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Date : 20170602


Dossiers : T-389-11

T-1668-10

Référence : 2017 CF 545

[TRADUCTION FRANÇAISE]

Ottawa (Ontario), le 2 juin 2017

En présence de monsieur le juge Locke

Dossier : T-389-11

ENTRE :

APOTEX INC.

demanderesse

et

ASTRAZENECA CANADA INC.

défenderesse

Dossier : T-1668-10

ET ENTRE :

ASTRAZENECA AKTIEBOLAG, ASTRAZENECA CANADA INC. et ASTRAZENECA UK LIMITED

demanderesses/
défenderesses reconventionnelles

et

APOTEX INC. et
APOTEX PHARMACHEM INC.

défenderesses/
demanderesses reconventionnelles

ORDONNANCE ET MOTIFS

[1]               La présente ordonnance vise des conflits entre les parties (ci-après appelées Apotex et AstraZeneca) découlant de la lecture, lors du procès, des passages de l’interrogatoire préalable, comme le prévoit l’article 288 des Règles des Cours fédérales, DORS/98-106 (les Règles). Ces conflits, qui ont été débattus au cours du procès, s’inscrivent dans deux catégories :

  1. En ce qui concerne certains des éléments qu’Apotex propose de consigner en preuve, AstraZeneca tente d’ajouter des extraits pertinents en vertu de l’article 289 des Règles.
  2. Quant à certains des éléments qu’AstraZeneca propose de consigner en preuve, Apotex s’oppose à leur inclusion.

[2]               J’examine chacune de ces catégories à tour de rôle.

I.                   Extraits pertinents proposés par AstraZeneca

[3]               Les parties ne semblent pas contester le droit applicable. L’article 288 des Règles permet à une partie de présenter en preuve, à l’instruction, tout extrait des dépositions recueillies à l’interrogatoire préalable d’une personne interrogée pour le compte d’une partie adverse. L’article 289 des Règles prévoit que lorsqu’une partie présente en preuve des extraits en vertu de l’article 288 des Règles, la Cour peut lui ordonner de produire « tout autre extrait de ces dépositions qui, à son avis, est pertinent et ne devrait pas être omis ». La jurisprudence applicable (que j’ai scrutée dans la décision que j’ai rendue dans l’affaire MediaTube Corp c. Bell Canada, 2016 CF 1066) mène à la conclusion que je devrais permettre des extraits pertinents seulement :

     (i)            lorsque le témoin n’a pas bien compris un élément de la question qui lui a été posée;

   (ii)            lorsque le passage consigné en vertu de l’article 288 des Règles dénature les propos du témoin;

 (iii)            lorsque le passage consigné en vertu de l’article 288 des Règles manque de contexte ou de matière.

[4]               Au moment de déterminer s’il convient d’ordonner la consignation en preuve des extraits pertinents, il est important de se rappeler qu’AstraZeneca tente d’obtenir une ordonnance pour obliger Apotex à ajouter certains éléments de preuve à ses arguments. Je ne tente pas de déterminer si AstraZeneca aurait pu ajouter des renseignements semblables à ses arguments.

[5]               Ayant entendu les parties et examiné les passages en question (qui ont été soumis à la Cour dans un livre comportant six onglets), j’ai conclu qu’aucun des extraits pertinents proposés ne devrait faire l’objet d’une ordonnance en vue d’être consigné en preuve. Je ne suis pas convaincu que les passages proposés par AstraZeneca respectent les critères permettant la consignation en preuve des extraits pertinents. Le tableau ci-dessous fournit des détails supplémentaires.

Onglet

Passages

Contenu des éléments à consigner en preuve proposés par Apotex

Contenu supplémentaire des extraits pertinents proposés par AstraZeneca

Commentaires

1

108:22-112:5 (Collis)

Ampleur de la promotion du produit Nexium d’AstraZeneca au moment de sa perte d’exclusivité

Produits particuliers ayant fait l’objet d’une plus grande promotion que le produit Nexium

Le passage qu’AstraZeneca tente d’ajouter vise différents renseignements. Le fait que le début du passage d’Apotex fait référence au passage précédent qu’AstraZeneca tente d’ajouter n’est pas suffisant.

2

206:20-209:15 (Collis)

La réponse d’AstraZeneca était inhabituelle en ce qui concerne la mise en place d’un programme de carte de remise au moment de sa perte d’exclusivité.

Mise en place par AstraZeneca d’un programme de carte pour le produit Nexium au moment de sa perte d’exclusivité

Le passage qu’AstraZeneca tente d’ajouter vise différents renseignements.

3

Réponses 77-79 (Collis)

Ententes d’inscription de produits conclues entre AstraZeneca et BC Health une fois qu’Apotex a obtenu son avis de conformité pour l’Apo-Esomeprazole

AstraZeneca envisageait de conclure de telles ententes avant qu’Apotex obtienne son avis de conformité.

Le passage qu’AstraZeneca tente d’ajouter vise différents renseignements.

4

161:6-163:3 (Findlay)

Mise en doute de l’inscription du produit Nexium sur la liste des médicaments assurés dans un autre contexte

Ententes d’inscription de produits d’AstraZeneca dans le monde réel

Le passage qu’AstraZeneca tente d’ajouter vise différents renseignements.

5

352:3-355:22 (Findlay)

Nexium est le premier produit pour lequel AstraZeneca met en place un programme de carte.

Des renseignements supplémentaires concernant le programme de carte d’AstraZeneca, comme (i) les principales raisons du moment de sa mise en place pour Nexium et (ii) d’autres produits pour lesquels un tel programme a été mis en place.

Les renseignements supplémentaires ne visent pas nécessairement à faciliter la compréhension du passage d’Apotex ni à fournir des précisions à cet égard.

6

380:5-383:7 (Findlay)

Les démarches de sociétés auprès d’AstraZeneca en juillet 2010 au sujet d’un programme de carte ne visaient pas Nexium.

Autres produits d’AstraZeneca visés par les démarches de ces sociétés.

Les renseignements supplémentaires ne visent pas nécessairement à faciliter la compréhension du passage d’Apotex ni à fournir des précisions à cet égard.

II.                Oppositions d’Apotex concernant les éléments qu’AstraZeneca propose de consigner en preuve

[6]               Les oppositions d’Apotex visent deux passages de l’interrogatoire préalable du représentant d’AstraZeneca, Gordon Fahner : de la page 1 120, ligne 24 à la page 1 122, ligne 18 et page 1 127, lignes 4 à 16. Apotex s’oppose parce que les renseignements demandés et donnés dans ces passages visent des situations hypothétiques, tandis qu’AstraZeneca s’est constamment opposée aux questions relatives à de telles situations posées aux témoins des faits lors du procès. Les parties ont convenu que ces oppositions seraient réglées dans les observations finales au moment de rendre ma décision sur le fond. Apotex souligne également que M. Fahner a témoigné au procès et que les réponses qu’il a données lors de l’interrogatoire préalable auraient pu être lui être posées à l’audience. Bien entendu, nous pouvons être certains que ces questions auraient été contestées si elles avaient été posées à M. Fahner par Apotex. Cette dernière affirme qu’AstraZeneca ne devrait pas avoir le droit d’approuver ou de réprouver.

[7]               AstraZeneca fait valoir que comme la recevabilité des questions hypothétiques posées aux témoins des faits n’a pas encore été déterminée en l’espèce, on ne devrait pas l’empêcher de présenter ces éléments de preuve sous réserve de la détermination à venir quant à la question de la recevabilité, comme pour les autres éléments de preuve dans cette affaire. Essentiellement, AstraZeneca inverse les rôles en ce qui concerne l’argument relatif à l’approbation et à la réprobation d’Apotex : AstraZeneca ne devrait pas profiter d’un avantage injuste qui entraînerait l’exclusion de ces éléments consignés en preuve si je décidais que ces questions hypothétiques posées aux témoins des faits sont recevables.

[8]               En réponse, Apotex affirme qu’AstraZeneca tente de faire consigner en preuve des éléments éventuels, ce qui n’est pas prévu dans les Règles.

[9]               Je préfère la thèse d’AstraZeneca. À mon avis, il est plus juste d’admettre les éléments à consigner en preuve visés dès maintenant, sous réserve de la décision que je rendrai plus tard à l’égard de la recevabilité, plutôt que de courir le risque d’exclure dès maintenant des renseignements qui pourraient être jugés recevables ultérieurement. Je suis d’avis qu’il n’y a aucun manquement à l’équité ni aucun autre problème relativement à l’admission d’éléments à consigner en preuve assujettis à une éventualité, et je ne vois aucune interdiction dans les Règles concernant cette procédure. En outre, je ne vois aucune raison pour laquelle la possibilité de M. Fahner de répondre aux questions au procès empêcherait AstraZeneca de se fonder sur ses déclarations lors de l’interrogatoire préalable, comme le prévoit l’article 288 des Règles.

III.             Conclusion

[10]           Pour les motifs susmentionnés, je n’interviendrai d’aucune façon à la consignation en preuve des éléments proposés. Je n’ordonnerai pas à Apotex d’ajouter tout extrait pertinent aux éléments proposés à consigner en preuve. Enfin, je n’ordonnerai pas l’exclusion de tout élément à consigner en preuve proposé par AstraZeneca.


ORDONNANCE dans les dossiers T-389-11 et T-1668-10

LA COUR ORDONNE que les demandes d’ordonnance respectives des parties concernant l’ajout ou l’exclusion d’éléments consignés en preuve soient rejetées.

« George R. Locke »

Juge


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


Dossiers :

T-389-11 ET T-1668-10

 

 

DOSSIER :

T-389-11

 

INTITULÉ :

APOTEX INC. c. ASTRAZENECA CANADA INC.

 

ET DOSSIER :

T-1668-10

 

INTITULÉ :

ASTRAZENECA AKTIEBOLAG, ASTRAZENECA CANADA INC. ET ASTRAZENECA UK LIMITED c. APOTEX INC. ET APOTEX PHARMACHEM INC.

 

LIEU DE L’AUDIENCE :

Toronto (Ontario)

 

DATE DE L’AUDIENCE :

Le 31 mai 2017

 

ORDONNANCE ET MOTIFS :

LE JUGE LOCKE

 

DATE DES MOTIFS :

Le 2 juin 2017

 

COMPARUTIONS :

Jerry Topolski

 

Pour la demanderesse dans le dossier T-389-11

ET POUR LES DÉFENDERESSES dans le dossier T-1668-10

 

Kevin Siu

 

Pour la défenderesse dans le dossier T-389-11

ET POUR LES DEMANDERESSES dans le dossier T-1668-10

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Goodmans LLP

Avocats

Toronto (Ontario)

 

Pour la demanderesse dans le dossier T-389-11

ET POUR LES DÉFENDERESSES dans le dossier T-1668-10

 

Smart & Biggar LLP

Avocats

Toronto (Ontario)

 

Pour la défenderesse dans le dossier T-389-11

ET POUR LES DEMANDERESSES dans le dossier T-1668-10

 

 

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