseignements que le ministre et le gouverneur en conseil exigent pour rendre leurs décisions. (En effet, en l’espèce, les décisions du ministre et du gouverneur en conseil étaient conformes aux conclusions du rapport).

  • d) Attentes légitimes : les règles de procédure concernant l’audience publique énonçaient clairement, d’une manière relativement détaillée, comment le processus de la Commission procèderait. Les règles de procédure concernant l’audience publique indiquent précisément que le processus doit être [traduction] « équitable et organisé ». Toutefois, la Commission avait le pouvoir de s’éloigner parfois de ces règles de procédure et l’avait effectivement fait à quelques reprises.

  • e) Choix procéduraux faits par le décideur : comme il a été indiqué ci-dessus, la Commission avait le pouvoir de s’éloigner de ses propres règles de procédure (ce qu’elle a fait). Parfois, c’était au profit de Taseko (c’est-à-dire accorder à Taseko [traduction] « quelques jours de plus » pour répondre aux observations tardives) et parfois, ce ne l’était pas. Il faut faire preuve de déférence à l’égard du choix de processus du décideur (Baker, au paragraphe 27).

[49]  L’arrêt Canada (Procureur général) c Mavi, 2011 CSC 30, [2011] 2 RCS 504 [Mavi], cité par le ministre (PG), n’est pas particulièrement déterminant. L’arrêt Mavi indique qu’il faut mettre en balance le coût d’un processus « équitable » et l’intérêt du public pour que l’État agisse équitablement (et qu’il soit perçu ainsi). En l’espèce, avec des intérêts publics importants de part et d’autre (des intérêts économiques et environnementaux, par exemple), la balance pencherait fortement en faveur de la garantie de l’équité. En outre, ce processus était probablement assez coûteux, et les défendeurs n’ont fourni aucune preuve que des mesures supplémentaires d’équité procédurale auraient été hors de prix.

2)  Principe d’audi alteram partem

[50]  Dans la décision Assoc. Canadienne de télévision par câble c American College Sports Collective of Canada, Inc, [1991] 3 CF 626, à la page 639, 81 DLR (4th) 376 (CA), le juge MacGuigan de la Cour d’appel fédérale a ainsi défini le principe d’audi alteram partem :

[traduction] La common law reconnaît deux principes dans sa conception de la justice naturelle; ils sont habituellement exprimés dans cette maxime latine : audi alteram partem (entend l’autre partie), laquelle signifie que les parties doivent être informées du dossier à leur encontre et se voir offrir la possibilité d’y répondre.

[Non souligné dans l’original.]

[51]  Bien que le ministre ou le procureur général du Canada cite l’arrêt Charkaoui c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2007 CSC 9, au paragraphe 57, [2007] 1 RCS 350 [Charkaoui] pour la proposition selon laquelle « le droit d’une partie de connaître la preuve qui pèse contre elle n’est pas absolu », je ne trouve pas cette décision particulièrement persuasive dans ce contexte.

[52]  L’arrêt Charkaoui a été tranché dans le contexte de préoccupations liées à la sécurité nationale; en effet, peu de temps après que la Cour suprême du Canada (CSC) eut fait la déclaration citée par le ministre (PG), la juge en chef MacLachlin a déclaré que « la Cour a reconnu à de nombreuses reprises que des considérations relatives à la sécurité nationale peuvent limiter l’étendue de la divulgation de renseignements à l’intéressé » (au paragraphe 58). La présente cause ne présente aucune circonstance semblable qui justifierait de contrevenir au principe d’audi alteram partem.

[53]  Taseko prétend que la présentation du document technique enfreint ce principe, et son argument s’appuie sur deux prétentions : 1) que le document technique était une nouvelle preuve favorisant la position de RNCan; et 2) que Taseko n’avait pas eu une possibilité adéquate de répondre à cette preuve.

[54]  Les deux postulats de Taseko sont erronés. Le document technique ne contenait pas de nouveaux renseignements; plutôt, ce document résumait les renseignements qui avaient déjà été présentés à la Commission et à Taseko dans les observations orales et écrites de RNCan. Par conséquent, Taseko connaissait déjà la preuve à réfuter avant la présentation du document technique, et la preuve à réfuter n’a pas changé à la suite de la présentation du document technique.

[55]  L’argument de Taseko selon lequel il s’agissait de « nouveaux renseignements » est fondé sur la prétention que M. Desbarats, lors de son contre-interrogatoire, avait abandonné la « position de l’ordre de grandeur ». Toutefois, la comparaison de « l’ordre de grandeur » n’était utilisée qu’en faisant référence à la différence entre les deux modèles en 3D, et la reconnaissance du « facteur de deux » devant la Commission a été faite pour renvoyer au modèle en 2D de Taseko.

[56]  En outre, cette affirmation de M. Desbarats était précédée de commentaires concernant les déficiences du modèle en 2D et la déclaration qu’il était [traduction] « difficile de comparer les deux ». Comme l’affirme le ministre (PG), [traduction] « l’expert de RNCan a simplement reconnu le calcul que si l’on devait inclure les résultats en 2D dans la comparaison – ce qu’il n’avait jamais accepté – alors, Taseko aurait encore sous-estimé les fuites par un facteur de deux (2) ».

[57]  Par conséquent, le document technique ne contenait pas de nouveaux renseignements, et ne constituait pas une prise de distance par rapport à la position de RNCan déclarée précédemment.

[58]  De plus, l’arrêt CEP Union (sur laquelle Taseko s’appuie) se distingue de l’espèce. Dans l’arrêt CEP Union, la BCCA a conclu que l’acceptation des observations écrites qui ne faisait que réitérer les éléments de preuve déjà fournis dans les observations orales pourrait enfreindre le principe d’audi alteram partem. Toutefois, dans cette cause, seule une des parties avait eu la possibilité de présenter des observations par écrit, et la partie adverse n’avait pas reçu de copie de ces observations (malgré sa demande). L’issue dans l’arrêt CEP Union tenait au fait qu’une seule partie avait eu la possibilité de présenter des observations par écrit. La BCCA a déclaré ceci :

[traduction] [14]  Ce qui nous amène au nœud du présent litige. S’agit-il ici d’une infraction de la règle de l’audi alteram partem? Il me semble que le juge en chambre a estimé qu’il n’y a pas eu d’infraction au motif que les observations écrites ne faisaient que réaffirmer des renseignements que le directeur ou Pacifica Paper avait exprimés de vive voix à l’audience. En toute déférence, je ne suis pas d’accord. La possibilité de présenter des renseignements et des arguments par écrit est essentielle pour une partie. La possibilité après une audience orale de réorganiser et de présenter de nouveau une observation ne peut être considérée sans importance, autrement que, pour plagier une citation de Browning, « À quoi sert l’écriture? »

[59]  La présente cause se distingue par conséquent, car Taseko avait eu la possibilité de présenter des observations par écrit. Taseko avait également reçu une copie des observations de RNCan et avait eu la possibilité d’y répondre.

[60]  Le terme contesté de « clarification » n’indique pas que le document technique contenait de nouveaux renseignements. Comme l’a avancé Taseko à l’audience, elle croyait qu’elle était parvenue à une sorte d’entente sur les fuites (c’est-à-dire, que les estimations avaient un facteur ou deux d’écart); le document technique de RNCan clarifiait simplement sa position qu’il n’existait pas d’entente de ce type. Comme le souligne le ministre (PG), ce terme de « clarification » indiquait que RNCan souhaitait communiquer que sa position n’avait pas changé par suite des contre-interrogatoires et des arguments de Taseko. Taseko avait déjà répondu aux renseignements dans le document technique et avait contre-interrogé l’expert pertinent au cours du processus de contrôle. Comme il est indiqué ci-dessous, Taseko reconnaissait lors de ses observations finales qu’il n’y avait pas de rapprochement entre ses opinions et celles de RNCan.

[61]  Enfin, même si on devait conclure que le document technique contenait de nouveaux renseignements, le deuxième postulat de Taseko est erroné, parce qu’elle avait la possibilité de répondre à ces renseignements. Taseko avait demandé et a reçu la permission de fournir des réponses dans des observations techniques tardives. Elle a choisi de fournir des réponses à plusieurs documents, mais non pas au document technique.

[62]  En outre, l’observation finale de clôture de Taseko indique explicitement que Taseko était consciente qu’il n’y avait pas de convergence d’opinion entre Taseko et RNCan concernant les fuites. Taseko a affirmé ce qui suit :

[traduction] Dans tout parc à résidus miniers (PRM) une certaine quantité de fuites est normale – en effet, elles font partie intégrante de la conception d’un PRM. Tandis que nous avions cru qu’il y avait une convergence d’opinions sur les prévisions des fuites entre Ressources naturelles Canada (RNCan) et Environnement Canada concernant ces questions au cours de l’audience, nous avons récemment – ce qui étonne un peu – vu ces organismes déclarer qu’elles demeuraient d’un avis différent.

[Gras dans l’original; je souligne.]

[63]  À mon avis, cela indique que Taseko avait connaissance du contenu du document technique; ce qui contredit également la position de Taseko à l’audience selon laquelle elle croyait qu’il y avait une entente entre Taseko et RNCan que l’écart entre les estimations des fuites était d’un facteur de deux.

[64]  Pour résumer, je ne peux conclure qu’il y a eu manquement à la règle de l’audi alteram partem.

3)  Attentes légitimes

[65]  La règle générale des « attentes légitimes » prévoit que la reconnaissance qu’une attente légitime existe aura une incidence sur la nature de l’obligation d’équité procédurale envers les personnes visées par la décision. Toutefois, il s’agit d’un droit procédural et non d’un droit matériel (Baker, au paragraphe 26). La citation suivante est pertinente en l’espèce : « Si le demandeur s’attend légitimement à ce qu’une certaine procédure soit suivie, l’obligation d’équité exigera cette procédure » (Baker, au paragraphe 26).

[66]  Taseko suggère que ses attentes légitimes ont potentiellement été enfreintes de deux manières : 1) la Commission n’a pas suivi les règles de procédure concernant l’audience publique, et 2) Taseko s’attendait qu’elle serait en mesure de répondre aux nouveaux éléments de preuve (dans le document technique), attente qui n’a pas été satisfaite.

[67]  Dans l’arrêt Centre hospitalier Mont-Sinaï c Québec (Ministre de la Santé et des Services sociaux), 2001 CSC 41, au paragraphe 29, [2001] 2 RCS 281, la CSC a déclaré que « [p]ar contre, la théorie de l’expectative légitime s’attache à la conduite de l’autorité publique dans l’exercice de ce pouvoir […] et notamment aux pratiques établies, à la conduite ou aux affirmations qui peuvent être qualifiées de claires, nettes et explicites ». En l’espèce, bien que les règles de procédure concernant l’audience publique aient été claires, elles n’étaient ni nettes ni explicites. À mon avis, Taseko n’avait aucune attente légitime que les règles de procédure concernant l’audience publique soient suivies rigoureusement lors de chaque instance parce que la Commission avait un vaste pouvoir discrétionnaire de dévier de ses propres règles de procédure concernant l’audience publique. En outre, la Commission a explicitement déclaré à toutes les parties qu’elle accepterait des observations finales jusqu’à une certaine date, et que, après cette date, Taseko aurait quelques jours pour répondre à toute observation technique. La Commission a ainsi décrit les règles de procédure qu’elle avait l’intention de suivre, et c’est précisément ce qu’elle a fait – elle les a suivies.

[68]  Taseko n’a pas démontré que ces règles de procédure concernant l’audience publique n’avaient pas été satisfaites en l’espèce. Taseko a relevé deux dispositions en particulier qui, selon elle, ont été enfreintes, comme il a été mentionné précédemment :

[traduction] 2.7  Si un participant dépose un rapport d’expert dans le cadre de sa demande, ce participant doit s’arranger pour que l’expert soit disponible pour répondre aux questions dans le cadre de l’audience lorsque la demande est déposée [...]

2.18  Les remarques de clôture ne doivent pas être utilisées pour présenter de nouveaux renseignements, mais doivent résumer la perspective de la partie intéressée au dossier de l’audience et les recommandations à la Commission.

[69]  Le document technique n’enfreint aucune de ces dispositions. Premièrement, M. Desbarats était disponible pour le contre-interrogatoire au sujet du rapport de RNCan. Deuxièmement, le document technique ne présentait pas de nouveaux renseignements. Taseko n’avait pas demandé un contre-interrogatoire plus approfondi de M. Desbarats, et étant donné qu’il avait déjà été contre-interrogé sur les mêmes renseignements, il n’est pas clair quel en aurait été le but. Les règles de procédure ne prévoient pas de contre-interrogatoire plus approfondi par suite des observations finales.

[70]  Pour ce qui est du deuxième point, Taseko s’attendait bien de façon légitime qu’elle aurait la possibilité de répondre à toutes les observations techniques finales. La Commission avait clairement, nettement et à plusieurs reprises affirmé que Taseko aurait la possibilité de le faire. Toutefois, ces attentes étaient satisfaites en l’espèce comme il a été discuté ci-dessus en ce qui concerne le principe d’audi alteram partem.

[71]  Taseko avait eu la possibilité de répondre au document technique dans ses observations finales et dans des observations supplémentaires par écrit. Comme il a été mentionné précédemment, Taseko avait demandé et reçu la permission d’avoir « quelques jours » pour répondre aux observations concernant les connaissances techniques ou spécialisées, et elle a fait référence à la position de RNCan (qu’il n’y avait pas de convergence des opinions des parties sur les fuites) dans ses observations finales par écrit à la Commission.

[72]  La décision de Taseko de ne pas répondre concrètement au document technique ne constitue pas une infraction à des attentes légitimes alléguées.

[73]  Enfin, comme l’a indiqué le ministre (PG), la Cour peut choisir de ne pas intervenir, même en l’absence de préjudice (décision Omer c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2015 CF 494, au paragraphe 9). En l’espèce, il n’est pas clair que Taseko a subi un préjudice en raison des prétendues irrégularités procédurales qu’elle a relevées.

4)  Omission de s’opposer

[74]  Si Taseko se préoccupait du fait que les observations ou les mémoires violaient l’équité procédurale, elle avait l’obligation d’aborder ces préoccupations auprès de la Commission. Comme dans les arrêts Geza c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2006 CAF 124, [2006] 4 RCF 377, et Hennessey c Canada, 2016 CAF 180, 484 NR 77, il n’appartient pas à Taseko de garder cette plainte en réserve pour alimenter le contrôle judiciaire.

[75]  En l’espèce, Taseko a en effet contesté les observations tardives de manière générale. Le représentant de Taseko a déclaré devant la Commission :

[traduction] Ma suggestion serait donc, numéro 1, que nous mettions fin à ces observations tardives, en particulier, les observations des personnes qui ont une expertise ou des connaissances spécialisées, qui doivent cesser, et nous avons besoin d’avoir au moins quelques jours pour pouvoir les évaluer et y répondre.

Et cela ne me dérange pas d’avoir la possibilité de le faire après l’argument final, si c’est acceptable pour la Commission. Mais nous avons certainement besoin d’une possibilité d’y mettre fin.

En outre, nous n’aurons pas la possibilité de poser des questions à M. McCrory, qui constitue également une iniquité dans le processus. Nous n’aurons pas la possibilité de contester ses documents.

[Je souligne]

La Commission a répondu ce qui suit :

[traduction] Et juste avant qu’on ne passe au prochain intervenant, j’ai indiqué à M. Gustafson ce matin que je tenterais de répondre à sa demande cet après-midi, et nous n’avons pas de problème pour vous accorder plusieurs jours à partir du moment de la réception de tout nouveau document technique pour nous répondre et – ouais.

Avec ce plan, qui peut-être, probablement entraînera une extension au-delà des remarques finales pour toute réponse de votre part aux nouveaux documents techniques reçus.

[Je souligne]

[76]  Taseko a reçu ce qu’elle avait demandé. Elle avait demandé « quelques jours » pour répondre aux observations techniques si la Commission acceptait ce type d’observations, et cette préoccupation a été traitée rapidement et convenablement par la Commission.

[77]  L’obligation d’exprimer ses préoccupations est pertinente à la prétention de Taseko que le document technique contenait de nouveaux éléments de preuve. Taseko n’avait pas, à l’époque, prétendu que la réception du document technique était injuste parce qu’elle constituait un nouvel élément de preuve. En outre, à aucun moment Taseko n’avait demandé qui était l’auteur du document technique ni indiqué que le défaut d’identifier l’auteur individuel constituait un manquement à l’équité procédurale.

5)  Intervenants du secteur

[78]  À mon avis, il ne convient pas d’imposer des règles d’application générale à des commissions (comme il a été proposé par les intervenants du secteur) étant donné le besoin de flexibilité procédurale et la nécessité de faire preuve de déférence à l’égard des règles de procédure choisies (et le vaste pouvoir discrétionnaire concernant la procédure conférée par la LCEE 2012). Ce qui constitue une occasion raisonnable d’être entendu peut varier selon les circonstances particulières de chaque commission.

[79]  Pour conclure, la Commission n’a pas fait défaut d’observer les principes d’équité procédurale en acceptant le document technique et en s’appuyant sur celui-ci.

B.  Deuxième question : La décision de la Commission selon laquelle Taseko a sous-estimé le volume de fuites des résidus d’eau interstitielle à la sortie du PRM était-elle déraisonnable?

[80]  La Commission a conclu que Taseko avait sous-estimé le volume de fuites des résidus d’eau interstitielle à la sortie du PRM. Taseko soutient que cette conclusion est déraisonnable étant donné la mauvaise interprétation de l’estimation de Taseko des fuites du PRM. En comparant une composante de l’estimation de Taseko des fuites du PRM avec l’estimation entière des fuites par RNCan, Taseko prétend que [traduction] « la Commission a comparé des pommes et des oranges, ce qui était manifestement déraisonnable ».

[81]  Taseko admet que la Commission a à juste titre indiqué les estimations des fuites par Taseko au tableau 3 du rapport pour un total de 70 L/s à la sortie du PRM. Toutefois, en résumant la comparaison de RNCan au tableau 5 du rapport, Taseko soutient que la Commission n’a pas tenu compte de son propre résumé exact des estimations de Taseko. Au tableau 5, l’estimation des fuites du bassin profond passe de 15 L/s à 0 L/s.

[82]  Taseko attaque également les comparaisons faites par RNCan qui, avec d’autres erreurs, ont mené à la conclusion de la Commission que Taseko avait considérablement sous-estimé les fuites du PRM.

[83]  À mon avis, la décision de la Commission (à l’égard de laquelle il faut faire preuve de déférence) que Taseko avait sous-estimé le volume des fuites des résidus d’eau interstitielle à la sortie du PRM était raisonnable.

[84]  La Commission avait été chargée d’évaluer les éléments de preuve scientifiques et d’en tirer des conclusions de fait, et elle avait l’expertise pertinente pour le faire (la Commission était composée de trois membres : M. Bill Ross, un professeur dans le domaine de l’aménagement de l’environnement, M. George Kupfer, un consultant communautaire, et M. Ron Smyth, un géologue). Comme il a été discuté dans la décision Inverhuron & District Ratepayers Assn, c Canada (Ministre de l’Environnement) (2000), 191 FTR 20 (CF 1re inst.), conf. par 2001 CAF 203 [Inverhuron], les circonstances suivantes sont pertinentes à l’évaluation du caractère raisonnable :

[71]  Rappelons encore une fois que la fonction de la Cour dans le contrôle judiciaire n’est pas d’agir comme une « académie des sciences » ou comme une « Haute assemblée ». Pour chacun des éléments prévus par la loi, la gamme des possibilités de fait est pratiquement illimitée. Peu importe le nombre de scénarios envisagés, il est toujours possible d’en concevoir un autre qui ne l’a pas été. Il est de la nature de la science que des personnes raisonnables puissent être en désaccord sur la pertinence et l’importance. À propos de ces questions, la fonction de la Cour n’est pas d’assurer l’exhaustivité, mais d’évaluer, quant à la forme plutôt qu’au fond, s’il y a eu quelque examen des éléments que l’étude approfondie doit, selon la Loi, prendre en compte. S’il y a eu un certain degré d’examen, il importe peu qu’on ait pu procéder à un examen plus poussé ou de meilleure qualité.

[Gras dans l’original; je souligne.]

[85]  Taseko soutient que le tableau 5 et la discussion subséquente constituent une mauvaise interprétation des estimations des fuites par Taseko. Toutefois, cette partie du rapport n’est qu’un résumé de la position de RNCan, et ne représente aucune des conclusions de la Commission.

[86]  Il est important de garder à l’esprit, lors de la révision du tableau 5 et le résumé des conclusions de RNCan dans le rapport, que RNCan avait des préoccupations sérieuses quant aux modèles faits par Taseko. Le tableau 5 ne répète pas simplement les estimations avancées par Taseko (et résumées plus haut dans le rapport). Les « erreurs » citées par Taseko représentent en réalité des désaccords scientifiques concernant ce que RNCan croyait pouvoir être raisonnablement conclu des modèles de Taseko, en comparaison avec les conclusions de son propre modèle.

[87]  Il est donc inexact de dire que RNCan a effectué des « comparaisons erronées ». Des explications avaient été fournies pour les différences entre les estimations de Taseko (au tableau 3) et les chiffres dans les conclusions de RNCan (au tableau 5), de sorte que RNCan croyait que le modèle en 2D de Taseko empêchait toute conclusion sur les fuites du bassin profond (supérieur à 200 mbgs) (rangée du bas du tableau 5) et que seul le modèle de Taseko en 3D rendait compte des fuites par le fond du PRM (rangée du haut du tableau 5).

[88]  Le tableau 5 « corrigé » présenté dans le document technique de Taseko est donc erroné et problématique, étant donné qu’il ne représente pas avec exactitude les opinions de RNCan. RNCan n’est pas tenu d’accepter les modèles ni les estimations de Taseko; comme il est indiqué dans la décision Inverhuron, « [i]l est de la nature de la science que des personnes raisonnables puissent être en désaccord sur la pertinence et l’importance » (au paragraphe 71).

[89]  En aucun moment dans le rapport, la Commission n’indique qu’elle croyait que l’estimation totale des fuites de Taseko était de 9 L/s ou qu’elle avait autrement mal compris les estimations des fuites par Taseko. La Commission a résumé à la fois la position de Taseko et celle de RNCan, et elle l’a fait avec exactitude.

[90]  À l’audience, Taseko a invité la Cour à conclure que la Commission avait comparu l’estimation des fuites par RNCan de 100 L/s par rapport à une estimation erronée par Taseko de 9 L/s de fuites totales. Toutefois, la Commission n’avait pas indiqué qu’elle s’appuyait sur les comparaisons figurant au tableau 5 pour parvenir à sa conclusion.

[91]  La Commission pouvait accepter les modèles et estimations avancés par RNCan sans tenir compte de la façon dont ils pouvaient être comparés aux modèles et estimations de Taseko. En outre, RNCan avait soulevé des préoccupations concernant l’exactitude de la simple combinaison des estimations d’après les modèles en 2D et en 3D de Taseko, étant donné la différence dans les méthodologies; pour cette seule raison, il était loisible à la Commission de traiter l’estimation « combinée » de Taseko de 70 L/s avec une certaine suspicion.

[92]  La Commission a fini par accepter l’estimation supérieure de RNCan : [traduction] « [l]a Commission accepte l’estimation supérieure de Ressources naturelles Canada comme étant le taux de fuites attendues du parc à résidus miniers (voir le tableau 5 ci-dessus) ». Rien ne laisse supposer que la Commission a estimé que le tableau 5 représentait les estimations de Taseko.

[93]  En outre, même si la Cour acceptait que la comparaison qui convient fût entre l’estimation de Taseko de 70 L/s et l’estimation de RNCan de 100 L/s, la Commission pouvait bien conclure que Taseko avait néanmoins considérablement sous-estimé le volume des fuites. Taseko n’avait avancé aucune preuve pour démontrer qu’un écart d’un facteur de deux était négligeable ou sans importance, et il serait inapproprié pour la Cour de conclure que c’est le cas.

[94]  Comme il a été discuté durant l’audience, il s’agit d’une différence de 30 L/s de fuites de plus chaque seconde de chaque jour pour des décennies – il était loisible à la Commission de conclure qu’il s’agissait d’une sous-estimation du volume des fuites de la part de Taseko. En outre, comme le relève le GNT, la Commission n’était pas tenue de fonder ses conclusions sur un « seuil scientifique » particulier, et Taseko a fait défaut de déterminer un « seuil scientifique » que les conclusions de la Commission ont fait défaut de satisfaire.

[95]  Pour conclure, en soutenant que le tableau 5 est erroné, Taseko tente essentiellement de reprendre les positions techniques et scientifiques qu’elle avait prises devant la Commission. La Commission a refusé les conclusions de Taseko. À mon avis, il ne convient pas que la Cour réexamine les éléments de preuve et parvienne à une autre conclusion.

[96]  En outre, les tentatives de Taseko d’introduire l’ambiguïté dans les conclusions de la Commission nécessiteraient une mauvaise lecture du rapport d’une manière qui défie la logique.

C.  Troisième question : La décision de la Commission d’accepter l’estimation supérieure de RNCan comme le taux de fuite attendu du PRM était-elle déraisonnable?

[97]  Taseko soutient que l’acceptation par la Commission de l’estimation de RNCan comme le taux de fuite attendu du PRM était déraisonnable pour les raisons suivantes :

  • a) Elle s’appuie directement sur la conclusion erronée que Taseko a sérieusement sous-estimé les fuites du PRM; et

  • b) Elle accepte le modèle de RNCan même s’il est considérablement différent de la conception réelle du PRM proposée par Taseko.

[98]  En résumé, j’ai conclu que la décision de la Commission d’accepter l’estimation supérieure de RNCan comme le taux de fuite attendu du PRM était raisonnable. Comme il a été discuté ci-dessus (voir la deuxième question), la conclusion de la Commission que Taseko a sous-estimé les fuites était raisonnable; par conséquent, le fait qu’elle s’appuie sur cette conclusion pour accepter l’estimation supérieure de RNCan est raisonnable.

[99]  Les commentaires de la CSC dans Newfoundland and Labrador Nurses’ Union c Terre-Neuve et Labrador (Conseil du Trésor), 2011 CSC 62, [2011] 3 RCS 708 [arrêt Newfoundland Nurses] concernant le caractère raisonnable sont pertinents en l’espèce :

[14]  Je ne suis pas d’avis que, considéré dans son ensemble, l’arrêt Dunsmuir signifie que l’« insuffisance » des motifs permet à elle seule de casser une décision, ou que les cours de révision doivent effectuer deux analyses distinctes, l’une portant sur les motifs et l’autre, sur le résultat (Donald J. M. Brown et John M. Evans, Judicial Review of Administrative Action in Canada (feuilles mobiles), §§12:5330 et 12:5510). Il s’agit d’un exercice plus global : les motifs doivent être examinés en corrélation avec le résultat et ils doivent permettre de savoir si ce dernier fait partie des issues possibles. Il me semble que c’est ce que la Cour voulait dire dans Dunsmuir en invitant les cours de révision à se demander si « la décision et sa justification possèdent les attributs de la raisonnabilité » (par. 47).

[15]  La cour de justice qui se demande si la décision qu’elle est en train d’examiner est raisonnable du point de vue du résultat et des motifs doit faire preuve de « respect [à l’égard] du processus décisionnel [de l’organisme juridictionnel] au regard des faits et du droit » (Dunsmuir, par. 48). Elle ne doit donc pas substituer ses propres motifs à ceux de la décision sous examen mais peut toutefois, si elle le juge nécessaire, examiner le dossier pour apprécier le caractère raisonnable du résultat.

[16]  Il se peut que les motifs ne fassent pas référence à tous les arguments, dispositions législatives, précédents ou autres détails que le juge siégeant en révision aurait voulu y lire, mais cela ne met pas en doute leur validité ni celle du résultat au terme de l’analyse du caractère raisonnable de la décision. Le décideur n’est pas tenu de tirer une conclusion explicite sur chaque élément constitutif du raisonnement, si subordonné soit-il, qui a mené à sa conclusion finale (Union internationale des employés des services, local no 333 c Nipawin District Staff Nurses Assn., [1975] 1 RCS 382, p. 391). En d’autres termes, les motifs répondent aux critères établis dans Dunsmuir s’ils permettent à la cour de révision de comprendre le fondement de la décision du tribunal et de déterminer si la conclusion fait partie des issues possibles acceptables.

[Je souligne]

[100]  En l’espèce, l’examen approfondi par la Commission des observations faites par toutes les parties intéressées est plus que suffisant pour appuyer ses conclusions finales. Même si la Cour avait conclu que la Commission n’avait pas suffisamment clarifié ses motifs de refuser les mesures d’atténuation de Taseko, à mon avis le dossier soutient les conclusions de la Commission.

[101]  Les différents participants ont fait part de leurs préoccupations concernant les mesures d’atténuation avancées par Taseko, et Taseko a répondu en affirmant que des études supplémentaires seraient effectuées à la suite de l’approbation du projet. Étant donné la nature conceptuelle et non prouvée des mesures d’atténuation et cette réponse sans éclat de Taseko, il était normal que la Commission ne recommande pas que ces mesures d’atténuation aient été raisonnables. Il n’y avait rien de déraisonnable dans la conclusion que des mesures d’atténuation satisfaisantes devraient précéder l’approbation du projet plutôt que de la suivre.

[102]  En outre, lorsque les taux d’efficacité de Taseko étaient appliqués aux estimations de RNCan des fuites avant la récupération, le résultat était de loin supérieur aux estimations de Taseko des fuites après la récupération (11,8 L/s au lieu de 2,40 L/s).

[103]  En ce qui concerne les différences entre le PRM proposé et le modèle de RNCan, la preuve indique que la Commission comprenait ces différences. En outre, il n’est pas évident comment la « mauvaise conception » dans le modèle de RNCan portait préjudice à Taseko.

[104]  Taseko a soutenu que RNCan est partie du principe qu’aucune fuite ne passerait par les talus, ce qui était problématique étant donné que le fait qu’il devait y avoir des fuites par les côtés était une fonction atténuante (les talus filtrent l’eau). Toutefois, la Commission a conclu que Taseko a attribué des valeurs homogènes aux dépôts de couverture et à la taille des particules des résidus; par conséquent, la Commission n’a pas accepté que cette « fonction atténuante » agisse exactement comme l’avait décrit Taseko.

[105]  Les autres différences indiquées par Taseko, telles que l’épaisseur des tills (que Taseko n’a même pas promis de fournir) et la calibration, ont été également comprises par la Commission. Il n’y a aucune indication que la Commission a mal évalué le modèle de RNCan au lieu du modèle proposé – la simple préférence d’un modèle par rapport à un autre ne suffit pas pour établir que la Commission a évalué la « mauvaise conception ».

[106]  En outre, comme l’indique le ministre (PG), l’hypothèse de RNCan a en fait profité à Taseko : si RNCan avait créé un modèle des fuites par les talus, cela aurait certainement augmenté son estimation des quantités totales des fuites.

[107]  Taseko prétend que le défaut de la Commission d’examiner l’atténuation des fuites enfreint le sous-alinéa 43(1)d)(i) de la LCEE 2012 et l’alinéa 2.2d) du mandat modifié. Toutefois, l’alinéa 19(1)d) de la LCEE 2012 indique que l’évaluation environnementale doit tenir compte « [d]es mesures d’atténuation réalisables, sur les plans technique et économique, des effets environnementaux négatifs importants du projet (non souligné dans l’original).

[108]  Par conséquent, si la Commission n’était pas d’accord que les mesures d’atténuation proposées par Taseko aient été réalisables ou qu’elles atténueraient les effets négatifs importants, elle n’était pas tenue de les prendre en compte. De plus, le mandat modifié indique que la Commission n’est tenue d’indiquer que les mesures d’atténuation qu’elle recommande.

[109]  Il ne faut donc pas présumer que la Commission a violé les dispositions prévues par la loi. Dans l’arrêt Ontario Power Generation Inc. c Greenpeace Canada, 2015 CAF 186, 388 DLR (4th) 685, inf. 2014 CF 463, autorisation d’interjeter appel à la CSC refusée, 36711 (28 avril 2016), la CAF a examiné l’appel interjeté à l’encontre d’une décision du juge Russell, où ce dernier avait conclu qu’un rapport par une commission d’évaluation environnementale conjointe créée aux termes de la LCEE n’était pas conforme à la loi. La CAF s’est exprimée en ces termes :

[123]  En l’espèce, la Commission n’a formulé aucune conclusion précise indiquant qu’elle avait respecté les exigences des alinéas 16(1)a) et b) de la Loi en ce qui concerne les éléments à prendre en compte. Nous sommes toutefois d’avis qu’il faut supposer que la Commission s’est implicitement assurée de respecter ces exigences lorsqu’elle a fait l’évaluation environnementale et rédigé son rapport d’EE. En appliquant à cette question la norme de contrôle de la décision raisonnable, nous devons examiner la décision de la Commission dans son ensemble et dans le contexte du dossier original pour déterminer si la conclusion implicite de la Commission selon laquelle elle s’est acquittée des exigences d’examen qui lui étaient imposées est raisonnable (arrêt Agraira, au paragraphe 53).

[Je souligne]

[110]  De même, en l’espèce, lorsque le rapport est examiné dans son ensemble, il est clair que la Commission a examiné les mesures d’atténuation des fuites avancées par Taseko. Le rapport a réexaminé les commentaires de M. Smith concernant les mesures d’atténuation, qui étaient critiques en ce qui concerne le défaut de Taseko de fournir des renseignements détaillés : [traduction] « la série de mesures d’interception des fuites proposées par Taseko n’avait été évaluée qu’à un niveau conceptuel ».

[111]  En outre, le rapport a réexaminé la critique faite par la British Columbia Ministry of Energy, Mines and Petroleum Resources (notamment que [traduction] « des incertitudes demeuraient concernant la capacité de limiter et de recueillir le volume attendu des fuites du [PRM], et la capacité de traiter l’eau efficacement afin de maintenir la qualité de l’eau dans le lac Fish et ses affluents »). Par conséquent, contrairement à l’arrêt Bow Valley Naturalists Society v Alberta (Minister of Environmental Protection) (1995), [1996] 2 WWR 749, 177 AR 161 (ABQB), cité par Taseko, la Commission n’a pas tiré ses conclusions en allant à l’encontre « d’éléments de preuve non contredits ».

[112]  En outre, l’acceptation par la Commission de l’estimation de la limite supérieure de RNCan a été étayée par le témoignage de l’expert indépendant, M. Smith, qui a déclaré que les fuites totales du PRM se situaient probablement vers la limite supérieure d’une fourchette de 20 à 100 L/s. Enfin, il convient de noter que, contrairement à ce qui est sous-entendu dans les observations de Taseko, les parties intéressées telles que RNCan n’étaient pas tenues de « réfuter » l’analyse de Taseko – la Commission n’était pas tenue de supposer que Taseko avait raison, sauf preuve du contraire.

D.  Quatrième question : La conclusion de la Commission selon laquelle la concentration des variables de la qualité de l’eau dans le lac Fish (Teztan Biny) et le lac Wasp constituerait probablement un effet environnemental négatif important était-elle déraisonnable?

[113]  Taseko soutient que les conclusions concernant les fuites, discutées ci-dessus, « imprégnaient » le rapport. Dans un paragraphe concernant la qualité de l’eau du lac Fish (Teztan Biny), le rapport indique ceci :

[traduction] La Commission indique également que les fuites du parc à résidus miniers attendues par Ressources naturelles Canada sont considérablement supérieures aux estimations de Taseko. Dans l’ensemble, la Commission conclut, comme l’ont fait la plupart des présentateurs sur ce sujet, qu’il y aurait des concentrations plus élevées de contaminants préoccupants de la qualité de l’eau dans le lac Fish que ce que montre le modèle de Taseko.

[Non souligné dans l’original]

[114]  Taseko soutient que la conclusion contestée concernant les fuites était directement responsable de la conclusion de la Commission selon laquelle le projet entraînerait des effets environnementaux négatifs importants sur la qualité de l’eau du lac Fish (Teztan Biny) et du lac Wasp. La conclusion concernant la qualité de l’eau s’appuie sur la conclusion déraisonnable concernant les fuites; par conséquent, elle ne peut être retenue et n’est pas conforme aux exigences du mandat modifié.

[115]  La conclusion de la Commission selon laquelle la concentration des variables de la qualité de l’eau dans le lac Fish (Teztan Biny) et le lac Wasp constituait probablement un effet environnemental négatif important était raisonnable. Comme il a été discuté ci-dessus, les conclusions contestées concernant les fuites étaient également raisonnables; par conséquent, le fait que la Commission s’appuie sur ces conclusions pour tirer une conclusion sur la qualité de l’eau était raisonnable.

[116]  En outre, les conclusions concernant la qualité de l’eau étaient soutenues par des éléments de preuve supplémentaires, y compris l’admission de Taseko elle-même que la qualité de l’eau ne serait pas conforme aux recommandations visant la protection de la vie aquatique. La probabilité que les mesures de traitement d’eau aux fins d’atténuation de Taseko soient efficaces était remise en question par des présentateurs du GNT ([traduction] « des détails sur l’efficacité du traitement n’étaient ni fournis ni représentés dans un modèle »), du British Columbia Ministry of Environment ([traduction] « des technologies non prouvées à long terme [et] potentiellement coûteuses »), et du British Columbia Ministry of Energy, Mines and Petroleum Resources ([traduction] « [l]e traitement de l’eau pour le projet n’a pas confirmé que la probabilité que les objectifs proposés pour la qualité de l’eau pour le lac Fish (Teztan Biny) soient atteignables sur les plans technique ou financier fut élevée »).

[117]  La Commission pouvait donc rejeter les propositions [traduction] « non prouvées et sans précédent » avancées par Taseko.

[118]  La Commission s’est exprimée en ces termes :

[traduction] La Commission conclut, d’après les éléments de preuve, qu’elle n’est pas en mesure d’accepter la conclusion de Taseko que les options de traitement de l’eau proposées atténueraient d’une manière efficace les effets négatifs du projet sur la qualité de l’eau du lac Fish (Teztan Biny). La Commission conclut que le schéma proposé de recirculation, le plan de gestion adaptée et les options de traitement de l’eau ne fonctionneront vraisemblablement pas à long terme. Pour ces motifs, la Commission conclut que l’essai pour la « validation du principe » proposé par Taseko pour l’évaluation environnementale n’a pas réussi.

[119]  Par conséquent, la Commission ne s’est pas appuyée uniquement sur les conclusions contestées concernant les fuites pour tirer ses conclusions sur la qualité de l’eau.

[120]  En ce qui concerne le principe de précaution, il ne semble y avoir aucun différend entre les parties que la Commission était tenue d’évaluer la proposition avec prudence. Le paragraphe de la LCEE 2012 énonçant l’objet de celle-ci prévoit ce qui suit :

4 (1) La présente loi a pour objet :

4 (1) The purposes of this Act are

a) de protéger les composantes de l’environnement qui relèvent de la compétence législative du Parlement contre tous effets environnementaux négatifs importants d’un projet désigné;

(a) to protect the components of the environment that are within the legislative authority of Parliament from significant adverse environmental effects caused by a designated project;

b) de veiller à ce que les projets désignés dont la réalisation exige l’exercice, par une autorité fédérale, d’attributions qui lui sont conférées sous le régime d’une loi fédérale autre que la présente loi soient étudiés avec soin et prudence afin qu’ils n’entraînent pas d’effets environnementaux négatifs importants;

(b) to ensure that designated projects that require the exercise of a power or performance of a duty or function by a federal authority under any Act of Parliament other than this Act to be carried out, are considered in a careful and precautionary manner to avoid significant adverse environmental effects;

c) de promouvoir la collaboration des gouvernements fédéral et provinciaux et la coordination de leurs activités en matière d’évaluation environnementale;

(c) to promote cooperation and coordinated action between federal and provincial governments with respect to environmental assessments;

d) de promouvoir la communication et la collaboration avec les peuples autochtones en matière d’évaluation environnementale;

(d) to promote communication and cooperation with aboriginal peoples with respect to environmental assessments;

e) de veiller à ce que le public ait la possibilité de participer de façon significative à l’évaluation environnementale;

(e) to ensure that opportunities are provided for meaningful public participation during an environmental assessment;

f) de veiller à ce que l’évaluation environnementale soit menée à terme en temps opportun;

(f) to ensure that an environmental assessment is completed in a timely manner;

g) de veiller à ce que soient étudiés avec soin et prudence, afin qu’ils n’entraînent pas d’effets environnementaux négatifs importants, les projets au sens de l’article 66 qui sont réalisés sur un territoire domanial, qu’une autorité fédérale réalise à l’étranger ou pour lesquels elle accorde une aide financière en vue de leur réalisation à l’étranger;

(g) to ensure that projects, as defined in section 66, that are to be carried out on federal lands, or those that are outside Canada and that are to be carried out or financially supported by a federal authority, are considered in a careful and precautionary manner to avoid significant adverse environmental effects;

h) d’inciter les autorités fédérales à favoriser un développement durable propice à la salubrité de l’environnement et à la santé de l’économie;

(h) to encourage federal authorities to take actions that promote sustainable development in order to achieve or maintain a healthy environment and a healthy economy; and

i) d’encourager l’étude des effets cumulatifs d’activités concrètes dans une région et la prise en compte des résultats de cette étude dans le cadre des évaluations environnementales.

(i) to encourage the study of the cumulative effects of physical activities in a region and the consideration of those study results in environmental assessments.

(2) Pour l’application de la présente loi, le gouvernement du Canada, le ministre, l’Agence, les autorités fédérales et les autorités responsables doivent exercer leurs pouvoirs de manière à protéger l’environnement et la santé humaine et à appliquer le principe de précaution.

(2) The Government of Canada, the Minister, the Agency, federal authorities and responsible authorities, in the administration of this Act, must exercise their powers in a manner that protects the environment and human health and applies the precautionary principle.

(La Cour souligne)

(Court’s underlining)

[121]  Toutefois, il y a manifestement un conflit entre les parties concernant ce que cela implique. La proposition de Taseko s’appuyait sur la gestion adaptée; c’est-à-dire, Taseko proposait que les risques environnementaux et les mesures d’atténuation pussent être traités à des étapes ultérieures du développement. D’autres parties ont jugé cette approche inadéquate, et ont demandé davantage de renseignements sur les risques et la faisabilité des mesures d’atténuation.

[122]  La Commission a reconnu la possibilité de la gestion adaptée, mais a conclu qu’elle ne pouvait remettre des décisions importantes à l’étape suivante du processus. Dans le rapport, la Commission a fait allusion à l’exigence qu’elle agisse avec prudence et a affirmé, en ce qui concerne en particulier la qualité de l’eau :

[traduction] Taseko a refusé de fournir des documents demandés par la Commission et par d’autres participants (par exemple, la description du modèle de la qualité de l’eau pour le lac Fish). Pour traiter les incertitudes en découlant, la Commission a examiné différentes stratégies de gestion du risque, y compris la gestion adaptée dans certaines conditions. Toutefois, lorsque la Commission a conclu que les éventuels effets environnementaux négatifs étaient potentiellement « importants », elle n’était pas d’accord que de renvoyer des décisions sur l’approche de la gestion du risque à des processus réglementaires subséquents soit approprié. Il est nécessaire au stade de l’évaluation environnementale que la Commission décide si un effet négatif important est probable et d’examiner si et comment le risque peut être géré à des niveaux admissibles.

Si, après l’examen du dossier de renseignements en vue de l’examen, la Commission décide qu’il existe des incertitudes sérieuses concernant un potentiel effet négatif sur l’environnement et la capacité de gérer cet effet et que le risque de dommage grave ou irréversible à l’environnement est élevé, la Commission doit adopter une approche de prudence.

[Je souligne]

[123]  Il était raisonnable que la Commission n’accepte pas les [traduction] « vagues assurances » de Taseko qu’elle entamerait la gestion adaptée pour traiter les effets négatifs sur l’environnement. La Commission a demandé des renseignements sur les effets environnementaux et les mesures d’atténuation, que Taseko a refusé de donner. Il était tout à fait raisonnable, et conforme à l’interprétation (raisonnable) par la Commission du principe de prudence, que la Commission tire la conclusion que la concentration des variables de la qualité de l’eau dans le lac Fish (Teztan Biny) et le lac Wasp aurait vraisemblablement un effet négatif sur l’environnement.

[124]  En effet, l’acceptation des vagues schémas de gestion adaptée dans de telles circonstances aurait pour effet, à mon avis, de remettre en question la valeur de la totalité du processus de la Commission – si toutes les décisions de ce type pouvaient être remises à un stade ultérieur, le processus du comité d’examen ne servirait qu’à préserver les apparences.

VI.  CONCLUSION

[125]  Pour ces motifs, la Cour conclut que :

  • a) La Commission n’a enfreint aucun principe d’équité procédurale, ni d’audi alteram partem, ni aucun principe lié aux attentes légitimes; et

  • b) Il était loisible à la Commission de tirer ses conclusions de fait, et celles-ci étaient raisonnables.

[126]  Par conséquent, la demande de contrôle judiciaire sera rejetée avec dépens en faveur des défendeurs.

 


JUGEMENT DANS LE DOSSIER T-1977-13

LA COUR rejette la demande de contrôle judiciaire avec dépens en faveur des défendeurs.

« Michael L. Phelan »

Juge

Traduction certifiée conforme

Ce 29e jour de juin 2020

Lionbridge


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


DOSSIER :

T-1977-13

 

INTITULÉ :

TASEKO MINES LIMITED c LE MINISTRE DE L’ENVIRONNEMENT et LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA et LE GOUVERNEMENT NATIONAL TSILHQOT’IN ET JOEY ALPHONSE, pour son propre compte et pour le compte de tous les autres membres de la Nation Tsilhqot’in ET L’ASSOCIATION MINIÈRE DU CANADA, LA MINING ASSOCIATION OF BRITISH COLUMBIA, LA MINING SUPPLIERS ASSOCIATION OF BRITISH COLUMBIA, LA ASSOCIATION FOR MINERAL EXPLORATION, BRITISH COLUMBIA, et MINES ALERTE CANADA

 

LIEU DE L’AUDIENCE :

Vancouver (Colombie-Britannique)

 

DATE DE L’AUDIENCE :

Les 30 et 31 janvier 2017; du 1er au 3 février 2017

 

JUGEMENT ET MOTIFS :

LE JUGE PHELAN

 

DATE DES MOTIFS :

Le 5 décembre 2017

 

COMPARUTIONS :

K. Michael Stephens

Kenneth Leung

Shannon Ramsay

 

Pour la demanderesse

 

Lorne Lachance

Naomi Wright

Oliver Pulleyblank

Michele Charles

 

Pour les défendeurs,

LE MINISTRE DE LA SANTÉ ET LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA

 

Jay Nelson

Sonya Morgan

 

Pour les défendeurs,

LE GOUVERNEMENT NATIONAL TSILHQOT’IN ET JOEY ALPHONSE, pour son propre compte et pour le compte de tous les autres membres de la Nation Tsilhqot’in

Craig P. Dennis, c.r.

Daniel Yaverbaum

 

POUR LES INTERVENANTS,

L’ASSOCIATION MINIÈRE DU CANADA, LA MINING ASSOCIATION OF BRITISH COLUMBIA, LA MINING SUPPLIERS ASSOCIATION OF BRITISH COLUMBIA, LA ASSOCIATION FOR MINERAL EXPLORATION, BRITISH COLUMBIA, et MINES ALERTE CANADA

 

Sean Nixon

POUR L’INTERVENANT,

MINES ALERTE CANADA

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Hunter Litigation

Avocats

Vancouver (Colombie-Britannique)

 

Pour la demanderesse

 

Procureur général du Canada

Vancouver (Colombie-Britannique)

 

Pour les défendeurs,

LE MINISTRE DE LA SANTÉ ET LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA

 

Woodward & Company

Avocats

Victoria (Colombie-Britannique)

Pour les défendeurs,

LE GOUVERNEMENT NATIONAL TSILHQOT’IN ET JOEY ALPHONSE, pour son propre compte et pour le compte de tous les autres membres de la Nation Tsilhqot’in

Dentons Canada S.E.N.C.R.L.

Avocats

Vancouver (Colombie-Britannique)

 

POUR LES INTERVENANTS,

L’ASSOCIATION MINIÈRE DU CANADA, LA MINING ASSOCIATION OF BRITISH COLUMBIA, LA MINING SUPPLIERS ASSOCIATION OF BRITISH COLUMBIA, LA ASSOCIATION FOR MINERAL EXPLORATION, BRITISH COLUMBIA, et MINES ALERTE CANADA

 

Ecojustice

Vancouver (Colombie-Britannique)

POUR L’INTERVENANT,

MINES ALERTE CANADA

 

 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.