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Date : 20171030


Dossier : IMM-4815-16

Référence : 2017 CF 966

[TRADUCTION FRANÇAISE CERTIFIÉE, NON RÉVISÉE]

Ottawa (Ontario), le 30 octobre 2017

En présence de monsieur le juge Boswell

ENTRE :

ASMEHLASH SELAMSSA

demandeur

et

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

défendeur

JUGEMENT ET MOTIFS

[1]  Le demandeur est un citoyen érythréen de 53 ans qui, lorsqu’il était jeune, a servi dans l’armée éthiopienne sous le régime Derg, une junte militaire qui régissait l’Éthiopie (y compris ce qui est maintenant l’Érythrée) de 1974 à 1991. En 2009, le frère du demandeur et la Calgary Catholic Immigration Society ont parrainé sa demande de statut de résident permanent dans la catégorie des réfugiés au sens de la Convention outre-frontières et la catégorie des personnes protégées à titre humanitaire outre-frontières. Au bout du compte, le 15 juin 2016, une agente d’immigration du Haut-Commissariat du Canada à Dar es-Salaam, en Tanzanie, a interrogé le demandeur concernant sa demande de résidence permanente à Kampala, en Ouganda. Dans une lettre datée du 29 juin 2016, l’agente a refusé la demande du demandeur parce qu’elle a conclu que ce dernier ne faisait pas partie de l’une des catégories prescrites de réfugié. Le demandeur présente maintenant une demande de contrôle judiciaire en application du paragraphe 72(1) de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, LC 2001, c 27 (LIPR).

I.  La décision de l’agente

[2]  Dans sa lettre du 29 juin 2016, l’agente a noté que le demandeur avait été interrogé avec l’aide d’un interprète ayant une bonne maîtrise de l’anglais et du tigrinya, et qu’il n’avait pas démontré de difficulté à comprendre l’interprète ou à se faire comprendre par lui. Après avoir cité la définition de réfugié au sens de la Convention de l’article 96 de la LIPR, l’agente a renvoyé à l’article 98 qui exclut de cette définition des personnes qui : i) ont établi leur résidence dans un pays autre que leur pays de nationalité et qui ont été reconnues comme ayant les droits et les obligations attachés à la possession de la nationalité de ce pays; (ii) ont commis un crime contre la paix, un crime de guerre, un crime contre l’humanité ou un crime grave de droit commun en dehors du pays d’accueil avant d’y être admises comme réfugiées; ou iii) se sont rendues coupables d’agissements contraires aux buts et aux principes des Nations Unies.

[3]  L’agente a également renvoyé aux articles 145 et 147 ainsi qu’à l’alinéa 139(1)e) du Règlement sur l’immigration et la protection des réfugiés, DORS/2002-227, en sa version modifiée, et elle a conclu sa lettre en informant le demandeur de ce qui suit :

[traduction]

Après avoir soigneusement examiné tous les facteurs relatifs à votre demande, je ne suis pas convaincue que vous soyez admissible au titre de l’une des catégories réglementaires. Selon les divergences entre les renseignements écrits du dossier et ceux que vous avez fournis à l’entrevue, je ne suis pas convaincue que vous soyez crédible, en particulier en ce qui concerne votre participation au régime Derg. Je vous ai donné de nombreuses possibilités de réagir à mes préoccupations pendant l’entrevue et vous ne l’avez pas fait. Je ne suis donc pas convaincue que vous soyez visé par la définition de réfugié au sens de la Convention et que vous n’en soyez pas exclu aux termes de l’article 98. J’ai également examiné la catégorie de personnes de pays d’accueil, mais j’ai conclu que vous ne respectiez pas non plus les exigences de cette catégorie. De plus, je ne suis pas convaincue que vous ne soyez pas interdit de territoire au Canada. Vous ne satisfaites donc pas aux exigences de cette disposition.

[4]  Les notes du Système mondial de gestion des cas (SMGC) font partie de la décision de l’agente (voir par exemple Baker c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), [1999] 2 RCS 817, aux paragraphes 43 et 44, [1999] ACS no 39). L’agente a indiqué dans les notes du SMGC que le demandeur avait fourni des renseignements contradictoires quant à son service militaire, en particulier : sur le formulaire Antécédents/Déclaration de la demande écrite du demandeur, ce dernier a indiqué qu’il avait servi dans l’armée de février 1971 à juin 1983, qu’il a été un soldat émérite d’avril 1977 à mars 1978 à Asmara Phorto-35, et qu’il avait participé activement aux combats à Dekemehary, à Quahay, à Mimine et à Mereb; mais dans un formulaire Antécédents/Déclaration mis à jour fourni à l’entrevue, il a indiqué qu’il avait servi comme soldat dans l’armée d’avril 1982 à mars 1983 à la brigade 22 d’Asmaraforto, shalega-31, et qu’il avait participé activement aux combats à Malmine en mars 1983. De plus, au cours de l’entrevue, le demandeur a déclaré qu’il avait servi dans l’armée pendant trois mois seulement, protégeant le bétail de villageois contre des bandits et qu’une nuit, des assaillants inconnus ont tiré sur lui.

[5]  Lorsque l’agente lui a posé des questions au sujet de ces divergences à l’entrevue, le demandeur lui a dit qu’il ne pouvait pas avoir commencé son service en 1971, puisqu’il aurait été trop jeune. Même si l’agente l’a reconnu, elle a noté que le demandeur n’avait fourni aucun document valide de l’Érythrée qui prouvait sa date de naissance. Le demandeur a également fait valoir qu’en raison de son manque d’éducation, il ne savait pas ce qu’était le régime Derg. L’agente a estimé que cette réponse n’était pas crédible en raison des exécutions de masse effectuées partout en Éthiopie (y compris en Érythrée) pendant la campagne de « terreur rouge » dans les années 1970. L’agente n’a pas non plus trouvé crédible le fait que les autorités de l’Érythrée aient détenu le demandeur en 1996, cinq ans après la chute du régime, s’il n’avait servi dans l’armée que trois mois. Selon les éléments de preuve documentaire et les rapports au sujet de la milice Derg, l’agente a conclu qu’il n’était pas crédible que les seules fonctions du demandeur aient consisté à protéger le bétail. Enfin, l’agente n’a pas trouvé que l’explication du demandeur en ce qui concerne la nuit où on a tiré sur lui alors qu’il surveillait du bétail était crédible, étant donné qu’il a déclaré dans sa demande qu’il avait participé activement aux combats.

[6]  L’agente a également conclu dans les notes du SMGC que :

[traduction]

Selon les renseignements au dossier et les renseignements fournis à l’entrevue, je ne suis pas convaincue que le demandeur principal ait travaillé seulement trois mois pour le régime Derg ni que sa description de sa participation limitée au régime soit crédible. Selon les renseignements disponibles au dossier, je suis convaincue que le demandeur principal a été détenu par les autorités de l’Érythrée en 1996 et les autorités de l’Éthiopie en 2013. Selon les renseignements disponibles au dossier, je suis également convaincue que le demandeur principal était membre du régime Derg et qu’il a été détenu pour cette raison. Toutefois, je ne suis pas convaincue que le demandeur principal ait répondu à mes questions de façon honnête pendant l’entrevue et qu’il y a trop de divergences au dossier pour évaluer son niveau de participation au régime Derg [...] Selon les divergences entre les renseignements écrits au dossier et ceux fournis à l’entrevue, je ne suis pas convaincue que le demandeur principal soit crédible.

II.  Questions en litige

A.  Modification de l’intitulé

[7]  Au début de l’audition de la présente question, il a été conclu que le défendeur avait incorrectement été désigné comme le ministre de l’Immigration, des Réfugiés et de la Citoyenneté Canada. Selon le registre des titres d’usage fédéral, le titre d’usage du ministère de la Citoyenneté et de l’Immigration est Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada. Dans la présente demande de contrôle judiciaire, le défendeur est le ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration aux termes du paragraphe 4(1) de la LIPR. Par conséquent, l’intitulé sera modifié, avec effet immédiat, afin de désigner le ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration en tant que défendeur, plutôt que le ministre de l’Immigration, des Réfugiés et de la Citoyenneté Canada.

B.  L’affidavit de l’agente

[8]  Le défendeur a déposé un affidavit qui indique les documents présentés à l’agente (G. Garant) au moment de l’entrevue et lorsqu’elle a rédigé la lettre de refus. Cet affidavit révèle également quatre formulaires d’immigration dans le dossier du demandeur, joints en tant que pièces A et C à l’affidavit du demandeur, dont ne disposait pas Mme Garant lorsqu’elle a interrogé le demandeur et lorsqu’elle a envoyé sa lettre de décision. Selon le défendeur, il est bien établi que la preuve dont ne dispose pas un décideur administratif n’est pas admissible dans le cadre d’un contrôle judiciaire, sauf dans certaines circonstances limitées concernant les renseignements généraux de base, les renseignements attestant l’absence de preuve sur certaines questions ou les renseignements liés à la justice naturelle. Le défendeur fait valoir qu’aucune des exceptions ne s’applique en l’espèce et que ces pièces devraient donc être radiées du dossier du demandeur ou, subsidiairement, ne se voir accorder aucun poids. À cet égard, je suis d’accord avec le défendeur. Par conséquent, la Cour n’accorde aucune importance aux documents figurant dans le dossier du demandeur dont ne disposait pas l’agente lorsqu’elle a interrogé le demandeur et lorsqu’elle a rédigé la lettre de refus.

C.  Norme de contrôle

[9]  Il est bien établi que la décision d’un agent quant à la question de savoir si un demandeur est membre de la catégorie des réfugiés au sens de la Convention outre-frontières ou de la catégorie des personnes de pays d’accueil soulève une question de droit et de fait susceptible de révision selon la norme de la décision raisonnable (voir par exemple : Gebrewldi c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2017 CF 621, au paragraphe 14; Bakhtiari c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2013 CF 1229, au paragraphe 22, 235 ACWS (3d) 1067; Qarizada c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2008 CF 1310, au paragraphe 15, [2008] ACF no 1666; Saifee c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2010 CF 589, au paragraphe 25, [2010] ACF no 693.

[10]  Conformément à la norme de la décision raisonnable, la Cour doit examiner une décision en s’en tenant « à la justification de la décision, à la transparence et à l’intelligibilité du processus décisionnel ». Le rôle de la Cour est de considérer la question de savoir si la décision tient « aux issues possibles acceptables pouvant se justifier au regard des faits et du droit » (Dunsmuir c Nouveau-Brunswick, 2008 CSC 9, au paragraphe 47, [2008] 1 RCS 190 [Dunsmuir]). Ces critères sont respectés si les motifs « permettent à la cour de révision de comprendre le fondement de la décision du tribunal et de déterminer si la conclusion fait partie des issues possibles acceptables » : Newfoundland and Labrador Nurses’ Union c Terre-Neuve-et-Labrador (Conseil du Trésor), 2011 CSC 62, au paragraphe 16, [2011] 3 RCS 708.

[11]  La norme de contrôle applicable à une allégation de manquement à l’équité procédurale est celle de la décision correcte (Établissement de Mission c Khela, 2014 CSC 24, au paragraphe 79, [2014] 1 RCS 502; Canada (Citoyenneté et Immigration) c Khosa, 2009 CSC 12, au paragraphe 43, [2009] 1 RCS 339). La question de savoir si une décision administrative était juste est en général susceptible de révision par un tribunal. Cependant, le cadre analytique n’est pas tant la norme de la décision correcte ou de la décision raisonnable, mais plutôt une question d’équité. Comme l’ont noté Jones et deVillars (Principles of Administrative Law, 6e éd. (Toronto : Carswell, 2014), page 266) :

[traduction]

L’équité d’une procédure n’est pas mesurée par les normes de la « décision correcte » ou de la « décision raisonnable ». Elle est mesurée par la question de savoir si la procédure respectait le niveau d’équité requis par la loi. La confusion vient du fait que, lorsque le tribunal examine la question de savoir si une procédure est équitable, il [...] se prononce sur la question de savoir si la procédure a été rendue correctement. Il ne faut pas faire montre de retenue à l’égard de la façon de faire du tribunal. L’instance s’est déroulée de façon équitable ou non.

[12]  Lorsqu’elle applique la norme de la décision correcte, la cour de révision n’acquiesce pas au raisonnement du décideur. En cas de désaccord avec la conclusion du décideur, elle substitue sa propre conclusion et rend la décision qui s’impose (voir l’arrêt Dunsmuir, au paragraphe 50). En outre, la Cour doit s’assurer que la démarche empruntée pour examiner la décision faisant l’objet du contrôle a atteint le niveau d’équité exigé dans les circonstances de l’espèce (voir : Suresh c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2002 CSC 1, au paragraphe 115, [2002] 1 RCS 3). Au moment d’appliquer la norme de la décision correcte, il n’est pas seulement question de savoir si la décision faisant l’objet du contrôle est correcte, mais également d’établir si le processus suivi pour prendre sa décision était équitable (voir Hashi c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2014 CF 154, au paragraphe 14, 238 ACWS (3d) 199; Makoundi c Canada (Procureur général), 2014 CF 1177, au paragraphe 35, 471 FTR 71).

[13]  La qualité de l’interprétation à une audience ou à une entrevue en matière d’immigration est une question d’équité procédurale et elle est donc assujettie à la norme de contrôle de la décision correcte (voir, par exemple Singh c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2007 CF 267, au paragraphe 16, 155 ACWS (3d) 922; Saravia c Canada (Ministre de la Citoyenneté de l’Immigration), 2005 CF 1296, au paragraphe 3, 142 ACWS (3d) 1023); Siddiqui c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2015 CF 1028, au paragraphe 38, 258 ACWS (3d) 388; Licao c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2014 CF 89, au paragraphe 18, 237 ACWS (3d) 739).

D.  Entrevue du demandeur

[14]  Voici un extrait pertinent de l’affidavit du demandeur en date du 30 décembre 2016 déposé dans le cadre de son dossier de demande :

[traduction]

J’ai été convoqué pour une entrevue le 15 juin 2016 à Kampala, en Ouganda. Un interprète tigrinya était présent à l’entrevue [...]

Je n’ai jamais compris correctement l’interprète et il y a eu des malentendus. Par exemple, je me rappelle que l’interprète m’a demandé « que mangez-vous? » et que j’ai répondu notre nourriture traditionnelle, l’injera. Toutefois, après une explication, j’ai réalisé qu’il me demandait ce que je faisais dans la vie.

[15]  De plus, le constat d’assermentation de l’affidavit du demandeur indique ce qui suit :

[traduction]

Comme Asmelash Selamssa ne comprend pas l’anglais, le présent affidavit lui a été interprété, selon ma croyance, par ANTENEH MENGESHA qui a déclaré qu’il/elle comprenait bien l’anglais et l’AMHARIQUE, qu’il/elle interpréterait de manière appropriée et véridique le contenu du présent affidavit et qu’il/elle interpréterait de manière appropriée et véridique le serment à prêter.

[16]  Mme Garant déclare ce qui suit dans son affidavit :

[traduction]

En ce qui concerne de façon générale le protocole et la procédure, je m’assure qu’une personne interrogée, que ce soit en personne ou par téléphone, comprend l’interprète. [...] S’il y a des difficultés quant à l’interprétation, je l’indique dans les notes d’entrevue et cette dernière ne va pas plus loin avec cet interprète. Si rien n’est indiqué, c’est que la personne interrogée et l’interprète n’ont eu aucune difficulté quant à l’interprétation. Au cours de l’entrevue du 15 juin 2016, le demandeur n’a pas dit qu’il ne comprenait pas bien l’interprète ou qu’il y avait des malentendus.

[17]  Les notes du SMGC déposées le 22 juin 2016 indiquent que Mme Garant a [traduction« vérifié que le demandeur et l’interprète se comprenaient ». Les notes liées à l’entrevue du demandeur ne font pas mention d’un malentendu entre le demandeur et le traducteur quant à l’injera.

[18]  De plus, le dossier authentique du tribunal contient une lettre non datée du frère du demandeur, Michael, qui a été transmise au Haut-Commissariat du Canada à Dar es-Salaam le 14 octobre 2016, ou vers cette date. Cette lettre soulève des questions quant à l’intégrité de l’interprétation au cours de l’entrevue, indiquant en partie ce qui suit :

[traduction]

L’interprète lui a dit qu’il avait obtenu le visa de résidence permanente au Canada, ce qui n’est pas vrai, et mon frère me dit maintenant que son interprète travaille pour le gouvernement de l’Érythrée, YGDF, comme agent double, alors je ne crois pas qu’il vous ait interprété exactement ce que mon frère lui a dit. L’interprète ne donne pas les véritables renseignements à l’agente d’immigration.

Même pour ce qui est du calendrier de 1983 de l’Érythrée et de l’Éthiopie, il s’agit d’un calendrier européen (1991). Nous avons des calendriers différents. L’interprète les a confondus. Je ne crois pas qu’il ait expliqué les bons renseignements. Nous pouvons donc prouver que l’interprète a sciemment donné de faux renseignements à l’agente.

[19]  La lettre de l’agente envoyée au demandeur, qui refusait sa demande, ne contenait pas les notes du SMGC relatives à l’entrevue. Ces notes ont été divulguées pour la première fois au demandeur dans le cadre de l’affidavit de Mme Garant déposé en même temps que l’exposé des arguments du défendeur le 20 février 2017. Le dossier certifié du tribunal reçu par la Cour le 4 avril 2017 contient d’autres notes du SMGC relatives à la demande du demandeur; il ne contient aucune note manuscrite concernant les questions et les réponses précises posées à l’entrevue du demandeur. Même si, selon Mme Garant, le demandeur n’a pas indiqué avoir eu de la difficulté à comprendre le traducteur ou à se faire comprendre par lui à l’entrevue, des préoccupations quant à la traduction à l’entrevue ont été soulevées bien avant la réception et l’examen par le demandeur des notes du SMGC relatives à l’entrevue.

[20]  Je ne peux être certain de la question de savoir si l’entrevue en l’espèce était équitable sur le plan procédural pour le demandeur ou si ce dernier a été bien compris par le traducteur et l’agente. En l’espèce, le caractère adéquat de la traduction à l’entrevue est contestable à la lumière de l’affidavit du demandeur, assermenté en anglais et en amharique. Le fait que cet affidavit n’est pas en anglais ni en tigrinya soulève des questions quant à savoir si le demandeur et le traducteur se sont bien compris à l’entrevue et si le demandeur maîtrise davantage l’amharique que le tigrinya. En l’absence de toute transcription ou de tout enregistrement sonore de l’entrevue, il n’est pas possible d’établir si l’interprétation était adéquate, précise ou compétente ou si la traduction comportait des lacunes ou des erreurs en ce qui concerne des questions sans importance. En outre, à la lumière de la lettre du frère du demandeur, on est en droit de se demander si le traducteur était impartial. La décision de l’agente de refuser la demande de résidence permanente du demandeur est viciée par ce qui pourrait bien être une traduction fautive de l’entrevue. La présente demande de contrôle judiciaire doit donc être accueillie.

III.  Conclusion

[21]  Pour les motifs énoncés précédemment, la présente demande de contrôle judiciaire du demandeur est accueillie.

[22]  Comme aucune des parties n’a soulevé de question grave de portée générale à certifier, aucune question n’est certifiée.


JUGEMENT DANS LE DOSSIER IMM-4815-16

LA COUR modifie par les présentes l’intitulé, avec effet immédiat, afin de désigner le ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration en tant que défendeur, plutôt que le ministre de l’Immigration, des Réfugiés et de la Citoyenneté Canada; la demande de contrôle judiciaire est accueillie; la décision de l’agente d’immigration en date du 29 juin 2016 est annulée; la question est renvoyée à un autre agent d’immigration pour nouvel examen, conformément aux motifs du présent jugement; et aucune question de portée générale n’est certifiée.

« Keith M. Boswell »

Juge

Traduction certifiée conforme

Ce 25e jour d’octobre 2019

Lionbridge


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


DOSSIER :

IMM-4815-16

 

INTITULÉ :

ASMEHLASH SELAMSSA c LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

 

LIEU DE L’AUDIENCE :

Calgary (Alberta)

 

DATE DE L’AUDIENCE :

Le 12 septembre 2017

 

JUGEMENT ET MOTIFS :

LE JUGE BOSWELL

 

DATE DES MOTIFS :

Le 30 octobre 2017

 

COMPARUTIONS :

Nico Breed

 

Pour le demandeur

 

Shaun Mellen

 

Pour le défendeur

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Nota Bene Law Group Inc.

Avocats

Calgary (Alberta)

 

Pour le demandeur

 

Procureur général du Canada

Edmonton (Alberta)

 

Pour le défendeur

 

 

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