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Date : 20171005


Dossier : IMM-1174-17

Référence : 2017 CF 881

[TRADUCTION FRANÇAISE CERTIFIÉE, NON RÉVISÉE]

Toronto (Ontario), le 5 octobre 2017

En présence de monsieur le juge Campbell

ENTRE :

ALPHONSE FULU-SHUNGU

demandeur

et

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

défendeur

JUGEMENT ET MOTIFS

[1]  La présente demande concerne la demande présentée par le demandeur pour considérations d’ordre humanitaire, en vue d’être dispensé d’une mesure de renvoi exécutoire prise contre lui et l’obligeant à retourner au Burundi en tant comme demandeur d’asile débouté. La demande présentée par le demandeur a été rejetée par une décision datée du 13 février 2017. La question à trancher est celle de savoir si la décision est raisonnable.

[2]  La séropositivité du demandeur est la principale considération soulevée dans la demande pour considérations d’ordre humanitaire du demandeur. À l’appui de cette considération, le demandeur a présenté à l’agent chargé d’examiner la demande pour considérations d’ordre humanitaire (l’agent) un élément de preuve selon lequel, à compter de 2012, seulement 34 % de tous les porteurs du VIH du Burundi ont eu la chance de recevoir des traitements antirétroviraux (dossier certifié du tribunal à la page 220). Avant de rendre la décision faisant l’objet du présent contrôle, l’agent a consulté les « nouveaux » renseignements datés de 2014 qui sont expliqués dans la décision comme suit :

[traduction] En ce qui concerne l’accès à des traitements, la majorité des personnes qui en ont besoin ont accès à des traitements antirétroviraux ainsi qu’à d’autres soins et services de soutien. Le gouvernement reconnaît avoir connu des pénuries de médicaments par le passé. Il recherche des solutions en mettant en place des systèmes de gestion des stocks et de la chaîne d’approvisionnement dans les zones de distribution des médicaments. En ce qui concerne l’aide gouvernementale, l’État fournit un soutien économique et social aux personnes concernées. [Non souligné dans l’original] (Motifs de la décision, dossier certifié du tribunal, à la page 8)

[3]  L’avocat du demandeur soutient qu’il était injuste que l’agent se fie à de nouveaux éléments de preuve sans accorder au demandeur la possibilité de répondre. Je souscris à cet argument que j’estime constituer un motif suffisant pour annuler la décision. La décision recèle toutefois une erreur bien plus importante, qui, à mon avis, la rend manifestement déraisonnable.

[4]  Au paragraphe suivant immédiatement celui qui est cité ci-dessus, l’agent écrit ce qui suit :

[traduction] Je comprends que la situation au Burundi ne soit peut-être pas comparable à celle observée au Canada. Je constate toutefois que le Burundi a fait d’importantes démarches pour répondre aux besoins des personnes atteintes du VIH. À la lumière des éléments de preuve à ma disposition, le demandeur n’a pas établi qu’il ne pourrait pas obtenir les soins que nécessite son affection s’il retournait dans son pays d’origine. [Non souligné dans l’original] (Décision, dossier certifié du tribunal p. 9)

[5]  Cette opinion semble être fondée sur la conviction que le demandeur ferait partie de la [traduction] « majorité » des porteurs du VIH qui recevraient des médicaments. Il n’y a absolument aucun élément de preuve étayant cette conviction. Pour aborder cette question, l’avocat du demandeur a demandé qu’il lui soit permis d’invoquer des éléments de preuve que le demandeur aurait pu présenter à l’agent si on lui en avait accordé la possibilité. À mon avis, il est très juste et convenable que le défendeur ne se soit pas opposé à cette requête.

[6]  Par conséquent, le demandeur a produit un élément de preuve précisant qu’il n’aurait que 52 % de chances réelles de recevoir les traitements prodigués à la [traduction] « majorité » (dossier de demande du demandeur, onglet D, à la page 455). Malgré cette précision, j’estime qu’il est surprenant qu’en rejetant la demande pour considérations d’ordre humanitaire du demandeur et en affirmant qu’il s’en sortira très bien s’il devait faire l’objet d’un renvoi, l’agent n’a vu aucun motif d’ordre humanitaire d’éviter que le demandeur ne soit exposé au risque d’avoir une chance sur deux de recevoir des traitements antirétroviraux au Burundi, alors que son accès à des médicaments vitaux est garanti au Canada.

[7]  Je conclus, pour le moins, que la décision ne témoigne d’aucune pensée et compassion rationnelles et intelligibles. Par conséquent, je conclus que la décision est déraisonnable.


JUGEMENT

LA COUR ORDONNE que la décision visée par le présent contrôle judiciaire soit annulée et je renvoie l’affaire pour un nouvel examen par un autre décideur.

Il n’y a aucune question à certifier.

« Douglas R. Campbell »

Juge

Traduction certifiée conforme

Ce 9e jour d’août 2019

Lionbridge


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


 

Dossier :

IMM-1174-17

 

INTITULÉ :

ALPHONSE FULU-SHUNGU c LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

LIEU DE L’AUDIENCE :

Toronto (Ontario)

DATE DE L’AUDIENCE :

Le 3 octobre 2017

JUGEMENT ET MOTIFS :

LE JUGE CAMPBELL

DATE DES MOTIFS :

Le 5 octobre 2017

COMPARUTIONS :

Aisling E. Bondy

Pour le demandeur

Julie Waldman

Pour le défendeur

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Bondy Immigration Law

Avocats

Toronto (Ontario)

Pour le demandeur

Procureur général du Canada

Pour le défendeur

 

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